Miquel Barcelo – Caixaforum de Madrid

Du 11 février au 13 juin, la CaixaForum de Madrid reçoit une rétrospective des 25 ans de trajectoire plastique de Miquel Barceló (Majorque, 1957),


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Très influencé par l’art brut, Miquel Barceló a proposé une alternative singulière aux tendances dominantes de l’art contemporain. Tout d’abord, face à la rhétorique de l’abstrait, si habituelle et rebattue dans les années quatre-vingt, l’artiste de Majorque revendiquait l’expressivité du figuratif. Ensuite, face aux discours conceptuels complexes, très à la mode dans les années quatre-vingt-dix, son œuvre a su rester fidèle aux principes du travail manuel et n’a jamais perdu son intérêt pour les textures, les couleurs et les formes de la matière. Il est un représentant incontournable de l’art espagnol, le plus international et apprécié du moment. Le spectateur peut découvrir sa riche expérience artistique, chargée en mystère et en adrénaline. Au total, ce sont plus de 200 œuvres à parcourir : peintures, sculptures, affiches, livres et carnets de voyage…
Pour l’évènement, l’artiste prête au centre social et culturel de la Obra Social « La Caixa », une de ses meilleures sculptures, El Gran Elefant Dret (2009). Un éléphant en bronze de sept mètres de haut, installé sur la place publique qui donne accès à la Caixa Forum.
Cette exposition inédite permet d’apprécier sa foisonnante biographie artistique qui s’étend de 1982 à nos jours, ne résiste pas à un passionnant voyage parmi ses vastes toiles. Le spectateur semble envoûté par le rythme trépidant, énigmatique et mystérieux de l’œuvre de Barceló.
miguel-barcelo-crucifixion.1267969122.jpgUne salle en retrait, plongée dans une semi-obscurité, une chapelle toute de mystère et de recueillement, est particulièrement émouvante, une crucifixion, des sculptures de crânes d’animaux, des toiles en presque noir et blanc, des toiles ocres, que vous pouvez retrouver sur la vidéo du vernissage.
Le gorille blanc sur la plage, 1999 était sous une autre forme à la Biennale de Venise, tragique dans sa solitude, tracé à grands coups de couteau, visage à la bouche hurlante d’effroi, les bras en croix, sur fond d’océan écumeux.miguel-barcelo-gorille-blanc-sur-la-plage.1267969144.jpg
Ses autoportraits, sont saisissants, surtout celui où l’aspect « animal-fou / loup garou » est terrible.
Dans son catalogue, les œuvres voisinent, avec d’autres qu’il cite en référence, qui l’ont inspirée, tel que le Paysage pour aveugles sur fond vert II.1989 ,il cite Ribera, Richter, Tanguy, Richard Long
L’objectif de l’exposition est d’offrir au grand public l’occasion de vivre l’art de Barceló comme une véritable expérience personnelle. Ainsi, il a choisi lui-même les toiles et les sculptures qu’il jugeait les plus représentatives de sa carrière artistique, quelques-unes venant de sa collection privée.
J’ai été émerveillée, par sa série d’aquarelles de Sangha, vendeuses de tomates un jour venteux, 2000. ou encore Le vent, 1999 où le rouge tragique d’un personnage, de sa barque renvoie à Turner ou  à la barque de Dante de Delacroix. Des présentoirs sont consacrés aux aquarelles.miguel-barcelo-aquarelle.1267969084.jpg
Mais aussi de nombreuses toiles montrent la série des Dogons, déjà vues à Venise, déserts de sables jaunes, bleus avec des personnages anonymes et des troupeaux cheminant.
Une peinture pour aveugles en relief, sur fond vert, que les gardiens vous empêchent de toucher ……
D’autres toiles consacrées à la corrida, à la cuisine espagnole, un moment idéal pour se pencher sur  la production artistique de Miquel Barcelo.
C’est une occasion spéciale pour le public, qui aura l’opportunité de s’aventurer dans son monde matériel, dans ses voyages physiques ou mentaux dans l’espace-temps, dans son utilisation d’éléments insolites, dans sa représentation du monde humain et animal, et dans son rapport à la tradition. Le catalogue en espagnol et en anglais est tout à fait abordable 20 €.

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les photos sont interdites, aussi je vous présente les scans du catalogue

Anne-Sophie Tschiegg à Art Karlsruhe

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Vous avez été nombreux à apprécier Anne-Sophie Tschiegg, lors de son exposition, à la galerie Beaurepaire à Paris, au mois d’octobre 2009, vous pouvez la retrouver à Art Karlsruhe à la galerie Vayinger, du 4 au 7 mars 2010.
Tous les renseignements figurent sur le site d’Art Karlsruhe.
  

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photo courtoisie d’Anne-Sophie Tschiegg

Ernst Beyeler

Ernst Beyeler (* 16. juillet 1921 – † 25. février 2010)
Ernst Beyeler, le fondateur de la Fondation Beyeler, est mort le 25 février 2010 au soir.
C’est un grand homme qui nous quitte au terme d’une longue vie, heureuse et bien remplie.
La Fondation Beyeler, Bâle, sa ville natale et le monde international de l’art lui doivent énormément. Depuis quelques temps sa haute silhouette se faisait de plus en plus rare dans son musée.
Il a rejoint au paradis des amoureux de l’art son épouse Hildy décédée en 2008.
Se rendre à la Fondation Beyeler, c’est comme aller à un rendez-vous d’amour, le cœur palpite, cheminant dans le sentier arrière de la Fondation, comme pour un pèlerinage, pressé de pénétrer dans le lieu, savourant à l’avance le plaisir que l’on sait trouver dans l’endroit. En revenir par le même sentier, rempli de l’émotion de la visite, se remémorant l’exposition, prolongeant indéfiniment le plaisir.
A force d’y aller, je crois que les œuvres m’appartiennent, je m’y sens comme chez moi.
Lorsqu’une œuvre de l’immense collection est absente pour un moment, je m’inquiète : aurait-elle été vendue ?
Dans ma naïveté et mon attachement je me suis enquis, à Art Basel, en voyant les oeuves phare exposées, auprès d’Ernst Beyeler, fondateur d’Art Basel, si elles étaient en vente. Jamais me répondit-il,
« c’est juste pour le plaisir des yeux« .
C’est aussi la Galerie Beyeler, au 9 de la Baumleingasse, de Bâle, avec ses expositions thématiques temporaires, qui fut vendue par la volonté d’Ernest Beyeler, après son décès.
Merci à lui de nous avoir permis d’accéder à son immense collection, choisie avec tant de discernement, de ne pas l’avoir enfermée égoïstement dans un coffre ou dans la zone franche de Genève. Merci de tout cœur.
Sa dernière apparition parue dans la presse régionale a été à l’occasion de la visite de Frédéric Mitterrand.
L’histoire. Parallèlement à leur importante activité de galeristes, les collectionneurs Hildy et Ernst Beyeler ont rassemblé au cours d’une cinquantaine d’années des œuvres particulièrement représentatives de l’art moderne. En 1982, la collection fut transférée en fondation et présentée au public pour la première fois dans son ensemble, en 1989, au Centro de Arte Reina Sofía à Madrid. La collection comprend aujourd’hui environ 200 tableaux et sculptures, témoignant d’un regard à la fois personnel et connaisseur sur les grands classiques de l’art moderne.
L’édifice a été conçu par l’architecte italien Renzo Piano. Outre des œuvres de Cézanne, Picasso, Rousseau, Mondrian, Klee, Ernst, Matisse, Newman, Bacon, Dubuffet, Baselitz et autres, la collection comprend vingt-cinq pièces représentant les arts d’Afrique, d’Alaska et d’Océanie et entretenant un dialogue étroit avec les peintures et sculptures de l’art moderne.
Jean Planque fut le collaborateur d’ Ernst Beyeler, lui servant d’intermédiaire pour accéder à Picasso entre autres a réuni une belle collection. (voir le billet)
Le musée n’entend pas seulement abriter ses précieux chefs-d’œuvre, il se veut lieu public d’innovation. Un tiers des 3800 m2 de la superficie totale est donc réservé aux deux à trois expositions temporaires qui se tiennent chaque année. Le but de ces expositions est d’élargir la collection et d’en repousser les limites temporelles en instaurant un dialogue vivant avec le présent.

En vadrouille

Si vous me cherchez je suis dans ces parages :

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photo Internet

Valentin

Valentin vient de valorem tenens ou encore valens tiro, soldat vaillant
(la légende dorée, Jacques de Voragine)

Le nom qui est d’origine latine signifie « qui va bien, qui est sain, fort »
Evèque et martyr il vécut au III e s. Il est le protecteur des Amoureux et des épileptiques . La croyance en sa protection particulière des amoureux est née au Moyen Age, du fait que l’on pensait que les oiseaux commençaient à nidifier le 14 février jour de sa fête. Son culte est diffusé dans la Haut Moyen Age, en Italie et en France, puis large diffusion en Allemagne, d’où provient quasi exclusivement son iconographie.

Il semble que peuvent être réunis en une seule et même personne les deux Valentin commémorés le 14 février. Le prêtre romain fut décapité en 268, sous l’empereur Claude II le gothique, pour avoir converti le préfet Astère et sa famille en guérissant sa fille aveugle depuis l’âge de deux ans. Il fut enseveli au bord de la via Flaminia, où le pape Jules 1er construisit plus tard une basilique Santa Maria del Popolo. jacopo-bassano-san-valentino-1575.1266018598.jpg
Quant à l’Evèque Valentin, il fut décapité en 273, pendant les persécutions de l’empereur bartolomaus-zeitblom-sanvalentino1.1266018703.jpgAurélien. Venu à Rome sur l’invitation du philosophe Craton, qui avait appris ses dons de Thaumaturge, Valentin guérit son fils à la condition que toute sa famille se convertit. A cause de quoi il fut d’abord emprisonné, puis, refusant de sacrifier aux idoles, roué de coups et enfin décapité. Son corps fut recueilli par ses disciples et emporté à Terni, sur la via Flaminia.
Ce sont donc l’identité des noms, la coïncidence des lieux de sépulture et la similitude des martyres qui conduisirent à confondre des deux Valentin en un seul et même saint.

guide des Arts

images Internet

Jacopo Bassano,
St Valentin baptisant Ste Lucie

Bartolomaus Zeitblom
St Valentin guérissant un épileptique

Vanités

« Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, vanité des vanités, tout est vanité. »

img_2642.1265850278.jpgDans l’Ecclésiaste le mot vanité est utilisé dans son acception plus ancienne et plus littéraire de « ce qui est vain », c’est-à-dire futile, illusoire, vide, de peu d’impact, voire sans aucune réalité.  Tout avantage possible de la vie est anéanti par l’inéluctabilité de la mort.
Si le terme « vanité » désigne en premier lieu les natures mortes qui ont prospéré à l’époque baroque, il s’applique de façon plus large à toute représentation de la dépouille humaine – crâne, squelette, – ayant pour fonction de rappeler le caractère fondamentalement vain de l’existence, sa fragilité, sa fugacité, face à l’irréductible réalité de la mort. (
Manuel Jover ) indélicatesse et non professionnalisme réparés.
Permettez-moi de vous renvoyer à l’à propos de mon blog, sur la droite sous la photo, qui explique la position d’un blogueur dilettante, qui n’a surtout pas de prétention professionnelle.

L’image du crâne conforte brutalement le spectateur à son destin, sans détour, sans discussion possible. Souviens-toi que tu vas mourir ou Memento Mori est le thème d’une splendide exposition au musée Maillol à Paris, jusqu’au 28  juin 2010.
« L’image du crâne n’est jamais anodine. Qu’elle relève de la superstition, de la peur, d’une provocation absolue, d’une manière de conjurer la mort ou de l’ignorer, elle reste dérangeante », assure Patrizia Nitti, directrice artistique du musée Maillol. Frappée par la prolifération des têtes de mort dans les domaines de l’art, de la mode ou encore de la publicité, mais
aussi sous le charme d’une collection particulière de vanités contemporaines, cette dernière a oeuvré, avec le concours d’autres baque-de-reine.1265851301.jpgcollaborateurs, à l’importante exposition qui se tient au musée Maillol jusqu’au 28 juin.

Baptisée :« C’est la vie ! Vanités de Caravage à Damien Hirst »,
elle réunit 170 pièces autour du thème de la mort, et autant de noms illustres : mosaïque polychrome de Pompéi (1e s après JC), tableaux du Caravage, montrant St François en méditation tenant un crâne (1602) à un autre St François avec capuche de Zurbaran (1635), les Totentanz dans les petits livres de Holbein le Jeune. Il y a aussi un anguleux jeune homme de Bernard Buffet, à côté d’une table basse supportant  un bougeoir et un crâne. Mickey Terminator de Nicolas Rubinstein, Mikets en hébreu signifiant fin.
 De Géricault à des  vanités modernes signées Cézanne, Braque et Picasso, en passant par Warhol et Basquiat, mais aussi sculptures, bijoux…

La mort nous va si bienchapmann.1265851031.jpg
Une place de choix est accordée aux artistes contemporains, parmi lesquels un des plus médiatiques et controversés, Damien Hirst, qui expose For the Love of God, Laugh, sérigraphie avec poussière de diamant réalisée à partir d’une photographie du fameux crâne en platine et diamants créé en 2007.  Le premier métier, d’embaumeur de cadavres de DH l’ayant conditionné pour la suite  de sa carrière, lui a permis de produire des œuvres absolument remarquables.
 Figurent également dans la sélection les spécimens de Philippe Pasqua (Crâne aux papillons), Jan Fabre (L’Oisillon de Dieu), Annette Messager (Gants-tête) et Xavier Veilhan (Crâne, version orange) bof,  les photographies de Cindy Sherman (Untitled) et Marina Abramovic (Carrying the Skeleton I), Daniel Spoerri, la liste est infinie, ou encore quelques vidéos… Sans oublier l’artiste dont on parle dans l’actualité, Christian Boltanski et son théatre d’ombres, provenant de l’époque baroque, une peinture très sobre de Gerhard Richter.
boltanski-theatre-dombres.1265850880.jpg  Un véritable parcours à travers les disciplines et les époques successives, aux prises avec des interrogations différentes. Du memento mori, réflexions sur la fragilité de la vie et le temps qui passe, Vanité ou Allégorie de la vie humaine de La Madeleine pénitente (copie) de Georges de La Tour  aux mouches de Damien Hirst ou aux vers des frères Chapman, Étranges, dérangeants, voire effrayants, ne sont pas simplement des oeuvres d’art, mais aussi des chefs-d’oeuvre  techniques, dotés d’une vraie portée philosophique ou intellectuelle. Je ne peux que vous encourager à vous y plonger, mon enthousiasme provient de mon côté « morbide »… car dans le monde Philippe Dagen n’est pas très enchanté de cette exposition, vous pouvez lire son article dans les commentaires, évidement le monde des blogueurs lui emboîte le pas !

images provenant du catalogue de l’exposition

Frédéric Mitterrand à la Kunsthalle de Mulhouse

Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, est venu à Mulhouse, hier matin, samedi 6 février, pour une rapide visite. Il a eu l’occasion de découvrir la Cité de l’automobile, le tramway décoré par Christian Lacroix, la Kunsthalle, et de prendre contact avec un paysage urbain mulhousien marqué par l’imbrication de l’art contemporain dans la ville. Le ministre s’est rendu ensuite à Riehen, dans le canton de Bâle-Ville, pour découvrir la nouvelle exposition du Douanier Rousseau
Voilà ce que relatait l’Alsace le Pays le 7/2/2010
En effet il est venu à la Kunsthalle, après avoir visité l’incontournable musée national de l’automobile, entouré d’un aréopage empressé, qui l’a conduit presque directement devant la Fontaine de Trevi » que Mandla Reuter  montre à Mulhouse, – dans le 3e volet de l’exposition dont Lorenzo Benedetti est le commissaire, « les sculptures meurent aussi » – dans le « continuel processus de dématérialisation qui nous entoure »

Mais Frédéric Mitterrand a foncé droit devant lui, me serrant la main au passage (aurait-il lu mon billet à son sujet, m’a t’il reconnue ? pourtant j’ai changé ma photo -;) pour qui m’a t’il prise ? *) le public ébahi, les officiels affolés ont cru à une subite faim indomptable, Fredo assez mal élevé pour snober notre si belle Kunsthalle, pour se jeter sur le buffet ?
Que neni, en homme de goût et de culture il voulait se rendre compte par lui-même de l’effet produit lorsque l’on pénètre par l’entrée des visiteurs lambda dans notre centre d’art contemporain. Admiratif, il a contemplé l’espace, puis les discours se sont enchaînés.
Ecoutez le discours de Frédéric Mitterrand en cliquant sur la flèche verte :
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Tous brefs, menés tambour battant, avec une remise de cadeau, dont on n’a pas vu la couleur, une toile d’après l’emballage, que le ministre se réserve la surprise de déballer plus tard dans l’intimité de sa suite. Avait-il peur, lui si réactif, que nous lisions la stupeur sur son visage, a t’il été surpris par la teneur de l’exposition minimaliste « les sculptures meurent aussi » ?
Monsieur Bockel, ministre,  secrétaire d’État auprès de la ministre de la Justice et des libertés et maire de notre bonne ville, lui présenta les 2 artistes majeurs de notre cité :


Robert Cahen, artiste vidéaste
et
Bernard Latuner , peintre.
Puis nous avons tous été conviés au buffet fort sympathique, alors que Frédéric Mitterrand avait déjà fui vers la Suisse du côté de chez Beyeler, pour rencontrer Samuel Keller, directeur de la Fondation et Ernst Beyeler son fondateur dans le cadre de l’exposition Henri Rousseau.
* De ds Ms, m’a rassurée Jacques Chirac lui a fait le même coup au musée du Quai Branly, serrage de main alors qu’elle était perdue dans le public, est-ce une méthode pour abréger les effusions et écourter les réunions ?
photos de l’auteur

Marie Paule Bilger – Take care

« Mettre en place mon territoire
Contempler le monde
Positionner mon regard
Poser mon geste pictural
Eterniser l’éphémère »
Marie Paule Bilger

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n’oubliez pas le clic sur la photo

Le choix de Marie Paule Bilger du titre, pour son exposition, à l’Espace Lézard de Colmar,  n’est pas anodin, la légèreté, la fragilité du support, l’éphémère de la floraison, pour nous rendre attentif à la beauté de la nature qui nous environne, beauté à laquelle nous ne prêtons pas suffisamment attention. Lorsque l’art si conforme, on imagine presque que c’est l’inverse.mp-bilger-take-care-lezad-colmar15-1-2010-29.1263683380.jpg
Il y a 5 ans, elle a vu la couleur qui dégoulinait d’un verre, elle a aimé ceci et trouvé intéressant de continuer son travail en ce sens. Après les bestioles,  dit-elle, elle est revenue à la peinture. C’est en allant au Japon que ce rapport à la nature, en ayant travaillé sur l’animal auparavant, lui apparut  le même, des instants à vivre avec la nature, sa beauté.mp-bilger.1263683042.jpg
Le choix du blanc est délibéré,  sans aucune transparence, en faisant l’expérimentation de la couleur, même sur des sacs de congélation.
Les trésors collectés dans la nature proposés sous forme d’herbiers frémissants, pour souligner la fragilité, l’éphémère des choses, mais aussi sa participation au combat écologique.
Il faut souligner autant la beauté, la délicatesse, que la qualité de son travail. Techniquement c’est une prouesse  assez exceptionnelle, c’est un travail d’anticipation, il faut peindre les premiers plans en premier, et finir par les arrières plans une technique difficile, comme celle de la peinture sous verre.
Cela montre la joie simple de la vision d’arbres en fleurs, qui emporte notre regard vers le haut, la rêverie et tout à la fois la prise de conscience de ce qu’il faut préserver. Préservation pourrait également être le thème de ses peintures sur sac de congélation.

« Vivre seulement pour l’instant, contempler la lune,
la neige, les cerisiers en fleurs et les érables rouges ;
chanter des airs, boire, se divertir et se laisser flotter
comme flotte la gourde au fil de l’eau… »
Dit du Monde flottant (Ukiyo Monogatari) d’Asai Ryoi

mp-bilger-take-care-lezad-colmar15-1-2010-14.1263683177.jpgDans une sorte d’herbier peint Marie-Paule Bilger représente sur cet objet industriel, courant et polluant, ce que la nature a de plus insignifiant et de plus beau à la fois : feuilles, graines, herbes, autant de choses qu’elle aime ramasser, collecter, représenter. Autant de choses tellement courantes qu’on a tendance à les oublier, à oublier qu’elles pourraient un jour disparaître, si on n’y prend pas garde, si on ne les préserve pas. Tout comme elle aime figer ses visions mp-bilger-herbier.1263993780.jpgéphémères dans ses œuvres, Marie-Paule Bilger aime conserver ses sensations dans ces petits poèmes visant à dire l’évanescence des choses que sont les häikus.
A l’Espace Lézard, c’est déjà le printemps dans la grisaille de l’hiver.
Elle animera un atelier haïku pour les enfants de 8 à 10 ans les samedis 30 janvier et 20 février de 15 à 16 h. Places limitées sur inscription au 03.89.41.70.77.
Y ALLER du 15 janvier au 6 mars, du lundi au vendredi de 14 h 30 à 18 h 30, le samedi de 14 h 30 à 17 h 30. Entrée libre Espace Lézard, 2 bld du Champ de Mars, Colmar : 03 89 41 70
74 mp-bilger-take-care-lezad-colmar15-1-2010-21.1263683582.jpg
contact : @lezard.org/
http://www.lezard.org

photos de l’auteur
 

James Ensor – le maître du fantastique

« Faut-il Crever pour être aimé dans le monde des étriqués ou chez les pâles sirs de Beaudrucherie »
James Ensor

ensor-squelettes-se-disputant-un-hareng-saur.1263433110.jpgAu hit-parade des artistes les plus bizarroïdes, le Belge James Ensor (1861-1949) mérite une médaille d’or. C’est en tout cas l’impression qui domine en admirant les 90 peintures et dessins réunis au musée d’Orsay. Masques grimaçants, squelettes se battant pour un hareng saur, en référence à son nom
‘Art  En Sor’, Jésus paradant à Bruxelles et des autoportraits parfois poignants : Ensor, dont les couleurs éclatantes rappellent l’impressionnisme ou le fauvisme, mais dont les sujets étranges annoncent le surréalisme avec des décennies d’avance, est inclassable dans le domaine de l’histoire de l’art. C’est un solitaire, non récupéré dans aucun mouvement. Cet isolement le rend aussi amer, critique, acerbe, voire revanchard dans sa peinture. Mais quelle leçon de peinture, les couleurs éclatantes, violentes, des tonalités crues de rouges,  jaunes,  mauves, verts,  bleus. Ses maîtres : Goya, pour le goût du fantastique, Bruegel pour les scènes de foule très détaillées. C’est un artiste de la cruauté. Sont rassemblés crânes, sculptures monstrueuses et surtout masques lui ayant appartenu. Les carnets et croquis permettent d’approcher l’univers burlesque d’Ensor.
Ensor a réalisé 112 autoportraits, lequel choir pour illustrer mon propos ? ensor-autoportrait.1263433240.jpg Narcisse, ambiguë, chapeau fleuri, où il n’hésite pas à se ridiculiser, le pisseur, gravure où il est de dos et se soulage contre un mur, ou encore, l’entrée du Christ à Bruxelles, s’identifiant au martyr en proie aux critiques. Et comme s’il défiait la mort  dans beaucoup de toiles il se montre plusieurs fois sous forme de squelette. Novateur il a introduit les graffitis dans la peinture. Il participe à l’élaboration de son propre mythe. Il peint lors de ses débuts dans l’indifférence générale.
Il s’inspire de la boutique maternelle, un bric-à–brac baroque de coquillages, de chinoiseries, de souvenirs, de curiosités, des tenues  de sa grand’mère. Scatologique, (eau-forte, le roi au centre, l’armée bourgeoise à droite, le clergé à gauche, nourrissent le peuple de leurs excréments) satirique, agressif, étrange
« J’ai donné un style libre,(….) reflétant mes mépris,
mes joies, mes peines…) »

 Il s’exerce aussi à faire vibrer la lumière dans ses toiles,
en peignant un univers brûlant, fantastique, grimaçant,
caricatural, une symphonie de couleurs tranchées.
Ses sujets, les natures mortes, la musique, la médecine,
la mise en scène de ses critiques et détracteurs.

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Soudain reconnu, à la fin de sa vie, nommé baron par le roi,
il n’est pas dupe, mais apaisé Il assiste en 1930 à l’inauguration
d’un monument à sa gloire. Une radio annonce par erreur son
décès, en 1942 il va se recueillir devant sa propre statue.
Musée d’Orsay jusqu’au 4 février 2010
scan provenant du catalogue

Chefs d'oeuvre du musée Von Der Heydt au musée Marmottan

Le Musée allemand Von-der-Heydt de Wuppertal (Rhénanie-du-Nord-Westphalie) et le Musée Marmottan-Monet, à Paris, ayant conclu un accord, chacun accueille une cinquantaine d’oeuvres prêtées par l’autre. Des Monet sont partis en Allemagne. En échange, Marmottan présente une anthologie des avant-gardes allemandes de la première moitié du XXe siècle et ceci jusqu’au 20 février 2010
Trois ensembles se distinguent : celui du groupe Die Brücke (« le pont »), fondé à Dresde en 1905, et dont Ernst Ludwig Kirchner fut le héros ; celui du Blaue Reiter (« le cavalier bleu »), qui s’est créé à Munich en 1911 autour de Vassily Kandinsky et de Franz Marc ; et, dans les années 1920, la nouvelle objectivité, qu’incarne Otto Dix.
D’emblée on est saisi par la profusion, presque l’agression des couleurs,  des nuances d’orange et de rouge, des tourbillons de courbes bleues, des ciels jaunes pâles, des obliques outremers, des triangles coupants. La raillerie, l’ironie, le sacrilège sont sous-entendus. C’est une occasion rare d’admirer des toiles de premier plan.
Voici ce qu’en dit Philippe Dagen
 » Pour Kandinsky, Jawlensky, Marc ou encore August Macke, la couleur est exaltation. Lyrique, panthéiste, elle célèbre les filles fleurs, les couchants, une nature pure. Ces peintres sont beaucoup plus proches de Monet, qui les reçoit, que ne le sont Kirchner et les siens, qui se placent sous l’autorité d’Edvard Munch. Opportunément, celui-ci ouvre le parcours : un terrible portrait de jeune fille vêtue et chapeautée de rouge, allégorie de l’angoisse. « 

munch.1262731646.jpgEdvard Munch (1863-1944)Jeune fille au chapeau rouge, vers 1905
« La concentration expressive et tendue de la forme et les couleurs saturées à dominantes rouge et noir confèrent à ce portrait d’enfant un sentiment d’angoisse et une évocation particulièrement pessimiste et inquiète dela destinée humaine. (…) Ce portrait peint avec une extrême économie de moyens témoigne d’une grande hardiesse plastique. » [Christine Poullain]



Un vrai choc :
Emil Nolde (1867-1956) Le Pont, 1910nolde.1262731850.jpg
Un pont qui, pourrait être peint par Monet, où les violets du pont et les jaunes de l’eau se juxtaposent comme dans une leçon sur les couleurs complémentaires, un parapet bleuté, sous un ciel rose, avec des flammèches rougeoyantes parsemé de bleu, qui forme une perspective avec l’eau dans les mêmes pigments , le vert de la forêt et le rivage
 
À la Beauté , 
« L’Hommage à la Beauté d’Otto Dix, tableau de 1922, met en spectacle avec ironie cette défaite et cet effacement de l’Expressionnisme. Le peintre en personne est au centre. Costume élégant, toilette soignée. Ce dandy tient dans une main l’écouteur d’un téléphone. Arrière-fond, un décor artificiel de style néo-classique, avec un salon de danse où un musicien noir rythme du jazz à la batterie. »
 [Lionel Richard)à la laideur
Otto Dix (1891-1969) Leonie, 1923 est une lithographie en couleursotto-dix-leonie-litho.1262732668.jpg
L ’image est une caricature, Léonie est laide, c’est du pur réalisme, le visage est détaillé au scalpel, sans complaisance, de savant glacis et rehauts rouges  en font un portrait saisissant annonciateur des troubles à venir.




Kees Van Dongen (1877-1968)
Nu de jeune fille, 1906
 « Ce tableau montre une femme nue, de face, à mi corps, dont la nudité sensuelle et librement dévoilée est mise en valeur par une lourde chevelure qui la révèle et l’encadre, peinte dans des accords chromatiques audacieux bleu sombre et rouge, qui contrastent avec la clarté lumineuse du corps aux formes généreuses et à l’insolence heureuse. » [Christine Poullain]kees-van-dongen.1262732846.jpg
Alexej von Jawlensky (1864-1941)
Les Yeux noirs, 1912
 « Die Schwarzen Augen montre en miroir dans un visage dessiné par de larges cernes noirs comment l’artiste met en correspondance la réalité du monde extérieur et sa vision intérieure. Libéré de tout élément accessoire, le visage de la femme aux yeux noirs n’exprime que le nécessaire, impérieux semble-t-il, son regard tendu et profond renforcé par le rouge des joues, le jaune du front, devenu sujet même du tableau. » [Christine Poullain]
Alexej von Jawlensky (1864-1941) Jeune fille aux pivoines, 1909
alexis-jawlenski.1262732986.jpg « Mädchen mit Pfingstrosen montre le portrait à mi-corps d’une femme à l’expression méditative, la tête légèrement penchée sur le côté, les yeux mi-clos. La couleur de sa veste et de son chapeau posée en larges touches et hachures rouge vif semées de petits points noir et blanc entre en harmonie dissonante et puissante avec le vert jaune de son visage et de ses avant-bras et le vert acide du fond. Il émane de ce portrait aux tons stridents, et de manière paradoxale, une intériorité silencieuse qui évoque fortement la nécessité spirituelle prônée par Kandinsky. » [Christine Poullain]

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Il faudrait tous les citer, Kandinsky, Pechstein, Nolde, Jawlensky, Münter, Marc et Macke, Felixmüller, Dix et Grosz, Max Beckmann, Delaunay, Karl Schmidt-Rottluff, Eberslöh, Oppenheimer, Kees van Dongen, Heckel, Dufy, Müller, Kokoschka, Kirchner, Morgner, Georges Braque, qui nous enchantent et nous abreuvent par le lyrisme des couleurs
A l’origine du musée se trouvent les collections privées de deux cités prospères de la sidérurgie et du textile, Elberfeld et Barmen, qui fusionnent en 1929 seulement pour fonder Wuppertal. En achetant largement, en organisant des expositions, en conjuguant leurs forces, les banquiers von der Heydt et les industriels locaux défendent très tôt l’art de leur temps. Ils exposent même les Munichois du Blaue Reiter dès 1910, avant la fondation du mouvement. Rien d’étonnant : à Essen, Düsseldorf ou Cologne, il en va de même. Les collectionneurs, dans l’empire de Guillaume II, sont infiniment plus actifs et avant-gardistes que ceux de notre IIIe République – y compris pour ce qui est du postimpressionnisme et du fauvisme parisiens. En 1914, il y a des Dufy, des Van Dongen et des Braque à Wuppertal. Il n’y en a pas un dans un musée français.
Cette tendance se maintient constamment jusqu’en 1933. Le nazisme lui est fatal. Il y a d’abord les saisies de la campagne contre l’art dit « dégénéré », puis les destructions de la guerre. Insultes, pillages, bûchers : de 1937 à 1945, le Musée de Wuppertal perd 1 680 oeuvres, dont 531 sont détruites.
Dès 1910, longtemps avant qu’Elberfeld et Barmen ne soient réunis pour former la ville actuelle de Wuppertal, le musée d’Elberfeld et le Barmer Kunstverein commencèrent à exposer et collectionner les oeuvres des expressionnistes et de leurs successeurs. Des dons importants de collectionneurs privés, au premier rang desquels August et Eduard von der Heydt, vinrent enrichir ces fonds. En dépit des nombreuses pertes occasionnées par les confiscations d’oeuvres « dégénérées » par le régime nazi en 1937-1938, l’actuel musée Von der Heydt peut s’enorgueillir, grâce à des dons et acquisitions significatives, de posséder à nouveau une collection exceptionnelle d’art expressionniste. Les oeuvres des représentants de la Nouvelle Objectivité constituent un autre point fort des collections. (source musée marmottan)