Zero Rankine, Sylvain Couzinet-Jacques

à la Galerie Hors-Champs, Mulhouse
jusqu’au 19 octobre 2014
Une programmation dans le cadre de la
Biennale de la photographie de Mulhouse / Mulhouse Art Contemporain
Commissariat :  Anne Immelé
Sylvain Couzinet-Jacques
Dans son travail, Sylvain Couzinet-Jacques interroge une iconographie stéréotypée liée à des territoires et à des individus s’y inscrivant. La pratique de la photographie de ce jeune artiste formé à l’Ecole de la Photographie d’Arles est résolument contemporaine, tant par le souci de la technique que par l’originalité de sa mise en oeuvre.
Les images qu’il malmène sont toujours des signes de notre époque contemporaine dans sa face la plus sombre. Fragments d’une ville américaine fantomatique, crise économique, émeutiers aux contours flous comptent parmi les figures fortes qu’il déploie.
Ses séries photographiques jouent avec les seuils de visibilité, voilées par des verres teintés qui rappellent les lunettes de soleil, surexposées ou sous-exposées jusqu’à perdre trace du motif représenté, parfois même maltraitées au point de rendre impossible une lecture plane et complète. Il faut prendre du temps et scruter les images pour suivre le fil de la pensée, développée par l’artiste, partant de son titre obscure et barbare pour non averti :
Zero Rankine, quoique le memento mori lui très lisible, donne le ton dès l’entrée.
Il a mis un soin particulier à adapter sa scénographie à son thème et au lieu.

 
Sylvain Couzinet-Jacques
A travers une écriture affirmant un engagement documentaire tout en imposant de nouveaux codes esthétiques, Sylvain Couzinet-Jacques se situe dans une nouvelle génération de photographes à la frontière de plusieurs disciplines (vidéo, sculpture, installation…) tout en renouvelant le genre photographique
prédominant dans son travail.
« Zero Rankine » fait référence a un terme de mesure thermodynamique qui a pour valeur le zéro absolu
– la température la plus basse qui puisse exister.
Lors de cette exposition, la Galerie Hors-Champs est utilisée par l’artiste comme un laboratoire de création en investissant l’espace et en déployant des matériaux peu utilisés dans le champ photographique, jusqu’à explorer leur seuil de résistance. L’exposition montre ainsi une série d’oeuvres pour la plupart inédites, que l’artiste a conçues in situ.
Sylvain Couzinet-Jacques
Biographie
Sylvain Couzinet-Jacques est né en 1983. Il vit et travaille à Paris. Son travail a notamment été exposé au BAL, à Paris Photo, au Salon de Montrouge ou encore aux Rencontres d’Arles.
En 2014, son travail a été remarqué au prix Leica Oskar Barnack, au prix Science Po pour l’Art Contemporain, et au Prix Levallois. Il est représenté par la Galerie Foucher-Biousse (Galerie Particulière – Paris/Bruxelles) !
Informations pratiques
Galerie Hors Champs
16 rue Schlumberger
Ouvert du mercredi au samedi de 13h30 à 18h30.
Les dimanches de 14h à 18h ou sur rdv.
Contact galerie : Laurent Weigel
03 89 45 53 92

info@horschamps.fr
Contact : Biennale de la photographie de Mulhouse
L’agrandisseur, Anne Immelé,
06 99 73 81 80
agrandisseur@gmail.com
agrandisseur.tumblr.com
Contact :
Mulhouse Art Contemporain
Président Dominique Bannwarth
contact@mulhouse-art-contemporain.fr
www.mulhouse-art-contemporain.fr
Les organisateurs
L’association Mulhouse Art Contemporain s’inscrit dans le prolongement de l’association de préfiguration du centre d’art contemporain de la Fonderie de Mulhouse – ouvert depuis sous le nom de La Kunsthalle. L’association a pour objectif d’assurer la promotion de l’art contemporain et sa diffusion la plus large en créant un réseau de personnes mobilisées sur ces mêmes désirs et d’accompagner les initiatives des structures et acteurs agissant dans le domaine de l’art contemporain.
Mulhouse Art Contemporain a été partenaire de l’Agrandisseur pour la production d’une affiche de Michel François, diffusée auprès du public au Musée des Beaux-arts dans le cadre de Play & Replay, première Biennale
de la photographie de Mulhouse.
Créée à Mulhouse en novembre 2010, l’association l’Agrandisseur organise des expositions, des conférences, des rencontres et workshop avec des photographes et des théoriciens de l’image.
L’association souhaite impulser un questionnement sur le médium photographique, ses transformations et ses usages dans le champ de l’art contemporain. Son activité principale est l’organisation de la Biennale de la Photographie de Mulhouse, dont la programmation soutient et diffuse les pratiques photographiques au sein de l’art contemporain, avec une vocation internationale et une volonté de montrer des talents émergents.

La Fondation Marguerite et Aimé Maeght, 50 ans

C’est toujours un enchantement d’aller à la Fondation Maeght, blottie à St Paul de Vence, inondée par le soleil et rythmée par le chant des cigales.
Fondation Maeght, parc
Face à l’oeuvre jusqu’au 11 novembre.
« Oui mon cher Joan, nous réaliserons une oeuvre unique au monde » Correspondance d’Aimé Maeght à Joan Miró, 29 août 1959
La Fondation Marguerite et Aimé Maeght est un exemple unique de fondation privée en Europe. Inaugurée le 28 juillet 1964 par André Malraux, alors Ministre des Affaires Culturelles (INA), cet ensemble architectural a été entièrement conçu et financé par Aimé et Marguerite Maeght pour présenter l’art moderne et contemporain sous toutes ses formes.
Marguerite et Aimé Maeght
Des peintres et des sculpteurs ont étroitement collaboré à cette réalisation avec l’architecte catalan Josep Lluís Sert en créant des œuvres, souvent monumentales, intégrées au bâtiment et aux jardins : la cour Giacometti, l’une des oeuvres « in situ » les plus connues au monde le labyrinthe Miró peuplé de sculptures et de céramiques, les mosaïques murales de Chagall et de Tal-Coat, le bassin et le vitrail de Braque, la fontaine de Bury

Pierre Bonnard, L’Eté, 1917. Photo Archives Fondation Maeght © Adagp Paris 2014.
Pierre Bonnard, L’Eté, 1917. Photo Archives Fondation Maeght ©
Adagp Paris 2014.

Véritable musée dans la nature, la Fondation Maeght est un lieu exceptionnel qui possède une des plus importantes collections en Europe de peintures, sculptures, dessins et œuvres graphiques d’art moderne du XXe siècle (Bonnard, Braque, Calder, Chagall, Chillida, Giacometti, Léger, Miró, Ubac) mais également d’artistes contemporains (Adami, Calzolari, Caro, Del Re, Dietman, Kelly, Mitchell, Monory, Oh Sufan, Takis, Tàpies...).

Pour leur grande exposition d’été 2014, Adrien Maeght, président du conseil d’administration, et Olivier Kaeppelin, directeur de la Fondation Maeght, ont choisi de rendre hommage aux oeuvres, dans cet esprit de face à face singulier, favorisé par l’architecture épurée et lumineuse de la Fondation Maeght.
« La Fondation Maeght a toujours refusé les a priori sur les oeuvres. Elle est d’abord au service des artistes et de l’art, dans une passion partagée avec le public ; c’est ce qui la rend si unique. Je crois qu’Aimé Maeght nous a appris que l’expérience importante était ce moment précis où s’ouvrent, pour chacun d’entre nous, un espace, un temps, une surprise qui contribuent à inventer la pluralité des mondes » explique Olivier Kaeppelin.

Vassili Kandinsky, Le Noeud rouge, 1936. Photo Claude Germain Archives Fondation Maeght. © Adagp Paris 2014.
Vassili Kandinsky, Le Noeud rouge, 1936.
Photo Claude Germain Archives
Fondation Maeght. © Adagp Paris 2014.

Entre « chefs-d’oeuvre » et singularité, grands maîtres internationalement reconnus et artistes plus confidentiels, cette exposition souligne l’importance du regard et de toutes les facultés qu’il met en jeu. Ces face-à-face auront lieu avec Pierre Bonnard, Georges Braque, Alberto Giacometti, Joan Miró et Alexander Calder, mais également avec ceux qui sont encore aujourd’hui l’expression d’une conviction originale et d’une prise de risque. François Fiedler, Gérard Gasiorowski ou encore Richard Lindner rejoindront, comme le souhaitaient les fondateurs, les artistes contemporains récemment exposés par la Fondation.

Calder - Derain
Calder – Derain

Un héritage vivant. Ni musée, ni centre d’art, la Fondation Maeght est un lieu unique où, jour après jour, s’invente et se partage l’art. Comme le soulignait André Malraux lors de l’inauguration de la Fondation Maeght le 28 juillet 1964 : « ici est tenté quelque chose qu’on n’a jamais tenté : créer l’univers, créer instinctivement et par l’amour, l’univers dans lequel l’Art Moderne pourrait trouver à la fois sa place et cet arrière-monde qui s’est appelé jadis le surnaturel ».

vue d'une salle Fondation Maeght

Plusieurs artistes ont affirmé qu’Aimé Maeght leur avait permis, avec la Fondation, de réaliser leurs rêves ; de nombreuses générations de visiteurs racontent en retour y avoir découvert l’art. Cet héritage, vivant et partagé, est au coeur de l’exposition de cet été 2014.
« Face à l’oeuvre ». L’exposition met en perspective la manière dont Aimé Maeght avec son épouse Marguerite, puis Adrien Maeght et les équipes à leurs côtés, ont choisi les oeuvres. Pour leur univers, leur force d’expression, leur engagement comme leur poésie et la cohérence de leur puissance d’émotion. Sans préjugés, qu’ils soient théoriques ou esthétiques, ni réduction à la notion d’ « école », uniquement soucieux de la « présence de l’oeuvre », Aimé Maeght a toujours conduit son exigence artistique et son goût pour la découverte dans une réelle volonté de partager l’art avec autrui. Avec ses contemporains et, selon son espérance, avec les générations futures. C’est à partir de cette volonté que l’exposition présente au public à la fois des « chefs-d’oeuvre » et des oeuvres encore en proie à l’histoire et aux débats.
Alberto Giacometti
Les amoureux de la Fondation Maeght ont ainsi le bonheur de retrouver les grandes oeuvres qui ont marqué la création, les aventures de la Fondation comme les mémoires et la vie de ses visiteurs. Il s’agit également pour Adrien Maeght et Olivier Kaeppelin de proposer des oeuvres « surprenantes », qui rappellent l’importance de la force de conviction et de l’esprit de découverte, confiés en héritage à la Fondation Maeght.
« Revivre avec passion la beauté des oeuvres de Bonnard, de Braque, de Derain comme éprouver l’intensité toujours croissante d’un grand Gasiorowski en train de prendre sa place dans le siècle, c’est tout le plaisir que nous souhaitons offrir aux visiteurs de Face à l’oeuvre » explique Adrien Maeght.
200 000 visiteurs viennent chaque année à la Fondation Maeght qui a réalisé plus de 100 expositions monographiques ou thématiques depuis son ouverture.
Une salle montre des sculptures de Giacometti, ainsi que 3 portraits que l’artiste a réalisés pour Marguerite Maeght et dédiés à celle-ci.

 A.Giacometti Portrait de Mme Maeght
A.Giacometti Portrait de Mme Maeght

La Fondation Maeght est dédiée, selon la volonté de ses fondateurs, à la création de notre époque. Lors des expositions temporaires, seule une partie de la collection permanente est exposée. A partir de ses collections, de nombreuses expositions sont également organisées, chaque année, dans des musées en France et à l’étranger.
La Saga Maeght
Saga Maeght
Yoyo Maeght, petite-fille d’Aimé, raconte le quotidien de sa famille élargie, ou artistes et écrivains se côtoient et travaillent. Elle livre ses souvenirs d’une vie passée dans un tourbillon de vernissages, fêtes, expositions, projets, échecs et réussites, drames et joies, entre Paris et Saint-Paul-de-Vence. Elle évoque aussi les fractures qui vont progressivement disloquer la famille.
La Saga Maeght est à la fois l’épopée d’une dynastie amoureuse des arts sur trois générations, digne d’un roman policier, l’aventure triste d’un clan déchiré à la mort du patriarche et un voyage dans l’intimité des plus grands artistes de notre histoire contemporaine.
lecture conseillée
Photos courtoisie Fondation Maeght
sauf  la 1/4/5/6

Gustave Courbet à la Fondation Beyeler

Après cet obscur objet de désirs,  autour de L’Origine du monde, au musée Gustave Courbet à Ornans,
Gustave Courbet Le Fou de peur (Portrait de l’artiste), ca. 1844/45 Huile sur papier sur toile, 60,5 x 50,5 cm Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design, Oslo

Gustave Courbet
Le Fou de peur (Portrait de l’artiste), ca. 1844/45
Huile sur papier sur toile, 60,5 x 50,5 cm
Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design, Oslo



La Fondation Beyeler consacre régulièrement ses expositions à des artistes dont l’oeuvre a exercé une influence déterminante sur l’évolution de la peinture moderne.
Gustave Courbet, né en 1819 à Ornans, dans le Jura, et mort en 1877 à la Tour-de-Peilz en Suisse, est l’une de ces figures clés de l’histoire de l’art.
L’exposition de la Fondation Beyeler, dont le paysage automnal extérieur s’allie parfaitement  aux soixante dix oeuvres, se concentre sur le rôle de premier avant-gardiste, de Courbet.
Par des tableaux provocants où s’affirme son individualité d’artiste, il s’est imposé parmi les pionniers de l’art moderne, rompant avec les conventions de la formation académique traditionnelle. Le refus de Gustave Courbet de se plier aux conventions formelles, son remarquable aplomb, l’affirmation opiniâtre de son individualité d’artiste, son goût pour la provocation et sa propension à briser les tabous ainsi que sa technique picturale révolutionnaire ont établi des critères qui ont marqué plusieurs générations d’artistes. Il compte parmi les principaux précurseurs de l’art moderne.
Autoportraits
À travers des autoportraits, des représentations de femmes, des tableaux de grottes et de paysages marins, l’exposition met l’accent sur son approche novatrice de la couleur et sur sa stratégie d’ambiguïté. La rupture avec la tradition académique, le développement du réalisme dans l’histoire de l’art, la technique révolutionnaire d’empâtement de Courbet qui exprimait son individualité d’artiste y sont également abordés, au même titre que son traitement ludique de motifs et de symboles du passé.
L’exposition s’ouvre sur les autoportraits de jeunesse, des oeuvres complexes à travers lesquelles Courbet s’est mis en scène au début de sa carrière parisienne.
Bonjour Monsieur Courbet montre l’importance affirmée déjà, alors qu’il croise son éventuel mécène.

la rencontre du jour, Bonjour Monsieur Courbet, musée fabre de Montpellier 1854 300mmx267mm
la rencontre du jour, Bonjour Monsieur Courbet, musée fabre de Montpellier 1854
300mmx267mm

Presque tous les autoportraits de Courbet ont été réalisés entre 1840 et 1855. Ils occupent une place déterminante au cours de cette période durant laquelle Courbet devient en quelque sorte réellement Courbet.
En se prenant pour modèle, il a pu multiplier les expériences et ce dialogue artistique avec sa propre apparence lui a permis de développer ses moyens d’expression. Les poses et rôles divers qu’il adopte doivent être considérés comme autant d’exercices qu’il s’est imposés à lui-même et l’on comprend aisément qu’il ne se soit jamais défait d’un grand nombre de ces tableaux : il y voyait les témoignages de son parcours artistique.
On peut y voir un étonnant autoportrait de 1858 intitulé Autoportrait sous forme de pipe, provenant d’une collection privée. On y distingue des personnages fumant la pipe, comme un dessin sous-jacent.
Courbet détail d'Auoportrait sous forme de pipe, 1858, collection particulière
Courbet détail d’Autoportrait sous forme de pipe, 1858, collection particulière

Le Fou de Peur (Portrait de l’artiste), vers 1844/1845 – également exposé autrefois sous le titre -Le Suicide –  (en en-tête) incarne indéniablement l’exemple extrême de cet ensemble d’oeuvres. On aurait peine à dire s’il s’agit de la représentation d’un individu affolé, d’un candidat au suicide ou d’un homme animé d’une idée fixe. La partie inférieure du tableau paraît inachevée et ses contemporains ne purent qu’y voir une esquisse pourtant, Courbet ne désigne pas cette oeuvre comme telle lors de son exposition de 1855. Si cette toile était effectivement achevée à ses yeux, on peut l’interpréter comme une déclaration de programme. Il s’agit là d’une entreprise audacieuse et périlleuse : on voit ici, littéralement, la main de l’artiste. Sur la plage blanche en bas à droite, on a en effet l’impression de distinguer les contours d’une main écartée, très probablement une empreinte de main « peinte ». Sous le regard des spectateurs, l’artiste ambitieux se jette dans l’indéterminé, dans quelque chose d’entièrement nouveau. Est-ce la mort ? Ou bien la nouvelle peinture dans laquelle Courbet se précipite en s’affranchissant de toute tradition ?
L’Origine du monde
L’exposition « Gustave Courbet » recèle une oeuvre qui a fait et continue à faire sensation, une toile qui compte parmi les plus célèbres et les plus sulfureuses de l’histoire de l’art : L’Origine du monde. Ce tableau constitue tout à la fois une rupture de tabou et un jalon, un hommage à la femme et une manifestation de voyeurisme, une peinture magistrale et une provocation. C’est précisément dans cette contradiction que réside son secret : célèbre-t-on ici le lieu de naissance, l’origine de l’humanité ou ne s’agit-il que du regard masculin posé sur  la femme ? Est-ce Courbet le voyeur, ou le sommes-nous tous ? Peut-être Courbet voulait-il également prouver que la peinture n’avait pas à redouter la
concurrence de la photographie, qui commençait alors à se répandre. Tel est le champ de tension qui fait toute l’importance de cette oeuvre, laquelle n’était initialement pas destinée à être présentée au public.
Thierry Savatier Fruit de plusieurs années de recherche, ce livre retrace toute l’histoire de L’Origine du monde, des arcanes de sa création en 1866 jusqu’à son entrée au musée d’Orsay en 1995

L’Origine du monde, est au centre de cette exposition. Cette peinture de 1866 est le chef-d’oeuvre inconnu du XIXe siècle, le tableau que peu avaient vu à l’époque de sa création, mais dont tous parlaient. Il n’a rien perdu de sa force de provocation. Ne parle t’on  pas de « la Joconde de l’art moderne »
Cette toile est présentée sans mise en scène particulière, comme on a pu la voir au Grand Palais en 2008, et plus récemment à Ornans, où durant tout l’été, les amateurs de belles oeuvres ont pu admirer  une exposition autour du thème « Cet obscur objet de désirs »; l’oeuvre particulière et sulfureuse de Gustave Courbet a attiré plus de 40 000 visiteurs.
Courbet lui-même se réclame du Titien et de Véronèse – avec son aplomb habituel, il aurait déclaré à des amis réunis chez Khalil Bey et qui venaient d’admirer cette toile :
« Vous trouvez cela beau… et vous avez raison… Oui, cela est très beau, et tenez, Titien, Véronèse, leur Raphaël, moi-même n’avons jamais rien fait de plus beau ».
Le Jura, la mer, la neige : un traitement révolutionnaire de la couleur
La plupart des tableaux réalisés après 1855 sont des paysages : à cette date, Courbet avait déjà peint la majorité de ses grandes oeuvres réalistes. Courbet associe volontiers les paysages typiques de sa région natale, le Jura des environs d’Ornans, caractérisé par ses sources, ses grottes, ses falaises calcaires escarpées et ses forêts profondes à des représentations de nus féminins. L’être humain, la sexualité et la nature intacte s’associent ainsi en formant un équilibre fascinant. D’autres tableaux se concentrent sur l’obscurité impénétrable des grottes du Jura. Courbet s’y affirme comme un maître de l’allusion et comme un authentique peintre de l’invisible.
C’est un artiste qui a su imposer de nouvelles idées picturales.
Gustave Courbet La Source du Lison, 1864 Huile sur toile, 91 x 73 cm Collection privée Photo: Paul Mutino
Gustave Courbet
La Source du Lison, 1864
Huile sur toile, 91 x 73 cm
Collection privée
Photo: Paul Mutino

Les paysages lui permettaient de donner la démonstration de son
individualité artistique. De plus, ils se vendaient bien. Le style de Courbet devient une véritable marque de fabrique, il existe une demande et un marché pour ces oeuvres. Une grande partie de ses tableaux de paysages sont consacrés à la représentation de sa région natale, les environs d’Ornans.
Un motif récurrent et prégnant des paysages de Courbet est la transition entre plateau (les environs de Flagey) et plaine (Ornans) – caractéristique de son Jura natal. Les paysages de Courbet ne sont pas marqués par un regard idéalisateur mais réaliste. Même si la plupart de ses toiles ont vu le jour dans son atelier, elles témoignent d’une minutieuse étude de la nature sur les différents motifs choisis.
Lorsqu’on se rend sur les plateaux entaillés de profondes vallées, que l’on observe les formations rocheuses spectaculaires, les cours d’eau obscurs et les grottes imposantes où ils prennent leur source, on ne peut manquer de remarquer la virtuosité de Courbet qui semble façonner littéralement les structures géologiques des rochers grâce à la couleur. La Source du Lison, 1864, en offre un bon exemple – l’effet spatial des différentes
strates sédimentaires est tout à fait étonnant. Lorsqu’on s’approche de la toile, tout se dissout en touches de pinceau parfaitement identifiables, qui communiquent une impression plastique des formations rocheuses. De même, dans La Source de la Loue, 1864, les couleurs claires, généralement pures, transforment en quelque
sorte la substance des rochers et de l’eau en une masse colorée abstraite. Il en résulte une nature qui paraît puissamment animée et correspond, sous sa forme pure et authentique, à l’expérience sensorielle du motif faite par Courbet.
Une toile somptueuse, étonnante et presque inconnue (1867), sauf pour ceux qui ont eu la chance de visiter la Fondation Barnes à Philadelphie en Pennsylvannie, montre un thème cher à son contemporain, Jean François Millet : la Bergère ou la Fileuse bretonne, avec ses moutons.
Gustave Courbet, la Bergère
Courbet utilisait la matière picturale d’une manière tout à fait inhabituelle pour son temps, appliquant manifestement la couleur à la brosse, au couteau, à l’aide d’un chiffon ou même de son pouce. L’intervention fréquente du couteau à palette jouait un rôle particulier. Cet outil qui ressemble à une petite truelle est généralement employé par les peintres pour mélanger les couleurs sur leur palette. Courbet en revanche s’en servait pour appliquer directement la couleur sur la toile, donnant ainsi l’impression que ses tableaux étaient
moins peints que « construits ».
Gustave Courbet, le coup de vent dans la Forêt de Fontainebleau, 1865, Museum of Fine Art Huston
Gustave Courbet, le coup de vent dans la Forêt de Fontainebleau, 1865, Museum of Fine Art Huston

Le Coup de vent, forêt de Fontainebleau vers 1865 révèle, lui aussi, une application particulière de la couleur.
Cette oeuvre remarquable est le plus grand paysage qu’il ait jamais réalisé. Il s’agissait probablement d’un travail de commande pour le décor d’une villa parisienne. Dans cette représentation d’un orage qui approche, Courbet manifeste toute la gamme de sa maîtrise et de son étonnante modernité. Cette composition audacieuse prend pour thème le mouvement, sous l’aspect du vent. En même temps, on peut y observer le traitement
différencié de la couleur, appliquée tantôt de façon précise et détaillée à l’aide d’un pinceau fin, tantôt de façon franchement « tempétueuse » en couches chromatiques translucides apposées par touches rapides, qui évoquent une grande liberté et se rapprochent de l’abstraction.
Gustave Courbet La Vague, ca. 1869 Huile sur toile, 65,4 x 88,7 cm Brooklyn Museum, donation de Mrs. Horace Havemeyer
Gustave Courbet
La Vague, ca. 1869
Huile sur toile, 65,4 x 88,7 cm
Brooklyn Museum, donation de Mrs. Horace Havemeyer

Dans les représentations de l’océan, aussi bien étale qu’agité, la transformation apparente de la couleur en forme exerce un effet si direct que Paul Cézanne s’est écrié à propos de la mer qui figure sur ces tableaux :
« On la reçoit en pleine poitrine. On recule. Toute la salle sent l’embrun. » Le commentaire de Joan Miró affirmant à propos de La vague qu’on percevrait la présence de la toile même en lui tournant le dos va dans le même sens. La technique d’application de la couleur de Courbet lui permettait de peindre particulièrement
vite, et il s’en vantait auprès de ses connaissances : une nuance pour le ciel, une pour la mer, et une pour la plage. Mépris du public, vantardise devant des collègues ? Ne s’agirait-il pas plutôt de la description d’une réduction radicale des moyens picturaux ? Trois tonalités, associées au geste pictural, ont produit des tableaux
qui comptent aujourd’hui parmi les oeuvres les plus belles et les plus chargées d’atmosphère de Courbet.
Gustave Courbet Les Trois Baigneuses, 1865–68 Huile sur papier sur toile, 126 x 96 cm Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris © Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris / Eric Emo
Gustave Courbet
Les Trois Baigneuses, 1865–68
Huile sur papier sur toile, 126 x 96 cm
Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
© Petit Palais, Musée des Beaux-Arts
de la Ville de Paris / Eric Emo

Femmes et eau
Les représentations de femmes dénudées au bord de l’eau entourées d’une nature foisonnante datent des années situées entre 1866 et 1868. Les trois toiles de format presque identique présentées dans l’exposition sont autant de variations sur le thème de l’unité de la femme et de la nature, un thème qui s’inscrit dans une longue tradition de l’histoire de l’art. On rencontre dès l’Antiquité des personnifications féminines de
sources ainsi que de charmantes figures de jeunes filles s’ébattant au bord de cours d’eau, de grottes ou de lacs. La femme, médiatrice entre l’eau de source et la végétation, incarne la fécondité, l’initiation et la sexualité. Courbet a exploité délibérément la charge érotique de ce motif. La Source, 1868, fait songer à des motifs comparables, que l’on rencontre par exemple chez Ingres. Courbet refuse toutefois d’idéaliser son modèle. La chair de la femme vue de dos est rendue avec un grand réalisme par le peintre, qui en souligne les irrégularités. De même, l’insistance sur les rondeurs féminines, exagérées par le peintre ou par le corset alors en usage, ne correspondait pas aux représentations courantes de la beauté. Pour la plupart de ses contemporains, un tel réalisme, parfois outrancier, était choquant.
Gustave Courbet Effet de neige, ca. 1868 Huile sur toile, 72 x 92 cm French and Company, New York
Gustave Courbet Effet de neige, ca. 1868 Huile sur toile, 72 x 92 cm French and Company, New York

Dans la salle intitulée « Traces dans la neige » où sont présentés les paysages de neige de Courbet, les oeuvres font découvrir au spectateur la manière dont sa peinture prend la couleur elle-même pour objet: pâteux et expressif, et en même temps d’une légèreté dynamique, le blanc se transforme ici en neige, semblant créer sa propre réalité.
Le centre obscur de la peinture de Courbet
Ses représentations de grottes et celles de vagues partagent un mystérieux centre obscur. Courbet affirmait explicitement qu’il construisait ses toiles à partir de l’obscurité et reproduisait l’incidence lumineuse par des moyens picturaux. Cette technique apparaît clairement dans la représentation de la veste bleu foncé du chasseur de droite de Braconniers dans la neige, 1867, que le peintre modèle par des accents de couleurs
appliqués avec parcimonie.
Dans les paysages en revanche, les rochers semblent graviter autour d’un centre noir encore indistinct, comme l’eau autour des ouvertures de grottes ou comme l’intérieur de la vague. La toile la plus célèbre de Courbet sans doute, L‘Origine du Monde, 1866, fascine par une construction picturale identique. Les spécialistes d’art y voient des parallèles formels et conceptuels. Le XIXe siècle, littéralement obsédé de fantasmes sexuels –
essentiellement masculins – avait élaboré toute une panoplie de moyens pour les représenter de manière plus ou moins explicite. Courbet était un maître de l’allusion érotique, au point que, même en l’absence de personnages féminins, on interprète ses tableaux de grottes comme des paysages anthropomorphes. Les
grottes seraient-elles des évocations cachées du sexe féminin ?
Gustave Courbet Le Bord de mer à Palavas, 1854 Huile sur toile, 38 x 46,2 cm Musée Fabre, Montpellier Agglomération © Musée Fabre, Montpellier Agglomération / Frédéric Jaulmes
Gustave Courbet
Le Bord de mer à Palavas, 1854
Huile sur toile, 38 x 46,2 cm
Musée Fabre, Montpellier Agglomération
© Musée Fabre, Montpellier Agglomération / Frédéric Jaulmes

Épilogue
À la Fondation Beyeler, le ravissant petit paysage de mer de Courbet Le Bord de mer à Palavas, 1854, qui représente probablement l’artiste lui-même, prend congé des visiteurs à la fin de l’exposition par un geste plein d’élan. En quelque sorte un pendant à la toile d’entrée, Bonjour Monsieur Courbet, réaffirmation de son désir d’importance, dans la la peinture.
Procès
Cette exposition est montée en coopération avec le Musée d’Art et d’Histoire de Genève, qui présente la création de Courbet datant de la période de son exil en Suisse.
Les expositions de Riehen/Bâle et de Genève donneront le coup d’envoi à la
« Saison Courbet » qui commence à l’automne 2014.

Catalogue
À l’occasion de l’exposition « Gustave Courbet », la Fondation Beyeler publie un catalogue en allemand et en anglais avec un tiré à part en français. L’édition commerciale est éditée par Hatje Cantz Verlag, Ostfildern. Ce catalogue abondamment illustré contient des contributions d’Ulf Küster, Stéphane Guégan, Michel Hilaire, Laurence Madeline, Bruno Mottin et James Rubin.
Manifestations organisées à l’occasion de l’exposition Gustave Courbet
Informations pratiques
Conférence de Laurence Des Cars
Mercredi, 17 septembre 2014, 18h30
Laurence Des Cars, directrice du Musée de l’Orangerie de Paris, parle de la création de Gustave Courbet.
En collaboration avec l’Alliance Française de Bâle et la Société d’Etudes Françaises de Bâle.

La conférence se tiendra en français.
La manifestation est incluse dans le prix d’entrée du musée.
Débat : l’art dans le champ de tension du scandale et de la rupture de tabou
Jeudi, 9 octobre 2014, 18h30–20h00
Depuis qu’il existe, l’art a été jalonné de scandales artistiques. Quel rôle joue la rupture des tabous dans l’art contemporain ? Dans quelle mesure les scandales et les ruptures de tabous sont-ils mis en scène ou provoqués ? Où se situent les champs de tension et les frontières entre tabous, provocation, art et culture ?
Voici quelques-unes des questions dont discutent l’artiste Tracey Emin, le conservateur et historien de l’art Norman Rosenthal ainsi qu’Elisabeth Bronfen et Andreas Beyer. Ce débat a lieu en anglais.
En collaboration avec DAS MAGAZIN
Prix : CHF 35.- entrée du musée incluse / Art Club et Amis CHF 10.-
Journée Familles « Gustave Courbet »
Dimanche, 26 octobre 2014, 10h00–18h00
Courtes visites guidées de l’exposition « Gustave Courbet »
pour enfants, jeunes, adultes et familles en différentes langues. Un jeu dans le musée et différents ateliers invitent le public à des expériences.
Prix : gratuit pour les enfants et pour les jeunes de moins de 25 ans ; adultes : prix d’entrée habituel du musée.
Lecture d’extraits du livre « Gustave Courbet »
Mercredi, 29 octobre 2014, 18h30
Ulf Küster, commissaire de l’exposition et auteur lit des extraits de son livre « Gustave Courbet ».
Ce nouvel ouvrage publié à l’occasion de l’exposition présente l’artiste et son oeuvre.
La manifestation est incluse dans le prix d’entrée du musée. En langue allemande.
Visite guidée publique en français
Dimanche, 15h00–16h00
28 septembre
19 octobre
30 novembre
21 décembre
Visite guidée dans l’exposition « Gustave Courbet »
Prix: Tarif d’entrée + CHF 7.-

Céleste Boursier-Mougenot, persistances

Exposition à l’ Aubette 1928 Strasbourg
jusqu’au 22|11|2014
L’Aubette 1928 accueille l’artiste Céleste Boursier-Mougenot dans le cadre de la programmation d’expositions temporaires consacrée aux formes les plus actuelles et pluridisciplinaires de l’art.
Céleste Boursier-Mougenot
Musicien de formation, Céleste Boursier-Mougenot réalise depuis une vingtaine d’années des installations qui prennent en compte leur lieu de présentation, leur environnement et donnent une place au visiteur qui en fait partie intégrante le temps de sa visite. L’artiste s’attache à rendre perceptible le potentiel musical de situation ou d’objets les plus divers en élaborant des dispositifs dont les formes varient mais qui toujours font de l’écoute le motif central de l’œuvre. Les formes sonores ainsi créées, que Céleste Boursier-Mougenot qualifie de vivantes, livrent une nouvelle perception de l’espace avec lequel elles entrent en résonance.
Céleste Boursier-Mougenot présente deux installations à l’Aubette 1928, parmi lesquelles une est produite pour l’exposition. Dans la salle des fêtes, Céleste Boursier-Mougenot développe une nouvelle version de l’installation videodrones (2000-2011) recomposant sur fond des décors de Theo Van Doesburg le paysage urbain environnant de la place Kléber filmé en direct et dont la bande son résulte « du bruit des images » ou plus exactement de la modulation du signal vidéo amplifié et converti en audio.
La subtilité du travail ingénieux de l’artiste demande quelques explications, pour la bonne compréhension et son appréciation.

 
videodrones, 2000-2014 (extrait de la vidéo)
Installation audio et vidéo, technique mixte,
Six caméras vidéo, six projecteurs
Vidéo, système multi canal de traitement et de diffusion audio, différents sofas.
Videodrones, présentée dans la salle des fêtes, donne à voir les mouvements de la vie publique captés par six caméras orientées sur la place Kléber. Ce flux d’images produit, via un amplificateur, une gamme sonore, dont la forme s’apparente à un bourdonnement continu, résonant dans l’espace. L’intensité sonore est modulée en fonction de l’exposition des caméras à la lumière, au mouvement, à la vitesse et à la taille des personnes et objets qui traversent leurs champs. Chaque flux d’images en provenance d’une caméra devient une source sonore qui s’ajoute à la composition. Les images captées sur la place sont ainsi diffusées par six caméras en temps réel sur les murs latéraux et le plafond de la salle des fêtes et se surimpriment aux décors géométriques réalisés en 1928 par Theo Van Doesburg, créant ainsi une étonnante mise en abyme du décor de Van Doesburg.
Au centre de l’espace, un meuble crée par le designer Stéphanie Marin, permet l’immersion dans cette oeuvre dont l’imaginaire peut se saisir et exploiter le potentiel fictionnel, autant qu’être troublé par le surdimensionnement des images projetées, créant une réalité seconde, hypnotique.
videodrones est issue d’une série d’installations audio et vidéo développées depuis 2000 par Céleste Boursier-Mougenot.
Conçue pour le Foyer-bar de l’Aubette, une nouvelle installation intitulée bruitformé est à découvrir au moment de l’ouverture de l’exposition. Un microphone capte la fluctuation de fréquences acoustiques audibles ou non qui adviennent et sont analysées pour insuffler un ensemble de sculptures fragiles, éphémères, utopiques qui forment un paysage atone.
Céleste Boursier-Mougenot, persistance IFoyer-bar
persistance I, 2014
Sculpture, technique mixte
Pompe à air, réservoir, solution tensioactive, modulateur électronique avec entrées audio,
microphones, socle en bois, tuba harmonium
Céleste Boursier-Mougenot a conçu pour le Foyer-bar de l’Aubette persistance I, oeuvre
composite formée d’un euphonium (sorte de tuba) présenté seul au milieu de la pièce conçue en 1928 par Sophie Taeuber-Arp. La substance mousseuse qui s’en échappe doucement résulte de approches, pièce sonore présentée dans le Ciné-dancing, en fonction des variations mélodiques de ce chant. A mesure que le son produit la mousse, celle-ci entoure l’instrument puis s’écoule lentement sur le socle rugueux sur lequel l’instrument est déposé. Un jeu de matière se créer alors ; la matière sonore donnant forme à la mousse aérienne et soyeuse, qui est entravée, à mesure de sa dissolution, par le matériau irrégulier et ingrat habillant le socle.
L’articulation de différentes matières, qu’il s’agisse du cuivre du tuba, des fines bulles de la
mousse ou du crépi industriel, fait apparaitre persistance I comme une concrétion
contemporaine, figurant, au moyen du caractère symbolique de l’instrument, le caractère révolu de cet espace, autrefois lieu festif et sonore.

Céleste Boursier-Mougenot , persistance I, 2014
Céleste Boursier-Mougenot , persistance I, 2014

Ciné-dancing
approches, pièce musicale pour voix, Joana Preiss, 23 mns, 1993
immersions, pièce musicale pour violon et altos, 66 mns, 1993
approches et immersions sont deux pièces musicales composées par Céleste Boursier-
Mougenot en 1993 pour la pièce De mes propres mains de Pascal Rambert présentée pour la première fois au festival Théâtre en mai à Dijon.
Dans le ciné-dancing de l’Aubette, approches, composition pour quatre voix à capella, est mise en espace et diffusée via huit haut-parleurs. Les quatre pistes, qui donnent à entendre les variations harmoniques de la monodie, se multiplient et se superposent. Ces variations vocales illustrent l’épisode du chant des sirènes, mythe fondateur de l’Odyssée, lors duquel Ulysse et son équipée parviennent à résister au pouvoir de séduction du champ des sirènes. Cet épisode s’entend comme une métaphore de l’aliénation et de la domestication de la nature légitimée par le progrès et la modernité, concepts développés par Max Horkheimer et Theodor Adorno dans La dialectique de la raison.
approches est accompagnée d’immersions, pièce pour quatuor de violons et d’altos, écrite et jouée par l’artiste.
Il vaut mieux ne pas être trop nombreux, pour déguster pleinement cette  délicieuse musique.
Né en 1961 à Nice, Céleste Boursier-Mougenot vit et travaille à Sète et expose depuis une dizaine d’années dans les lieux importants de l’art contemporain comme la Barbican Art Gallery à Londres ou la maison rouge – Fondation Antoine de Galbert à Paris. Lauréat de l’International Studio Programm du PS 1 en 1998-99,  Céleste Boursier-Mougenot a également été lauréat du David pour l’art contemporain en 2009 puis nommé pour le Prix Duchamp en 2010. En 2014, une importante exposition intitulée perturbations lui a été consacrée aux Abattoirs à Toulouse.
Céleste Boursier-Mougenot représentera la France à la Biennale de Venise en 2015.
Céleste Boursier-Mougenot et Camille Giertler
Commissariat : Camille Giertler, responsable de l’Aubette 1928
 photos de l’auteur
 

Tatiana Trouvé au MAMCO

Musée d’art moderne et contemporain, Genève
10, rue des Vieux – Grenadiers CH-1205
Genève
www.mamco.ch
Cycle Des histoires sans fin, séquence été 2014, 25 juin — 21 septembre 2014
Tatiana Trouvé
Tatiana Trouvé
Le Mamco présente « The Longest Echo/L’Écho le plus long« , une exposition de Tatiana Trouvé (née en 1968 à Cosenza (Italie), vit et travaille à Paris) qui réunit un ensemble de travaux développés par l’artiste depuis le milieu des années 2000 jusqu’à aujourd’hui. Sans être une rétrospective, L’Écho le plus long propose un vaste choix d’oeuvres qui occupe en totalité les deux premiers étages du musée et qui se concentre sur un ensemble de séries structurant ce travail.
Tatiana Trouvé
La constitution d’un espace en prise avec le développement de phénomènes psychiques est au coeur de l’oeuvre de Tatiana Trouvé. Le Bureau d’Activités Implicites, ou B.A.I., commencé en 1997, et déjà montré au Mamco en 2004, en fut le premier élément. Il s’est développé en différents « Modules », qui sont autant de lieux de travail et de concentration dont on ne sait précisément si la fonction consiste à produire des pensées ou à recenser les traces de l’activité de l’artiste. Cette recherche s’est poursuivie dans la réalisation de Polders, espaces en réduction se greffant à des espaces déjà là : énigmatiques, combinant des éléments faisant référence à des univers hétérogènes (sport, médecine, musique…), les Polders (présentés au 1er étage) portent l’empreinte d’une expérience rêvée.
Tatiana Trouvé, Polder
De semblables échanges entre espaces physiques et psychiques sont aussi à l’oeuvre dans les dessins de Tatiana Trouvé, dans la série Intranquillity, notamment, qui présente des architectures intérieures dont l’étrangeté est immédiatement perceptible : quelque chose, quelqu’un, semble avoir disparu ou tout au moins fait défaut, ce dont témoignent la disposition des lieux et la coexistence des objets. Ici, comme dans ses installations, l’artiste nous engage à croire que la réalité d’un lieu, sa vérité, ne peuvent se réduire à ce que l’on en voit, que dans leurs déploiements (titre d’une autre série de dessins) et dans leurs plis, les espaces ne sont ni stables ni fixes, mais frémissants et flottants. Une large place est d’ailleurs accordée au travail graphique de l’artiste dans cette exposition.
Ainsi sur le Plateau des sculptures, au premier étage du Mamco, une vaste structure métallique inventée par Tatiana Trouvé permet l’exposition d’une quarantaine de dessins de grand format et envahit l’ensemble de l’espace. C’est la première fois qu’un tel dispositif est conçu et montré.
Tout se passe donc comme si, pour Tatiana Trouvé, non seulement les lieux disposaient d’un inconscient, mais aussi comme si l’espace et le temps présents n’étaient guère plus
qu’un fragment d’un espace et d’un temps beaucoup plus étendus.
Ses oeuvres parmi les plus récentes en portent encore directement la marque,
comme 350 points à l’infini (un champ magnétique perturbé où des fils à plomb pointent dans des directions différentes),
Tatiana Trouvé
I Tempi Doppi (qui propose une vision stéréoscopique du temps à travers deux ampoules reliées l’une à l’autre, la première allumée et la seconde éteinte), ou encore I Cento Titoli (une sculpture qui dispose de cent titres, pour cent ans…).
La construction de l’oeuvre de Tatiana Trouvé est comparable à la croissance d’un monde structuré par la redistribution, l’altération, la modification et le redéploiement permanent des éléments qui le composent. Car les forces créatrices de la mémoire sont au coeur de cette oeuvre : mémoire du vécu, des pensées, des projets, des formes…
Pour le Mamco, Tatiana Trouvé a élaboré, en fonction de l’identité architecturale du lieu, un nouveau et ample visage de cet univers en perpétuelle métamorphose.
L’Ombre du jaseur (d’après Feux pâles)
Au quatrième étage l’exposition : L’Ombre du jaseur (d’après Feux pâles), présentée à l’occasion de la rétrospective Philippe Thomas au printemps, est prolongée.
En 1990, Philippe Thomas est invité par le capc Musée d’art contemporain de Bordeaux à concevoir l’exposition Feux pâles. Sous couvert de son agence les ready-made appartiennent à tout le monde, il voit dans l’invitation du musée l’occasion d’élever le principe de fiction développé dans ses travaux précédents à la hauteur de l’institution, lieu neutre d’un savoir scientifique, généralement peu suspecté de partialité.
L’Ombre du jaseur présentée par le Mamco, n’est pas une reprise littérale de l’exposition-oeuvre Feux pâles – proposition aujourd’hui vouée à l’échec – mais se conçoit comme une exposition dans l’ombre de la première.
Dans l’espace consacré aux Collections aux Collections du 3e étage, le Mamco propose un accrochage inédit.
mamco, feux pâles

Sommaire d'août 2014

un livre pour l’été

la saga Maeght par Yoyo Maeght
la Saga Maeght
par Yoyo Maeght

jardin Fondattion Maeght
03 août 2014 : Quelques jours à Marseille
10 août 2014 :
L’Eloge du peu, Lee Ufan à Versailles
24 août 2014 : Peindre l’Amérique à la Fondation de l’Hermitage à Lausanne
29 août 2014 : Magie du paysage russe. Chefs-d’oeuvre de la Galerie nationale Trétiakov, Moscou

Magie du paysage russe. Chefs-d’oeuvre de la Galerie nationale Trétiakov, Moscou

Le Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne accueille un ensemble exceptionnel d’oeuvres en provenance de la Galerie nationale Trétiakov, à Moscou.
Quelque 70 peintures retracent les grandes heures de l’école de paysage russe des années 1855 à 1917, du début du règne d’Alexandre II à la révolution d’Octobre.
Jusqu’au 5 octobre 2014
D’un continent l’autre, alors qu’à la Fondation de l’Hermitage de Lausanne on célèbre les peintres de l’Amérique du 19e siècle, le musée cantonal de Lausanne expose les chefs d’oeuvre du musée Trétiakov de Moscou.
Kontantin Korovine
Si l’apport de l’école russe à la modernité débute pour beaucoup avec l’avant-garde des années 1910, la rupture avec l’art académique se situe dès le milieu du XIXe siècle. Une nouvelle génération d’artistes refuse de se soumettre au diktat de l’Académie impériale des Beaux-Arts à Saint-Pétersbourg. Abandonnant les sujets bibliques et mythologiques, elle part à la découverte des moeurs et des paysages russes, elle revisite son passé dans le contexte fortement politisé de l’affirmation d’une identité nationale, de l’abolition du servage et de la croyance portée par l’intelligentsia d’une contribution décisive à la construction d’une société moderne et démocratique.
Dans ce contexte de profondes mutations, le paysage joue un rôle déterminant. Avec la peinture de genre, c’est lui qui, pour les contemporains, se révèle le meilleur traducteur de l’« âme » et de la « terre » russes. À l’époque de la plus grande expansion territoriale de la Russie, les peintres explorent les mers, les montagnes et les forêts du vaste Empire. Ils observent les cieux, le défilé des saisons de l’aube à la nuit, ils s’attachent à la représentation des coutumes paysannes, des architectures rurales et citadines. Rejetant les paysages italianisants en vogue jusqu’alors, la nouvelle école s’inspire des réalismes historiques (l’école hollandaise du XVIIe siècle) et contemporains (l’école de Düsseldorf, l’école de Barbizon, l’impressionnisme). Ces courants nourrissent stylistiquement une vision de la nature certes réaliste, mais aussi à forte dimension narrative et symbolique.
Grigori Miassoïédov
La peinture de paysage de cette époque présente une mosaïque complexe et frappe par sa diversité, par les fortes individualités artistiques qui la représentent et par le dynamisme de son développement. On y distingue le paysage lyrique ou « paysage d’humeur » (Savrassov, Kaménev, Lévitan, Polénov), les prolongement du paysage romantique (Aïvazovski, Vassiliev, Kouïndji), la tendance naturaliste et documentaire (Chichkine), et enfin la tendance académique (Lagorio, Bogolioubov, Mechtcherski).
Entretenant des liens étroits avec les écrivains de l’âge d’or de la littérature russe (Tchékhov, Tolstoï, Tourgueniev, Dostoïevski), et avec les musiciens du Groupe des Cinq (Rimski-Korsakov, Borodine, Moussorgski), mais aussi avec une nouvelle génération de critiques d’art (Vladimir Stassov), les artistes représentés dans l’exposition sont membres ou entretiennent des liens étroits avec la Société des expositions artistiques ambulantes, instrument de diffusion de leur art auprès d’un plus large public. Les Ambulants organisent des expositions qui s’arrêtent dans les principales villes de l’Empire : outre Saint-Pétersbourg et Moscou, Orel, Kiev, Kharkov, Kichiniov, Odessa, Varsovie, entre autres. Leurs oeuvres sont collectionnées par un nouveau type de mécènes, issus non plus de l’aristocratie, mais de la bourgeoisie d’affaires ou industrielle moscovite, tels Savva Mamontov, qui rassemble autour de lui les artistes dits du Cercle artistique d’Abramtsévo, ou Pavel Trétiakov, le plus grand collectionneur d’art réaliste russe. Trétiakov fonde la première galerie d’art national russe, qu’il offre à la ville de Moscou en 1892.
La Galerie nationale Trétiakov, organisateur de l’exposition à découvrir à Lausanne, est aujourd’hui, avec le Musée d’Etat russe de Saint-Pétersbourg, la plus grande collection d’art russe au monde.
Commissaires de l’exposition : Tatiana Karpova, vice-directrice de la Galerie nationale Trétiakov à Moscou, et Catherine Lepdor, conservatrice en chef au Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne
Quelques thèmes et leurs représentants principaux :
La forêt
Ivan Chichkine
Ivan Chichkine (1832-1898.) est surnommé le « patriarche de la forêt » par ses contemporains. Principal représentant de la tendance objective du réalisme, son art, épique, monumental, résolument optimiste, repose sur une analyse scientifique de la nature. Son langage est clair et précis. Son sujet de prédilection est la forêt de chênes ou les conifères, qui restent toujours verts. Sa saison favorite est l’été, et le moment de la journée qu’il préfère est le midi. Son monde repose sur des valeurs pour lui fondamentales: la terre, le pays natal, le peuple, la splendeur de la vie.
La mer
Ivan Aïvazovski
Figure tutélaire, Ivan Aïvazovski (1817-1900, ) bâtit sa réputation sur sa virtuosité exceptionnelle dans la représentation de la mer, des tempêtes et des naufrages. D’une productivité hors du commun (il a peint près de 6’000 tableaux, le plus souvent monumentaux), il porte à travers tout le XIXe siècle l’héritage du néoclassicisme et du romantisme. La mer est ainsi pour lui à la fois une métaphore du caractère imprévisible des revirements du destin et le symbole d’une puissance qui ne se laisse pas dompter, celle d’un peuple à la conquête de sa liberté.
Le ciel
Isaak Lévitan
Isaak Lévitan (1860-1900,) est un des principaux représentants du paysage lyrique ou « paysage d’humeur ». Proche ami de l’écrivain Anton Tchékhov, ils sont liés par leur appréhension lyrique de la nature, leur vénération de la beauté, du mystère du monde. La peinture de Lévitan, extrêmement construite et statique dans ses formes, nerveuse dans son traitement, résulte d’observations synthétisées en atelier. Son caractère émotif et solennel se traduit par la juxtaposition de larges coups de pinceau et une appréhension par larges surfaces colorées.
Les Nocturnes
Arkhip Kouïndji
Arkhip Kouïndji (1842-1910,), un des peintres les plus originaux de sa génération, est fasciné par la manière dont le nature est transfigurée par l a lumière. On l’a baptisé
l’« adorateur du soleil et de la lune ». Le traitement synthétique des formes, la transformation du volume en silhouette, le renforcement des contrastes de lumière et de couleur, apparentent ses paysages au clair de lune à des panneaux décoratifs ou à des décors de théâtre qui en font un précurseur de l’art nouveau, un compagnon de route des symbolistes.
Le printemps
Alekseï Savraddov
Avant Alekseï Savrassov (1830-1897,), la nature russe n’était pas considérée comme digne d’être représentée. On lui préférait les paysages d’Italie. Savrassov est l’inventeur du « motif » du printemps, non plus saison des émois amoureux, mais métaphore privilégiée du renouveau, des changements politiques et sociétaux tant espérés à l’époque de l’abolition du servage. Ce motif connaîtra après lui une grande fortune, répété en peinture d’Igor Grabar à Mikhaïl Larionov, en musique de la Sniégourotchka – La Demoiselle des neiges – de Nikolaï Rimski-Korsakov au Sacre d’Igor Stravinski.
L’été
Ilia Repine
Ilia Répine (1844-1930,) est le plus connu des peintres ambulants, mouvement dont il est le fer de lance et la vitrine à l’étranger. Son oeuvre a été influencée par l’impressionnisme français durant son séjour à Paris. Fin coloriste, brillant observateur des physionomies, il est amoureux de la vie dans toutes ses manifestations.
Ses scènes champêtres de la vie à la datcha lui vaudront les remontrances de son
ami l’écrivain Lev Tolstoï pour qui l’artiste doit se mettre au service de la société,
oeuvrer à son éducation et contribuer à son élévation morale.
Comme un air de Camille Monet avec ses enfants.
 
L’hiver
Boris Koustodiev
De la génération qui suit celle des premiers peintres ambulants,
Boris Koustodiev (1878-1927,) est un des élèves d’Ilia Répine. Il adhère à l’Union des artistes russes, association moscovite où la peinture acquiert une diversité de couleurs
accrue, et s’affranchit des tons lourds et sombres pour devenir plus aérienne, plus
solaire. Ces peintres, dont les oeuvres résonnent en mode majeur, frappent par
leur vivacité morale, leur regard optimiste sur le monde et leur foi dans l’avenir. Les
oeuvres hivernales de Koustodiev entretiennent de grandes affinités avec l’art des
miniatures laquées de Palekh.
42 artistes sont exposés.
L’exposition est organisée avec le soutien généreux du Consulat honoraire de la
Fédération de Russie à Lausanne, à l’occasion du 200e anniversaire de l’établissement
de relations diplomatiques entre la Russie et la Suisse.
Audio-guide  : En français et anglais, gratuit

CONFÉRENCES À 18H30 entrée libre
Je 4 septembre:
Entre devoir de réalisme et désir de modernité.
La littérature russe à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, par Jean-Philippe Jaccard,
professeur ordinaire de littérature et de civilisation russes à l’Université
de Genève
Je 11 septembre:
Un art nouveau à la redécouverte de la Sainte-Russie;
photographies en Russie, 1840-1914, par Dominique de Font-Réaulx,
conservateur en chef au Louvre, directrice du Musée Eugène-Delacroix
photos et texte courtoisie du musée cantonal des Beaux Arts de Lausanne

Peindre l’Amérique à la Fondation de l'Hermitage à Lausanne

L’ exposition de la Fondation de l’Hermitage à Lausanne : Peindre l’Amérique Les artistes du Nouveau Monde (1830 -1900)  est visible jusqu’au 26 OCTOBRE 2014
 

Edward Lamson HENRY, gardée en retenue 1889     Edward Lamson HENRY, gardée en retenue 1889
Edward Lamson HENRY, gardée en retenue 1889

A l’occasion de son 30ème anniversaire, la Fondation de l’Hermitage présente une exposition exceptionnelle consacrée à la peinture américaine du XIXe siècle. Centrée autour des genres du paysage, du portrait et de la nature morte, cette manifestation réunit un ensemble d’œuvres réalisées entre 1830 et 1900, et pour la plupart présentées pour la première fois en Europe. Encore peu connue du grand public européen, la peinture américaine, dont l’essor fut considérable au XIXe siècle, est présentée au travers de plus de 90 œuvres.

Le paysage est à l’honneur, avec les artistes de la Hudson River School (Thomas Cole, Jasper F. Cropsey, Albert Bierstadt, Frederic E. Church et Thomas Moran) et du mouvement luministe (John Kensett, Fitz Henry Lane).
Aux côtés de plusieurs portraits d’Amérindiens peints par George Catlin, sont également réunis des scènes de la vie quotidienne et des portraits réalisés par Thomas Eakins et Richard C. Woodville.
Enfin, des tableaux de William M. Harnett, John F. Peto et John Haberle illustrent le renouvellement profondément original du genre de la nature morte.
Un magnifique ensemble de photographies regroupant des paysages et des portraits d’Amérindiens complète la présentation.

Thomas Cowperthwait Eakins
Thomas Cowperthwait Eakins

La grande majorité des œuvres provient de musées américains de premier plan (Pennsylvania Academy of the Fine Arts de Philadelphie, National Gallery of Art de Washington, Terra Foundation for American Art de Chicago, Los Angeles County Museum of Art, …), ainsi que d’importants musées européens (Museo Thyssen-Bornemisza à Madrid, Musée d’Orsay et Musée du Quai Branly à Paris, musée cantonal de Lausanne …).

Eastman Johnson, Hirondelles de Grange 1878
Eastman Johnson, Hirondelles de Grange 1878

 En 1763, Benjamin Franklin, l’un des Pères fondateurs des Etats-Unis, énonce clairement l’ordre des priorités de la jeune nation : « Quand nous en aurons fini avec les nécessités de la vie, nous songerons à ce qui l’embellit. » De fait, le projet initial de démocratie autonome américaine n’a pas pris en compte le rôle que l’art pourrait jouer dans une nation naissante. Contrairement à leurs homologues européens, les artistes ne bénéficient ni du mécénat royal ou aristocratique, ni de commande pour des décors d’église dans un pays en majorité protestant. En outre, il faut attendre 1805 pour voir la création du premier établissement destiné à enseigner l’art et à rassembler des oeuvres sur le sol américain : la Pennsylvania Academy of the Fine Arts, fondée à Philadelphie par le peintre Charles Willson Peale (1741- 1827), dont l’autoportrait est présenté. Tout au long du XIXe siècle, les artistes cherchent à s’affranchir du poids des modèles européens et à rendre l’«américanité», l’identité propre à leur pays. Cette quête passe par la recherche de sujets typiquement américains, parmi lesquels la nature grandiose et envoûtante occupe une place centrale dès les années 1830.
Thomas Cole, Vue sur le Schoharie     Thomas Cole, Vue sur le Schoharie
Thomas Cole, Vue sur le Schoharie Thomas Cole, Vue sur le Schoharie

La première génération d’artistes de la Hudson River School peint la nature en exaltant la beauté immaculée des territoires vierges et leur splendeur dramatique. A partir des années 1850, une deuxième génération de peintres de paysage adopte une approche différente, moins topographique, plus attentive aux atmosphères lumineuses. Les oeuvres de ce groupe d’artistes, qu’on appellera plus tard les « luministes », se caractérisent par une perception poétique du paysage, souvent paisible et solitaire. Ils délaissent le sublime et les effets spectaculaires au profit d’un lyrisme tranquille, à travers lequel le peintre exprime ses émotions.
Fitz Henry Lane Boston Harbor, Sunset | Port de Boston au soleil couchant vers 1850-1855 huile sur toile, 60,9 x 99,7 cm Los Angeles County Museum of Art, gift of Jo Ann and Julian Ganz, Jr., in honor of the museum's 25th anniversary © Digital Image Museum Associates / LACMA / Art Resource NY / Scala, Florence
Fitz Henry Lane
Boston Harbor, Sunset | Port de Boston au soleil couchant
vers 1850-1855
huile sur toile, 60,9 x 99,7 cm
Los Angeles County Museum of Art, gift of Jo Ann and Julian Ganz, Jr.,
in honor of the museum’s 25th anniversary
© Digital Image Museum Associates / LACMA / Art Resource NY / Scala,
Florence

De dimensions généralement plus modestes, ces toiles sont peintes dans des tonalités douces qui renforcent leur ambiance intime et contemplative. Leur précision extrême, probablement influencée par la photographie naissante, va de pair avec une facture lisse où les coups de pinceau deviennent presque invisibles. Véritables sujets des tableaux, les modulations de lumière sont rendues avec une infinité de nuances dans des ciels immenses, des brumes diffuses ou des reflets aquatiques. Sous l’oeil des peintres luministes, la nature est désormais apaisée.

Frederic Edwin Church Morning in the Tropics | Matinée sous les tropiques, vers 1858
Frederic Edwin Church Morning in the Tropics | Matinée sous les tropiques, vers 1858

Enraciné dans la tradition picturale hollandaise et anglaise, le portrait connaît un essor considérable en Amérique aux XVIIIe et XIXe siècles. Dans un contexte peu favorable à l’expression artistique, le portrait est, dans un premier temps, une des seules formes d’art permettant aux peintres de vivre de leur talent. La naissance de la jeune nation stimule en effet la réalisation de portraits patriotiques, en particulier ceux des Pères fondateurs. De même, la classe marchande émergente commande une multitude de portraits destinés à orner les intérieurs bourgeois.

On the Veranda | Sur la véranda, 1887 huile sur toile, 51,4 x 66,7 cm Chicago, Terra Foundation for American Art, Daniel J. Terra Collection © Chicago, Terra Foundation for American Art
On the Veranda | Sur la véranda, 1887
huile sur toile, 51,4 x 66,7 cm
Chicago, Terra Foundation for American Art, Daniel J. Terra Collection
© Chicago, Terra Foundation for American Art

Jusqu’au début du XIXe siècle, le portrait laisse toutefois peu de place à l’inventivité et à la créativité de l’artiste. La ressemblance au modèle prime avant toute chose, ce qui n’est pas sans rappeler la démarche rigoureusement naturaliste qu’adoptent les peintres de paysage. Par contre, le choix des sujets permet aux portraitistes d’affirmer leur originalité vis-à-vis des modèles européens. En choisissant de représenter un chef de gang, un cow-boy, un ouvrier ou de riches citadins, ils nous plongent au coeur même de la société américaine.
Louis Comfort Tiffany, le moissonneur, vers 1879-1881
Louis Comfort Tiffany, le moissonneur, vers 1879-1881

Si le paysage joue un rôle essentiel dans la construction du sentiment artistique national, il en va de même pour la peinture de la vie quotidienne, dans tout ce qu’elle a de plus prosaïque. Un des objectifs des artistes est d’affirmer la rupture avec les traditions européennes par la représentation d’activités et de personnages américains : travaux agricoles, commerces, réunions politiques, trappeurs, bateliers ou encore cow-boys. Le choix des artistes de montrer des scènes familières répond aussi au souhait de toucher un public moins élitiste, qui se reconnaît dans ces évocations des réalités ordinaires et qui retrouve dans ces tableaux les valeurs morales qui cimentent la nation.

Thomas Cowperthwait Eakins, Cowboy à la guitare
Thomas Cowperthwait Eakins, Cowboy à la guitare

La peinture de genre ne s’intéresse guère aux aspects plus sordides de la réalité américaine, sans doute parce qu’il n’existait pas de marché pour ces sujets. Quand ils sont représentés, les Noirs sont bien souvent cantonnés dans des rôles de second plan. Le sort misérable des immigrés à New York est lui aussi rarement abordé par les artistes. Quant aux Indiens, de nombreuses peintures détaillent leur mode de vie traditionnel dans des paysages grandioses, mais les bouleversements dramatiques que connait leur société sont passés sous silence.

George Catlin Portrait de Mu-ho-she-kaw (Nuage blanc), Chef des Ioways du Haut- Missouri, vers 1845-1846 huile sur toile, 81 x 65 cm Paris, Musée du quai Branly © musée du quai Branly / Patrick Gries / Bruno Descoings / Scala, Florence
George Catlin
Portrait de Mu-ho-she-kaw (Nuage blanc), Chef des Ioways du Haut-
Missouri, vers 1845-1846
huile sur toile, 81 x 65 cm
Paris, Musée du quai Branly
© musée du quai Branly / Patrick Gries / Bruno Descoings / Scala, Florence

La photographie est adoptée dès son arrivée sur le sol américain en 1840. Dans un pays où la fidélité à la nature est au coeur des préoccupations artistiques, elle apparaît comme le médium idéal pour transcrire la réalité de manière objective. Le portrait est très rapidement popularisé grâce aux nombreux studios qui s’ouvrent dans les villes et aux photographes ambulants qui sillonnent les campagnes. Dans la seconde moitié du siècle, des tentatives de recensement des Indiens sont également menées par le biais du portrait photographique. A partir de la guerre de Sécession, la photographie joue aussi un rôle de premier plan dans la pratique du reportage et du documentaire.

Gardner Two Strikes
Gardner Two Strikes

Tout au long du XIXe siècle, les Etats-Unis acquièrent et intègrent de nouveaux territoires à l’Ouest: la Louisiane en 1803, l’Oregon en 1846, les provinces mexicaines situées au nord du Rio Grande en 1848 ou l’Alaska en 1867. Afin de cartographier ces espaces immenses et d’inventorier leurs ressources, des missions d’exploration sont lancées par le gouvernement et par des entreprises privées. Des peintres, des dessinateurs, et plus tard des photographes y sont associés pour en documenter les découvertes. Albert Bierstadt parcourt ainsi le Colorado, le Wyoming, les Rocheuses, la vallée de Yosemite ou encore l’Alaska. Ses études de paysages lui serviront de points de départ pour des centaines de tableaux, souvent des vues idylliques témoignant des horizons infinis qu’il a pu observer. Thomas Moran participe à la mission d’exploration officielle conduite par

Frederic Edwin Church The Iceberg | L’iceberg, vers 1875
Frederic Edwin Church The Iceberg | L’iceberg, vers 1875

dans la région de Yellowstone en 1871. Ses peintures grandioses, ainsi que les photographies prises par William H. Jackson, marquent le public et plaident en faveur de la protection de ce site, qui deviendra le premier parc national de l’histoire en 1872. En quête de paysages spectaculaires et exotiques, Frederic E. Church et William Bradford vont même dépasser les frontières américaines. Church obtient ainsi un succès phénoménal avec ses paysages des Andes et de la côte du Labrador. Bradford est un des premiers artistes américains à peindre les glaces de l’Arctique, région qui le fascine au point de s’y rendre à de multiples reprises. George Catlin est, quant à lui, célèbre pour les centaines de portraits d’Indiens qu’il a réalisés en observant les tribus lors de ses nombreux voyages d’exploration dans les années 1830. Sa « galerie indienne », une exposition itinérante consacrée à la culture des Indiens, a été présentée à New York en 1837 avant d’être montrée dans les capitales européennes à partir de 1840. Elle offre un précieux témoignage d’une civilisation menacée de disparition.
L’exposition est accompagnée d’un ouvrage richement illustré, avec des textes de William Hauptman, historien de l’art, spécialiste de l’art américain du XIXe siècle et commissaire de l’exposition, ainsi que deux essais sur la photographie, par Corinne Currat et Dominique Hoeltschi, chargées de projets à la Fondation de l’Hermitage. Publié en coédition avec La Bibliothèque des Arts, Lausanne.
Vaut le détour, car pendant longtemps les peintres américains, étaient considérés comme des artistes de province, jusqu’à l’apparition du pop-art

VISITES COMMENTÉES PUBLIQUES
Les jeudis à 18h30 et les dimanches à 15h Prix : CHF 5.- (en plus du billet d’entrée) / gratuit pour les Amis de l’Hermitage Sans réservation, nombre de participants limité

VISITES COMMENTÉES POUR GROUPES PRIVÉS
Des visites peuvent être organisées sur demande pour des groupes privés, en français, allemand ou anglais Prix : CHF 130.- (en plus des billets d’entrée) Maximum 25 personnes par groupe
Renseignements et réservations au +41 (0)21 320 50 01

VISITES COMMENTÉES AVEC EXTRAITS MUSICAUX Di 6 juillet à 11h, sa 30 août à 16h, di 21 septembre à 11h, sa 11 octobre à 16h Découvrez les liens entre peinture et musique, grâce à une visite commentée ponctuée d’extraits musicaux. Prix : CHF 5.- (en plus du billet d’entrée) / gratuit pour les Amis de l’Hermitage Nombre de participants limité Sur réservation au +41 (0)21 320 50 01

CONFÉRENCES Jeudi 11 septembre à 18h30 Il était une fois l’Amérique. Le regard des peintres sur le Nouveau Monde par William Hauptman, historien de l’art, commissaire de l’exposition Jeudi 2 octobre à 18h30 La nostalgie de l’avenir : peindre des trompe-l’oeil dans l’Amérique du XIXe siècle par Jan Blanc, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Genève Prix des conférences : CHF 12.- / CHF 10.- tarif réduit / gratuit pour les Amis de l’Hermitage Sur réservation au +41 (0)21 320 50 01

NUIT DES MUSÉES de Lausanne et Pully Samedi 27 septembre de 14h à 2h du matin De nombreuses animations sont proposées autour de l’exposition : commentaires d’oeuvres, visites spéciales « les yeux fermés », atelier créatif pour les familles, chasse au trésor et balades à la découverte du parc de l’Hermitage, contes et légendes amérindiens, musique et restauration légère à l’américaine dans la cour, ainsi que la traditionnelle braderie de livres d’art, catalogues, cartes postales et affiches d’expositions. Prix : CHF 10.- / gratuit pour les moins de 16 ans Programme détaillé des animations et informations pratiques sur www.nuitdesmusees.ch
Photos courtoisie Fondation de l’Hermitage
quand le logiciel du Monde voudra bien les faire apparaître

L’Eloge du peu, Lee Ufan à Versailles

Ma première rencontre avec les oeuvres de Lee Ufan date de 2004, présentées à la Fondation Fernet Branca, grâce à Jean-Michel Wilmotte, architecte de renommée internationale et grand connaisseur de la culture coréenne, qui a réussi la rénovation et transformation des anciennes usines, en centre d’art contemporain. Dans l’intimité du lieu, elles dégageaient une sérénité contagieuse.
La Fondation présente actuellement et jusqu’au 31 août, les oeuvres d’un ancien élève, puis assistant de Lee Ufan, un compatriote coréen  » Lee Bae »

Lee Ufan, Relatum - Le bâton du géant
Lee Ufan, Relatum – Le bâton du géant

A Versailles, elles tiennent leur promesse. Avec des pierres, du métal et beaucoup de poésie, l’artiste apporte sa vision minimaliste, à la magnificence du parc dessiné par Le Nôtre. Les dix récits illustrés de ce marcheur philosophe, créent de nouvelles visions du monument le plus célèbre du monde.
Dans le château et surtout dans les jardins, les formes sculpturales intenses et silencieuses de l’artiste  se posent au pied de l’Escalier Gabriel, dans la perspective majestueuse dessinée par Le Nôtre ainsi qu’au détour des allées et des mystérieux bosquets, complétant et modifiant pour un temps l’atmosphère des lieux. Toutes entièrement nouvelles et pour certaines aux dimensions inusitées viennent en réponse aux espaces des jardins.
Lee Ufan, Relatum - L’Arche de Versailles
Lee Ufan, Relatum – L’Arche de Versailles

Il n’apprécie pas les oeuvres qui écrasent l’homme par leur présence qui imposent une idée, une théorie. Son prénom, Ufan veut dire soleil en coréen. Maître de l’art Zen, ses oeuvres minimalistes, sont réduites tant au niveau des couleurs, gris, blanc, noir, tant qu’ au niveau des matériaux, l’acier et la roche, le dialogue entre l’être et le temps.
Il est l’un des protagonistes du mouvement artistique intitulé Mono-Ha, terme que l’on peut traduire par “l’École des choses”.
Selon la définition de Lee Ufan, fondateur et théoricien de ce groupe d’artistes japonais, son principe était
“d’utiliser une chose sans rien y ajouter. Ils prenaient et assemblaient des matériaux industriels, des objets quotidiens, des objets naturels, sans les modifier. Cette méthode ne consistait pas à se servir des choses et de l’espace pour réaliser une idée mais est venue à vrai dire de la volonté de faire vivre divers éléments dans les rapports qu’ils entretiennent entre eux ”.
Le Mono-Ha apparaît dans les mêmes années que les tendances européennes ou nord américaines regroupées au sein de l’Arte Povera, Supports-Surfaces ou Land Art, toutes manières de repenser les fondements mêmes de la sculpture ou de la peinture.
A Versailles il invite à un parcours lent, solitaire, en groupe, en famille, comme une sorte de pèlerinage, une sorte de désintoxication en 10 stations, des installations très épurées, en osmose avec l’espace et le temps, invitant à la pause, à la méditation.
le plan des oeuvres
Lee Ufan, Relatum, Earth of the Bridge
Lee Ufan, Relatum, Earth of the Bridge

Elles portent le terme générique de “Relatum”, exprimant que l’œuvre d’art n’est pas une entité indépendante et autonome, mais qu’elle n’existe qu’en relation avec le monde extérieur. Pour Lee Ufan l’acte du sculpteur consiste, en réponse à une évolution de l’art qui après des millénaires d’objets fabriqués par la main de l’homme s’est ouvert à l’objet industriel et au ready made, à critiquer l’hyper productivité du monde contemporain.
Lee Ufan a choisi de lier le faire et le non faire. Il part du principe que
“voir, choisir, emprunter ou déplacer font déjà partie de l’acte de création”. Il relie la nature à la conscience humaine avec une simple plaque de fer en dialogue avec une pierre. Il peut aussi déployer des plaques d’acier mat en une structure linéaire debout ou couchée, dont les ondulations répondent à l’espace investi.
« Cela fait longtemps que je souhaite réaliser une œuvre en forme d’arche comme un arc-en-ciel suspendu à l’horizon. Je suis donc très heureux d’avoir la chance de réaliser ce projet dans les jardins historiques du Château de Versailles. L’œuvre dépassera l’histoire de Versailles ainsi que ma propre histoire. L’espace lui-même s’ouvrira et deviendra un lieu de rencontre avec les spectateurs, une respiration conjointe. Il y a dans ce projet une forme de transcendance, de par le fait même de sa présentation à Versailles. Il ne s’agit pas de poser un objet tout droit sorti de l’atelier, mais de créer un véritable dialogue avec le site. Je pense que l’œuvre doit avoir deux sens. Cette dernière ne doit pas être un objet fermé, mais une porte ouverte. J’utilise souvent la pierre qui représente la nature, et le métal qui est un symbole de la société industrielle. Ils interagissent en fonction de l’espace et créent une relation inévitable dans le lieu. Les œuvres présentées seront principalement composées de pierre et métal. Du petit chemin, au grand jardin, jusqu’aux salons du château, la circulation de l’air dans l’espace offrira au spectateur la sensation que leur cœur palpite ».
C’est en juin 2014 que l’“espace-temps” s’ouvre dans les jardins du château de Versailles. Lee Ufan Extrait d’un entretien de l’artiste avec Philippe Piguet, L’œil #665, Février 2014
Lee Ufan, Relatum, Lames de Vent
Son énorme «Arche» d’acier incarne un vieux rêve d’enfant devant un arc-en-ciel, souvenir du Japon. C’est un immense et fin ruban d’acier bleuté, de 30 mètres de long et 40 tonnes, aux reflets changeant selon la météo, porte ouverte sur la Grande Perspective, jusqu’aux mystérieux bosquets royaux.
Lee Ufan, Relatum - L’ombre des étoiles
Lee Ufan, Relatum – L’ombre des étoiles

Notamment celui de l’Étoile, espace désertique qui abrite « L’Ombre des étoiles », (ma vidéo) une œuvre étrange, un espace minéral de granit blanc, un champ mégalithique éclairé d’une lumière lunaire, auquel Lee Ufan a donné la forme de la constellation du Grand Chariot.

Sur les pelouses il a fait onduler des plaques d’acier, comme des vagues, les lames de vent
Dans l’allée de Flore, deux plaques d’acier posées au sol qui relient, tel un pont, deux grandes roches se faisant face au bout d’un sentier étroit, escorté d’arbres et de buissons proprement alignés.
L’envoûtant bosquet des Bains d’Apollon  qui clôturent le parcours sont un endroit secret et mythique, un paysage de verdure, de bassins et de cascades déferlant de la grotte où le bel Apollon (Louis XIV) trône entouré de ses nymphes, l’artiste a creusé une tombe, d’où une grosse pierre noire figure un hommage à Le Nôtre, le contraste est saisissant.
 
Lee Ufan, Relatum, La Tombe, hommage à Le Nôtre
Lee Ufan, Relatum, La Tombe, hommage à Le Nôtre



Une seule œuvre à l’intérieur du château « un mur de coton »
C’est une invitation à sentir et à voir, avec l’intériorité de chacun et l’infinité du monde.
Jusqu’au 2 novembre
photos de l’auteur
 

La Pyramide des clones

Je recycle une ancienne chronique
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Cela a commencé par une banale blague où je voulais piéger mon petit ami et surtout sa fidélité sur un réseau social. Au fil des jours, mon avatar de princesse africaine, m’attira une multitude d’amis, de prétendants, d’invitations de tous poils. Autant vous dire que le piège tendu je l’ai abandonné par crainte de voir la vérité révélée.
Sans rien produire, n’étant jamais en ligne, n’affichant que ma scolarité imaginaire, sans âge, ni qualité, je me retrouve à la tête au bout de 6 mois de 140 amis inconnus. Je n’ai sollicité personne, ils viennent tous à moi, par ricochet, et effet collatéral, au point que mon avatar, le vrai en crève de jalousie. Le pauvre il se fend de billets emberlificotés sur son blog, qu’il reverse sur sa page, en y ajoutant des photos et des commentaires. Rien n’y fait, il est snobé, ignoré, à peine quelques commentaires d’encouragement ou le tellement significatif, sublimant « j’aime ».
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Moi princesse du rêve et de l’embrouille je me régale et me moque de ma jumelle désappointée. La prenant en pitié j’ai poussé la gentillesse jusqu’à lui souhaiter son anniversaire. La snobe ne m’a pas répondu, elle ignore la chance qu’elle a de m’avoir dans son ombre tel un ange gardien, malgré tout sexué… Peut-être vais-je moi-même lui proposer mes propres amis, si empressés, et lui prodiguer quelques conseils de bonne communication. J’ai bien vu un livre traitant du sujet dans un salon du livre, mais j’ai trouvé le prix trop élevé pour ma bourse de fantôme, aussi j’en ai fait l’impasse. Peut-être vais-je le lui offrir pour son prochain millésime. Si elle prend la mouche, je vais être fâchée avec la moitié de moi-même, cela ne me mènera-t-il pas vers un psy pour schizophrénie ?
Mais elle n’a pas dit son dernier mot, elle est pleine de ressources et ne manque pas d’humour, ni d’amour propre, je crois qu’elle mijote une vengeance de derrière les fagots, car mine de rien, elle en a dans son ciboulot, si méconnu. Les vacances vont lui être propices à la réflexion et à la confection du scénario. S’il réussit je viendrais vous en conter le récit. S’il rate, je vous parlerais du marronnier de saison et de sa question récurrente « où pars-tu en vacances ? » ou encore l’autre formule « tu n’es pas bronzée, n’as-tu pas été en vacances ? » avec les programmes indispensables : comment perdre 10 kilos avant de se mettre en maillot et une analyse des divers régimes et autres conseils qui obstruent ma boîte aux lettres, qu’un charitable anti-spam élimine gracieusement.
Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne sont que pure coïncidence,  sortie de mon imagination, mais l’expérience a été faite.
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Répondre Yossi Malka Yossi Malka 16 juillet 2011 à 21:12 | # J’aime , ce n’est pas une blague… texte adorable
Répondre akimota akimota 08 août 2011 à 21:18 | # J’ai connu un cas semblable, plus sophistiqué (dont la page a disparue depuis). La « vraie » est venue me voir, consternée et dépitée des conséquences inattendues (pas de détails). Je lui ai dit qu’à mon avis, il s’agit de « création » comme un conte ou une nouvelle qui aurait emprunté les voies du web, tant son « jeu » était bien construit, sans avoir arnaqué personne. La seule qui en aie pâti, c’est elle-même, à cause du dédoublement de personnalité, qui prête plus à conséquence que sur Second Life où quand même l’addiction est un grand risque…D’ailleurs, sur second life, je me nomme akimota, pour vous servir… 🙂
Répondre Martine L Martine L 18 juillet 2011 à 08:32 | # C’est vraiment joli ! et de grande pertinence sociologique, Elisabeth ! en quelques lignes bien troussées, vous stigmatisez cet avatar de sentiments, d’amitié, de réel déguisé, qu’est le « roi facebook » ( en dehors de pas mal d’utilités autres et bien réelles, cette fois ) que votre texte donne à réfléchir à quelques uns !
Répondre elisabeth 29 juillet 2011 à 00:14 | # Merci, que vos commentaires sont doux à mon ego, nous pourrions être de vrais amis « hors » facebook !
Répondre a-s a-s 08 août 2011 à 15:42 | # sacrée pistolette !
Répondre  elisabeth 14 novembre 2011 à 14:25 | # Marre de marre, trop « d’amis » trop sollicitée l’usurpatrice, j’ai essayé de la virer, rien n’y fait, sans image, hors connexion, elle est encore demandée, comment s’y prendre pour exterminer ce fantôme du Web ?
 Commentaires (7) elisabeth 24 novembre 2011 à 22:52 | # 350 amis, sans image, sans définition, hors service, hors connexion, elle a encore des demandes et des invitations, non mais je vais la trucider! Est pris qui croyait prendre !
merci pour vos  commentaires