DIALOGUE MONET – MITCHELL

A la Fondation Vuitton jusqu’au 27 février 2023

Commissaire générale de l’exposition
Suzanne Pagé, Directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton, Paris
Co-commissaires
Marianne Mathieu, directrice scientifique du Musée Marmottan Monet,
Angeline Scherf, conservatrice à la Fondation Louis Vuitton
assistée de Cordélia de Brosses, chargée de recherches
et Claudia Buizza, assistante de conservation
L’exposition « Monet - Mitchell » est organisée dans le cadre d’un partenariat scientifique avec le Musée Marmottan Monet.
L’exposition « Rétrospective Joan Mitchell » est co-organisée par le San Francisco Museum of Modern Art (SFMOMA) et le Baltimore Museum of Art (BMA) avec la Fondation Louis Vuitton.

C’est un grand privilège de participer à cette nouvelle vision de Claude Monet et de Joan Mitchell, artiste à laquelle la Fondation accorde une importance toute particulière au sein même de sa collection. La puissance et le lyrisme de leur peinture se font écho et soulignent ce qui les rapproche profondément : un lien intime à la nature, porteur d’une réelle force régénératrice.

Bernard Arnault
Président de la Fondation Louis Vuitton
(extrait)

L’exposition « Monet-Mitchell » s’inscrit dans la ligne d’une programmation résolue de la Fondation liant la modernité historique à un engagement contemporain, à travers filiations ou correspondances d’artistes ou de mouvements artistiques.
Aujourd’hui il s’agit d’une stratégie plus sophistiquée et avant tout sensible, de l’ordre de la consonance, dans la mise en regard d’oeuvres de deux grandes figures : Joan Mitchell, inscrite dans la modernité de l’expressionnisme abstrait américain, enfin reconnue comme l’une des grandes voix du XXe siècle et Claude Monet, icône française de l’impressionnisme au moment où, réhabilité à travers ses oeuvres tardives, il est redécouvert et salué comme pionnier de la modernité américaine des années 50.
Suzanne Pagé

Parcours de l’exposition

Deux générations différentes

De générations différentes – Joan Mitchell étant née un an avant la mort de Claude Monet -, leurs peintures furent d’abord rapprochées dans le cadre de l’émergence de l’expressionnisme abstrait américain dans les années 1950. Monet est alors redécouvert comme précurseur de la modernité américaine et son oeuvre tardive réhabilitée après l’accueil critique reçu en France par les Nymphéas de l’Orangerie en 1927. L’association des deux artistes est confortée par l’installation de Mitchell à Vétheuil en 1968, dans une demeure surplombant la maison où vécut Monet de 1878 à 1881.

Prenant appui notamment sur la déclaration de Joan Mitchell au critique américain Irving Sandler en 1957,

« J’aime le Monet de la fin, mais pas celui des débuts »,

Joan Mitchell
En regard
REFLETS ET TRANSPARENCES, « L’HEURE DES BLEUS »

Les reflets constituent une thématique essentielle chez Monet. En témoignent ici les peintures inspirées par le bassin qu’il crée dans son jardin : depuis Nymphéas avec reflets de hautes herbes (1897) jusqu’à Saule pleureur et bassin aux nymphéas (1916-1919) et Agapanthes (1916-1919), études pour les Grandes Décorations (1914-1926). À travers de nouveaux formats et d’innombrables variations où fusionnent les mondes aquatiques, célestes et végétaux, Monet confine ici à une forme d’abstraction. « L’azur aérien captif de l’azur liquide » (Paul Claudel).

                       Claude Monet, Le bassin aux nymphéas, 1917-1919

Élément récurrent dans la peinture de Mitchell, l’eau, par le jeu de ses mémoires croisées, est celle du lac Michigan de son enfance, comme de la Hudson et de la East River de sa maturité à New York et celle de la Seine à Vétheuil. En 1948, elle partage sa fascination avec Barney Rosseta:

Joan Mitchell, Quatuor II for Betsy Jolas, 1976

«Je découvre que l’on peut même trouver une raison de vivre dans les profondeurs, les reflets dans l’eau »

 On les retrouve ainsi dans Sans titre (1955) et Quatuor II for Betsy Jolas (1976), celui-ci inspiré par la musique de cette compositrice et par le paysage que Mitchell voit depuis sa terrasse de Vétheuil à l’« heure des bleus», entre la nuit et le jour.

SENSATION ET FEELING

À partir du jardin que Monet crée comme motif et du paysage élu par Mitchell à Vétheuil, les deux artistes cherchent à fixer une « sensation » ou un « feeling », soit le souvenir de l’émotion provoquée au contact de la nature et transformée par la mémoire. C’est dans leur quête incessante autour de la couleur que les correspondances entre les deux artistes sont les plus fortes.

                                                   Un jardin pour Audrey (1975)

Un jardin pour Audrey (1975) dans un format monumental, un vocabulaire clairement abstrait et une gamme chromatique où dominent les verts, jaunes et orange sur fond blanc, fait écho aux Hémérocalles (1914-1917) et aux Coins du bassin (1917-1919) de Monet.

                             Claude Monet Les Hémérocalles, 1914-1917

Beauvais (1986), réalisé à l’occasion de la visite de l’artiste à l’exposition des Matisse venus de Russie,

                                                Joan Mitchell, Beauvais1986
rejoint la liberté de touche des Iris Jaunes de Monet (1914-1917).

                                        Iris Jaunes de Monet (1914-1917)  
                                                           Joan Mitchell, Row Row (1982)
La gamme des bleus, verts et mauves de Row Row (1982) dialogue avec celle des Nymphéas avec rameaux de saule (1916-1919) et des Nymphéas (1916-1919)

                                       Claude Monet, Nymphéas (1916-1919)

dont la sérialité conduit progressivement à l’effacement du motif au service d’une planéité à la limite de l’abstraction.
Contrastant avec une composante de mauves et de violets, les jaunes dominent dans Two Pianos (1980),

                                      Joan Mitchell Two Pianos, 1980
dont la dynamique des touches renvoie à une composition musicale éponyme de Gisèle Barreau. Dans une gamme comparable de rouge et de jaune, La Maison de l’artiste vue du jardin aux roses (1922-1924) de Monet atteste de la liberté expressive de la couleur et du geste. Une même dissolution du sujet est notable dans une série de tableaux de chevalet : Le Pont japonais (1918-1924) et Le Jardin à Giverny (1922-1926).

Claude Monet les saules pleureurs

PRÉSENCE DE LA POÉSIE

La poésie accompagne en permanence Joan Mitchell. Fille de la poète Marion Strobel, elle est proche d’écrivains et de poètes américains : James Schuyler, Frank O’Hara, John Ashbery… et, en France, de Samuel Beckett et Jacques Dupin. Sans titre, peint vers 1970, faisait partie de la collection de ce dernier, dont quatre poèmes ont inspiré les compositions au pastel réalisées par Joan Mitchell aux alentours de 1975 et présentées dans cette salle.

                                     Joan Mitchell, Sans titre, peint vers 1970
Claude Monet côtoie les écrivains de son temps, comme Zola, Maupassant, Mallarmé et Valéry. Les poètes sont d’ailleurs parmi les premiers, et longtemps les seuls, à célébrer l’oeuvre tardive de Monet, à laquelle appartient Iris (1924-1925).

                                                                 Claude Monet, 1924/25
En fin de section, Mon Paysage (1967), à travers la synthèse et l’économie de son titre, résume à lui seul l’engagement fondamental de Mitchell :

« Je peins à partir de paysages mémorisés que j’emporte avec moi – et de sensations mémorisées… ».

« UNE ONDE SANS HORIZON ET SANS RIVAGE » (MONET)

L’espace laissé en réserve domine dans les Nymphéas de Monet (1917-1919) et River de Mitchell (1989), mis en dialogue : le blanc en apprêt ou en rajouts s’associe à une gamme de vert, bleu, jaune et mauve, éclairant les compositions dans l’ouverture et l’extension de l’espace.

                                                         Joan Mitchell, River, 1989
Monet retranscrit la fluidité de l’eau par des touches courtes proches d’une écriture calligraphique que l’on retrouve avec une autre intensité dans la gestualité expressive du diptyque de Mitchell.

                                                    Claude Monet Nymphéas, 1917-1919

Le parcours se clôt sur deux grands ensembles : d’une part,


 L’Agapanthe de Monet (1915-1926), triptyque monumental qui a joué un rôle décisif pour la reconnaissance de l’artiste aux États-Unis, exposé ici pour la première fois dans son intégralité à Paris ; d’autre part, dix tableaux issus du cycle de La Grande Vallée de Joan Mitchell (1983-1984). Tous deux correspondent à des environnements où la dissolution du sujet dans la couleur et l’affranchissement des limites spatiales créent un espace immersif pour le spectateur.

                                     Joan Mitchell, la Grande vallée
La gamme colorée privilégie les mauves, violets, bleus, verts et jaunes ; chez Monet l’application de frottis monochromes en atténue l’éclat, induisant une certaine contemplation. Chez Mitchell, les couleurs sont fortes et les touches énergiques, faisant de cette oeuvre, à l’origine endeuillée, un éclatant hymne à la vie.

Informations pratiques

Réservations
Sur le site : www.fondationlouisvuitton.fr
Horaires d’ouverture
(hors vacances scolaires)
Lundi, mercredi et jeudi de 11h à 20h
Vendredi de 11h à 21h
Nocturne le 1er vendredi du mois jusqu’à 23h
Samedi et dimanche de 10h à 20h
Fermeture le mardi
Horaires d’ouverture
(vacances scolaires)
Vacances de la Toussaint : Tous les jours de 10h à 20h
Vacances de Noël : Tous les jours de 10h à 20h
Vacances de Février : Tous les jours de 10h à 20h
Accès
Adresse : 8, avenue du Mahatma Gandhi,
Bois de Boulogne, 75116 Paris.
Métro : ligne 1, station Les Sablons,
sortie Fondation Louis Vuitton.
Navette de la Fondation : départ toutes les
20 minutes de la place Charles-de-Gaulle – Etoile, 44 avenue de Friedland 75008 Paris (Service réservé aux personnes munies d’un billet Fondation et d’un titre de transport – billet aller-retour de 2€ en vente sur www.fondationlouisvuitton.fr ou à bord)

Tapisseries de la Dame à la licorne

Le Moyen Âge est une époque aussi fascinante que méconnue. La littérature, le cinéma et les séries télévisées notamment ont contribué depuis quelques décennies à diffuser les clichés et idées reçues qui l’accompagnent dans l’inconscient populaire.

La nature est omniprésente dans l’art du Moyen Âge, comme elle l’est dans la vie des hommes et des femmes de cette époque, où une forte majorité  de la population vit à la campagne et où les villes abritent des jardins et même des portions de vignes et de champs. Pièces luxueuses ou plus modestes, objets religieux ou profanes, éléments du décor ou objets de la vie quotidienne, témoignent tous de l’art du Moyen Age.
C’est au musée de Cluny à Paris que je vous convie aujourd’hui.
Ce musée renferme des œuvres incontournables  dont je parlerai dans un autre billet.

Les chefs d’œuvre

En quelque sorte c’est la Joconde de ce musée, les Tapisseries à la Licorne

Avouons-le tout de suite, les licornes sont des animaux fantastiques. Mais au Moyen Âge, on croit dur comme fer à leur existence !

Comment en douter puisque des voyageurs, comme Marco Polo, racontent en avoir rencontré.
Et certains marchands ramènent même du Nord de l’Europe des cornes de licorne ! L’une d’elles, provenant du trésor de l’abbaye de Saint-Denis, est d’ailleurs conservée au musée de Cluny. En réalité, il s’agit d’une dent de narval, mais chut !

Elles sont au nombre de six

Le Toucher, le Goût, l’Odorat, l’Ouïe et la Vue… et une sixième pièce, avec une tente bleue et l’inscription mon seul désir : immédiatement reconnaissables, les tapisseries qui forment la tenture de la Dame à la licorne sont parmi les œuvres les plus célèbres des collections du musée de Cluny.

Ce sont des femmes sur des îles
une grande solitude féminine
une solitude qui a l’air enchanté

Yannick Haenel, A mon seul désir 2005

La composition

Le fond rouge et un même schéma de composition unissent les six tapisseries.

Sur un grand ovale bleu, la Dame, élégante, parée de bijoux et souvent assistée d’une demoiselle, se tient solennellement, entre un lion et une licorne porteurs de bannières, de capes ou d’écus à trois croissants. Ce groupe est encadré par des arbres de quatre essences : des chênes, des orangers, des pins et des houx. Le sol des six « îles » est planté de fleurs, et les fonds rouges sont parsemés de plantes à fleurs et d’animaux : lapins blancs, renardeaux, un lionceau, des agneaux, des oiseaux… mais aussi des singes ou une panthère.

Les armoiries


Les armoiries, de gueules (rouge) à la bande d’azur (bleu) chargée de trois croissants d’argent (blanc) ont permis d’identifier la famille qui a fait tisser ces pièces : les Le Viste, originaires de Lyon, mais possédant des terres en Bourgogne et des résidences parisiennes. L’identité du commanditaire reste l’objet de débats : ce serait soit Jean IV Le Viste, mort en 1500, soit son neveu Antoine, mort en 1532, deux personnages de l’époque des rois de France Charles VIII et Louis XII, pourvus de charges dans la haute administration du temps.


Les femmes et les animaux

Les modèles des femmes et des animaux à grande échelle ont été dessinés par le peintre Jean d’Ypres. Actif à Paris de 1489 à 1508, il est connu comme enlumineur au service de la reine Anne de Bretagne et comme auteur de modèles pour des vitraux ou pour des gravures illustrant des livres imprimés. Les plantes et les animaux ont pu être tissés à partir de modèles détenus dans les ateliers des liciers.
mais elles pourraient tout autant être l’œuvre des liciers parisiens. Le tissage est très soigné, voire virtuose, mais le lieu de production des tapisseries n’est pas connu. Elles peuvent provenir des métiers à tisser implantés aux Pays-Bas méridionaux, dans des villes comme Bruxelles ou Tournai, 
mais elles pourraient tout autant être l’œuvre des liciers parisiens.

Général

Un sentiment de paix et d’harmonie se dégage des six tapisseries. On y voit peu d’objets et d’accessoires, tandis que les vêtements et les bijoux sont décrits avec attention. Les végétaux et les animaux sont partout représentés, tantôt stylisés, tantôt inspirés par l’observation directe.

La tenture a été comprise de diverses manières, en particulier en fonction de l’interprétation que l’on peut faire de la sixième pièce. Comment comprendre l’inscription, comportant deux initiales, A et I encadrant l’expression mon seul désir ? Peut-être les prénoms d’Antoine Le Viste et de son épouse Jacqueline ? La Dame prend-elle ou remet-elle un collier dans le coffret tendu par la demoiselle ? Est-ce une allégorie des sens et d’un sixième sens, proche de l’âme et du cœur ? Peut-on faire une lecture courtoise de ces tapisseries, puisque la Dame est dans un jardin où nombre de plantes et d’animaux font allusion à la quête amoureuse ? Mon seul désir est-il une devise ? Quel sens donner au mot désir, dans un monde encore profondément chrétien, mais au seuil de la Renaissance ?

Et Parlerey des six sens,
Cinq dehors et ung dedans
qui est le cuer

Jean Gerson, 1402

Vidéo du musée de Cluny (20 mn)

Informations pratiques

MUSÉE DE CLUNY, MUSÉE NATIONAL DU MOYEN ÂGE
Entrée du musée par le 28 rue Du Sommerard, 75005 Paris

JOURS ET HEURES D’OUVERTURE
Le musée est ouvert tous les jours sauf le lundi
de 9h30 à 18h15.
Fermeture de la billetterie à 17h30.
Début de l’évacuation des salles à 17h45.

 

Amazing TRANSFORMERS so cute

CHEFS-D’ŒUVRE DE LA COLLECTION FRIEDER BURDA EN DIALOGUE AVEC DES ÊTRES ARTIFICIELS

 « Transformers», au musée Frieder Burda de Baden-Baden jusqu’au 30 avril   2023

« Machines have less problems, I’d like to be a machinee, wouldn’t you ? »
Andy Warhol

Commissaire : Udo Kittekmann

On a rarement vu un musée aussi vivant. Rencontrez des avatars, des machines humaines mobiles, qui parlent et qui apprennent. Observez la richesse des mouvements, des paroles et la réactivité des êtres transformés. Écoutez attentivement une souris blanche animatronique s’adresser à une bougie. Laissez-vous séduire par un personnage qui anime des réactions subjectives et objectives, entre excitation et répulsion.
 Que nenni ! Dans mes pérégrinations j’ai rencontré :

 

  • Au musée Maillol à Paris « Hyperréalisme. Ceci N’est Pas Un Corps » ici
  • A la Fondation Beyeler : « Duane Hanson pour les 25 ans de la Fondation Beyeler » ici
  • A la Bourse de Commerce de François Pinault la souris de Ryan Gander
    vous accueille à l’entrée et fait la joie des petits et des grands.
    La Bourse de Commerce vous offre un tote-bag à l’effigie de la souris .
    Si vous êtes membre du Cercle, et elle figure aussi sur la carte de membre
    2022
Les promesses de l’intelligence artificielle

L’automatisation de la vie, la transformation de nos environnements sociaux se poursuit. L’intelligence artificielle et ses promesses prennent le relais et créent des formes d’existence semblables à la vie. L’homme pousse au progrès – et se trouve depuis longtemps au seuil de sa propre remplaçabilité.
Avec l’exposition «Transformers», le musée Frieder Burda tente une expérience et se transforme en un dispositif expérimental hybride et utopique. Il thématise et présente des êtres artificiels qui inspectent de manière critique le musée et ses chefs-d’œuvre classiques. La fiction : Une nouvelle situation de dialogue qui joue sur le subjonctif du «Que se passerait-il si» d’un avenir radicalement modifié.

Les chefs d’oeuvre de la collection

                                                                 Markus Lupertz 1941

Pablo Picasso, Jackson Pollock, Willem de Kooning, Gerhard Richter, Sigmar Polke, entre autres : ils ont tous, à leur époque, modifié les attentes classiques vis-à-vis d’une œuvre d’art. Avec les chefs-d’œuvre importants de la collection de Frieder Burda et la rencontre avec des êtres artificiels, des espaces d’expérience multidimensionnels se combinent et s’interconnectent ainsi dans le musée, dans lesquels les visiteurs doivent d’abord se situer eux-mêmes. Il y a de la vie dans le musée, nous grandissons au sein du métavers – même si elle n’est pas réelle, mais seulement un reflet de notre monde actuel de plus en plus transformé par l’artifice.

Les artistes invités

Les artistes invités, Louisa Clement (*1987), Ryan Gander (*1976), Timur Si-Qin (*1984) et Jordan Wolfson (*1980), font tous partie d’une génération qui a grandi dans un monde numérique. Dans leur biographie comme dans leurs créations, ils reflètent les sphères de pouvoir croissantes des possibilités virtuelles.

Louisa Clement

Les représentantes
Avec ses trois représentantes de la production actuelle (2022), rassemblées en tant qu’invitées de l’exposition au milieu de la présentation des oeuvres de Georg Baselitz, Sigmar Polke et Gerhard Richter, l’artiste crée des copies réalistes, d’elle-même. Elle les a apprêtées selon un choix de tenues tout à fait séduisantes. Il s’agit d’avatars, créés à partir d’un scan 3D, le matériau de leur enveloppe extérieur est en silicone, le squelette en métal. Un chatbot est également implanté dans leur corps. Il utilise l’intelligence artificielle pour
converser avec les humains en langage quasi naturel. Pour l’instant elle ne s’exprime et ne répond qu’en anglais.
Avec le temps, la poupée parlante promet de devenir de plus en plus intelligente et de s’épanouir dans le rôle de sa créatrice, y compris dans son rayonnement érotique sophistiqué, qui la rend aussi inaccessible que disponible. Elle pratique le langage des Jésuites, en répondant à une question quelque peu trop personnelles, par une question.
Exemple :
Quelle âge avez-vous ?
réponse : c’est un secret et vous ?
Les « hommes-machines » de Louisa  Clément sont des « appareils d’influence »,
intelligents et communicatifs. Ils peuvent imiter les expressions humaines, ils sollicitent leur désir -et pourtant ils ne peuvent les satisfaire.
« Dans chaque oeuvre » dit l’artiste  « il y a une partie de moi à l’intérieur, qu’on livre avec l’oeuvre ». En effet, des êtres artificiels comme ceux qui se mêlent maintenant à nous , portent toujours du vivant dans l’inerte.

Ryan Gander

« Un enfant est le microcosme d’un spectateur parfait[…], il n’a pas le bagage culturel des adultes, il n’est pas intimidé quand il se trompe[…] »
Voilà l’une des déclarations de l’artiste britannique Ryan Gander. Il a utilisé pour sa sculpture animatronique, d’une souris blanche, la voix d’enfant enregistrée de sa fille, alors âgée de 9 ans. Une voix aiguë et enfantine enchaîne des phrases, en bégayant :

« Bien sûr, d’une certaine manière, eh bien« 

Petite, impuissante, enfantine, encore incapable de s’exprimer clairement –
On sent que la souris a quelque chose d’important à dire, mais n’arrive pas à trouver les mots nécessaires.

Timur Si-Qin

Le titre de l’exposition, Transformers, est tiré du film d’action et de science fiction américain du même nom, Transformers, (2017), extrêmement populaire,
Il est basé sur une série de jouets également du même nom, qui est encore commercialisée, avec beaucoup de succès, dans le monde entier.
L’intrigue du film repose sur une race de machines extra-terrestres intelligentes sur la planète Cybertron, qui ont la capacité de transformer leur corps en d’autres formes. Autrefois en harmonie sur leur planète et gouvernant ensemble, ils se divisent en bons (les Autobots) et en méchants
(les Decepticons), qui se battent dans une guerre civile pour le pouvoir exclusif sur l’univers.
En se basant sur les affiches martiales du film Transformers, Timu Si-Qin a réalisé en 2011, une série d’images encadrées intitulées Mainstream.


Distingué par « Destroy » et « Protect » ,
celles-ci sont recouvertes de feuilles de plantes de formes, de tailles et d’espèces les plus diverses, soulignant dans un premier temps la distance supposée entre l’idée de nature et le « non-humain »
Selon un thèse du 21e siècle, l’ancienne distinction fondamentale entre technique et organique doit être remise en question depuis longtemps et n’a plus qu’une fonction symbolique.
« Je ne vois pas de séparation entre la ‘culture populaire’ ou ‘commerciale’ et le monde naturel »
« Je réfléchis toujours à la manière dont nous sommes imprégnés de publicité dans notre vie quotidienne et je trouve cela très beau, car elles apparaissent plus ou moins selon les mêmes principes que les feuilles des plantes : en effet, elles poussent pour occuper tout espace utile dans lequel, elles peuvent puiser de l’énergie« 

Jordan Wolson

Alors qu’il se rendait au centre ville de New York, Jordan Wolson a écrit ces lignes dans le cadre d’un monologue pour son fascinant personnage robotique
Female Figure. L’artiste né à New York en 1980 est connu pour ses oeuvres percutantes et inquiétantes qui explorent les conditions et les stratégies actuelles de l’art, de la technologie et des médias de masse et de formats variés.

« Female Figure » dit l’artiste, « incarne la tension entre le subjectif et l’objectif, entre l’excitation et la répulsion. Elle est mon interprétation de (ma propre) masculinité.
Il s’agit en outre de violence et de questions relatives à (ma) sexualité. J’ai réfléchi
à l’idée de me voir comme auteur d’une fiction dans laquelle ce que la culture dit être vrai et ne l’est pas – je ne suis pas. Mais bien sûr que c’est vrai et que je le suis »
Sur fond musical d’Applause de Lady Gaga et de Graceland de Paul Simon, Wolson anime physiquement et psychiquement son personnage inquiétant et manipulateur. Enfin, il démontre avec une acuité intellectuelle et artistique, comment la technologie infiltre et harcèle notre perception. Un peu coquine et impudique, tout en étant délibérément sale, à la fois érotique et émotionnellement séduisante, la sculpture peut aussi servir de métaphore pour une époque corrompue.

Information importantes
VISITES GUIDÉES
Visites guidées publiques (en allemand)
Samedi et dimanche 11h et 15h

Frais de participation: 4 €
Les billets sont disponibles à la réception

Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h

Ouvert tous les jours fériés.

le port d’un masque FFP2. est recommandé

Alice Neel, un regard engagé

Alice Neel, « Marxist Girl » (Irene Peslikas), 1972 Daryl and Steven Roth © The Estate of Alice Neel Courtesy The Estate of Alice Neel, David Zwirner, and Victoria Miro, London/Venice

Au Centre Pompidou Jusqu’au lundi 16 janvier 2023
commissaire : Angela Lampe Conservatrice, service des collections modernes, Musée national d’art moderne

                         Alice Neel, 1984 Robert Mapplethorpe


Quelques semaines avant sa mort, la peintre déclare :

« En politique comme dans la vie j’ai toujours aimé
les perdants, les outsiders. Cette odeur de succès je
ne l’aimais pas. »

Alice Neel

Précurseure d’une approche intersectionnelle, la peintre américaine Alice Neel, disparue en 1984, a toujours su lier la cause de la femme à la question des origines et de la classe sociale.  Avec Angela Lampe, voyons le parcours d’une femme farouchement indépendante, source d’inspiration pour nombre d’artistes, dont Robert Mapplethorpe, Jenny Holzer ou encore Kelly Reichardt.

La lutte des classes

Tout au long de sa vie, cette femme radicale, membre du parti communiste, ne cesse de peindre les marginaux de la société américaine, ceux et celles qui sont écartés en raison de leurs origines, la couleur de leur peau, leur excentricité, leur orientation sexuelle ou encore de la radicalité de leur engagement politique.  Même si, grâce à une notoriété grandissante à partir des années 1960, Neel élargit le spectre de ses modèles aux milieux plus favorisés, elle reste toujours fidèle à ses convictions de gauche. Communiste engagée, Alice Neel fut un temps fichée par le FBI : un événement qui fut une source d’inspiration  pour l’artiste conceptuelle américaine.
Son goût pour l’art et la liberté, la sienne comme celle des autres, a été sa boussole.
Elle passe son enfance dans la petite ville étriquée
de Colwyn, en Pennsylva nie. Père fonctionnaire dans les chemins de fer, mère femme au foyer. Intelligente, cultivée, qui fait découvrir à sa fille le théâtre et le ballet. Alice Neel décide d’étudier la peinture à la Philadelphia
School of Design for Women. Au cours de sa formation, elle décroche les meilleures notes en classe de portrait et apprécie les classes de nus pour lesquelles posent, miracle dans l’Amérique puritaine,
femmes et hommes. Lors d’une université d’été, elle rencontre un jeune
peintre cubain, Carlos Enríquez Gómez. Coup de foudre.

                                                Aquarelle 1936, West Street

Ils se marient et partent vivre dans sa belle famille à La Havane.
À Cuba, Alice Neel découvre, une pauvreté qu’elle n’a jamais imaginée, d’autant
plus choquante qu’elle contraste avec la richesse des élites locales,
dont sa belle famille. Dans sa belle maison aux sols de marbre,
Alice Neel peint les mendiants des rues. Inéluctablement, les relations du jeune couple avec le clan familial se détériorent. En 1927, ils s’installent, vivres coupés, à New York. L’artiste n’a jamais divorcé. Elle a vécu avec plusieurs
hommes, mariés ou non, avec lesquels elle a souvent des relations douloureuses.

Mère et fille Alice Neel

La lutte des genres

Anticipant les débats actuels, elle expliquait en 1971 : 

J’ai toujours pensé que les femmes devaient s’indigner et cesser d’accepter les insultes gratuites que les hommes leur infligent

Alice Neel

 Ses nus féminins sont très éloignés du canon traditionnel façonné par le regard masculin, ainsi que ses femmes enceintes dans leur plus simple appareil, sans aucun sentimentalisme. Elle a même eu le courage de portraiturer une victime de violences conjugales. Pour cela, Neel est devenue une icône du féminisme militant.

J’ai cherché dans toute l’expo, l’autoportrait nu, il n’y est pas !
voici un extrait du film
Traversant les périodes de l’abstraction triomphante, du pop art, de l’art minimal et conceptuel, Alice Neel, une femme libre et indépendante, est restée avec sa peinture figurative à contre-courant des avant-gardes qui marquent la scène de New York où elle avait élu domicile au début des années 1930. Habitant dans les quartiers populaires et multiethniques – Greenwich Village d’abord, Spanish Harlem ensuite – Neel, vivant des aides sociales et mère célibataire, se sent proche de ses modèles, auxquels elle cherche à s’identifier. Son engagement n’est jamais abstrait, mais nourri de vraies expériences. Peindre l’histoire sans le filtre d’une proximité intime ne l’intéresse pas. À l’instar de l’œil de la caméra, Neel fait entrer dans notre champ de vision des personnes qui auparavant restaient dans l’obscurité et tombaient dans l’oubli. C’est son premier geste politique. Le second réside dans son choix de cadrage – une frontalité qui interpelle. L’artiste nous place droit devant ses modèles.
Avec une grande puissance picturale, Neel nous les impose : regardez-les !

Informations

Place Georges-Pompidou
75004 Paris

Métro :
Rambuteau Métro ligne 11
Hôtel de Ville Métro ligne 1 Métro ligne 11

Châtelet Métro ligne 1 Métro ligne 4 Métro ligne 7 Métro ligne 11 Métro ligne 14
RER :
Châtelet Les Halles RER A, Paris - picto RER B, Paris - picto RER D, Paris - picto
Bus :

Bus ligne 29 Bus ligne 38 Bus ligne 47 Bus ligne 75

ST-ART 2022, 26e édition

Foire européenne d’art contemporain et de design

Parc des expositions, Strasbourg 

Du 25 au 27 novembre 2022

Un nouvel écrin pour ST-ART

Le 24 novembre 2022, ST-ART a  soufflé sa 26ème bougie. Après avoir fêté son quart de siècle, elle profite du plus beau des cadeaux : une implantation dans le
tout nouveau Parc des expositions de Strasbourg, au pied des rives de l’Aar. Une oeuvre en soi signée Kengo Kuma l’architecte japonais, gagnant du prestigieux
Global Award for Sustainable Architecture.

Les exposants ont unanimement apprécié ce nouvel écrin
« lumineux et aéré, aux espaces de circulation plus spacieux« .

BILAN
  • 55 exposants dont
  • 46 galeries
  • 14 galeries étrangères
  • 15 exposants du territoire alsacien
  • 25 exposants qui revenaient
  • 30 nouveaux exposants
  • Près de 250 artistes présentés
  • Plus de 600 oeuvres exposées
Des retours enthousiastes

Les exposants ont salué « une très bonne édition » et se sont montrés satisfaits de leur participation.

Une foire tremplin

ST-ART est synonyme de démarrage, de tremplin et c’est ce qui lui a valu sa réputation : c’est à Strasbourg que tout peut commencer, pour une galerie, un artiste ou une collection.

  • Le secteur First Call rassemblait cette année 30 nouvelles galeries, soit plus de la moitié des exposants. Une façon d’affirmer plus que jamais sa mission de foire précurseur.
    Une galerie nomade Yannick Kraemer, collectionneur presque compulsif,qui met en vente une partie de sa collection, dont une toile signée Combas affichée à 280 000 €.  La coiffure peut mener à la peinture, Yannick Kraemer a monté une chaîne de salons de coiffure à succès.

                                                     photo Robert Cahen

  • Le soutien et l’adhésion de la Ville de Strasbourg à ST-ART ont permis également d’appuyer cette position de foire tremplin en mettant en scène cette année des artistes récemment diplômés de la HEAR – Haute Ecole des Arts du Rhin de Strasbourg, et la Gedok Haus de Stuttgart, dont les structures célèbraient 70 ans de collaboration

                                Martina Geiger-Gerlach    photo elisabeth itti

  • L’édition 2022 initiait une collaboration inédite avec l’école CAMONDO et dévoilait son regard totalement innovant autour de l’Intelligence Artificielle.

Les événements de cette 26e édition

Une exploration des liens entre cinéma et photographie

ST-ART a souhaité, pour sa 26ème édition, croiser les pratiques artistiques et explorer les liens entre cinéma et photographie. Cette thématique a été portée par :

• l’association inédite avec « Strasbourg art photography » ou Mois de la photographie, qui avait lieu pour la 1ère fois au mois de novembre (et non au printemps) et dont la foire était la clôture.

                                                 Ryo Tomo – la séparation 2021 photo EI

• la présentation, au coeur de la foire, d’un projet d’exposition intitulée
« Cinéma et photographie, un lien si sensible » porté par Ryo Tomo, directeur du festival Strasbourg art photography.

                                                          Photo EI
Installation La Belle captive  – coup de coeur
Sur une proposition de Ryo Tomo, le couple d’artistes strasbourgeois Dool présente son installation

Conçue et réalisée par Dool (Diane Ottawa et Olivier Lelong), l’installation
« La belle captive » s’inspire de l’oeuvre de Magritte et du film d’Alain Robbe-Grillet. Il s’agit ici d’une installation à média mixtes, principalement composé de photographies numériques et de vidéo.

                                                            photo EI
La belle captive chez Magritte représente une mise en abîme dans laquelle il est possible de plonger, et nous donne à penser les liens qui existent entre différents niveaux de représentations dans la peinture, le roman, le cinéma et la photographie.

• une exposition vidéo avec l’invitation de Patricia Houg à l’artiste
Tim White-Sobieski.
Le projet, qui rend hommage à l’oeuvre En attendant Godot de Samuel Beckett, comprend une installation vidéo synchronisée à 4 canaux avec trame sonore
et musique de Henry Purcell et Giovanni Battista Pergolesi.
L’intrigue de la pièce implique deux personnages qui attendent quelqu’un qui ne vient jamais.

                                                                     photo EI
Waiting for Godot est une pièce absurde qui explore les thèmes de la philosophie existentialiste. Le vide et le caractère aléatoire de l’intrigue amènent le public à se demander si quelque chose va se produire et s’il y
a un sens quelconque dans la pièce – ou dans la vie.
Le film Waiting for the God transcende les frontières géographiques et ethniques et est de nature cosmopolite. Elle interpelle les coeurs et les esprits de tous parce qu’elle soulève les questions fondamentales de l’esprit humain :
Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? D’où venons-nous ?

• la création d’un secteur dédié aux galeries présentant des photographes contemporains ou historiques.

Hommage à Jean Greset

Jean, l’art brut et l’art singulier
Jean Greset, un fidèle acteur de ST-ART nous a quitté au mois d’avril 2022.
Sur une initiative de la Direction du salon et de son comité de sélection, porté par Georges- Michel Kahn et Rémy Bucciali, un hommage lui est rendu par la foire. C’était une référence majeure sur le territoire français en la matière.

Une oeuvre monumentale pour la Nef

 Une oeuvre monumentale, de l’artiste Angela Glajcar, vous accueillait dans la Nef du Parc des Expositions. Artiste exposée par la galerie Stream Art Gallery

                     – Stream Art Galery – Angela Glajcar  – Photo: lfdd

Une performance

Une performance de Simon Berger a été présentée par la Galerie Mazel le soir du vernissage. Au cours de cette performance, l’artiste a réalisé une oeuvre de 150 x 150 cm sur du verre. Briser du verre est généralement considéré comme une mauvaise action, plus souvent
comme un acte de vandalisme. Mais que diriez-vous si cette destruction pouvait en
fait se révéler d’une beauté éclatante ?
Cet artiste suisse nous montre comment nous pouvons briser le verre et trouver de nouvelles façons de percevoir des matériaux du quotidien.
Après trois ans de recherche et de tentatives, Simon Berger a découvert le moyen de fissurer le verre sans le briser, transformant ainsi des vitres ordinaires de ce matériau fragile en de remarquables portraits.

Les galeries exposant à ST-ART sont sélectionnées par un comité de sélection,
composé pour cette édition de :

REMY BUCCIALI

Officier des Arts et des Lettres.
Né en 1952 à Rueil-Malmaison, il étudie la photographie et
les arts plastiques à Paris et entre en 1972 à l’atelier RIGAL
à Fontenay aux Roses. Nommé taille-doucier en 1975, il
travaille jusqu’en 1976 sous la direction du Maître Gaston
Gerbault.
En 1977 il ouvre son propre atelier à Paris avant d’ouvrir
en 1983 un atelier à Colmar. Depuis lors, de nombreux
artistes internationaux sont édités dans son atelier. Editeur de gravures contemporaines depuis 1989 sous le label «
Editions Rémy Bucciali », il collabore avec de nombreuses galeries françaises et étrangères : Paris, Barcelone, Berlin, Copenhague, Cologne, Rotterdam, Stockholm, Düsseldorf.
Il participe également à de nombreuses foires internationales, telles que Art Paris, Art Elysées, ST-ART, Düsseldorf, Francfort, ART Karlsruhe, London Print Art Fair et AAF Bruxelles.

GEORGES-MICHEL KAHN

Après 20 ans dans une entreprise de prêt porter, et déjà collectionneur de l’abstraction des années 50/60 française et européenne, Georges-Michel Kahn a ouvert en 1997 une galerie à Strasbourg sur la place du Musée d’Art Moderne
et Contemporain. Après 7 ans à Strasbourg, il a ensuite ouvert un show room à Paris et depuis 2006 s’est installé à l’île de Ré.
La galerie édite tous les ans des multiples d’artistes et participe à l’édition de livres d’artistes.

Les 2 galeristes ont présenté ST’Art 2022 en l’absence de Patricia Houg, à la presse. ( les 2 photos Robert Cahen)

La SAAMS

La Société des Amis des Arts et des Musées de Strasbourg a fait éditer un livre pour marquer les 190 ans de la société.
Le 28 e prix Théophile Schuler a été remis par la main de son président Bertrand Alain Gillig à Hélène Thiennot à la foire ce samedi.
L’artiste est diplômée de l’Ecole Supérieure d’Art de Lorraine de Metz. Photographe et dessinatrice elle montre « Souches » dessin à l’encre noire,
des troncs d’arbres coupés, sa manière de montrer l’impact de l’homme sur la nature. La dotation est de 3000 €

Galeries alsaciennes

Valérie Cardi revient cette année avec une diversité d’artistes, aux médium différents, dont sur la photo, Bernard Latuner et Yves Bingert

 

                                                             photo EI

Withoutart Galerie, Marc Sun met l’accent sur les oeuvres de deux artistes taiwanais, Pan Hsinhua et Wu Ichien.
L’un et l’autre, à travers leurs peintures, touchent à la question de la mémoire collective et à la transmission entre les générations.

En parallèle à cela, WITHoutARTgalerie propose une vue d’ensemble des artistes de la galerie :

photo EI
La calligraphie contemporaine à travers les oeuvres de André Kneib, artiste ayant participé au renouveau de l’art de la calligraphie en Chine.

AEdaen propose Francesca Gariti

Photo EI

Jean Pierre Ritsch-Fisch

Le galeriste a passé la main à Richard Solti qui présente toujours  de l’art brut

                                                          Stéphane Spach photo EI

                                                                      photo EI

Beaucoup de galeries présentent des artistes venant d’Asie.
Le discours des artistes nous rappelle la pandémie qui leur a permis de se concentrer à leur domicile pour créer des oeuvres, tout en dénonçant la société de consommation.
Rendez-vous à l’année prochaine. Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez consulter l’excellent blog de la Fleur du dimanche

SurréAlice – une double exposition

Vue de l’entrée de l’exposition photo elisabeth Itti


Lewis Carroll et les surréalistes au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg MAMCS et
 Illustr’Alice au Musée Tomi Ungerer (à venir sur mon blog)
les 2 expositions jusqu’au 26 FÉVRIER 2023
Commissaire : Barbara Forest, conservatrice en chef du Patrimoine au MAMCS
et Fabrice Flahutez, professeur à l’Université Jean-Monnet de Saint-Etienne, spécialiste du surréalisme.
Scénographie de l’exposition : Martin Michel
Identité visuelle de l’exposition : TANDEM

En guise de préambule à l’exposition SurréAlice, l’artiste anglaise Monster Chetwynd  fait pénétrer le visiteur dans la gueule d’un chat monumental au sourire du Cheschire. Réinventant le pays des merveilles dans un décor du cabaret de l’enfer à Paris dont l’étage servait de lieu de réunion des surréalistes pour les célèbres séances de sommeils médiumniques, elle invite le spectateur à franchir un seuil. Inquiétant pour certains, enivrant pour d’autres, ce passage prend la forme de la tête d’un animal, suggérant d’emblée les changements de points de vue, de langage et de rapports aux temps et à l’espace qui vont s’imposer dans l’exposition comme c’est également le cas chez Carroll.

Lewis Carroll : miroir magnétique des surréalistes


La première traduction d’Alice’s Adventures in Wonderland en français suit de très près sa publication en anglais (1865). Il faudra cependant attendre les années 1930 pour qu’Alice in Wonderland fasse pleinement son entrée dans la culture française à la fois comme un classique de la littérature jeunesse et comme une référence chez les avant-gardes. Alice in Wonderland est en effet publié dans pas moins de dix traductions pour enfants entre 1930

Dorothea Tanning

Le pays des merveilles

                Dorothea Tanning, Petite Musique de Nuit 1943
                       Courtesy Tate Collection

«Tranchons-en : le merveilleux est toujours beau, n’importe quel merveilleux est beau, il n’y a même que le merveilleux qui soit
beau ».

André Breton, le manifeste de 1924

La recherche du merveilleux par tous les moyens est donc au coeur  des préoccupations du surréalisme. Il est à la fois la manifestation de la beauté, mai
également, et comme l’indique Aragon, de la liberté. À la source du merveilleux, il y aurait l’inconscient, s’exprimant à travers le rêve et que les surréalistes ont à charge de convoquer.
Le dépaysement associé au rêve et au merveilleux trouve dans le récit d’Alice in Wonderland, un terrain d’expérimentation et d’investigation unique. Chaque chapitre est une rencontre cocasse dans une situation inattendue avec des animaux et des fleurs, bouleversant la partition des règnes, le darwinisme, le naturalisme et la Genèse.
   Les surréalistes se passionnent pour les cabinets de curiosité et collectionnent un bestiaire insolite ou bariolé, chiné dans les marchés aux puces et brocantes. Dans La Maison de la peur de Leonora Carrington, les gravures de Max Ernst révèlent des personnages mi-homme-mi-cheval tandis que Rachel Baes invite les visiteurs de son exposition avec une image de chauve-souris, son portrait métaphorique.


Les spécimens de la collection du Musée Zoologique de Strasbourg choisis suivant les espèces présentes dans les récits de Lewis Carroll, du crocodile au lapin et du chat au flamant rose entre autres, rappellent cet engouement commun pour une nature productrice d’affect poétique et de rêveries d’ailleurs.

Le corps imprévu

Les surréalistes n’ont pas seulement été séduits par la forme narrative et onirique des récits de Lewis Carroll. Ils ont également trouver dans la figure d’Alice l’incarnation de la femme-enfant mais aussi du corps en perpétuelle métamorphose. À la fois jeune, innocente, naïve mais aussi révoltée, effrontée, combattive et joueuse, Alice sera une figure tutélaire de la plasticité des corps et de l’esprit. Elle est, en ce sens, une source d’inspiration et de transgression des identités.

Claude Cahun multiplie les mises en scène où le déguisement et le travestissement lui permettent d’interroger la question du genre. De jeunes artistes femmes, comme Leonora Carrington, Alice Rahon ou Gisèle Prassinos, sont même surnommées du nom de l’héroïne de Lewis Carroll. Cela traduit l’attachement du groupe à ce personnage à la fois réel et fictionnel. À la muse, la diabolique, ou à l’incarnation d’Eros, ils ajoutent la femme-enfant, amie des animaux et de la nature. Leonora Carrington et Dorothea Tanning réagissent chacune à leur manière à cette personnification, plaçant la femme-enfant dans un univers plus angoissant que merveilleux. Au jeu des faux-semblants, le miroir de Lewis Carroll prodigue aux surréalistes, à commencer par Aragon, un formidable instrument de dédoublement et de déformation du corps, mais aussi de réflexion sur la volatilité du réel et de ses représentations. Magritte et Paul Nougé exploitent ses effets subversifs, confondant le reflet du réel, ses systèmes de représentation et ses apparences. Enrico Baj utilise des brisures de miroir comme autant de ruptures dans l’intégrité du corps. Le miroir, objectivation de la présence, sera aussi du côté de l’inconscient et la traversée du miroir est synonyme de mise en évidence des zones cachées de l’inconscient et de la psychanalyse et notamment dans la figure du rétracté de Brauner.

Enrico Baj

Le non-sens et l’absurde

Chez Lewis Carroll comme chez les surréalistes, les écarts entre le réel et sa représentation se doublent d’un écart entre les choses et leur nom. Lewis Carroll, qui est avant tout un spécialiste de logique mathématique et d’algèbre à Oxford, a un goût immodéré pour le travail sur le langage. Certains textes sont des morceaux d’anthologie de mots-valises et de créations langagières étonnantes. Les exemples sont nombreux. Lorsqu’Alice parle trop vite, fait des erreurs et veut se corriger, la Reine lui lance :

L’ÉCOLE DES MODERNITÉS À L’INSTITUT GIACOMETTI

«C’est trop tard. Une fois que l’on a dit quelque chose, cela se fixe par là-même et l’on doit en subir les conséquences».

Le non-sens apparaît cependant avec le plus d’évidence dans La Chasse au Snark, Une agonie en huit chants,

                                        Victor Brauner, le poichat qui navole 1964

récit sous forme de poème publié en 1876. Les personnages, menés par l’Homme à la cloche, et dont les noms commencent tous pas un B, cherchent une créature dangereuse, le Snark, sans savoir à quoi elle ressemble. La genèse du poème est « absurdement » performative. Carroll est en effet parti du dernier vers (« Parce que le Snark était un Boojum, voyez-vous »), puis il a inventé son histoire en remontant vers le début. La fin est donc dans le commencement.
L’absurde, arme douce de la contestation du régime victorien, inspire les artistes et les poètes surréalistes. Le non-sens, incessant, plaît à ceux qui aspirent à un renouvellement complet de l’entendement et au démembrement du langage. De 1927 à 1931, Magritte réalise la majeure partie de ses « peintures à mots ». L’orthodoxie de la langue et de ses usages conventionnels y sont systématiquement remis en cause.

                        Roland Topor Alice à la NeigeMarcel Duchamp le Trébuchet

Des langues sont imaginées par Brauner et Duchamp excelle en jeux de mots et jeux d’esprit dans ses notes comme dans ses titres. Le non-sens qui naît parfois des télescopages de sonorités de mots incongrus réunis dans une phrase produit un humour caustique, voire noir qui formera le terreau sur lequel s’enracine le surréalisme. Dans L’Anthologie de l’humour noir, c’est le chapitre du « Quadrille des Homards » qui est sélectionné par Breton pour évoquer Lewis Carroll. Roland Topor n’hésite pas à placer Alice et ses amis dans une improbable classe de neige tandis que Marcel Duchamp conçoit le Trébuchet, qui n’est qu’un portemanteau mural posé à même le sol, pour induire la chute du visiteur distrait. Le titre et l’objet jouent ensemble de double-sens, de quiproquos drôles et ludiques à la manière des mots-valises de Carroll.
Et pour échapper à l’atmosphère de la France de Vichy, c’est le jeu de cartes, à jouer ou divinatoire, qui va être la principale activité des stratagèmes collectifs. Assignés à la Villa Air-Bel près de Marseille, les surréalistes reprennent le jeu du tarot et le transforment, élisant Alice comme une figure du jeu.

Lise Deharme la Dame de Pique ^

Des publications

SurréAlice
ISBN : 9782351252123
Prix envisagé : 35€
Pagination : environ 304 pages
Date de parution : 17/11/2022

Illustr’Alice
Introduction (Thérèse Willer)
Alice illustrée en France (Thérèse Willer)
Alice au pays de la caricature britannique (1865-2020) (Brigitte Friant-Kessler)

Informations pratiques

Musée d’Art moderne et contemporain (MAMCS)
1 place Hans-Jean-Arp, Strasbourg
Ouvert tous les jours de 10h à 13h et de 14h à 18h, sauf le lundi pendant la durée de l’exposition
Ateliers, lectures etc sur . http://www.musees.strasbourg.eu/


L’art mystique de Laurent Grasso

Au Collège des Bernardins Paris jusqu’au 18 février 2023
 Grégory Quenet,
historien de l’environnement commissaire

                                            Laurent Grasso photo journal des arts

L’artiste et vidéaste contemporain français Laurent Grasso habille le Collège des Bernardins à Paris avec ses créations inspirées des découvertes scientifiques, des sciences humaines mais aussi de rumeurs et des croyances populaires. Cette exposition est le fruit d’échanges et de réflexions avec l’équipe de recherche de la chaire Laudato si’. Pour une nouvelle exploration de la Terre du Collège des Bernardins.

Laudato si’

Aujourd’hui, le Collège des Bernardins mobilise un collectif de chercheurs – explorateurs de cette nouvelle terre – autour d’une nouvelle chaire de recherche – action – pédagogique. Leur mission est de contribuer à renouveler nos paradigmes, nos imaginaires, nos affects afin d’apprendre à
« aimer la terre et mieux l’habiter ».
Dès l’entrée la sérénité et la solennité du lieu engage à une introspection,
mais aussi attise la curiosité.

Studies into the Past

Laurent Grasso a imaginé une nouvelle série de peintures
« Studies into the Past ». À la forêt du Mont Sainte-Odile, son lieu d’inspiration, répond la forêt de colonnes de la voûte cistercienne du Collège des Bernardins, sur lesquelles viennent se fixer, par un système d’accroche en bronze, une série d’huiles sur bois. L’artiste s’est inspiré du 17e siècle hollandais présentant des intérieurs historiques. Plus précisément de l’accrochage des obiit, ces armoiries funéraires placées aux piliers des églises.

Architecture gothique

Des phénomènes étranges caractéristiques de son travail (nuages, rochers en lévitation, flammes) semblent avoir traversé l’écran pour envahir les vastes architectures voutées représentées sur les peintures.
« Studies into the Past » vient prolonger un travail de longue date sur le temps et le voyage dans le temps où des systèmes d’échos et de mise en abyme viennent approfondir ici un sentiment de flottement face à cette archéologie imaginaire du travail.

L’enfant au renard

 Une sculpture en bronze montre un enfant portant un renard. Avec la silhouette mince du personnage et ses traits simplifiés, elle rappelle les pâtres des crèches de Noël, venant offrir leur présent, muet mais terriblement évocateur.
« À la manière d’un messager ou d’un oracle, le jeune enfant semble avoir accès à quelque chose d’unique ou détenir la clé d’un savoir », explique Laurent Grasso.

Il invite le visiteur dans la sacristie où un film le met en scène comme l’animal qu’il tient dans ses bras.

Argos Panoptès

Sur les murs de la nef, des branches métalliques certaines sont garnies de néon.  Ces arbres ont des yeux en guise de fruits. Passionné par le thème de la vision, de la surveillance et du pouvoir de l’objet, Laurent Grasso s’est emparé de ce motif (une tige d’apparence végétale supportant des yeux) pour créer des sculptures évoquant le « regard omniscient », celui de la Sainte Lucie, qui porte l’objet de son martyre sur un plateau, celui de Sainte Odile (Ste patronne de l’Alsace) qui tient ses yeux sur un livre ouvert ou celui d’Argos Panoptes, le berger aux cent yeux.

 Anima, le film

Au départ, il y a cette singularité du Collège des Bernardins : un dialogue permanent entre la recherche et l’art qui chacun, s’exerce en liberté.

« C’est une première pour le Collège des Bernardins parce que c’est une création. Ce que je trouve particulièrement original c’est la façon dont nous avons mis en place une conversation qui n’a jamais été ni exactement une commande, ni exactement quelque chose qui se déroule où tout est appliqué » explique Gregory Quenet, titulaire de la chaire du Collège des Bernardins, en référence à sa collaboration avec Laurent Grasso. (extrait du film)

C’est au Mont Saint-Odile, en Alsace, que l’artiste a trouvé son inspiration mais Laurent Grasso a avancé sur le chemin de la création artistique, nourri des échanges des historiens et théologiens du Collège des Bernardins, ainsi que d’un spécialiste de la géobiologie. « Je me suis toujours méfié d’un art trop illustratif (…). J’ai une approche plus intuitive. Mon travail est assez sensoriel mais aussi très informé » explique Laurent Grasso. 

Informations pratiques

Collège des Bernardins
20 rue de Poissy, Paris

Horaires d’ouverture :

  • Du lundi au samedi de 10h à 18h
  • Le dimanche de 14h à 18h

Fermée à partir de 14h exceptionnellement le 18 novembre, et du samedi 10 décembre 12h au jeudi 15 décembre 14h

Livre d’art

Parution le 5 janvier 2023
Catalogue d’exposition
ANIMA LAURENT GRASSO
chez GALLIMARD Livres d’art

galerie Perrotin

Oskar Kokoschka. Un fauve à Vienne

Jusqu’au 12 février 2023 au MAM Paris

Commissariat: Dieter Buchhart, Anna Karina Hofbauer et Fanny Schulmann, assistés d‘Anne Bergeaud et Cédric Huss 

Le Musée d’Art Moderne de Paris présente la première rétrospective parisienne consacrée à l’artiste autrichien Oskar Kokoschka (1886-1980). Retraçant sept décennies de création picturale, l’exposition rend compte de l’originalité dont fait preuve l’artiste et nous permet de traverser à ses côtés le XXe européen.

« Je suis expressionniste parce que
je ne sais pas faire autre chose qu’exprimer la vie »

Oskar Kokoschka

Podcast
Peintre, mais aussi écrivain, dramaturge et poète, Oskar Kokoschka apparaît comme un artiste engagé, porté par les bouleversements artistiques et intellectuels de la Vienne du début du XXe siècle. Par sa volonté d’exprimer l’intensité des états d’âmes de son époque, et un talent certain pour la provocation, il devient pour la critique l’enfant terrible de Vienne à partir de 1908 où, soutenu par Gustav Klimt et Adolf Loos, il inspire une nouvelle génération d’artistes, parmi lesquels Egon Schiele. Portraitiste de la société viennoise, Kokoschka parvient à mettre en lumière l’intériorité de ses modèles avec une efficacité inégalée.

Un « enfant terrible » à Vienne

(1904-1916) Prônant l’unité des arts, les artistes de la Sécession et de la Wiener Werkstätte (1903-1932) inventent alors à Vienne des formes douces et végétales, qui prolifèrent aussi bien en art qu’en architecture. L’irruption d’Oskar
Kokoschka sur cette scène artistique fait donc l’effet d’une « explosion dans un jardin », comme l’analyse l’historien Carl Emil Schorske.
Kokoschka s’affirme par la crudité de ses dessins et textes, qui annoncent le courant expressionniste. Son premier poème illustré en 1908, Les Garçons qui rêvent, dédié à Gustav Klimt en remerciement de son soutien, crée un scandale lors de son exposition à la « Kunstschau » de Vienne. Celui-ci se répète une année plus tard avec la première représentation de sa pièce de théâtre Meurtrier, espoir des femmes.
Qualifié de fauve par la critique, Kokoschka se rase la tête pour ressembler
à un bagnard.

Les années de Dresde

(1916-1923) Déclaré inapte au service militaire, Kokoschka séjourne à
Berlin à la fin de l’année 1916, où il signe un contrat avec le
galeriste Paul Cassirer (1871-1926). Alors qu’il traverse une
phase de profonde dépression liée à la guerre, il est soigné
dans un centre de convalescence à Dresde. Il se rapproche
de la scène artistique de la ville, notamment théâtrale, qui
l’encourage à poursuivre ses créations dramatiques.

En 1919, il obtient un poste de professeur à l’Académie des beaux-arts,
qu’il occupe jusqu’en 1923.
Inquiet de l’instabilité du climat politique, des explosions révolutionnaires comme de leurs sanglantes répressions, il s’en distancie en affirmant la nécessaire indépendance de l’art. Il proteste notamment contre l’endommagement d’une toile de Rubens lors d’affrontements à
proximité des musées de Dresde. Cela lui vaut la réprobation d’artistes Dada
comme George Grosz (1893-1959) et John Heartfield (1891- 1968), qui publient une tribune à son encontre.
À Dresde, Kokoschka visite régulièrement les musées et leurs chefs-d’oeuvre de Rembrandt, Titien, Raphaël. Il recherche de nouvelles formes d’expression picturale, tentant de « résoudre le problème de l’espace, de la profondeur picturale, avec des couleurs pures,

Oskar Kokoschka
Autoportrait / Selbstbildnis, 1917

pour percer le mystère de la planéité de la toile ».

Les oeuvres de cette période se distinguent par leurs couleurs intenses et lumineuses, appliquées par juxtaposition et épousant librement les formes du sujet.

La Poupée

En 1918, plusieurs années après sa rupture d’avec Alma Mahler, Kokoschka commande à l’artiste Hermine Moos (1888-1928) une poupée à taille réelle à son effigie. L’artiste tente de concrétiser ainsi un fantasme, par ailleurs
récurrent dans la littérature depuis le personnage d’Olympia des Contes d’Hoffmann (1817), celui d’une femme artificielle. Cette poupée fétiche est réalisée sur les instructions que Kokoschka fait parvenir à Hermine Moos, qui
sont très précises dans les attendus esthétiques comme tactiles de l’objet. De nombreuses interprétations ont cours sur sa signification et sa place dans l’oeuvre de Kokoschka : objet auto-thérapeutique, censé réparer les
blessures amoureuses et le traumatisme de la guerre ; mais aussi instrument performatif avant-gardiste, permettant à l’artiste d’explorer d’autres aspects de sa création, puisqu’il se met en scène et se peint en sa compagnie. En 1922, à l’issue d’une soirée, Oskar Kokoschka finit par détruire la poupée. Cette dernière séquence s’inscrit dans une représentation de la violence des hommes envers les femmes qui trouve de nombreux échos dans les réalisations des artistes de l’époque, du peintre George Grosz au cinéma expressionniste allemand.

Voyage et exil

Voyageur infatigable, il entreprend dans les années 1920 d’incessants périples en Europe, en Afrique du Nord et au Moyen Orient. Sa fragilité financière l’oblige à revenir à Vienne, qui connaît dès le début des années 1930 d’importants troubles politiques, le contraignant à partir pour Prague en 1934. Qualifié par les nazis d’artiste « dégénéré », ses oeuvres sont retirées des musées allemands. Kokoschka s’engage alors pleinement pour la défense de la liberté face au fascisme. Contraint à l’exil, il parvient à fuir en Grande-Bretagne en 1938 où il prend part à la résistance internationale.

La Suisse

Après la guerre, il devient une figure de référence de la scène intellectuelle européenne et participe à la reconstruction culturelle d’un continent dévasté et divisé. Il explore les tragédies grecques et les récits mythologiques afin d’y trouver le ferment commun des sociétés. Prenant ses distances avec la culture et la langue germanique, il s’installe à Villeneuve, en Suisse romande, en 1951. Les oeuvres des dernières années témoignent d’une radicalité picturale proche de ses premières oeuvres, dans leur absence de concessions. Sa croyance dans la puissance subversive de la peinture, vecteur d’émancipation et d’éducation, demeure inébranlable jusqu’à sa mort.

Oskar Kokoschka. Un fauve à Vienne réunit une sélection unique des 150 oeuvres les plus significatives de l’artiste grâce au soutien d’importantes collections européennes et américaines.

Podcast

Sur France Culture l’Art est la matière

Informations pratiques

Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris
11 Avenue du Président Wilson 75116 Paris

Standard : Tél. +33 1 53 67 40 00

Horaires d’ouverture

Du mardi au dimanche de 10h à 18h (fermeture des caisses à 17h15)

Nocturne
le jeudi soir jusqu’à 21h30 (fermeture des caisses à 20h45)

Hyperréalisme. Ceci n’est pas un corps

Sam Jinks, Untitled (Kneeling Woman), 2015 © Sam JinksCourtesy of the artist, Sullivan+Strumpf, Sydney and lnstitute for Cultural Exchange, Tübingen

Plongez  vous-mêmes dans l’univers troublant de l’hyperréalisme.

Participez à l’exposition et comparez votre corps avec les œuvres inédites présentées !

Etre capable de se mettre à nu, au sens propre, devant les autres, c’est d’abord se lancer un défi, surpasser les peurs et les doutes que l’on peut avoir par rapport à soi-même. Dans un contexte naturiste, on ne « montre » pas, on ne s’exhibe pas, on « est », tout simplement. Un retour à l’essentiel, détaché du paraître, permettant de vivre pleinement l’expérience de visite, de manière respectueuse, pudique et originale.

Les 10, 11 et 17 novembre 2022, pour la première fois le Musée Maillol accueillera des groupe de visiteurs entièrement nus pour visiter l’exposition itinérante « Hyperréalisme. Ceci n’est pas un corps ».

Visite ouverte à tous, sous réserve d’être nu.e.s

Date : Trois créneaux de visite sont proposés les 10, 11 et 17 novembre 2022 à 19h30, 20h15 et 21h

Fermeture de l’exposition à 22h30

 
Plongez dans l’univers troublant de l’hyperréalisme.
INTRODUCTION

L’exposition itinérante « Hyperréalisme. Ceci n’est pas un corps » s’expose au Musée Maillol dans une version enrichie et en partie inédite,
jusqu’au 5 MARS 2023

Une coproduction de Tempora et Institut für Kulturaustausch en étroite collaboration avec le Musée Maillol.

L’hyperréalisme est un courant artistique apparu dans les années 1960 aux Etats-Unis et dont les techniques sont explorées depuis lors par de nombreux artistes contemporains.

L’exposition présente une série de sculptures qui ébranlent notre vision de l’art. Réalité, art ou copie? L’artiste hyperréaliste tourne le dos à l’abstraction et cherche à atteindre une représentation minutieuse de la nature au point que les spectateurs se demandent parfois s’ils ont affaire au corps vivant. Ces œuvres génèrent ainsi une sensation d’étrangeté, mais sont toujours porteuses de sens.

Le sous-titre de l’exposition fait référence à la célèbre œuvre de René Magritte « Ceci n’est pas une pipe », qui questionnait le rapport de l’art à la réalité. Certains artistes exposés s’efforcent de donner du corps humain la représentation la plus fidèle et vivante possible tandis que  d’autres, au contraire, questionnent la notion de réalité : nouvelles technologies, représentations populaires détournées, déformations….

  • Le parcours rassemble plus de 40 sculptures d’artistes internationaux de premier plan dont : George Segal, Ron Mueck, Maurizio Cattelan, Berlinde De Bruyckere, Duane Hanson, Carole A. Feuerman, John DeAndrea,…
  • Une exposition représentative d’un courant artistique dans son ensemble qui vous transporte aux frontières du réel
  • Certains secrets de fabrication des œuvres sont révélés par les artistes eux-mêmes.

L’œuvre s’appelle Caroline. Firman donne souvent des prénoms comme titre à ses œuvres. Cela leur confère une véritable existence, un caractère narratif. Chaque œuvre devient un être à part entière. Pourtant dans ce cas, malgré son prénom, elle reste anonyme parce que le spectateur ne voit jamais le visage de Caroline – son identité reste donc abstraite.
L’intérêt de Daniel Firman pour l’énergie et la dynamique du corps ainsi que pour le mouvement et le rapport à l’espace est manifeste dans ses sculptures. Caroline représente une jeune femme dans un moment d’angoisse ou de désespoir. Ses bras et sa tête sont dissimulés sous son pull, sa posture, les avant-bras appuyés contre le mur, renforce l’impression de contrainte et le sentiment opprimant qui se dégagent de l’œuvre. Réalisé à l’aide de moulages, ce personnage à taille humaine est entièrement habillé. Malgré son visage et ses bras soustraits à notre regard, on a l’impression d’être face à un véritable être humain.

REPLIQUES HUMAINES

Dans les années 1960, Duane Hanson et John DeAndrea réalisent des sculptures saisissantes de réalisme grâce à des procédés techniques complexes. Le haut degré de réalisme atteint par leurs œuvres crée une illusion d’authenticité physique, et l’effet produit est si convaincant qu’il nous semble faire face à des alter ego en chair et en os. Les œuvres de ces artistes ont eu par la suite une influence déterminante sur les développements qu’a connu la sculpture au cours des cinquante dernières années. Des artistes comme Daniel Firman se sont inscrits dans le fil de cette pratique et l’ont perpétuée. Véritables miroirs de la condition humaine, ces œuvres révèlent la perception changeante de l’image de l’humain aux XXe et XXIe siècles.

MONOCHROMES

Après de nombreuses années dominées par l’art abstrait, George Segal ouvre à nouveau la voie aux représentations réalistes de l’humain avec ses sculptures monochromes. Tout un courant s’est engouffré dans brèche. Au premier abord, l’absence d’utilisation de couleurs naturelles atténue l’effet réaliste, mais le caractère monochrome des personnages sculptés renforce en revanche les qualités esthétiques liées à la forme. Des artistes comme Thom Puckey ou Brian Booth Craig ont exploité cet effet avec succès en créant des œuvres qui interrogent l’universalité de la nature humaine.

MORCEAUX DE CORPS

La sculptrice américaine Carole A. Feuerman dont les célèbres nageuses, introverties et volontaires, semblent avoir atteint une parfaite harmonie intérieure, fait œuvre de précurseur. Par la suite, dans les années 1990, de nombreux artistes se sont mis à utiliser le style hyperréaliste de manière inédite et personnelle. Au lieu de créer l’illusion d’une corporéité parfaite, prise dans son entièreté, ils se sont concentrés sur des parties spécifiques du corps, s’en servant pour véhiculer des messages à tonalité humoristique ou dérangeants, comme c’est le cas par exemple dans l’œuvre de Maurizio Cattelan où des bras tendus, pris isolément du corps, font référence à des événements politiques de l’histoire récente.

Vu sous un certain angle, le buste de Lily semble être un portrait entier mais lorsque nous changeons de perspective, on découvre qu’il s’agit en réalité d’un fragment. Les sculptures de Jamie Salmon, réalisés avec une minutie surprenante de détails, jouent avec l’idée d’inachevé et introduisent une rupture par rapport à l’esthétique du réalisme. À l’ère du numérique, ses corps fragmentés mettent en lumière la difficulté de distinguer ce qui est réel de ce qui ne l’est pas.

En créant de grands portraits sculptés d’artistes de renom tels qu’Andy Warhol ou Frida Kahlo, l’artiste japonais Kazu Hiro crée un rapport de forte intimité avec ses personnages emblématiques. Hiro sculpte les couches de silicone de l’intérieur vers l’extérieur, et réussit ainsi à faire affleurer les émotions enfouies de ses personnages. Le piédestal supportant l’immense tête de Warhol est porteur d’une part d’ambiguïté. La stabilité et la résistance de son matériau sont altérés par sa forme, la sculpture se dissout en effet dans sa partie inférieure en un amas fluide.

JEUX DE TAILLE

Dans les années 1990, l’artiste australien Ron Mueck révolutionne la sculpture figurative avec ses œuvres aux formats inhabituels. En jouant sur l’échelle de ses personnages de manière radicale, il place l’accent sur des thèmes existentiels tels que la naissance ou la mort. Des artistes tels que Sam Jinks et Marc Sijan capturent quant à eux la fragilité de la vie à travers leurs représentations de la physionomie humaine – représentations qui, bien que de taille réduite, n’en sont pas moins incroyablement réalistes. En revanche, les œuvres surdimensionnées de Zharko Basheski produisent un effet de distanciation, qui nous force à adopter une nouvelle perspective.

REALITES DIFFORMES

Au cours des dernières décennies, les innombrables progrès scientifiques et les nouvelles perspectives induites par les communications numériques ont conduit à un changement radical de notre compréhension de la réalité. Influencés par la réalité virtuelle, des artistes comme Evan Penny et Patricia Piccinini se sont mis à observer les corps en partant de perspectives déformées. Tony Matelli quant à lui a choisi de défier les lois de la nature, tandis que Berlinde De Bruyckere questionne la mort et le caractère éphémère de l’existence humaine en présentant des corps contorsionnés. La valeur de la vie et le sens profond qui lui est attaché sont au cœur de l’approche hyperréaliste de la sculpture.

FRONTIERES MOUVANTES

De quoi sera fait l’avenir de la sculpture hyperréaliste ? Quel pan du mouvement sera-t-il à même d’appréhender l’essence de la frontière toujours plus perméable entre l’homme et la technologie ? Dans le flot continu d’images numériques se reflètent les nouvelles formes de construction de l’identité, qui aboutissent dans les One Minute Sculptures d’Erwin Wurm, à la reproduction perpétuelle par le visiteur ou au modèle de postures défiant la raison. Des visions fictionnelles ou des réalités absurdes se substituent aux sujets issus du quotidien et permettent de mieux comprendre ce nouveau monde de l’entre-deux« hypernaturel » et jusqu’alors inconnu.

Enfin, les personnages cinématographiques« animés » de Glaser/ Kunz nous mettent face à une notion élargie de la définition de la sculpture hyperréaliste et à un glissement des frontières entre réalité et fiction à l’ère du bouleversement numérique.

Informations pratiques

Accès

59-61 rue de Grenelle
75007, Paris

Horaires

Ouvert tous les jours
HORAIRES JOURNALIERS

NOCTURNES
Ouverture le mercredi jusqu’à 22h

Métro

Rue du Bac
Saint-Sulpice4
Sèvres-Babylone10/12

Jacques Thomann – le regard poétique

Jacques Thomann du Haut-Pays triptyque 2015

Germain Roez commissaire
Exposition visible au Pôle Culturel de Drusenheim,  jusqu’au 17/12/2022

Dès que l’on pénètre dans l’espace Paso, on est ébloui par les couleurs.
On s’en approche avec gourmandise, pour en détailler le langage.


Jacques Thomann est un coloriste né, il joue de la couleur, comme un musicien
égrène les notes dans un concerto, en dialogue avec le chef et l’orchestre, tout en exécutant des envolées lyriques. Harmonie ou dissonance, tendance figurative ou expressionnisme abstrait ?
Un mélange harmonieux où la couleur est maîtresse.

                                         Vies silencieuses pastel

Mais aussi il sait être minimaliste avec ses pastels à l’huile, d’une élégance
subtile.

l’image peinte prend une autre parole, elle prête une voix qui n’est pas le constat glacé éphémère de la photographie d’information

Jacques Thomann – extrait du catalogue
Peinture d’histoire

Ses oeuvres témoignent de l’histoire de l’actualité du monde « de l’aube« 
dépeint le désastre nucléaire de Fukushima au Japon. Elles nous donnent à voir, la surprise, l’incrédulité, le chaos de l’esprit et du monde.

                                             

De l’intranquillité des toiles

La pandémie a permis à Jacques Thomann de se poser, de réfléchir, de mettre à jour 3 ouvrages ordonnant plus de 50 années de dessins, peintures, carnets de voyages. Un travail rétrospectif qui rend compte d’une forte liberté de l’écriture picturale, de la couleurs, ainsi que des sujets des plus éclectiques. (catalogue)

Sujets plus éclectiques, politiques, philosophiques, poétiques, ironiques se montrent aux cimaises du Pôle. Sensualité, rêveries, qui est ce Galant de nuit ?

Les titres

La lecture des titres apporte autre chose qu’une indication sur la circonstance et le lieu de telle apparence de paysage …… autre chose aussi que des éléments pour résoudre l’étrangeté visible de la composition réunissant des figures, des objets pris dans le flux ou le partage des couleurs (catalogue)

                                                          Le Parlement

De l’intemporalité

Il a développé le sens de l’observation, relevé et assimilé les aspects de la nature, des humains, des nuages, du ciel, des amis, tout est sujet, tout est couleur.

A ferrailler au pastel gras ou maigre, à l’encre de chine ou bien à l’aquarelle, à la gouache, l’aventure de la peinture, à ce jour, me fait prendre conscience que le sujet serait peut-être, la matière seule ?
Rendre visible ou pas le sujet ?

Jacques Baumann
Pratique

Pôle Culturel
2 Rue du Stade
67410 DRUSENHEIM

03 88 53 77 40

contact@museepaso.fr