Sommaire du mois d'août 2017

© photo Haupt & Binder

06 août 2017 : Jérôme Zonder. The Dancing Room
10 août 2017 :  A World Not Ours
14 août 2017 :  Art/ Afrique, le nouvel atelier à la Fondation Vuitton
15 août 2017 :  L’Assomption
23 août 2017 : dOCUMENTA 14 Kassel

dOCUMENTA 14 Kassel

Pour sa 14e édition, la dOCUMENTA, rendez-vous
quinquennal de l’art contemporain réunit 160 artistes
internationaux, à Kassel.
Ils sont répartis sur plus de 20 sites
jusqu’au 17 septembre, dans la ville de Kassel, capitale
de la Hesse allemande. La question des réfugiés et des
frontières est omniprésente dans les œuvres, qui veut
ignorer le marché de l’art et ses idoles. En effet point
de star du marché occidental comme à la Biennale de Venise,
ici c’est la politique qui est abordée. A Kassel, la critique
du système est une tradition.

Daniel Knorr  sculpture fumante, Expiration Movement

C’est « the place to be« de l’été qui fait accourir de tous les
continents, artistes, curators, directeurs de musée,
collectionneurs et amateurs qui se veulent être dans le vent.
Certains chanceux ont déjà assisté au volet I de Documenta 14
à Athènes. Vous pouvez lire ici un résumé d
un curieux des arts.
C’est le directeur artistique, le Polonais
Adam Szymczyk, qui a la première fois ouvert cette manifestation
d’abord en Grèce le 8 avril dernier, puisant dans  l’actualité riche,
matière à réflexion et renouveau.
Pourquoi Athènes ? Pour célébrer la cité de Socrate, mais surtout
pour se déclarer solidaire d’un pays soumis aux exigences
financières de l’Europe en général et de l’Allemagne en particulier.
Parthénon des livres censurés de Marta Minujin

C’est une manifestation de très grande ampleur, qui envahit la ville.
Les principaux lieux sont le Palais Fridericianum, la
Documenta Halle, les musées Bruder Grimm, Natur im Ottoneum,
le musée de la sculpture, etc … le pavillon de l’Orangerie,
le Palais Bellevue, les 2 Neue Galerie l’une bâtiments récupéré
d’une ex-poste, la Karlsaue.
Hiwa K When we where Exhaling Images

La visite demande de l’organisation, une bonne constitution
physique, et une bonne paire de chaussure, mais aussi du temps.
Les hôteliers vous proposent d’entrée une carte de tram selon
vos besoins. Ce qui est bien commode, Kassel est bien desservie
en trams et bus.

Premier lieu de rencontre sur la FriedrichPlatz :
« Le Parthénon des livres« , (ci-dessus) installation artistique
monumentale, qui est l’attraction majeure de la Documenta.
L’oeuvre spectaculaire de la plasticienne argentine
Marta Minujin, est un plaidoyer contre la censure sous toutes
ses formes.
L’oeuvre a exactement les mêmes dimensions que le Parthénon:
70 mètres de long sur 31 mètres de large, et 10 mètres de hauteur.
Symbole fort dans une Allemagne hantée et honteuse de son passé
nazi, le « Parthénon des livres » a été bâti à l’endroit même où en
1933 furent brûlés les livres d’auteurs juifs ou marxistes par
les sbires d’Adolf Hitler.
Antonio Vega Macotelas, Mill blood

 Le «moulin à sang», qui se présente comme un jouet oublié
et joyeux, dans la Karlsaue  est la réplique exacte d’un appareil
qui a été vraiment exécuté par Antonio Vega Macotela.
Lorsque les colonisateurs ont apporté l’argent des montagnes
et les ont estampillés dans des pièces de monnaie et des barres,
des ânes ont conduit de tels moulins, mais le travail était trop dur.
Et quand il n’y avait plus d’ânes, les plus pauvres des pauvres
devaient s’adresser à la population indigène.

La vidéo de Bill Viola The Raft est une image de la destruction
et de la survie, une métaphore flagrante et viscérale de l’expérience
collective des catastrophes naturelles et des actes de guerre.

Bill Viola the Raft

 Britta Marakatt Labba raconte des histoires et des mythes
sur ses origines et la survie de la terre. Elle
crée des mondes
miniatures politiquement engagés.

Les oeuvres de Cecilia Vicuña compose des poèmes
dans l’espace, «quipoems» – une contraction
du poème et du quipu. Un dictionnaire en ligne définit quipu ,
plutôt réducteur, comme « un dispositif composé d’un cordon
avec des cordes nouées de différentes couleurs attachées,
utilisées par les anciens Péruviens pour enregistrer des événements,
un type d’écriture précolombienne, tradition littéraire qui a donné
au monde des personnalités telles que Gabriela Mistral,
Pablo Neruda et Nicanor Parra. Les épaves des bateaux utilisés
par les réfugiés et échoués sur les côtes grecques sont devenues
une installation de l’artiste mexicain Guillermo Galindo et
transformées en instrument de musique.

 L’artiste irakien-allemand Hiwa k (ci-dessus)
(When we where Exhaling Images)
a empilé des tuyaux
d’égout sur la Friedrichsplatz en face de la documenta halle,
sous forme d’un grand cube. C’est une œuvre d’art puissante,
dont beaucoup de références se révèlent peu à peu.
De loin, il ressemble à un chantier. Si vous vous rapprochez,
vous pouvez voir que les tuyaux d’égout sont confortablement
meublés: avec des lits, des livres, des plantes vertes et des
cuisines avec du café.


La Norvégienne Maret Anne Sara à la Neue Galerie,
dénonce l’oppression des Samis par le pouvoir central
scandinave, en présentant un rideau de crânes de rennes
percés, ainsi que des photos de sa famille qui la soutient
dans son action.

Maret Anne Sara

Au Palais Bellevue, c’est la vidéo de

La vidéo de l’artiste israélo-américain Roee Rosen, est un bonheur,
clin d’oeil ironique à Jeff Koons, entre autres.

Ci-dessus c’est un résumé de ce que j’ai apprécié
Il y a une installation d‘Olaf Holtzapfel, dont je n’ai pas
saisi la nécessité de couper des arbres afin de construire
sa sculpture.

Olaf Holtzapfel

Bien que toutes les œuvres et installations en extérieur soient
prévues pour être temporaires, seize créations exceptionnelles
ont pu être durablement acquises à ce jour –
donations ou acquisitions issues des diverses documenta.
Leur maintien en place n’a pas résulté d’une politique
d’acquisition systématique, mais de l’engagement participatif
de la population ainsi que de la diligence des artistes et des
mécènes. Pour onze des seize œuvres d’art en extérieur de la
documenta (dont l’installation des 7000 chênes),

La ville de Cassel en a assumé la responsabilité en tant
que propriétaire.
Elles sont représentatives de ce que chaque documenta entendait
communiquer.
Elles reflètent ainsi des étapes importantes dans l’histoire
de cette exposition d’art mondiale et constituent des
exemples actualisés des rapports de l’art avec les espaces
urbains ou paysagers.
A consulter ici
Déplacement et séjour à titre personnel
à mes frais

Jérôme Zonder. The Dancing Room

Au musée Tinguely de Bâle visible jusqu’au
1 novembre 2017,
Avec la présentation de Mengele-Totentanz (1986)
de Jean Tinguely
dans la salle nouvellement conçue à cet effet,
le Musée Tinguely lance une série d’expositions
avec de jeunes artistes qui font référence à cette oeuvre
tardive de Tinguely et en abordent l’actualité encore
aujourd’hui valable.

Le coup d’envoi est donné par Jérôme Zonder
(né en 1974 à Paris), qui compte parmi les grands
dessinateurs de sa génération. Avec ses représentations
grotesques, inspirées de Jérôme Bosch, Paul McCarthy
ou Otto Dix, il parvient à exprimer les atrocités humaines
indicibles et catastrophes humanitaires des 100 dernières
années pour en faire des « Danses macabres »
contemporaines.
Une quarantaine de dessins, une oeuvre murale
grand format et une construction sculptée composent
ainsi une vaste installation en dialogue direct avec
Mengele-Totentanz
La part politique, narrative et historique qui est très
forte, pas simplement dans le récit de la pièce,
renforce le lien qui s’établit entre les 2 espaces.
Un dessin en 3 temps : la première structure c’est la herse
que l’on aperçoit lorsque l’on arrive dans la salle, qui nous
bloque, avec sa présence menaçante, dont l’usage et le
sens nous échappe. Pour Zonder c’est une manifestation
de la grande histoire.

Le grand dessin à l’empreinte sur toile, travaillé
à la mine de plomb et à la poudre de charbon
est réalisé d’après une photo des wokings deasds,
une foule de zombis qui tendent les bras vers nous,
avatars contemporains de la danse macabre.
Cela représente le lien très fort avec le travail de
Tinguely.
Puis le grand mur d’images, une grande grille, comme
un mur Internet, un Trumbl, un album de famille privé,
axé sur la violence, la cruauté, lié à la danse macabre.
Un Pingpong, un jeu de renvoi entre l’image de la mémoire,
de la mauvaise conscience, l’album de la cruauté, du
cauchemar qui tente de nous saisir. C’est aussi un résumé
du rapport à la vanité et en même temps un appel vers
le récit de Tinguely, très littéralement
une évocation de la morbidité de sa pièce, comme si elle
nous arrivait d’entre les morts, portant un message
pour nous rappeler que nous sommes mortels.

Le souvenir à l’intérieur, sur le mur est une sélection
de dessins de 2010 a 2017 qui sont tous en rapport avec
la violence.
Il y a les 3 niveaux de référence de genre graphique
avec lequel il travaille, les images d’archives historiques,
travaillées à l’empreinte, un état de la mémoire et
du corps liés à Auchwitz, 2 images qui viennent de
Didi Huberman, les chaires grises de la maison rouge,
les premiers de la nouvelle série sur la guerre d’Algérie,
des images d’archives de 1957 d’un interrogatoire
à Constantine.
C’est le travail de cette mémoire qu’il veut saisir à bras
le corps, d’un côté les archives historiques classiques,
du côté de l’histoire de l’art, la grande peinture de
Baldung Green, Christian van Couwenbergh (1604-1667),
Le viol de l’esclave noire.

Travail sur le viol et la domination du blanc sur le noir,
une violence plus métaphorique sur la jeune fille
et la mort du Kunstmuseum de Bâle, la figure de la
domination masculine 15 e s.
D’un côté les archives, de l’autre côté les mélanges
qu’il fait avec des travaux de l’histoire ici avec
les jeux d’enfants et des dessins qui sont dans
l’immédiateté des faits d’actualité, des moments d’histoire
qui marquent.

Jerôme Zonder Tinguelys Mengele-Totentanz

Il est passé des travaux de la forme du dessin
à des travaux de forme d’écriture, à quelque chose qui
s’incarne dans la façon de travailler le matériau et
le support dans la physicalité de son travail.
Dans ses portraits en noir et blanc, l’artiste français rend
hommage aux femmes, icônes féministes ou anonymes,
les “fiancées du diable”.
Elle s’appelle Garance, comme l’héroïne des
Enfants du paradis, qui chante
« Je suis comme je suis » en arpentant le
« boulevard du Crime » dans le film de Carné et Prévert.
Soixante-dix ans plus tard, elle n’a rien perdu de son
audace en quittant le grand écran pour réapparaître
dans les dessins noir et blanc de Jerôme Zonder.

Mengele-Totentanz (1986). La sculpture-machine en 14 parties
est réinstallée dans une salle du musée spécialement conçue à
cet effet afin d’évoquer l’apparence d’une chapelle.
L’oeuvre doit son nom au maître-autel figurant au centre,
une ensileuse à maïs (tellement déformée qu’elle est presque
méconnaissable) de la marque Mengele ayant appartenu à la
famille de l’effroyable médecin nazi.
Toutes les pièces utilisées ont été récupérées après un incendie
dévastateur dans une ferme non loin de l’atelier de Tinguely,
à Neyruz, près de Fribourg.

La danse macabre constitue à Bâle un sujet de longue tradition,
qui culmina avec la fameuse Basler Totentanz, réalisée vers 1450
sur l’enceinte de l’ancien couvent des Dominicains, et maintes
fois citée et reproduite depuis. Le message de la représentation
était multiple : rappeler le caractère éphémère de la vie et
l’égalité de tous devant la mort, tout en puisant dans les motifs
et pensées des idéaux humanistes émergeant à cette époque.
Le catalogue « Jérôme Zonder » est publié par l’édition
Galerie Eva Hober, Paris.
La publication en français, anglais et allemand avec un
avant-propos de Eva Hober et des contributions de
Roland Wetzel et Catherine Francblin
le catalogue, Mengele-Totentanz (1986) de Jean Tinguely
au Musée Tinguely paraît aux Éditions Kehrer,
Heidelberg/Berlin, une publication richement illustrée,
avec des textes récents de Sophie Oosterwijk, Sven Keller
et Roland Wetzel ainsi qu’un entretien entre Jean Tinguely
et Margrit Hahnloser, enregistré en 1988.
La publication paraît en allemand, français et anglais.
Horaire du musée :
Mardi – dimanche, 11h – 18h
Accès :
Depuis la gare SBB, tram 2, descendre à Wettsteinplatz,
puis bus n° 37
 

Robert Cahen à Macao

« La musique ne doit pas être le miroir de l’image,
mais son alter ego
 »
Robert Cahen

Robert Cahen
, ce poète aux semelles de vent a été
choisi pour fêter les 30 ans de l’Alliance française à Macao.
en présence de Eric BERTI
Consul General of France in Hong Kong and Macau
La vidéo installation de Robert Cahen  » Crossing of Time « 

et de son collaborateur  Thierry Maury sera projetée
lors du vernissage au Sofitel de Macao, samedi le 15 juillet,
at 4:00pm at the lobby
and the concert of Laurent Couson & Friends
“Tribute to Gainsbourg”
Sa réputation de vidéaste n’est plus à faire.
Vidéaste, réalisateur et compositeur de formation,
Robert Cahen est issu de la traversée des frontières entre
les arts. Diplômé du Conservatoire national supérieur de musique
de Paris en 1971, il a su enrichir la vidéo des expérimentations
techniques et linguistiques de la musique concrète.

Robert Cahen & Thierry Maury photo de Jorge Luis Vaca Forero

Chercheur à l’ORTF et pionnier dans l’utilisation des
instruments électroniques, il traite les images comme les sons,
les organise, les transforme, ouvrant les possibilités d’échange
entre les modèles, les paramètres de l’image et ceux de la musique.
Son travail est reconnaissable à cette manière d’explorer le son
en relation avec l’image mais aussi de traiter les ralentis,
qui rendent visible un « temps retenu », pour construire
un véritable univers poétique. Juxtaposition d’images fixes et
en mouvement, oscillation, multiplicité des points de vue,
expérimentation physique de la vidéo dans l’espace
constituent autant de traits caractéristiques de son oeuvre.
Dès sa première vidéo, L’Invitation au voyage (1973),
il manipule l’image et la rend malléable.
Voici ci-dessous la vidéo tournée pour les 30 ans de l’Alliance
Française à Macao ici
En 1983, il réalise Juste le temps, fiction de 13 minutes
considérée comme l’une des vidéos les plus
importantes des années 1980.

Tout le monde se souvient de sa vidéo « Sanaa passage en noir »
tournée au Yemen et projetée au festival Musica.
Lauréat de la Villa Médicis Hors les murs en 1992, il a également
remporté le Grand Prix du Videokunstpreis du ZKM
de Karlsruhe pour Sept Visions fugitives,
en 1995.
Plusieurs des installations et mono-bandes de Robert Cahen
ont rejoint les collections de prestigieux musées en France et
à l’étranger.
Macao, photo Robert Cahen

De Hong Kong à Buenos Aires, Barcelone, en passant par Strasbourg,
Mulhouse, Besançon, Colmar, Grenoble, Paris, il parcourt le monde.
Son exposition « Entrevoir » au MACMS de 2015, suivi d’une autre
« Temps contre Temps » au musée du Temps de Besançon,
sa participation au Festival Musica de Strasbourg en 2013,
où il présenta Le Maître du Temps – Pierre Boulez dirige
« Mémoriale »,
qu’il a revisité pour le musée des
instruments de musique et présenté à la Philharmonie
de Paris en 2017.


Ushba et Tetnuld, est un opéra-poème multimédia de Nicolas Vérin,
qu’il illustra avec sa vidéo tournée en Géorgie.
D’Argentine en Italie, d’Afrique en Amérique, de master class
en workshop, pionnier de l’art vidéo, son oeuvre, empreinte
de thématiques universelles, s’intéresse en particulier aux questions
de temporalités et notamment au rapport musique et temps,
rythme et silence. Sa vaste production artistique, reconnue
dans le monde entier est accessible dans un coffret de DVD
D’Allemagne (ZKM) en Chine, de la Filature de Mulhouse,
à la Fonderie,
ses Paysages Urbains à Lille, du Jeu de Paume
à Paris, il est le « Juif errant » terme utilisé par lui-même dans
son allocution, lors de sa nomination en qualité de
chevalier des Arts et Lettres.

On ne peut pas oublier sa « Peinture mise en mouvement«  au
musée Unterliden de Colmar avant les travaux de rénovation.
Avec ses amis artistes il a « pris le temps » à la Fondation
Fernet Branca.

Ses yeux bleus sont toujours à l’affût de l’insolite, comme du beau,
qu’il aime partager avec nous. Ses prises de vue, ses vidéos, font
le bonheur de ses admirateurs et des suiveurs sur Facebook.
Il lui arrive aussi de faire tomber un piano (festival Chopin),
mais aussi les mots et les objets.
Tout en se souvenant de ses maîtres, il encourage les jeunes
artistes à avoir confiance en eux et à aller de l’avant.
Depuis l’année dernière c’est Jean François Kaiser
qui est devenu son galeriste à Strasbourg.
en tournage à Macao

La révolution est morte. Longue vie à la révolution !

Il ne reste que quelques jours pour voir les 2 expositions
jusqu’au 9 juillet 2017

Pour commémorer le centenaire de la Révolution russe,
le Kunstmuseum Bern et le Zentrum Paul Klee organisent
une double exposition
La révolution est morte. Longue vie à la révolution !
et enquêtent sur l’héritage artistique de la Révolution
de 1917.
Tandis que l’exposition du Zentrum Paul Klee, conformément à
son sous-titre « De Malevitch à Judd », est consacrée à l’impact
de l’avant-garde russe et de l’art non-fiurative en tant qu’idée
artistique, le Kunstmuseum Bern présente, sous le titre
De Deineka à Bartana, des oeuvres du Réalisme socialiste
dont elle montre les répercussions au fil de l’évolution de l’art
jusqu’à aujourd’hui.
Avec la distance historique, on s’interroge : comment juger cet
événement qui a profondément marqué son époque? Comment
évaluer ses répercussions sur la sphère artistique? Comment
la révolution sociale et politique en Russie, qui avait été précédée
par une révolution esthétique avec le Carré noir de Kasimir
Malevitch (1915), pouvait-elle déboucher sur une tendance
telle que le Réalisme socialiste? Comment comprendre une
orientation esthétique décriée jusqu’après la Guerre froide et
généralement considérée comme « propagande » et comme
« kitsch », représentant une dictature totalitaire et n’étant devenue
obsolète qu’en 1991 avec la dislocation de l’Union soviétique ?

Comment évaluer les prétentions de cette tendance
de l’art à « façonner la réalité », c’est-à-dire non seulement à
refléter la réalité du socialisme mais aussi à construire celle-ci
en la représentant, quand on songe à la façon dont on utilise
actuellement les mondes virtuels et les technologies numériques
de l’image ?

Qu’est-ce qui a changé dans le postulat idéologique de la vérité
en art ? Existe-t-il un art qui ne soit pas récupéré par l’idéologie
et puisse, aujourd’hui encore, prétendre être « révolutionnaire » ?
Voilà les questions qui ont inspiré l’idée de cette exposition La
révolution est morte. Longue vie à la révolution !
Le titre choisi, dérivé de l’expression française
« Le roi est mort. Vive le roi ! », résume les bases
mêmes de la problématique :
à une révolution succède toujours la suivante.

La Révolution russe de 1917 s’est, elle aussi, annoncée
dans de nombreux événements révolutionnaires qui l’ont
précédée. Le sujet se révèle d’une grande actualité dans
la mesure où le terme de révolution, comme désir de
bouleverser l’ordre économique et social existant, a
bénéficié d’un nouvel élan ces dernières années.
Dans le monde, les protestations contre les inégalités
sociales et économiques se multiplient ; l’idée de révolution
au sein même de l’art a d’ailleurs fait l’objet d’une nouvelle
attention, comme on a pu le voir, par exemple, dans
l’exposition «Soulèvements » présentée à Paris en 2016.
Et la nécessité qu’a l’art de se renouveler sans cesse implique
une proximité avec ce qui est « révolutionnaire ».

En 1917, année de la révolution russe, un besoin impérieux
de liberté conduisit au renversement du régime, ce qui permit
à la population, avec l’aide des bolcheviks, de se libérer de
conditions sociales injustes et de l’oppression des tsars. Il se
forma aussitôt un gouvernement révolutionnaire de conseils,
les soviets, qui opposa au régime autocratique une alternative
socialiste. Le mouvement de cette société révolutionnaire vers
le socialisme a été marqué par une industrialisation galopante.
L’évolution brutale conduisant d’un pays agricole à une nation
industrielle est passée par l’expropriation massive de la population,
dépossédée de ses terres et de ses biens, et par la
privation des droits civils. La collectivisation des campagnes,
organisée à la fin des années 1920 (regroupement des paysans
en kolkhozes) fut un désastre, dont le pays ne se releva
jamais. Des millions de familles furent expulsées et dispersées
dans toute l’Union soviétique. Cette population nomade devint
un réservoir de main d’oeuvre pour la révolution industrielle
soviétique. Elle remplit les grandes villes ainsi que les chantiers
et les camps du Goulag. Dans le même temps, le premier
plan quinquennal (1928–1932) provoqua la pire famine due à
l’homme, entraînant la mort de près de huit millions de paysans.

On se basa sur les doctrines de Marx, Engels et Lénine pour
réorganiser toute une nation. Mais cette révolution s’étendit
en réalité sur une centaine d’années. Elle avait commencé en
1891, lorsque la population, affamée, s’opposa pour la première
fois au gouvernement du tsar, et se termina en 1991 avec la
chute du régime soviétique.
dans l’ordre : Malewitsch, Rodtchenko, Kandinsky, Klee, Itten, Tatline
Accès par transports publics
Bus ligne 12 (direction Zentrum Paul Klee)
Jusqu’au terminus; l’arrêt est situé près du Restaurant Schöngrün
et de l’entrée nord du Zentrum Paul Klee.
De la gare de Berne (Hauptbahnhof) au Zentrum Paul Klee
par Käfigturm, Zytglogge, la partie basse de la vieille ville,
Nydeggbrücke, Bärengraben (la fosse aux ours) et Grosser Muristalden
(point de vue sur la vieille ville de Berne).
Durée du trajet: env. 15 minutes de la gare de Berne (Hauptbahnhof).
La ligne de bus 12 dessert le Zentrum Paul Klee tous les soirs jusqu’à 24 heures.

Sommaire du mois de juin 2017

Robert Cahen et son galeriste Jean François Kaiser à Art Basel 2017

03 juin 2017 : Wolfgang Tillmans engagé
05 juin 2017 : Hebdoscope sous la baguette de Valérie Cardi
17 juin 2017 : Art Basel 2017
20 juin 2017 : Otto Freundlich, Communisme cosmique
22 juin 2017 : Cézanne révélé
27 juin 2017 : Wim Delvoye

Wim Delvoye

 Wim Delvoye
« Nous naissons entre les excréments et l’urine » 
dans cette phrase attribuée à St Augustin, toute empreinte
d’humilité, se reflète le pan entier de l‘oeuvre de Wim Delvoye,
celui de traduire l’origine de l’existence humaine par la
trivialité de sa corporéité.
Au Musée Tinguely de Bâle jusqu’ 1er janvier 2018
L’exposition a été réalisée en collaboration avec le
MUDAM Luxembourg.
Commissaire de l’exposition: Andres Pardey

En 2017, le Musée Tinguely consacre à l’artiste belge
Wim Delvoye sa première rétrospective en Suisse.
Depuis la fin des années 1980, Delvoye est connu pour
des oeuvres qui mêlent avec un humour subtil le profane
et le sublime. La tradition croise l’utopie, l’artisanat devient
high-tech.
Ses oeuvres les plus célèbres sont les Cloacas : ces machines
digestives qui reproduisent le processus de l’élimination
par le corps humain rendent visible et tangible une constante
de notre existence. Ses dernières reproductions de machines
de construction et de poids lourds, tout empreintes d’ornementation
gothique, révèlent l’engouement de l’artiste pour
l’expérimentation esthétique et le monumental.
L’exposition à Bâle, conçue en collaboration montre
tout ce que Wim Delvoye a réalisé depuis ses débuts
jusqu’aux oeuvres les plus récentes.

Au début figurent des dessins d’enfant, que l’on peut
tout à fait interpréter comme le fondement d’un travail
ultérieur. Franchise, curiosité, folie des grandeurs,
goût de l’altérité – autant d’aspects qui caractérisent jusqu’à
aujourd’hui l’oeuvre et la nature de Wim Delvoye.
Son art porte la marque des Flandres : tradition, artisanat,
technique, le tout associé à une ouverture au monde,
à l’imaginaire et l’utopie, ce en quoi il rejoint des artistes
comme James Ensor, Paul Van Hoeydonck ou Panamarenko.
En même temps, Delvoye est en plein dans le monde, il
travaille avec des artisans d’Indonésie, de Chine ou d’Iran –
les frontières semblent ne pas exister.

L’écusson de sa patrie se trouve sur les Ironing Boards (1990),
tandis que les 18 Dutch Gas-Cans (1987 – 1988) sont ornés de
peintures de la porcelaine de Delft.

Les imposants tubes d’acier de Chantier V (1995) sont
soutenus par des pieds en porcelaine spécialement conçus ;
la bétonneuse et les barrières de Chantier I (1990 – 1992)
sont en revanche délicatement taillées dans le bois.
Les procédés se mélangent, les matériaux entretiennent une
tension créative. Le banal devient ornement artistique,
l’art populaire devient muséal.

C’est en 2001 que Delvoye crée Cloaca, dont suivront
neuf autres jusqu’en 2010. Ces machines complexes
reproduisent dans des conditions de laboratoire la digestion
humaine au moyen d’enzymes et autres substances.
L’être humain, ou plus précisément son organe le plus important –
le tube digestif de la bouche jusqu’à l’anus – est reconstitué à
part et rendu ainsi visible. Ce n’est pas la forme des organes qui
compte ici, mais uniquement leur fonction.

Les premières Cloacas, comme la deuxième Cloaca-New
& Improved
(2001) montrée au Musée Tinguely, sont encore
conçues comme des machines de laboratoire strictement
scientifiques. Cloaca Quattro (2004 – 2005) déjà, présentée
pour la première fois en 2005 dans l’exposition
La Belgique visionnaire (2005), renonce à la froideur du
« look de laboratoire » : avec ses machines à laver et ses moteurs
ouverts, elle est plus un assemblage de machines.
Cloaca Travel Kit
(2009 – 2010) rompt quant à elle avec
le sérieux de l’affaire ; montée dans une valise, elle est
utilisable à tout moment partout dans le monde.

La rupture ironique est un procédé que Delvoye emploi
souvent et volontiers. La confusion ainsi suscitée chez
l’observateur fait partie de son répertoire artistique.
Ainsi à Bâle, lors de l’inauguration de l’exposition et
du salon ART Basel, où il a présenté Tim (2006 – 2008),

le Suisse qui a vendu sa peau d’abord à l’artiste pour
la faire tatouer puis à un collectionneur :
là, l’artistique pose forcément la question de l’éthique.
On ne peut s’empêcher de poser des questions –
auxquels il revient à chacun d’apporter sa réponse.

Cement Truck (2012 – 2016), un camion à ciment de taille normale,
est « garé » dans le Parc Solitude qui jouxte le Musée Tinguely.
L’engin est constitué de plaques d’acier Corten découpées
au laser de manière à évoquer des ornements gothiques.
Cette même esthétique est reprise dans Suppo (2010), une forme
de cathédrale néogothique tout en longueur, contorsionnée,
ne représentant qu’un clocher ornementé.

L’exposition entraîne les visiteurs à la découverte du travail
d’un artiste qui ne cesse de se réinventer.
Le plaisir de la nouveauté et de la surprise y est partout sensible.
Et en même temps, sculptures et dessins proposent une
magnifique réflexion sur l’art, sur la vie, sur notre monde.

Wim Delvoye est né en 1965 àWervik, Belgique.
Il vit et travaille à Gand et Brighton.
À l’occasion de l’exposition paraîtra chez
Somogy éditions d’art, Paris un catalogue richement
illustré en allemand et en anglais avec des textes par
Sofia Eliza Bouratsis, Michel Onfray, Tristan Trémeau
ainsi qu’une préface par Roland Wetzel et Enrico Lunghi.
En vente en boutique du musée et en ligne pour 48 CHF.

Accès
Gare centrale de Bâle CFF / Gare SNCF :
tram no. 2 jusqu‘au « Wettsteinplatz »,
puis bus no. 31 ou 38 jusqu’à « Tinguely Museum ».
Gare allemande (Bad. Bahnhof) : bus no. 36.
Autoroute: sortie « Basel Wettstein/ Ost ».
Parking à coté du musée ou au Badischer Bahnhof.
Horaire
Mardi – dimanche, 11h – 18h
Tinguely Tours | Wim Delvoye
12h30 Brève visite guidée en allemand
13h Brève visite guidée en anglais
Coûts: billet d’entrée, sans inscription
pass-musées accepté
Il y a des cartels en français dans chaque salle

 

Cézanne révélé

Du carnet de croquis à la toile au Kunstmuseum
de Bâle, Neubau jusqu’au 24 septembre 2017
sous le commissariat de Anita Haldemann
Avec 154 feuillets, le Kunstmuseum Basel abrite la plus
vaste et la plus significative collection de dessins
de Paul Cézanne (1839–1906).

Cet ensemble constitue le point de départ d’une exposition
d’envergure réunissant 213 oeuvres qui illustrent
l’importance du dessin dans la création de Cézanne,
en partant des esquisses et des études jusqu’au peintures,
en passant par les aquarelles.

Blatt: 17.8 x 23.7 cm; Bleistift und schwarze Kreide auf weissem Zeichenpapier; verso: Bleistift und schwarzer Stift; Inv. 1934.162

En 1934 et 1935 déjà, le Kunstmuseum Basel a fait
l’acquisition auprès du marchand d’art Werner Feuz
de deux importants lots de dessins totalisant 141 oeuvres
issues du fonds d’atelier de Paul Cézanne.
Cet ensemble va être complété par des achats auprès de
particuliers, au premier rang desquels le couple de
collectionneurs Martha et Robert von Hirsch.

Le Kunstmuseum Basel a ainsi été la première institution
à reconnaître l’importance de l’oeuvre dessinée alors
largement méconnue, ce faisant il a aussi empêché que
l’ensemble des carnets soit davantage éparpillé.

Les dessins de Cézanne, contrairement à ses aquarelles,
ont été peu exposés, en raison de leur fragilité. Ils ont été en
outre – ce qui est plus surprenant – très peu étudiés.
111 feuillets du lot appartenant au cabinet des estampes
du Kunstmuseum
proviennent de cinq carnets divisés,
qui furent autant que possible reconstitués.

Dans l’exposition Cézanne révélé des feuillets provenant
d’autres collections complètent ces carnets, accompagnés
par des aquarelles et des peintures du  fonds du musée,
mais aussi d’autres collections institutionnelles et privées.
101 x 65 cm; Öl auf Leinwand

Les pages de carnets, comme point de départ et coeur du
processus artistique, révèlent un aspect particulièrement
généreux de la création cézannienne, car ils permettent
un coup d’oeil par dessus l’épaule de l’artiste et une
confrontation immédiate avec sa pratique quotidienne
du dessin. Les esquisses et les études montrent ainsi
quelles oeuvres l’artiste copie au Louvre, mais aussi qu’il
ébauche des portraits dans son atelier, qu’il observe les
arbres en Provence et qu’il dessine sa femme et son fils
à la maison.
Tandis qu’il s’essaie à toutes les thématiques dans
sa jeunesse, il en vient par la suite à se concentrer sur
quelques motifs : les natures mortes, les paysages,
les baigneurs et les portraits.
34,5 x 49,5 cm; Bleistift, Aquarell und Gouache auf Papier

De petit format, ces carnets de croquis garantissent
une vision intime, car il n’ont jamais été pensé pour
un public. Ils documentent un processus d’expérimentation
et de recherche sans contrainte. A l’abri des regards,
Cézanne remet profondément en question le dessin et sa
fonction, dans la mesure où il ne respecte pas les règles
courantes et escamote les usages. Des séries entières
d’études d’après nature ou de copies des maîtres anciens,
de l’antiquité à Eugène Delacroix, montrent comment
la confrontation répétée avec un motif donné pousse
Cézanne à développer toujours de nouvelles options
de représentation.

Dans ses aquarelles, Cézanne a complétement repensé
le rapport entre ligne et couleur. Ainsi, le dessin n’est
souvent pas uniquement préparatoire, Cézanne retravaille
son motif avec du graphite après la pose de la couleur,
de telle manière à ce que ligne et couleur s’entremêlent
dans un jeu dynamique. Dans d’autres aquarelles,
Cézanne renonce complètement au graphite et trace
des traits à l’aide d’un pinceau fin. Sur ce point aussi,
l’exposition Cézanne révélé montre combien le peintre
se soucie peu des conventions, et permet de nouveaux
et captivants regards sur une oeuvre pourtant célèbre.

Le fonds du Kunstmuseum Basel est complété par 53 prêts
de premier ordre, pour l’essentiel, des peintures et des
aquarelles issues de collections privées renommées
d’Europe et des Etats-Unis, mais aussi de musées,
dont la Fondation Beyeler (Riehen/Basel), la Kunsthalle Bremen,
The Art Institute of Chicago, la Staatliche Graphische
Sammlung München, The Metropolitan Museum of Art
(New York), The Museum of Modern Art (New York),
le Musée d’Orsay (Paris), le Princeton University Art
Museum, le Museum Boijmans Van Beuningen (Rotterdam),
la Grafische Sammlung Albertina (Wien), le Kunsthaus Zürich u.a.

Un catalogue (allemand ou anglais)paraît à l’occasion de l’exposition
aux éditions  Prestel Verlag avec des contributions de Oskar Bätschmann,
Anita Haldemann, Henrike Hans, Fabienne Ruppen, Annegret Seger,
Richard Shiff et Matthew Simms.
Il est illustré des oeuvres présentées dans l’exposition.
L’exposition est placée sous le haut patronage de l’ambassade
de France en Suisse
.

Kunstmuseum Basel | Neubau, Foyer 1er sous-sol,
veuillez entrer par le Hauptbau.

Otto Freundlich, Communisme cosmique

Otto Freundlich, Communisme cosmique
Jusqu’au 10 septembre 2017, au
Kunstmuseum Basel
| Neubau

sous le Commissariat de :
Julia Friedrich, du Museum Ludwig Köln
Otto Freundlich (1878–1943) connaissait tout et tout le monde.
Personnellement j’ignorai son existence, jusqu’à ce jour où j’ai
au le plaisir de voir ses oeuvres sur les cimaises du Kunstmuseum.

Peu d’artistes de la première moitié du XXe siècle se sont confrontés
avec autant d’intelligence et de passion aux différents courants
de l’art de leur temps. Des rapports intimes, souvent de vraies
amitiés, le rattachent aux principaux artistes de toutes les avant-gardes
– expressionisme, fauvisme, cubisme, orphisme, dadaïsme,
De Stijl, Bauhaus et enfin l’art abstrait. Les influences vont dans
les deux sens, de lui à eux et d’eux à lui. Pour autant Freundlich a
poursuivi sa voie propre, que ce soit avec ses sculptures, ses peintures
ou ses peintures sur verre.

L’exposition Otto Freundlich – communisme cosmique
souhaite retracer la carrière comme la vie intime d’Otto Freundlich
et analyser l’évolution de sa pensée artistique et philosophique.
Elle se penche sur l’oeuvre de cet artiste à qui les Nazis ont déclaré
la guerre: une partie importante de son oeuvre fut d’ailleurs
détruite par eux, lui-même ayant été assassiné dans un camp
d’extermination.
Son oeuvre la plus célèbre est aujourd’hui la sculpture
«Grosse tête» (1912); jadis bien visible sur la couverture du guide
de l’exposition «Art dégénéré» organisée par les Nazis.
La rétrospective démontre que non seulement les Nazis avaient
transformé le titre de l’oeuvre, mais aussi la sculpture elle-même:
au cours d’une des étapes en tout cas de l’exposition itinérante

«Art dégénéré», l’oeuvre présentée était une réplique lourdingue.
Aussi actif politiquement et déterminé qu’il fût, Freundlich n’a
pas suivi les combat de son temps, il n’a fait que proposer de pures
utopies. Ce qui détermine son oeuvre, c’est un universalisme total
qu’il a baptisé «le communisme cosmique».
La persécution qui s’est acharnée contre Freundlich en Allemagne
a pour conséquence qu’une grande partie de ses importantes
oeuvres de jeunesse est perdue. Lors des actions menées contre
«l’art dégénéré», ce ne sont pas moins de 14 de ses oeuvres qui
furent confisquées.

L’exposition, conçue par le Museum Ludwig de Cologne et
présentée au Kunstmuseum Basel, rassemble quelques
50 oeuvres. Cette rétrospective, la plus complète à ce jour, présente
les résultats parfois fascinants des recherches les plus récentes,
et permet de retracer l’évolution de l’oeuvre de Freundlich de
1909 à 1940.

Otto Freundlich et Bâle
Le soutien sans doute le plus fidèle d’Otto Freundlich était une
enseignante bâloise, Hedwig Muschg, qu’il avait rencontrée à Paris
en 1927. Hedwig Muschg était la demi-soeur de l’écrivain
Adolf Muschg. Sans relâche, avec ses modestes moyens, elle a envoyé
de l’argent à l’artiste dans le besoin et a tenté de vendre ses oeuvres
en Suisse. En signe de reconnaissance, Freundlich lui a envoyé
des travaux qu’elle a vendu après sa mort. C’est ainsi qu’une gouache
(aujourd’hui chez un particulier) s’est retrouvée dans la collection
personnelle du directeur du Kunstmuseum Basel de l’époque,
Georg Schmidt
, tandis qu’une grande peinture fut achetée
pour le Kunstmuseum Basel. Par la suite, le musée a hérité d’une
tempera sur bois et d’un pastel issus de la donation
Marguerite Arp-Hagenbach.
La vie d’Otto Freundlich
Otto Freundlich venait d’une famille juive assimilée de Stolp,
Poméranie (aujourd’hui en Pologne). Après un apprentissage
commercial à Hambourg, il a étudié trois semestres d’histoire
de l’art entre Berlin et Munich. Vers 1906, il crée ses premières oeuvres.
En 1908, il se rend à Paris. Dans les années suivantes, on retrouve
Freundlich entre Paris, Hambourg, Munich, Berlin et Cologne.
Il était ami avec un nombre inouï de personnalités du monde de l’art
et tout particulièrement avec des artistes.

81 x 65 cm; Pastell auf Karton

Ses principaux soutiens aux côtés de Hedwig Muschg,
étaient le collectionneur de Cologne Josef Feinhals ainsi que le directeur
du musée de Hambourg, Max Sauerlandt, qui a fait l’acquisition
d’oeuvres importantes, confisquées en 1937 et longtemps considérées
comme perdues jusqu’à leur redécouverte récente.
Après 1924, Freundlich a habité essentiellement à Paris.
Lorsque les Nazis ont envahi la France, l’artiste a fui dans les Pyrénées.
A l’âge de 65 ans, il fut dénoncé et déporté. S’il n’est pas mort déjà
durant sa déportation, on considère qu’il fut assassiné au camp
d’extermination de Sobibór.
24 x 163 cm; Glasgemälde

A l’occasion de l’exposition paraît aux éditions Prestel Verlag
un catalogue richement illustré de 250 illustrations avec des
contributions de Geneviève Debien, Christophe Duvivier, Julia
Friedrich, Verena Franken, Otto Freundlich, Adolf Muschg entre autres.
« Une exposition du Museum Ludwig Köln en coopération
avec le Kunstmuseum Basel. »

Kunstmuseum Basel | Neubau, Foyer 1er sous-sol,
veuillez entrer par le Hauptbau.

Wolfgang Tillmans engagé

Wolfgang Tillmans jusqu’au 1er octobre 2017
à la Fondation Beyeler

« Tout est une question de regard, d’un regard
ouvert et sans peur »


En tee-shirt et bermuda, il répond avec cordialité à nos questions.
Dans l’ascenseur il m’a spontanément serré la main, en riant
parce que j’ai affirmé au traducteur, que son français était parfait.
C’est un des photographes que l’on dit le plus passionnant du moment.
Dans tous les classements ce natif de Remscheid, dans la Ruhr,
RFA, est en tête. On peut voir ses oeuvres à la Tate galerie de Londres
et depuis quelques jours à la Fondation Beyeler, près de 200
travaux photographiques réalisés entre 1986 et 2017, ainsi qu’une
nouvelle installation audiovisuelle.
« J’aime la photographie et j’utilise ce médium depuis 30 ans,
non pas parce que je veux être absolument un photographe,
mais parce que cela donne des possibilités
illimitées de produire de nouvelles images. »

Ici il n’y a ni règles, ni chronologie, ni hiérarchie, de la vision
Tillmans veut faire une expérience.
Ses accrochages ressemblent à des performances,
les portraits et les natures mortes, de l’accessoire et
du fondamental, du figuratif et de l’abstrait,
tout se vaut.

Wolgang Tillmans, Tilda Switon 2009

Rien ne le laisse insensible. Tillmans est faiseur d’images
et musicien.
C’est l’art en général et surtout les images qui l’intéressent,
il se voit dans une continuité de 30 000 ans, depuis que
des hommes ont commencé à faire des images, la photographie
n’est qu’un tout petit domaine dans l’histoire totale des images.
Ces photographies intimes et attentives le font connaître
au début des années 90.
Il documente l’ambiance des clubs et le style de vie de
la jeunesse londonienne, le feeling de la contre-culture.
Ces images se présentent comme une membrane
entre la sphère du privé et celle du public.
Ce sont particulièrement les images du début
des années 90 qui manifestent une préoccupation
sociétale. Il était tout à fait conscient que ce n’était
pas juste une plaisanterie superficielle, c’était amusant,
certes, mais il était clair pour lui qu’il s’agissait de
développement et de progrès sociaux, le privé et le politique
sont pour lui indéniablement liés. Les libertés dont
il profite ont été acquises de haute lutte politiquement.
Il ne parle pas du fait de pouvoir exister en tant qu’homosexuel,
mais de pouvoir vivre en démocratie.

Après avoir vécu à New York, il vit a Londres où il reçoit le
Turner Prize, en tant que photographe et surtout premier
photographe non britannique à l’âge de 32 ans.
En 2015, on lui a décerné l’International Award in
Photography
de la Hasselblad Foundation, Göteborg.
Prix acceptés avec humilité, en s’excusant.
Il veut montrer le monde à sa façon.

Parfois quelque chose se développe, tout d’un coup
il y a le bon dosage de mise en scène, de trouvailles et
de vérité qui se manifestent. Il fait des photos pour intervenir
pour faire de l’effet sur la société. Ce n’est pas que de
l’art pour l’art, pour se positionner dans ce
domaine, il voudrait changer les choses, conscient que
cela ne représentera presque rien.
Mais son énergie le pousse dans ce sens. Prendre position
est son credo d’artiste et de citoyen, comme sa dernière
campagne d’affiches contre le Brexit.

Il ne voit pas la limite entre la politique et la vie, mais il ne voit
pas non plus la nécessité de tout regarder sous l’angle politique.
Certaines choses ont lieu et existent tout simplement,
elles deviennent des natures mortes du fait du hasard.
Le drapé de vêtements jetés négligemment par hasard,
devient une nature morte, comme une peinture.

Le tee-shirt se métamorphose en sculpture. L’éclipse totale du
soleil capté avec son vieil appareil analogique.
Des scènes de rue, des façades de maisons, des groupes de
personnes, des panneaux publicitaires, des voitures,
des couloirs d’aéroport, des ciels étoilés, des vues d’avion.
(Concorde)
Il a rapidement élargi son champ de vision et a exploité
les expériences de la photographie pour inventer un nouveau
langage iconographique. Ainsi sont nés des travaux recourant
ou non à l’appareil photo ainsi qu’à la photocopieuse.

Chaque exposition de Tillmans est une oeuvre en soi.
Il n’aligne pas une suite de succès, elle demande à être
regardée avec attention, car il mélange les formats,
le banal avec le sensationnel, l’ordinaire avec l’émouvant.
Il arrive toujours à surprendre, par exemple avec
des images qui naissent sans passer par l’objectif d’une caméra,
en travaillant le papier photo avec la lumière ou
des produits chimiques.
Il rend le non vu, visible.
Il illustre sa perception du monde. Selon lui tout est
fonction du regard ouvert et exempt de peur.
C’est un regard sur la liberté de voir de faire ou de jouer
et c’est finalement aussi un comportement politique.

« Il ne faut pas tout particulièrement dans les temps
que nous vivons, cette époque remarquablement étrange,
se laisser déposséder de la curiosité visuelle et de la liberté
inaliénable de l’art » .
C’est au Schaulager que la commissaire Theodora Vischer
tente une correspondance de son travail pour la première fois
dans lexposition de Holhein à Tillmans
À l’invitation de la Fondation Beyeler, l’artiste avait déjà aménagé
dès 2014 une salle avec des peintures et des sculptures de la collection
permanente, auxquelles il avait ajouté deux de ses propres
travaux. Cette exposition Tillmans constitue cependant la
première réflexion approfondie à laquelle se livre la
Fondation Beyeler sur le médium photographique
Informations pratiques
Heures d’ouverture :
Tous les jours 10h00–18h00, le mercredi jusqu’à 20h00
Pendant la semaine d’Art Basel
10–18 juin 2017, 9h00–19h00
Prix d’entrée de l’exposition :
Adultes CHF 25.-
Pass-musées accepté
Entrée gratuite pour les moins de 25 ans
(sur présentation d’une pièce d’identité à la billetterie)
et membres de l’Art Club
Accès
Tram 2 direction Eglisee
descendre à Messe Platz
puis tram 6 direction Grenze
arrêt Fondation Beyeler
Renseignements ici