Sommaire du mois de mai 2020

The happy Fisherman Gregory Forstner

En état de choc #georgefloyd – pas de mots.
Bref aperçu de ce tableau – il fait partie d’une série «étude pour un nouvel archétype américain et The happy Fisherman» que j’ai réalisée en vivant à Brooklyn. Il me semblait que peu de gens étaient fans de ces œuvres car
c’était très direct, frontal, l’on ne pouvait échapper aux questions portées par le sujet. Mais je m’en fichais, pour moi c’était très important de passer par là. La peinture a une responsabilité vis-à-vis de ses sujets, c’est un jeu avec des conséquences. Je voulais faire face à notre responsabilité – la société blanche – dans le traitement, intellectuel, culturel, politique, de la diversité de la culture noire américaine aux États-Unis en faisant face aux mensonges installés dans notre inconscient collectif. J’ai essayé de ne pas le faire de manière naïve,
au contraire . De toute évidence, nous, Européens, n’avons aucune leçon à donner. Je suis né au Cameroun et j’en ai toujours été si fier, je ne sais pas pourquoi, mais je me sentais toujours plus fort en sachant ce petit fait. Et en vivant à Brooklyn il y a 10 ans, cela m’a donné la chance de comprendre un peu et de faire face à travers mon travail à des problèmes collectifs. C’est trop de mots inutiles, notre seul moyen, nous les artistes, c’est notre travail, des peintures surtout dans mon cas, pour tenter d’affronter la réalité.

#georgefloyd

Gregory Forstner

22 mai 2020 : Fondation Beyeler
17 mai 2020  : Le Char de la mort, Emmanuel Honegger
14 mai 2020  : Rencontre avec Marie Freudenreich
08 mai 2020 : Circular Flow – De l’économie des inégalités, Gegenwart Kunstmuseum Basel
03 mai 2020 : Céline Cléron, visite d’atelier

Le Char de la mort, Emmanuel Honegger.

Le « Char de la mort » est un livre d’Emmanuel Honegger au Verger éditeur.
Il devait paraître officiellement le 20 mars 2020. Dans les circonstances que nous vivons, (Covid-19) la parution de l’ouvrage, véritable hymne de Théophile Schuler à la République, est reporté au 5 juin en librairie
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige
Merci à Emmanuel Honegger de m’avoir envoyé son livre.


C
‘est la première grande toile que l’on aperçoit lorsque l’on arrive dans
la partie art moderne, à l’Akerhof, au musée Unterlinden.
Intrigante par sa construction pyramidale, un triomphe guerrier, une mort de Sardanapale inversée ? Cela mérite un décryptage et attention.
C’est ce que propose dans son livre Emmanuel Honegger.

Tout le monde connait Gustave Doré ! Théophile Schuler, son contemporain,
né et mort à Strasbourg (1821-1878), n’est pas aussi célèbre…
c’est une véritable injustice. Dessinateur, peintre romantique et graveur, Schuler illustra notamment Jules Verne, Victor Hugo et Erckmann-Chatrian.
Emmanuel Honegger

Le Char de la mort est une immense peinture de 3.5 mètres de long présentée au musée Unterlinden de Colmar.
Ce tableau, peint au milieu du XIXe siècle, coupe véritablement le souffle, un peu comme le fait Le Radeau de la Méduse de Géricault ou La Liberté guidant le peuple de Delacroix.

Mais outre son aspect grandiose, l’œuvre se révèle une véritable profession de foi… politique ! En raison de la censure, sévère à l’époque, le peintre fut obligé de ruser : Il camoufla donc sa dénonciation de l’ancien régime, comme son immense désir de République. Pour cela, ce fils de pasteur mêla de multiples allusions religieuses aux symboles politiques qu’il choisit…

Aller à l’oeuvre pour observer tous les détails ici
en promenant votre souris sur le tableau
cela vous donnera encore plus l’envie de vous plonger dans le livre
et son analyse

Le livre d’Emmanuel Honegger se propose de décrypter les nombreux messages cachés « entre les lignes » de la fresque. Par exemple, on peut avancer que l’ange de la mort se tient en réalité debout sur le cercueil de Napoléon, ou découvrir pourquoi Jonas, personnage biblique resté trois jours dans le ventre d’une baleine, figure parmi les personnages représentés…

Vous découvrirez pourquoi ce tableau, peint après la révolution de juin 1848 qui fit 5500 morts à Paris, est un cri en faveur de la République et une charge impitoyable contre l’ancien régime.

Le peintre fut obligé de livrer son message sous forme d’énigmes pour parer à la virulente censure de Napoléon III.

L’enquête se révèle aussi passionnante qu’un bon roman policier…

La crise du milieu du 19e siècle et notamment la Révolution de 1848 marquèrent profondément l’esprit romantique de certains artistes. Tel fut le cas de Théophile Schuler, peintre originaire de Strasbourg, élève de Gabriel-Christophe Guérin à Strasbourg, à Paris de Michel-Martin Drolling de 1839 à 1843 puis du peintre d’histoire Paul Delaroche de 1843 à 1848.
Le char de la Mort daté de 1848 exorcise le tumulte des évènements qui secouent l’Europe cette année-là. Inspiré autant par les Danses macabres d’Holbein que par le goût romantique pour l’ésotérisme et l’au-delà, Schuler conçoit une composition audacieuse d’une grande richesse iconographique.

Sur un char mené par quinze chevaux réduits à l’état de squelettes chevauchant dans un paysage désolé de cimetière aux tombes béantes, la Mort emporte sur son passage tous les hommes, qu’importe leur condition telle la figure du roi tentant vainement de retenir sa couronne. Les arts ne sont pas épargnés, évoqués à la fois par leurs personnifications féminines ainsi que par la pierre tombale portant, au centre de la composition, le nom du peintre.

Cette oeuvre, s’aborde aussi comme un livre d’histoire. Surchargée de symboles politiques et religieux, il a fallu deux années de travail à l’auteur pour en décrypter les messages cachés. La censure sous le second Empire avait amené Théophile Schuler à « écrire entre les lignes ».
Faire revivre sa pensée républicaine est le résultat d’une enquête minutieuse avec des rebondissements et doubles pistes dignes d’un roman policier.
Préface de Rémy Valléjo, frère dominicain, et postface de l’historien
Georges Bischoff.

NB : Le Meiselocker (charmeur de mésange), statue de la fontaine de la place Saint Etienne à Strasbourg, présente sur son socle le portrait de Théophile Schuler (et, de l’autre côté, celui de Daniel Arnold, l’auteur de la première pièce de théâtre écrite en Alsacien : Le Pfingstmontag traduite en 2014 par Roger Siffer et Suzanne Mayer, que Schuler avait illustrée.)


Emmanuel Honegger

Emmanuel Honegger présente Le Char de la mort et le travail du peintre Théophile Schuler à la salle blanche de la librairie Kléber, à Strasbourg, interviewé par Walter KIWIOR, grand spécialiste en peinture alsatique.
vidéo ici

Auteur et dessinateur, Emmanuel Honegger est né en 1956 à Paris.

Il vit et travaille à Haguenau, dans le Bas-Rhin.
J’ai publié sur mon blog, l‘article d’Emmanuel Honegger, sur David Hockney
après une discussion sur Facebook.

– Diplômé de l’École des Arts décoratifs de Strasbourg, promotion 1979.
– Président des Amis de l’œuvre et de la pensée de Georges Migot, peintre et compositeur.
– Vice-président des Amis du compositeur Jean-Jacques Werner.
– Vice-président de l’Académie rhénane.
Ancien vice-président de la SAAMS (Société des Amis des Arts et des Musées de Strasbourg)
– Ancien président de la commission Théophile Schuler de la SAAMS, récompensant des artistes de moins de 35 ans vivant et travaillant en Alsace.
Site d’Emmanuel Honneger

Rencontre avec Marie Freudenreich

Marie Freudenreich née à Colmar en 1975
sculpteuse, barbouilleuse.

C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Parcours
Ecole Nationale des Beaux-Arts de Nancy (1995 à 1998), D.N.A.P.
– Art Student’s League of New York (1998 à 2003), Certificate of Completion in Fine Arts Sculpture
– atelier à Motoco depuis 2013

photo Robert Cahen

Un monde qui tient avec du scotch.
Comme si l’image que nous percevons comme la
« réalité » n’était qu’un décor de carton, prêt à s’envoler au premier coup de vent.
Une illusion d’optique qui cache à peine, comme une jupe trop courte, le vide qui nous entoure : le cosmos immense et noir, l’éternité de mort qui encadre nos vies.
La fragilité de tout ce que nous connaissons.
Quand deux couleurs sont juxtaposées, elles sont vraiment bord à bord. Il n’y a pas de chevauchement, aucune marge de sécurité.
Si on les écartait d’un demi-millimètre, on découvrirait l’abîme caché derrière.
C’est un peu cela, mes peintures.
Marie Freudenreich

Comment définirais-tu ta peinture ?
Peindre, c’est un peu comme apprendre la mécanique. Démonter la réalité (ou l’illusion) étaler les pièces
devant soi, essayer en se grattant la tête de
comprendre comment ça s’articule. Ensuite remonter tout ça.
La plupart du temps on se trompe, on abîme une pièce ou on la remonte à l’envers. Je tente de faire de chouettes erreurs. Après tout c’est la panne qui révèle le mécanisme.

Quand travailles-tu ?
Plutôt en fin d’après-midi, le soir, la nuit, je n’ai pas d’horaire défini.

A quel endroit, maison, atelier ?
Je travaille à Motoco, dans mon atelier, avant ça je travaillais chez moi.

J’ai réessayé pendant le confinement de travailler chez moi, sans y parvenir.

photo Robert Cahen

Un rite pour te mettre au travail ?
J’ai souvent besoin de plusieurs heures pour me vider la tête, épuiser en quelque sorte la partie de moi qui s’éparpille en tracas divers, faire baisser le niveau de tension nerveuse avant de pouvoir démarrer. C’est probablement pour ça que je commence souvent ma journée de travail à l’heure où d’autres

la finissent. Mais pas de rituel précis

Quelle est ta technique ?
Récemment, huile sur contreplaqué, huile sur carton et tempera à l’oeuf sur papier. Sculpture sur bois aussi et installation.
pendant ma formation, j’ai fait beaucoup de sculpture sur pierre et de la gravure
(eau forte)

Huile sur bois

L’ambiance, musique, silence, intérieur, extérieur ?
En intérieur avec de la musique, sans perturbations.

J’ai besoin de me sentir seule au monde, comme au fond d’une grotte,
et plongée dans la musique, pouvoir chanter en travaillant

Qui sont tes maîtres ?
Fra Angelico, Joseph Albers, Jacob Laurence, Mark Rothko

Zut il n’y a que des mecs
Louise Bourgeois, Agnès Martin, Frida Kahlo

Quelles sont tes références littéraires ?
« Interaction of Color » Josef Albers

J’ai aussi un gros faible pour l’écriture des dramaturges américains, Eugene O’Neill : « Long days’s journey into night »
Tennessee Williams :  » A street car named Desire »
Ce qui me touche, c’est leur art de dissimuler le drame qui sous-tend la pièce et fait craquer les coutures des personnages entre les lignes des dialogues les plus triviaux.
Rien de ce qui est important n’est jamais énoncé, et pourtant tout se dessine, petit à petit, dans les fissures du récit.
J’aime tellement l’écriture de ces pièces, que je n’éprouve pas le besoin de les voir mises en  scène, les lire me bouleverse.

Que devient ton travail pendant le confinement, est-il une source de création et de recherches plastiques ?
Le confinement n’a pas eu d’effet bénéfique sur ma créativité.

J’avais un projet « spécial confinement » mais ça n’a pas du tout marché.

Que cherches-tu à exprimer dans ton travail, qui ne serait pas possible avec des mots ?
Que dire ..

Tout sauf le titre ?
Les mots capables de dire, sans doute, les mêmes choses qu’une oeuvre d’art plastique sont les mots des poètes. Pourtant malgré l’immense respect que j’ai pour la poésie, je ne suis pas sûre qu’elle ait vocation à supplanter toutes les autres formes d’expression, et surtout, je ne comprends pas en quoi ce serait un progrès.
Je ne ressens pas cette supposée supériorité du verbe.
L’idéal pour moi, serait qu’une oeuvre permette de transporter une idée, une émotion, une interrogation, une intuition, une image mentale ou peu importe sous forme graphique (ou volumique), directement du cerveau de l’artiste à celui du regardeur, via ses yeux, sans passer par le laminoir ou la moulinette de la verbalisation, pire encore, de la rationalisation.

Comment définirais-tu ton travail ?
C’est une espèce de chemin que j’emprunte sans connaître et sans vouloir connaître ma destination.

Ce n’est que quand une étape (comme l’application d’une couleur) est achevée que je décide de la suivante, comme un marcheur qui déciderait à chaque croisement de la direction à emprunter.
J’ai répondu un peu à côté de la question, parce que je ne sais pas définir mon travail. Mais il semble que si je savais le définir, je serais incapable de le poursuivre. Sa définition serait comme son rapport  d’autopsie.

Peins-tu des autoportraits ?
On dit que chaque oeuvre est un portrait de son auteur.
Des autoportraits de ma tête, ça m’est arrivé, mais très peu, mais quand je peins une table ou un bol, c’est aussi une sorte d’autoportrait.
Cela dit, j’aime bien les autoportraits des autres, surtout quand ils révèlent un trouble, comme ceux de Schoenberg.
J’aime aussi ceux, nombreux, où on sent de la méfiance, quand l’artiste se regarde d’un air de dire :
« toi mon coco, je te connais trop bien pour te faire confiance »

Motoco ? Depuis ?
J’ai eu la chance in extremis de pouvoir intégrer Motoco dès le démarrage, en 2013. Mischa Schaub m’avait attribué le tout dernier espace disponible à l’époque.

A modifié ta manière de travailler de vivre ?
J’ai mis longtemps à arriver à vraiment travailler à Motoco, à y retrouver le degré de concentration dont j’ai besoin, et qui peut aujourd’hui encore être facilement compromis, par l’absence de séparation phonique entre les ateliers, la chaleur étouffante en été, le froid en hiver.

photo Robert Cahen

Motoco est-il un apport pour toi ?
Motoco m’a apporté énormément en terme de vie sociale, et même d’existence sociale. Pouvoir échanger avec les autres artistes du lieu est infiniment précieux.
Ma présence à Motoco m’a aussi permis de rencontrer un public, qui ignorait mon existence et mon travail jusque là.

Pour terminer, peut-on revenir sur l’exposition au forum de St Louis en 2012
A ce moment là, je pensais que c’était un appel, solitaire, tu voulais convier les gens à ta table, muette, tu t’exprimais par ton travail.
La table exposée à Saint-Louis, je crois qu’elle date de 2005. Je l’ai mise en œuvre 5 fois à ce jour. C’est une idée qui m’est venue comme ça, toute faite et qui ne m’a plus lâchée, même si je ne la comprenais pas.

Elle a longtemps été sans titre.
Tout ce que je savais en dire est que c’était une pièce importante pour moi, d’où son titre transitoire « wie ich tisch ».
Elle a maintenant je crois son titre définitif: « Tableau ».

Dans cette vidéo de l’exposition au forum de St Louis de 2012,
on peut constater que Marie est dans la continuité de son travail et de son maître Josef Albers

Expositions
– CORK Gallery, Lincoln Center New York, 2002 (Nessa Cohen memorial Grant winners show)
– CORK Gallery, Lincoln Center New York, 2004 (idem)
– « Liquid Memories » (exposition personnelle), 2006, association culturelle :
à table !, Boulogne-sur-Mer conjointement à cette exposition,
publication d’ un livret de dessins intitulé :
« my life is as empty as a room full of boxes »
– « (é)mouvantes couleurs (vidéo)» en duo avec Robert Cahen, 2012, forum de l’ Hôtel de ville de Saint-Louis
– « archéologies mentales » en duo avec Eric Smolinski, hiver 2013-2014,
« Mulhouse Jeune Art Contemporain »
– REGIONALE 14 : « Noli Me Tangere » (group show), E-WERK Freiburg
« à la croisée des chemins potentiels » (group show), FABRIK culture, Hégenheim
– Janvier 2017 : « ÉDEN », galerie Jean-François Kaiser, Strasbourg
– Février-Mars 2018 : « Et, toujours, ils tiennent le monde / Désirer un coin de soi-même inconnu « , LE GRANIT et la Cantine d’art contemporain, Belfort
Régionale 20, « les chemins du rêve » Fabrikculture Hégenheim 2019/20

crédit photos :
Robert cahen 1,2,3,8
Marie Freudenreich 6,7
Elisabeth Itti 4,5,8 + 1 vidéo

Céline Cléron, visite d’atelier

La Fondation Fernet-Branca, nous convie, par l’intermédiaire de son directeur
Pierre Jean Sugier  pour une nouvelle visite d’atelier.
Place à l’artiste Céline Cléron, qui nous fait
découvrir son univers artistique (vidéo)

Vous avez pu la découvrir, en 2018, dans l’exposition
« l’impermanence » de la Fondation Fernet Branca, en compagnie de
Philippe Lepeut, de Léa Barbazanges  de MARIE DENIS et
STEPHANE GUIRAN
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Depuis plus de 15 ans, Céline Cléron mène une production artistique dans le champ de l’objet et de la sculpture, réunissant une multiplicité de matériaux et de supports : verre, tissu, cire d’abeille, ballons, fossiles, bois, porcelaine, dessin, photographie, vidéo…

Céline Cléron, une minute de latitude

Céline Cléron créé des œuvres hybrides, inspirées par les objets du quotidien et leur force d’évocation, mais également par le passé, l’histoire de l’art et l’archéologie, les encyclopédies, les musées, les mythologies et les cultures anciennes, les sciences. Les objets qui retiennent son attention ont en commun le fruit de phénomènes naturels ou le produit du travail de l’artisan.

                                              L’horizon des événements
Le plus souvent, l’artiste travaille en collaboration avec des artisans pour réactiver des techniques et des gestuelles en voie de disparition.
Elle s’appuie ainsi sur les compétences d’un souffleur de verre, d’une costumière, d’un ébéniste, d’un taxidermiste, d’un apiculteur…

                       Céline Cléron, Conseil de révision

Ces « savoirs faire » précis côtoient dans son travail un certain « laisser-faire » qui consiste à convoquer des accidents, des hasards, que les processus techniques engagés vont produire en évoluant. Le hasard et l’accident sont au cœur de sa démarche, ses pièces étant souvent complétées par l’œuvre de la nature ou de l’animal, figure également très importante dans l’ensemble de son travail. La notion de temps et plus singulièrement de temps arrêté ou suspendu, est également récurrente dans sa démarche.

                                              Céline CLÉRON
                                              Saules Pleureurs « Bigoudis »

Chez Céline Cléron, le rapport au souvenir comme au jeu se tisse dans le détournement, selon une tension persistante entre ce qui est figé et ce qui est en mouvement, entre permanence et impermanence, origines et évolution, fondamentaux et inventions. Les objets présents dans l’environnement qui entoure l’artiste mais aussi les images évoquées par sa mémoire, la corrélation entre forme et dénomination génèrent des analogies, des glissements sémantiques et visuels, qui se reflètent à travers son œuvre.

En cette période de confinement, elle s’est retournée vers le dessin sur sable,
pratique amorcée il y a un ou deux ans, qui correspond bien à ce moment
où tout est en suspend. C’est un travail très lent et méditatif.
Chaque vase en verre soufflé est rempli de différentes couches de sable
qui tentent de fixer l’image d’un regard, d’un visage, inspiré des portraits
du Fayoum.
Elle était en train de tourner un film, sur la déambulation d’un chien loup
dans un cimetière pour chiens, lorsque la pandémie s’est déclarée.
Ce film sera visible dans une prochaine exposition à Marseille.

Céline CLÉRON Née en 1976 à Poitiers  Vit et travaille à Paris www.celinecleron.com
Représentée par la Galerie Papillon, Paris

FORMATION
2000 Diplômée de l’École des Beaux-arts d’Angers, (DNSEP)
1998 Diplômée de l’École des Beaux-arts de Poitiers, (DNAP)

Elle a à son actif de nombreuses expositions personnelles

Sommaire du mois d’avril 2020

Le confinement est en train de modifier les modes de « consommation » de la culture, avec une mise à disposition de contenus inédits sur la toile dont les ex-visiteurs sont très friands. Plus que tout, la culture est le socle commun de notre humanité durant ces temps difficiles. D’où l’intérêt d’une réflexion poussée dans notre communauté.

Les différences entre le réel et le virtuel ?
Le coeur  palpite à l’idée de pénétrer dans un musée. Les sens. L’odeur. Le parquet qui craque. Un rayon de lumière sur la toile. Le toucher de la pierre des escaliers. L’envie d’embrasser le Scribe. L’émotion. En rêver sur le chemin du retour.

Pourquoi se déplacer pour voir les oeuvres, puisqu’on peut les voir aussi bien sur un écran ?
Le virtuel n’est pas opposé à la rêverie poétique. Autant la visite réelle laisse une trace dans la mémoire, celle virtuelle permet d’y revenir. C’est pourquoi personnellement j’aime en plus prendre des photos, afin de me replonger dans l’ambiance et de retrouver les détails admirés.

Une visite réelle se compose de trois éléments :
– les oeuvres
– un lieu
– une durée
Le musée est un lieu que l’on parcourt physiquement, une temporalité qui s’étale dans la durée, à l’opposé du zapping du net. Le virtuel est un substitut,
considéré comme une introduction à la visite réelle, il ne rend que très rarement compte du lieu, de la vision exacte de l’oeuvre, de la dimension, des couleurs.
Rien n’est plus triste qu’un musée fermé.
Grand merci à tous ces musées et artistes qui nous permettent des visites virtuelles
et vive le déconfinement

La Fondation Beyeler rouvre ses portes le lundi 11 mai 2020.

Les expositions «Edward Hopper» et «Voir le silence – Images de quiétude» sont prolongées jusqu’au 26 juillet, l’exposition «Goya» est reportée.

25 avril 2020 : Van Eyck. Une Révolution Optique
22 avril 2020 : À La Rencontre de Böcklin
19 avril 2020 : Pascal Henri Poirot
17 avril 2020 : Léa Barbazanges
12 avril 2020 : Joyeuses Pâques
08 avril 2020 : Fondation Fernet Branca
06 avril 2020 :  TINGUELY @ HOME

Pascal Henri Poirot,

Pascal Henri Poirot, la Fonte 2019
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Aujourd’hui je vous emmène à la rencontre de Pascal Poirot, peintre, sculpteur, chargé de cours à la fac et aux Arts-Deco, maître du paysage, comme de l’architecture, je vous ai déjà présenté son livre,
« [EN]QUETE DE PEINTURE  qui est tout à fait imparable. », bilingue, français, anglais, enrichi par les textes de Tiphaine Laroque, entre autres, des photos de Florian Tiedje.

Dans une vidéo de France 3, il se présente.

J’emprunte un extrait de Roland Recht qui parle de ses canapés

Les motifs de Canapés se réfèrent explicitement aux « drôleries » de l’art médiéval que l’oeil ne découvre que progressivement dans les marges des manuscrits, ou plus exactement aux « grotesques » de l’Antiquité et de la Renaissance. Dans les Grotesques, tout comme chez Poirot, les figures sont ordonnées à partir d’un principe de symétrie qui les transmue en motifs. Mais alors que dans les grotesques, le peintre crée de toutes pièces des créatures monstrueuses, mi-homme, mi-animal, chez Poirot, c’est le couple « étalé » dans la figure érotique qui devient une créature monstrueuse

et un autre de

(…)…Par leur insistance répétitive et leur fixité, les canapés apparaissent comme un souvenir-écran, qui à la fois voile et dévoile le travail de la mémoire et fige en une image un précipité de souvenirs. Objet de ravissement et de fascination qui surgit là où la mémoire s’est perdue.(…)
Marie Pesenti-Irrman

Plusieurs thèmes bibliques sont abordés et illustrés par les tableaux de
Pascal Henri Poirot. Ils sont porteurs d’une grande richesse symbolique. Le rapport à l’Écriture a toujours été essentiel pour le protestantisme tant dans l’étude des textes bibliques que, dans la force d’extraits de la bible, mis en évidence sur les murs des temples. La paroisse  d’Abreschviller avait
demandé à l’artiste de faire apparaître cette caractéristique.

                                            La Tour de Babelle
Tous les tableaux sont réalisés au pigment à l’œuf sur bois, sauf celui représentant le temple d’Abreschviller, peint sur des collages sur bois.

Dans son « atelier perché »  de Neuve-Eglise en AlsacePascal Henri Poirot, l'Atelier Perché il prend le temps de peindre. Ses paysages de montagnes sont vides de tout personnage, un peu surréalistes, avec un banc de-ci de-là, une échelle, ou encore ses cabanes, souvenir des coins parcourus et photographiés depuis des décennies.  Pascal-Henri Poirot est un artiste esthète, un philosophe, pour lequel Michel Serre est une référence, pour se mettre en phase avec la nature. Ce livre l’inspire sur le temps, les déséquilibres graves qui adviendront, des dangers que nous courons. Il a choisi un extrait :
le « Contrat Naturel » un autre rapport à la nature, un rapport respectueux. C’est une lecture prémonitoire d’un livre qui a 30 ans,
annonciateur d’un autre mode de vie, d’un autre monde, que nous
serons bien obligé d’adopter.

Ses souvenirs d’enfance, la salle à manger des grands parents
ornée de  l’Angelus de Millet, la vie paysanne, font partie de ses thèmes,
qu’il transpose jusqu’en Australie.
Cela correspond aux mutations actuelles du mode de vie,
aux bouleversements.
Paysage insolite, qu’il mélange avec ses récurrentes échelles.

Nés quelquefois au hasard des bigarrures colorées du mobilier, végétaux personnages, monstres et animaux semblent issus d’herbiers ou d’ouvrages ethnologiques et érotiques. Les canapés déserts sont d’autant plus troublants qu’ils éveillent le souvenir d’une musique de chuchotements, de rires lointains et de petites cuillères que l’on tourne dans une tasse de thé.

Le méticuleux contrecollage des papiers froissés et préparés par toute une alchimie culinaire à un vieillissement prématuré, participe à cette sollicitation de la mémoire.
Evelyne Loux

Ses montres sont-ils prémonitoires ?
Tortue géante ou pangolin aux couleurs rassurantes sous un fabuleux
paysage de science fiction ?

Les paysages de Pascal Poirot sont souvent dépeuplés, dénudés.
Le peintre privilégie l’hiver : les blanchiments
précoces du paysage,
la première couche de
neige, quasi-transparente encore, à travers laquelle
le nervurage du sol commence à se lire, lorsque se développe une belle
gamme de gris comme sur
quelque gravure au burin. L’hiver passant, l’ossature
du paysage se dessine bien davantage encore, toute la végétation basse est aplatie ou morte : ne restent plus que les lignes-forces.Avec les hauteurs vosgiennes, le
peintre a tout son content : il parcourt le « pays vain » par excellence.
François Pétry

Une friandise pour terminer

voici à quoi nous allons ressembler à la sortie du confinement

Différentes techniques donnent lieu à des séries récurrentes de peintures autour des objets, canapés, architectures, peintures à l’huile de
paysages sur le thème du mythe et de la sanctuarisation.

PARCOURS
De nombreuses expositions dans des lieux culturels et galeries, foire,
il est présent dans des collections et musées en France ,Suisse,
Allemagne, Australie.

Léa Barbazanges

La Fondation Fernet-Branca, propose une nouvelle visite d’atelier.
place à l’artiste Léa Bargazanges, qui nous fait découvrir son univers
artistique !
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Cliquez sur le lien pour visionner

Les sculptures et installations de Léa Barbazanges sont délicates, raffinées, presque flottantes. Le choix de la matière est au cœur de sa réflexion : des matériaux naturels, bruts, sont choisis pour leur beauté.
La compréhension des propriétés des matériaux et leur capacité métamorphique, passionnent autant qu’elles représentent un défi pour l’artiste.


Léa Barbazanges met en espace des cristaux translucides, brillants, au graphisme étonnant. Ils sont constitués de minéraux envahissant des surfaces planes, comme de l’eau qui, à une certaine température, prend une forme cristalline. Le dessin est à la fois organique et géométrique, prédéterminé par sa nature cristalline, qui se caractérise par une matière ordonnée au niveau des atomes. C’est cette organisation de la matière qui explique la réflexion particulière de la lumière.

Dans le triptyque « Magnolia macrophylla – les masques – » on peut distinguer au sein de l’aluminium les nervures d’une feuille d’arbre grandeur nature dans ses moindres détails. C’est en collaboration avec H.H. Services et notamment avec Isaak Rensing, et ses outils de tôlier formeur que Léa Barbazanges a pu imprimer le graphisme du végétal dans du métal. Dans ce travail à quatre mains l’émerveillement apparaît en se rapprochant, quand on découvre la délicatesse du dessin anthropomorphe. En effet les feuilles ont été perforées par des insectes de façon quasi symétrique. Sa forme est simple, fascinante, concrète.

Finalement, les œuvres de Léa Barbazanges nous montrent ce que la nature nous cache ou que nous ne savons pas voir dans un changement constant. Elle nous montre la beauté de cette transformation qui participe à notre enchantement et notre propre construction.

Léa Barbazanges a exposé à la Fondation lors de l’exposition « L’impermanence » avec également Céline Cleron, Marie Denis, Stephane Guiran et Philippe Lepeut du 26 mai 2018 jusqu’au 30 septembre 2018.

Sur France culture

Fondation Fernet Branca

Communiqué de la Fondation Fernet Branca

C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

« Dans le cadre de la situation actuelle de pandémie du Coronavirus, notre responsabilité est d’assurer la sécurité et le bien-être de nos visiteurs et de l’équipe de la Fondation. En conformité avec les directives gouvernementales, nous avons pris la décision de fermer la Fondation Fernet-Branca.

Bien entendu nous ne pouvons pas prédire la durée de la fermeture. Cependant, nous vous tiendrons informés et nous restons à votre disposition par mail pour toute information.

Dans cette attente, nous vous proposons des
visites d’ateliers d’artistes (cliquez ici) que nous diffusons régulièrement pour le plaisir des yeux et du savoir.
La Fondation Fernet Branca, vous propose de revenir sur certaines expositions passées, de les visiter virtuellement :

Expositions 5 femmes : l’engagement poétique

Exposition David Nash, Nature to Nature

Exposition Sens contresens 

Exposition David Brolliet

HISTOIRE DE LA FONDATION

La Distillerie de Fernet-Branca

L’histoire de cette distillerie ludovicienne commence à Bâle, le 22 juillet 1907, date à laquelle l’entreprise de construction Broggi et Appiani, « entrepreneurs de travaux en maçonnerie et ciment », dépose une demande d’autorisation de bâtir au maire de Saint-Louis pour le compte de la famille Branca de Milan, selon les plans de l’architecte milanais G. Merlini.

Ce permis est accordé le 25 juillet par le maire Jules Tilger.


Un impressionnant bâtiment d’une longueur de 50 mètres sera construit sur un terrain qui longe la voie ferrée, sis 2 rue du Ballon, où l’activité de distillerie débute en 1909 et produit un digestif aux plantes amères appelé
« Fernet Branca » : du nom de son inventeur, le Dr Fernet, médecin et herboriste, et Branca, propriétaires de la fabrique.
Le Dr Fernet a fabriqué une poudre et Bernardino Branca l’a transformée en liqueur.

Dans les caves du bâtiment sont installés des fûts de chêne géants destinés au vieillissement de la liqueur, créés sur place par l’artisan tonnelier strasbourgeois Rodolphe Fruhinsholz.
La distillerie de Saint-Louis produira en moyenne 300 000 bouteilles par an.

Le bâtiment est surplombé d’un aigle en cuivre, emblème de la marque Fernet-Branca, réalisé pour dominer le pavillon de cette entreprise à l’exposition internationale de Milan en 1906.
A la demande de Jean Ueberschlag, député-maire de Saint-Louis, le préfet de la Région Alsace, par arrêté du 04 juillet 1996, a inscrit sur l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, la façade ainsi que l’aigle et le globe qui la surmontent.

Le 22 juillet 2000, la production est définitivement arrêtée à Saint-Louis.

De la distillerie Fernet-Branca à un lieu de diffusion d’art contemporain

L’idée est née en février 2003, lors de la visite des lieux par Jean Ueberschlag, député-maire, et Jean-Michel Wilmotte, architecte, à l’occasion de la mission confiée par le Conseil Municipal de Saint-Louis au Cabinet Wilmotte chargé de définir un nouveau projet urbain pour Saint-Louis.

Fondation Fernet-Branca
2, rue du Ballon
68300 Saint-Louis/Alsace
T +33 3 89 69 10 77

Président :  Jean Ueberschlag
Directeur :  Pierre-Jean Sugier

Horaires d’ouverture :
du mercredi au dimanche
de 13 heures à 18 heures

Sommaire du mois de mars 2020

Les expositions et foires prévues pour les mois de mars et avril sont reportées pour la plupart au mois de septembre
La plupart des sites de musées proposent des visites en ligne.

Magritte le Baiser
précurseur du Covid-19 ?

30 mars 2020 : 1518, LA FIÈVRE DE LA DANSE
20 mars 2020 : Coronavirus #Mulhouse Resiste
19 mars 2020 : Bernard Fischbach
13 mars 2020 :  La Fiancée Du Vent – Oscar Kokoschka – Vienne 1900
06 mars 2020 : Amuse-Bouche. Le Goût De L’art.
04 mars 2020 : Karin Kneffel Au Musée Frieder Burda
03 mars 2020 : Jane Evelyn Atwood À La Filature

1518, LA FIÈVRE DE LA DANSE

Voici une « épidémie » qui avait atteint notre région au 16 e siècle
Je fais remonter mon article

Au Musée de l’oeuvre Notre Dame/Arts du Moyen Age
de Strasbourg, jusqu’au 24 FÉVRIER 2019

Albrecht Dürer, « Couples dansants chutant dans une rivière en châtiment de leur attitude irrespectueuse lors de la Fête Dieu », gravure tirée de Hartmann Schedel, Chronique de Nuremberg, Nuremberg, Anton Koberger, 1493, folio CCXVII recto. Strasbourg, Cabinet des Estampes et des Dessins
Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

En juillet 1518, des dizaines de personnes se mettent
soudainement à danser dans les rues de Strasbourg. Hommes
ou femmes, rien ne semble pouvoir les arrêter.
Cette « épidémie », qui s’étend sur plusieurs semaines, ébranle
la communauté strasbourgeoise et frappe les esprits au point
d’être consignée par de nombreux chroniqueurs de l’histoire
municipale du XVIe au XXe siècle.

. Retable de la Crucifixion avec saint Guy et saint Valentin, vue d’ensemble et détail de la console de saint Guy (Sankt Vitus), Chapelle Saint-Materne, Cathédrale de Cologne.
Le détail de ce panneau peint constitue l’une des très rares représentations
de la danse de Saint-Guy

L’exposition se propose, cinq cent ans plus tard, de revenir sur
ce phénomène et d’observer la manière dont le gouvernement
de la ville, le clergé et le corps médical tentèrent d’y remédier.
Reprenant le déroulement des événements, elle s’efforce d’éclairer
le contexte de cet épisode historique particulier et de le mettre
en relation avec d’autres cas de « manies dansantes » qui ont
marqué le Moyen Âge ou les périodes plus récentes.

7. La Mort dansant, vers 1520,
sculpture sur bois polychromée, Strasbourg, Musée de l’Œuvre Notre-Dame Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

Basée sur les sources contemporaines de l’évènement, la présentation
tente de distinguer les faits des interprétations abusives
donnant du monde médiéval la vision simpliste d’un monde
traversé par des pulsions irrationnelles et secoué par les crises.
Cette approche de la réalité et de l’imaginaire du Moyen Âge,
portée par une scénographie immersive, s’attache aussi aux
interprétations qui ont pu être données de ces évènements par
les historiens comme par le monde médical jusqu’à la période
contemporaine. Elle questionne en conclusion d’autres
comportements épidémiques de natures diverses et les
processus mentaux ou sociaux qui les sous-tendent.

Relief avec la Vierge à l’enfant, saint Guy et un saint pape, début du XVIe siècle, sculpture sur bois polychromée provenant de la chapelle Saint-Guy près de Saverne,
Musée du Château des Rohan, Saverne Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

Commissaire : Cécile Dupeux, conservatrice du Musée de
l’Œuvre Notre-Dame
Collaboration scientifique : Georges Bischoff, professeur émérite
d’Histoire du Moyen Âge et Élisabeth Clementz, maître de
conférences à l’Institut d’Histoire d’Alsace de l’Université de Strasbourg
« Il faudrait se souvenir de ces évènements pendant
mille ans, et limiter les danses, en particulier les danses
obscènes et indécentes… ».
C’est en ces termes que l’humaniste et professeur
strasbourgeois Hieronymus Gebwiller décrit quelques années
plus tard le traumatisme créé par l’épisode de danse collective
qui ébranla la ville durant l’été 1518

5. Extrait du registre des Mandats et Règlements de la Ville de Strasbourg. Interdiction des danses publiques par le magistrat de Strasbourg,
signée Sébastien Brandt (Strasbourg, 2 août 1518).
Archives de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg, AVES, 1 MR3, f. 72 r.

Le parcours de l’exposition

L’aspect théâtralisé des éléments visuels produit un effet
d’immersion attisant l’imagination des visiteurs.
Ces éléments visuels sont mis en page  en étroite relation avec
les textes s’y référant. Les titrages et les cartels guide la curiosité du
public tout en lui fournissant les éléments propices à l’élaboration d’une
prise de conscience réaliste d’un tel phénomène.
La lumière diffuse pour crée des ambiances favorables à la concentration,
ou bien ponctuelle, éclairant faiblement en découpe une gravure
ou un document écrit.
Unité 1 : l’épidémie de danse à Strasbourg et les réactions de
l’administration municipale
La description de plusieurs cas de danse compulsive décrits par
les sources permet une première approche du phénomène tel qu’il
fut vécu par les habitants de Strasbourg.
Le rôle joué par la ville et ses corporations face à ce problème
d’ordre et de santé publics, et en particulier l’intervention de
l’humaniste et poète Sébastien Brant, secrétaire de la ville et
membre des conseils, sont développés.

Unité 2 : les épidémies de danse au Moyen Âge, répartition
géographique, représentations et descriptions
La présentation des cas répertoriés de manies dansantes médiévales
montre leur implantation presque exclusive dans une aire couvrant
la région Rhin-Main et la Belgique, espace de chevauchement entre
deux espaces culturels à la lisière du monde germanique et du monde roman.
Les quelques descriptions, constituées par les témoignages de médecins
ayant pu assister à des phénomènes semblables au cours du XVIe siècle,
et les rares représentations d’épisodes proches, en particulier celles
du pèlerinage des épileptiques de Moelenbeek près de Bruxelles,
tentent de préciser les caractéristiques du phénomène.

Unité 3 : la médecine face à l’épidémie
Cette section permet de développer la position complexe des médecins
de Strasbourg, partagés entre le recours à un diagnostic astrologique
ou humoral traditionnel et une aspiration nouvelle à l’observation
et à l’analyse scientifique, telle que la révèlent les nombreuses et
remarquables éditions médicales publiées dans la ville au début
du XVIe siècle. Elle montre la présence presque constante de
la religion dans l’analyse médicale, le corps étant perçu comme
le reflet de l’âme. Les premières tentatives d’explication du
phénomène de danse épidémique, en particulier par le médecin
et alchimiste Paracelse, présent à Strasbourg quelques années
après l’évènement, expriment l’intérêt porté à cet épisode
historique après son déroulement.

Unité 4 : bonne et mauvaise danse au Moyen Âge
La perception de la danse à la fin du Moyen Âge et en particulier
le jugement ambigüe de l’Église sont évoqués. Si cette forme
d’expression pouvait en effet être considérée comme un moyen
de communication avec Dieu pouvant conduire au Salut, elle était
aussi parfois perçue comme instrument du diable, capable de
provoquer une perte de contrôle menant à tous les dérèglements.
Le refus des danses populaires désordonnées tournées en dérision
par les graveurs, la distinction des bons et des mauvais instruments,
la publication de traités ou pamphlets contre les danses permettent
d’expliciter cette position de défiance, qui aide à comprendre la peur
suscitée par les épidémies de danse.

Unité 5 : les saints patrons de la danse
Le recours à la thaumaturgie religieuse par le biais de la prière,
des messes et des pèlerinages (vers l’église Saint-Vit de Saverne
dans le cas strasbourgeois) est attesté dans les épidémies de danse.
C’est saint Guy (15 juin) et saint Jean-Baptiste (24 juin), réputés
comme saints patrons de la danse et des maladies convulsionnaires
depuis l’Antiquité tardive, que l’on invoquait le plus
fréquemment pour obtenir une guérison, mais leur culte prend
le plus souvent la forme de rites thérapeutiques annuels,
destinés tout autant à la prévention qu’à la guérison.
Car s’ils sont réputés soigner le mal, ces saints peuvent
aussi en être la cause, capables par leur malédiction
de provoquer les transes redoutées.

Unité 6 : la manie dansante vue par les siècles suivants
La mention de l’évènement par les chroniques strasbourgeoises
successives sera marquée par des déformations qui s’amplifieront
au cours des siècles et permettront d’interroger dans l’exposition
la notion même de « source historique ». Les outrances de
l’interprétation moderne et contemporaine, basée sur une lecture
du Moyen Âge comme époque irrationnelle ancrée dans les
superstitions, font l’objet d’une mise au point nécessaire dans
l’exposition.
L’intérêt du monde médical au XIXe siècle pour ce qui apparaît
comme une pathologie s’exprime en particulier dans l’analyse
du docteur Jean-Martin Charcot, qui en fit une explication
neurologique reprise par la plupart de ses successeurs.
Les développements au XXe siècle montrent la tendance
à plaquer sur le phénomène les stéréotypes de la médecine
et de la psychologie modernes.
Unité 7 : d’autres phénomènes épidémiques dans le monde actuel
Si les mentions ou les représentations de danses convulsives
remontent à l’Antiquité, qui voit dans la possession des corps le signe
de la présence des dieux, les exemples de danses rituelles telles
la Tarentelle encore pratiquées dans le monde contemporain
font partie de la réflexion sur le phénomène.