Lucas Cranach – La Fontaine de Jouvence

La Gemäldegalerie de Berlin, est l’une des plus importantes  pinacothèques du monde. Six siècles de peinture européenne y ont trouvé un magnifique écrin. La période va du haut Moyen Age, avec de précieux retables, au crépuscule de la tradition baroque vers la fin du XVIIIe siècle. Une subtile sélection de chefs-d’œuvre issus de toutes les écoles et toutes les époques artistiques, permettent d’y être confronté. Cela m’a permis de voir l’original du jugement dernier de Bea Angelico, des annonciations de Fra Filippo Lippi et de Filippino Lippi.
J’ai retenu dans  la salle des Cranach, une toile qui me fait sourire, tellement actuelle, ancêtre des cliniques de rajeunissement suisses et des cliniques d’esthétique actuelles.
« La Fontaine de Jouvence »  ( 1546) luca-cranach-la-fontaine-de-jouvence.1235864358.JPGLa peinture de Cranach traite des êtres humains à l’immortalité et à la jeunesse éternelle. L’âge venant, ils rêvent de jouir à nouveau du printemps de la vie, de pouvoir abandonner leur enveloppe corporelle usée et de l’échanger contre une nouvelle. L’idée de la force purificatrice des éléments, en particulier l’eau, est aussi vielle que le monde. Un bassin dans lequel on descend par quelques marches constitue l’élément central de la scène. Il est placé au milieu d’un paysage imaginaire, loin de toute habitation. Des femmes et des hommes ont rejoint ce lieu isolé afin de plonger dans ces eaux miraculeuses. Ils ont dû pour cela endurer mille peines. Dans la partie gauche de l’image, des femmes toutes ridées et vacillantes de faiblesse sont transportées jusqu’à la fontaine sur des chariots, des brouettes ou des civières. Une fois déshabillées, un médecin les examine avant qu’elles se baignent. Là, dans l’eau, se déroule le processus de rajeunissement progressif. Leurs rides disparaissent. Leur corps prend à nouveau une teinte rose, leur peau se tend : elles se transforment en jeunes filles. Au sortir du bassin, elles sont accueillies par un galant homme qui les guide vers une tente, à l’intérieur de laquelle, elles endosseront de nouveaux habits. C’est ainsi que de vieilles paysannes se transforment en demoiselle de la cour s’adonnant avec insouciance aux plaisirs de la vie. A la joyeuse animation de la table de fête, à la danse, à la musique et aux jeux amoureux, correspond un paysage florissant, celui du royaume de la jeunesse éternelle.
Un paysage rocheux et aride dans lequel sont représentés les tourments de la vieillesse lui fait face, formant un contraste saisissant. Le pilier de la fontaine, qui achemine l’eau de la source vers le bassin, est orné de sculptures de Vénus et d’Amour. Elles montrent qu’il ne s’agit pas là uniquement d’une fontaine de jouvence mais plutôt d’un puits d’amour, et que la force du sentiment est bien la véritable source de jeunesse éternelle.
Et pourquoi cela n’expliquerait pas un peu, l’attirance de beaucoup d’hommes pour les femmes très jeunes, imaginant naïvement que cela agira comme un bain de jouvence…. La version féminine attirée par des jeunes hommes est plus rare, car les femmes ont davantage le sens du ridicule…..

Picasso et les femmes

Les plus connues sont présentes dans la collection Berggruen.
Sept femmes ont véritablement compté dans la vie du Maître

La tête de Fernande Olivier, portrait en trois dimensions, réalisée en bronze, de 1909. De son vrai nom Amélie Lang avec qui il restera de 1904 à 1912. Quand il la rencontre, il est plongé dans sa période bleue, mélancolique.

Picasso, « Ma Jolie », peinture murale, Sorgues, été 1912

Picasso tombe alors sous le charme d’une autre jeune femme, Eva Gouel née Marcelle Humbert avec qui il restera de 1912 à 1915. Il lui déclare sa flamme de manière cachée dans certaines de ses œuvres en inscrivant souvent « Ma jolie » ou en la personnifiant sous les traits d’une guitare. Malheureusement, elle décède rapidement en 1915 et toute sa vie le Maître aura la nostalgie de ce grand amour perdu.

                                                Olga Khokhlova
Une nouvelle rencontre va le remettre dans la création : celle d’Olga Khokhlova qui deviendra Madame Picasso en 1918. Il est comblé par la naissance de son premier fils, Paulo en 1921. Le couple se déchire, cette vie mélancolique et mondaine qu’ils mènent ne plaît pas à Picasso et leur séparation officielle éclate en 1935, en revanche, le divorce ne sera jamais prononcé, ce qui sera un souhait de la ballerine russe. Elle ne figure pas dans la collection Berggruen.

A son retour de Horta de Ebro, Picasso s’efforce de transposer l’analyse cubiste à la sculpture en trois dimensions. Un entrelacs passionné de formes concaves et convexes, bouche, nez et orbites suivent les volumes naturels  tandis que les joues sont décomposées en parties creuses et saillantes. Une multiplicité de points de vue se trouvent condensés dans cette tête.
Françoise Gilot occupe une place à part dans la vie de Picasso, notamment en

raison de son indépendance d’esprit. Amante de Picasso à l’âge de 21 ans, alors qu’il était âgé de 62 ans.
Ils passèrent ensemble 10 années d’inspiration mutuelle.
Elle était sa muse, critique et artiste, appréciée en société. Le tableau « la lecture » a été peint à la villa La Galloise.  Il s’agit d’une composition de surface. Des moitiés de visage, une veste noire, des manches de chemise, mains, livre et table sont fortement liés par les couleurs. L’impression de plasticité ou d’espace, que donnent les ombres du bras et du livre ou l’ombre portée sur une moitié du double visage, crée un réel contraste. La lecture évoque un adieu.
Ce visage montre deux vues : celle de face (le bel ovale bleu) et celle de profil (anguleuse et peinte d’un blanc terne)
Ils eurent 2 enfants. Elle le quitta et lui tint tête dans un procès en reconnaissance de paternité. Il en sera vexé à jamais.

Matador et femme ( Jacqueline Roque) fait partie d’une série réalisée en 1970 à Mougins sur le thème de prédilection de Picasso : la tauromachie. Encore une  fois, cette peinture d’un couple traite de l’art et de la vie, préoccupation toujours très forte de Picasso alors âgé de 89 ans. Le matador vêtu d’une cape rouge sang et l’épée dégainée symbolise la devise « Au combat ! » (Roland Marz)
Cette peinture vise l’immédiateté – un combat des sexes ? Ce qui est fort probable si l’on regarde la vie agitée de Picasso, sans cesse en quête de nouvelles sources d’énergies féminines. A l’exposition du Grand Palais, l’homme était en vert, pour attester de la toujours vigueur sexuelle de l’artiste. Le corps de la femme bien en chair occupe la partie blanche de la toile, à laquelle répond le chapeau blanc du matador, et s’oppose le rouge de la cape de manière spontanée en lignes dynamiques.

Un dessin au crayon sur papier de 1938, montre un étude de Picasso où il a stylisé les deux femmes de sa vie du moment . Dans la partie haute, Dora Maar en buste de trois quart, coiffé de son chignon catalan sévère, l’accent est mis sur ces grands yeux, il y en a trois, et son visage altier,  dessin cubiste. (voir Dora Maar aux ongles verts sous le lien)
Dans la partie basse Marie Thérèse Walter, qui donna naissance à Maya, assise dans un fauteuil, croise ses jambes, le corps à la poitrine opulente, montré de trois quart, la tête aux deux vues, dont l’une figure  le profil parfait de Marie Thérèse. Unies dans sa vie, contre leur gré, unies sur le papier. Picasso a vécu avec Dora Maar tout en maintenant sa liaison avec Marie Thérèse.

Dora Maar aux ongles verts

Il y avait le gant de Gilda. Il y a ceux de Dora Maar. Noirs et brodés de roses. Toute sa vie Picasso les garda précieusement dans une vitrine. Quand il avait rencontré Dora, en hiver 1935, elle les avait ôtés et avait posé sa main nue sur la table : elle jouait à lancer la lame aiguisée d’un canif entre ses doigts écartés. Plusieurs fois elle manqua son but et se blessa. C’était aux Deux Magots. Dora était en compagnie d’Eluard, qui les présenta. Lorsque Picasso lui adressa la parole, Dora Maar répondit en espagnol. Ainsi commença cette histoire d’amour que nous conta une exposition au Musée Picasso, des chefs-d’oeuvre et des documents multiples, tels des clichés photographiques jamais montrés, qui éclairent les années 1935 à 1945, sans doute les plus intenses de la création de Picasso.
Dora Maar avait des cheveux d’un noir de jais. Picasso n’était-il pas le Minotaure, et Dora Maar sa proie, celle qu’il transforme en muse, en chimère, en sphynge, en nymphe ou en harpie ? Mais Dora Maar est aussi celle qui, selon Eluard,  » a toutes les images dans son jeu « . Pour Picasso elle incarne l’idéal féminin, selon Victoria Combalia :  » sa taille de guêpe, ses hanches larges, ses fesses rebondies et ses jambes bien formées « . Amie des surréalistes, qui s’intéressent à son oeuvre de photographe, elle a signé le 10 février 1934 avec Breton et Eluard  » l’Appel à la lutte  » du Comité de Vigilance des Intellectuels antifascistes. Loin d’être une amante passive, elle va entraîner Picasso sur des voies nouvelles. Par-delà leur passion, un dialogue d’artistes se noue

entre eux, dont témoignent des gravures de Picasso qui font écho aux photomontages de Dora Maar. Elle initie Picasso à la photographie et ils réalisent à quatre mains des   » photogravures  » qui constituent l’une des révélations de l’exposition.
La vente à Paris de la succession Dora Markovitch, dite Dora Maar, en 1998 a suscité un vif engouement de la part des amateurs et pour cause, le musée personnel de celle-ci recelait de nombreux souvenirs et de trésors réalisés par le maître de la peinture moderne.
Ce sont des peintures et des dessins ayant toujours appartenu à Dora Maar et qu’elle ne voulut jamais vendre, qui auront été proposés aux enchères à la Maison de la Chimie comme cette toile « Femme qui Pleure » et cette « Dora Maar sur la plage » qui respectivement étaient estimées au delà de 20 et 10 millions de francs.
A la Sammlung Berggruen c’est une Dora dégantée,  aux yeux grands ouverts, signe de grande intelligence d’après Heinz Berggruen, qui l’a rencontrée, grâce aux liens qu’il entretenait avec Picasso. C’est une des premières peinture de Dora par Picasso, (1936) assise dans un fauteuil, le haut du corps et l’ovale de la tête comme suspendu en gravitation sont inclinés vers le bord gauche, atténuant sa position hiératique, la tête légèrement de profil, coiffée à l’espagnol, accentue les traits classiques de son visage, tandis que les doigts écartés aux ongles vernis en vert soulignent l’élégance de cette dame capricieuse.
Quatre an plus tard, après le début de la guerre et l’avancée des troupes allemandes, Picasso s’était réfugié à Royan, où il vécu et travailla avec Dora Maar dans une toute petite chambre d’hôtel. En 1939 il peignit le  » pull-over jaune  » un autre portrait de Dora, dans lequel les aspects individuels de sa personnalité lui importaient moins que de donner une image symbolique de l’époque. Ici Dora est assise dans un fauteuil, en plein centre de l’image. La tête stylisée au double visage, à la fois vu de face et de profil selon la manière cubiste quasiment classique. Le corps en revanche, sous l’action des rapports déformant de l’époque est serré dans un  » pull-over jaune  » qui ressemble davantage à une camisole en cotte de mailles. Les mains élégantes et les ongles verts du tableau précédent deviennent ici des pattes griffues et animales.
  photos de l’auteur

lecture : Dora Maar Alicia Dujovne Ortiz

sur France culture

Berlin 2009


Dix huit ans après la chute du mur, Berlin est encore le plus gros chantier d’Europe. Elle remplit sa fonction de capitale d’une Allemagne réunifiée. En l’espace de presque une décennie, le gouvernement et les ministères y ont établi leur siège. Les ambassades, les associations s’y sont installées, des quartiers entiers ont modifié leur aspect et leur composition, hauptbanhoff-berlin-medium.1235408319.JPGd’innombrables bâtiments  ont été construits, restaurés, transformés, si bien que l’on est étonné à chaque détour de quartier par le gigantisme des tours aux verrières lumineuses. A la fin de la seconde guerre mondiale, la plupart des quartiers de Berlin, notamment le centre ville ressemblaient à un champ de ruines. La population de 4.33 millions avant la guerre, passa à environ 2 millions en 1945, de nombreux réfugiés composant désormais cette population. Cette situation de table rase entraîna d’audacieux projets d’aménagement de la ville qui ne purent se concrétiser. Personne n’a oublié le partage de Berlin et surtout la chute du mur le 9 novembre 1989, avec la célébration  dans l’allégresse de Léonard Bernstein bernstein-9e-beethoven-mur-de-berlin.1235408752.jpgde ce prodigieux événement. Avec des musiciens venus d’Allemagne, de Russie, de Grande Bretagne, des US, de France, ce chef engagé politiquement , décida symboliquement de la participation  de toutes ces nations, vainqueurs ou vaincus se trouvant réunis dans la musique, qui fut toujours par excellence l’art favorable au rapprochement des peuples.
Démantelé à la fin de la guerre, le seul point de passage de l’est à l’ouest, a été rétabli à la demande général, et replacé au milieu de la rue, Checkpoint Charlie a été réamenagé en poste de contrôle, avec des sacs de sable. A l’emplacement de l’ancien point de passage 2 énormes portraits du photographe berlinois Frank Thiel : celui d’un soldat russe, tourné vers l’Ouest, et celui d’un de ses homologues américains, qui regarde vers l’Est. De faux soldats avec uniformes et drapeaux représentant les 2 camps et s’y font photographier pour 1 € par les touristes.checkpoint-charly.1235407906.JPG
La circulation entre les diverses gares à l’architecture moderne et futuriste, se fait en S Bahn ( RER)ou en U Bahn (Métro), ou encore en bus à étage. Cela permet d’avoir une approche des innonbrables musées, par quartiers ou réunis dans une île, des bâtiments officiels comme le Reichstag, rénové par Norman Forster, avec élégance et technique, le très harmonieux et gigantesque Lehrter Hauptbahnhoff.
A l’instar du musée d’Orsay, l’art contemporain a trouvé sa place dans la Hamburger Banhoff, où se trouve la si contestée collection Flick, musée en rénovation actuellement.
Les constructions et leurs architectes rivalisent de gigantisme, d’exubérance, de luminosité, ce qui en fait une ville futuriste. Mais le plus bluffant est le Sony Center, près de la Postdamer Platz, dominé par l’extérieur par la BahnTower. C’est à l’intérieur que le complexe d’acier  et de béton conçu par l’architecte Helmut Jahn sony-center-berlin.1235408545.JPGrévèle ses charmes : une grande place de 4000 m2 abritée par un chapiteau spectaculaire, véritable prouesse technologique. Les édifices alentour supportent un anneau massif d’où s’échappe un mât légèrement penché qui maintient le chapiteau en fibre de verre. Le musée du  cinéma s’y trouve, ainsi que les vestiges de l’hôtel Esplanade, des cafés, des terrasses, un endroit fantastique.

Sammlung Berggruen

Une belle découverte, hors des sentiers battus à Berlin, la Sammlung Berggruen (Montagne Verte), située dans le quartier de Charlottenburg, dans l’édifice Stüler, tout près du Schloss Charlottenburg.  cimg0004.1235350624.JPGLes plus grands noms de l’art moderne, rassemblés par Heinz Berggruen, galeriste éclairé : Cézanne, Matisse, Klee, Giacometti. Plus de 80 œuvres de Picasso de la période bleue aux encres de 1971, en passant par une étude pour les demoiselles d’Avignon, des toiles cubistes, des portraits.  Ce n’est pas sans douleur que Heinz Berggruen s’est séparé de sa collection 
 » lacrima sunt rerum «  écrit-il. Des études de lettres à Grenoble et Toulouse, puis retour à Berlin, le nazisme le contraint à s’exiler. Après avoir passé la majeure partie de sa vie aux Etats Unis, où il découvre Paul Klee, il revient à Berlin sous l’uniforme américain en 1945, pour rejoindre l’équipe de la revue culturelle  » heute  » à Munich, pour contribuer au renouveau de la démocratie allemande. Ensuite il se rend à Paris, comme attaché culturel américain auprès de l’Unesco. En 1947 il s’établit et travaille de longues années avec succès, comme marchand d’art et éditeur. Il vendit tout ce qui précédait Picasso, pour régler des droits de succession et pour étendre les ensembles Picasso et Klee.
Il montre sa collection privée à Genève, puis pendant 5 ans à la National Gallery de Londres. Revenu dans son pays d’origine il offre l’œuvre de sa vie, sa collection, à la ville de Berlin.
Dans l’audio guide, c’est lui-même qui intervient pour certaines œuvres, évoquant avec bonheur, les moments attachants de l’acquisition et des rencontres privilégiées avec les artistes.sabartes-picasso.1235350852.JPG
Un portrait du poète Sabartès, qui était le secrétaire de Picasso, souffre douleur d’après Françoise Gillot, peint en 1904 dans les tons de bleu, période monochrome et mélancolique de l’artiste, les traits sévères et durs du modèle, d’après la légende aurait été peint par Picasso d’un seul trait après une morne soirée, se libérant de sa mauvaise humeur. Une photographie retrouvée dans la succession de Picasso semble avoir servi de modèle pour ce portrait.
photos de l’auteur

La passion Lippi

Une belle histoire d’amour
 
 
annonciation.1234576297.jpg
Lippi fut apprenti chez Guido, Filippo Lippi est placé très jeune au couvent des Carmes de Florence où il prononce ses vœux en 1421 à l’âge de 15 ans, le même jour que Guido qui devint Fra Angelico (Bea).bea-angelico-le-jugement-dernier.1235863838.JPG Il peint ses premières œuvres dans ce couvent. Il va faire souffler un vent de passion sur la peinture de la Renaissance. Moine et libertin, artiste intransigeant, manipulateur et sans scrupules, futur maître de Botticelli, ses madones, sont inspirées entre autre par les pensionnaires des maisons closes.
Il a 52 ans quand il est nommé chapelain du couvent de Sainte-Marguerite à Prato. Il eut un modèle une nonne Lucrezia Buti qui a 20 ans, dont il tomba éperdument filippino-lippi-viegre-a-lenfant.1235863963.JPGamoureux. Il enlève Lucrezia peu après avoir découvert qu’elle était enceinte de lui. C’est elle qui lui servi de modèle pour ses sublimes madones. Il avait la protection de Cosme de Médicis, qui lui commandait sans cesse fresques et toiles. C’est lui qui intercéda auprès du pape Pie II afin d’obtenir la fin de son exil forcé. Ils donnèrent naissance à Fillipino Lippi (1457)
Vierge à l’enfant Filipino Lippi
Daniel Arasse L’Annonciation italienne Hazan – 1999
Le thème de l’«Annonciation» représente un défi pour un peintre. Comment représenter en effet l’irreprésentable, l’invisible – le mystère de l’incarnation : cette venue du Créateur dans la créature ? C’est sur cette question abordée par les artistes italiens entre le XIVème et le XVIème siècles que Daniel Arasse se penche en renouvelant notre perception de l’Annonciation italienne. L’invention progressive de la perspective à partir du XIVème siècle ouvre aux artistes de nouvelles formes de représentation par des moyens mathématiques perceptibles à l’oeil humain.
Daniel Arasse montre comment certains d’entre eux utilisent paradoxalement la mesure géométrique de la perspective philippo-lippi-lannonciation.1234576376.jpgpour faire voir la venue de l’immensité divine dans le monde fini de l’humain, et l’acte par excellence mystérieux : l’incarnation. Des Siennois, en passant par les Florentins du Quattrocento, cette histoire commune de la perspective et de l’Annonciation connaît de nombreux épisodes avant de produire à Venise, à la fin du XVIème siècle, un ultime avatar : les machines de Véronèse articulées hors de toute allusion théologique à des fins théâtrales. Une passionnante confrontation des aspirations du monde plastique et du monde religieux à la Renaissance qui débouche ici sur l’écriture d’un nouveau chapitre de l’histoire de l’art italien.
Voilà ce que dit Daniel Arasse à propos des Annonciations, en particulier de celle de Filippo Lippi .

Naga – Une culture oubliée "redécouverte"

Les Naga vivent à la frontière de l’Inde et de la Birmanie. On estime à 2 millions, le nombre d’individus de cette population vivant en Inde et 100000 seulement en Birmanie.
Jusqu’à une période récente, le territoire des Naga n’apparaissait pas sur les cartes.
Ce n’est qu’en 1963, que le Nagaland est devenu un État fédéral.
L’origine des Naga est mal connue. Naga provient peut-être d’un mot sanscrit qui signifie montagne ou d’un autre, signifiant guerrier. Les Naga eux-mêmes n’ont jamais eu de terme générique pour désigner les 32 différentes communautés qui les constituent.
Autant dire, la diversité des cultures regroupées sous un seul terme
Torso300
Voir l’essentiel de cette exposition visible jusqu’au 9 mai 2009 au musée des cultures de Bâle  (pass-musées accepté) et le billet complet de
 Détours des Mondes sur cette belle exposition.
Une visite guidée en français est programmée pour le dimanche 5 avril à 11 h
Dans ce musée sont aussi exposés les masques de carnaval de la ville de Bâle , Bâle où le Morgenstreich, les fifres et les Waggis sont une véritable institution.

Lanternes magiques

La lanterne magique est une petite machine d’optique
Qui fait voir dans l’obscurité sur une muraille blanche
Plusieurs spectres et monstres si affreux
Que celui qui n’en sait pas le secret
Croit que cela se fait par magie 

Antoine Furetière

Dictionnaire universel 1690

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Divulguée par un jésuite allemand, Anasthase Kirscher, en 1671, l’invention de la « Laterna Magica » est sans doute née grâce à un astronome et physicien hollandais, Christiaan Huygens, en 1659. Cette technique n’a pas cessé de se perfectionner  et dans son article, Laurent Mannoni nous explique qu’on en vient à une véritable « tempête optique » une fantasmagorie réalisée par un appareil révolutionnaire, le fantascope, monté sur rail et placé à l’arrière de l’écran. Grâce à ce procédé, l’image s’avance vers le spectateur ou au contraire apparaît extrêmement lointaine pour ne former qu’un point miniscule. C’est cimg0002.1233881329.JPGun curieux prêtre liégois qui, ayant transformé son nom en Robertson, a mis en pratique ces spectacles de fantasmagorie avec un succès immense. Un journaliste du XVIIIe siècle déclarait que « Robertson était passé maître dans l’art de faire apparaître des spectres et des fantômes. Toutes les puissances de l’au-delà lui obéissaient » Il semble qu’il avait le pressentiment du cinématographe.

 

Jean Lorentz – président de la Ste Schongauer

 

Lanterne de peur ou lanterne magique, le Musée Unterlinden  de Colmar, jusqu’au 16 mars, nous présente, une infinie variétés de ces lanternes. Les adultes, comme les enfants visiteurs, restent ébahis devant la variété présentée et devant les projections drôles, fantasmagoriques, poétiques.cimg0054.1233536656.JPG

Tantôt sous forme de Tour Eiffel, de mosquée, de Boudha, de « lampadorama »,  de voiture,  de maisonnette,  de chalet, de kiosque, de vase fleurs, d’ église Ste Sophie,  chinoise, boule,  de communion,  bijou, de salon, de colporteur, qu’elles soient romantiques, à feuilles de chêne, à gaudrons, riche, carrée, Louis XV, à rouleau horizontal, « Bi-Unial » ou « Tri-Unial » elles nous parviennent grâce à des collectionneurs passionnés ; depuis leur origine à son évolution jusqu’au 20e siècle.

Le catalogue est l’occasion de rappeler les premières projections au milieu du XVIIe siècle, des danses macabres par Holbein le Jeune.

C’est aussi le moment de rappeler que l’on célèbre le centième anniversaire du premier dessin animé, intitulé « Fantasmagorie » par son auteur Emile Cohl.

Elles sont toutes des pièces uniques et rares, intéressantes dans leur originalité.

Des plaques de projection pour tous les usages,  celles qui servaient aux danses macabres, celles qui sont montrées par un singe projectionniste, celles qui animaient simplement les soirées ordinaires, ou celles qui instruisaient les amateurs, toutes tendent vers le futur cinéma de Georges Méliès, sans oublier la camera oscura chère à Veemer.

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photos provenant du catalogue de l’exposition qui comporte un DVD d’images de lanternes magiques et de fantasmagories

Picasso et les maîtres expliqué

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Si vous êtes frutrés de ne pas avoir vu cette très belle expostion, si vous avez patientez dans les queues interminables, si vous avez envie de vous y replonger, cela est possible.
Je porte à votre connaissance, les analyses détaillées, du blog Bleu de cobalt, petites chroniques picturales, que vous trouvez en lien du mien, sous la rubrique blogs amis, qui a consacré 4 billets fournis à cet évènement, que vous pouvez lire ici, , ici,et encore.

Après trois jours non-stop, 24h sur 24, l’exposition parisienne « Picasso et les maîtres » a fermé ses portes lundi soir

picasso-et-les-maitres.1233668857.jpgL’exposition du Grand Palais a accueilli plus de 780.000 visiteurs, un record. Plus de 65.000 personnes ont profité du marathon de 83 heures qui l’a conclue, de vendredi à lundi.
L’exposition en 210 chefs-d’oeuvre confrontait Picasso aux peintres qui l’ont marqué, Titien, Velasquez, Goya, Zurbaran, Rembrandt, Poussin, Manet, Cézanne ou Van Gogh.
Le succès populaire a été tel qu’il a fallu à chaque instant s’y  adapter, en élargissant les horaires et même en décidant d’une ouverture non stop pendant quatre jours et trois nuits, en réimprimant le catalogue, en augmentant  le nombre d’ateliers pour les enfants.
De ce succès, la Réunion des musées nationaux (RMN) tire au moins deux enseignements. « Même en période de  crise, ou peut-être parce que nous sommes en période de crise, l’art est une  valeur-refuge », affirme son admininstrateur général Thomas Grenon. Et la personne même de Picasso, l’accrochage qui a été un « véritable résumé d’histoire de l’art » et plus prosaïquement, l’amplitude horaire jamais atteinte à ce degré, « a amené un public nouveau, différent et renouvelé », dit-il. Le taux de primo-visiteurs, personnes qui visitent pour la première fois une exposition, a été de 55% contre 20 à 30% d’habitude.
Et des comportements que l’on n’imaginait ont été constatés, donnant matière à réflexion pour l’avenir. Si le public s’est déplacé les soirs du dernier week-end, les horaires de 6h ou 7h du matin ont aussi été réservés rapidement, par un public familial. « Jusqu’à présent, on  raisonnait en nocturne. Ouvrir tôt le matin est aussi un créneau », certains publics pouvant vouloir voir une « expo avant le bureau ou la sortie familiale à la piscine », estime Thomas Grenon.
(source France 2)

La Magie des Images, l'Afrique, l'Océanie et l'art moderne

portrait-en-plumes-kii-hulu-manu-du-dieu-de-la-guerre-kukailimoku.1233265914.jpgLa Magie des images – l’Afrique, l’Océanie et l’art moderne », présentée à Bâle, à la Fondation Beyeler,  à la fois la réunion la plus riche d’oeuvres africaines et océaniennes que l’on ait vue depuis longtemps et une expérience artistique bluffante.
Cette exposition instaure un dialogue captivant qui témoigne de la contribution irremplaçable de l’Afrique et de l’Océanie à l’histoire de l’art mondiale.
 Au mur des Nymphéas, de Monet ; et, devant elle, au sol, deux longues sculptures de crocodile de Nouvelle-Guinée, une idée déconcertante. l’association est-elle une symbolique de l’initiation, par le fleuve et le crocodile ?
Chaque salle – il y en a douze – associe un artiste à une esthétique et une provenance, Cézanne et les Sénoufo, Miro et les Dogon, Léger et les Mumuye, Klee et les îles Cook, Picasso et les « fétiches à clous » des Vili et des Yombe. Quelques prêts provenant de la prestigieuse collection Barbier Muller de Genève viennent compléter les toiles de la Fondation Beyeler. Quelques 180 pièces, présentées comme seule la Fondation Beyeler excelle dans ce domaine. Pour une novice de l’art africain et océanien, comme moi c’est un bonheur sans limite, une occasion formidable de m’initier quelque peu à cet art, où culture, artisanat et culte sont expliqués, que j’avais tenté d’approcher au Quai Branly et au musée Dapper. Ici elles vous invitent au regard, par la polychromie et la diversité des objets présentés dans un choix judicieux et unique, qui semble une évidence et qui vous laisse pantois. On comprend aussi où les artistes comme Picasso, Vlaminck et d’autres étaient inspirés par ces visages et cette culture.  Le regard provocateur des grands yeux en fragments de nacre et la bouche grimaçante, abondamment pourvue de crocs de dents de chiens, les plumes de coloration rouge vif, sont une représentation du Dieu de la guerre Kübâ’ilimoku, il fait partie d’un groupe de huit sculptures en plumes acquises lors du troisième voyage de James Cook à Hawaï, (assassiné lors de son retour involontaire) Les images en plumes étaient fichées sur un bâton et menées en procession en l’honneur des dieux lors des expéditions guerrières. Elles associaient forces vitales divines et revendications profanes du pouvoir. La toile rouge de Rothko est en parfaite résonance avec ce guerrier.mabuiag-rothko.1233415745.jpg
Par contre je n’ai pas trouvé de correspondance entre Mondrian et les sculptures malagan, est-ce à cause des codifications, cérémonies funéraires pour les uns, l’arbre pour l’autre ? Les Mumuye  du Nigéria avec leur coiffe de « Bécassine » sont en parfaite concordance avec la magnifique sculpture de Hans Arp et la toile de Fernand Léger.
Après avoir visiter cette nouvelle présentation, on ne peut rester indifférent à cet art. Je ne peux que vous encourager à vous précipiter pour cette exposition visible jusqu’au 24 mai 2009. Sans oublier l’exposition sur les Nagas au musée des cultures de Bâle jusqu’au 17 mai ni le Musée Tinguely qui présente le cabinet de curiosités de Ted Scapa : un mélange haut en couleurs d’œuvres d’art, d’objets artisanaux et d’objets curieux, jusqu’au 19 avril. L’ exposition Venise  à la Fondation Beyeler se termine le 15 février, 4 bonnes raisons pour faire un petit saut dans la ville de Federer, d’Erasme et de Holbein.
ypwom.1233490582.jpg Vous pouvez lire ici le billet plus détaillé de Détours des Mondes, mon amie Lyliana, spécialiste de l’art africain et océanien, ancienne élève et diplômée de l’école du Louvre, conférencière, qui m’a permis de bénéficier d’une visite guidée commentée par elle, avec force détails et brio.
photo 1 provenant du dépliant de la Fondation

 photo 2 de presse, ne concerne pas le guerrier

 photo 3 provenant du blog de Détours des Mondes