Céline Cléron, visite d’atelier

La Fondation Fernet-Branca, nous convie, par l’intermédiaire de son directeur
Pierre Jean Sugier  pour une nouvelle visite d’atelier.
Place à l’artiste Céline Cléron, qui nous fait
découvrir son univers artistique (vidéo)

Vous avez pu la découvrir, en 2018, dans l’exposition
« l’impermanence » de la Fondation Fernet Branca, en compagnie de
Philippe Lepeut, de Léa Barbazanges  de MARIE DENIS et
STEPHANE GUIRAN
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Depuis plus de 15 ans, Céline Cléron mène une production artistique dans le champ de l’objet et de la sculpture, réunissant une multiplicité de matériaux et de supports : verre, tissu, cire d’abeille, ballons, fossiles, bois, porcelaine, dessin, photographie, vidéo…

Céline Cléron, une minute de latitude

Céline Cléron créé des œuvres hybrides, inspirées par les objets du quotidien et leur force d’évocation, mais également par le passé, l’histoire de l’art et l’archéologie, les encyclopédies, les musées, les mythologies et les cultures anciennes, les sciences. Les objets qui retiennent son attention ont en commun le fruit de phénomènes naturels ou le produit du travail de l’artisan.

                                              L’horizon des événements
Le plus souvent, l’artiste travaille en collaboration avec des artisans pour réactiver des techniques et des gestuelles en voie de disparition.
Elle s’appuie ainsi sur les compétences d’un souffleur de verre, d’une costumière, d’un ébéniste, d’un taxidermiste, d’un apiculteur…

                       Céline Cléron, Conseil de révision

Ces « savoirs faire » précis côtoient dans son travail un certain « laisser-faire » qui consiste à convoquer des accidents, des hasards, que les processus techniques engagés vont produire en évoluant. Le hasard et l’accident sont au cœur de sa démarche, ses pièces étant souvent complétées par l’œuvre de la nature ou de l’animal, figure également très importante dans l’ensemble de son travail. La notion de temps et plus singulièrement de temps arrêté ou suspendu, est également récurrente dans sa démarche.

                                              Céline CLÉRON
                                              Saules Pleureurs « Bigoudis »

Chez Céline Cléron, le rapport au souvenir comme au jeu se tisse dans le détournement, selon une tension persistante entre ce qui est figé et ce qui est en mouvement, entre permanence et impermanence, origines et évolution, fondamentaux et inventions. Les objets présents dans l’environnement qui entoure l’artiste mais aussi les images évoquées par sa mémoire, la corrélation entre forme et dénomination génèrent des analogies, des glissements sémantiques et visuels, qui se reflètent à travers son œuvre.

En cette période de confinement, elle s’est retournée vers le dessin sur sable,
pratique amorcée il y a un ou deux ans, qui correspond bien à ce moment
où tout est en suspend. C’est un travail très lent et méditatif.
Chaque vase en verre soufflé est rempli de différentes couches de sable
qui tentent de fixer l’image d’un regard, d’un visage, inspiré des portraits
du Fayoum.
Elle était en train de tourner un film, sur la déambulation d’un chien loup
dans un cimetière pour chiens, lorsque la pandémie s’est déclarée.
Ce film sera visible dans une prochaine exposition à Marseille.

Céline CLÉRON Née en 1976 à Poitiers  Vit et travaille à Paris www.celinecleron.com
Représentée par la Galerie Papillon, Paris

FORMATION
2000 Diplômée de l’École des Beaux-arts d’Angers, (DNSEP)
1998 Diplômée de l’École des Beaux-arts de Poitiers, (DNAP)

Elle a à son actif de nombreuses expositions personnelles

Sommaire du mois d’avril 2020

Le confinement est en train de modifier les modes de « consommation » de la culture, avec une mise à disposition de contenus inédits sur la toile dont les ex-visiteurs sont très friands. Plus que tout, la culture est le socle commun de notre humanité durant ces temps difficiles. D’où l’intérêt d’une réflexion poussée dans notre communauté.

Les différences entre le réel et le virtuel ?
Le coeur  palpite à l’idée de pénétrer dans un musée. Les sens. L’odeur. Le parquet qui craque. Un rayon de lumière sur la toile. Le toucher de la pierre des escaliers. L’envie d’embrasser le Scribe. L’émotion. En rêver sur le chemin du retour.

Pourquoi se déplacer pour voir les oeuvres, puisqu’on peut les voir aussi bien sur un écran ?
Le virtuel n’est pas opposé à la rêverie poétique. Autant la visite réelle laisse une trace dans la mémoire, celle virtuelle permet d’y revenir. C’est pourquoi personnellement j’aime en plus prendre des photos, afin de me replonger dans l’ambiance et de retrouver les détails admirés.

Une visite réelle se compose de trois éléments :
– les oeuvres
– un lieu
– une durée
Le musée est un lieu que l’on parcourt physiquement, une temporalité qui s’étale dans la durée, à l’opposé du zapping du net. Le virtuel est un substitut,
considéré comme une introduction à la visite réelle, il ne rend que très rarement compte du lieu, de la vision exacte de l’oeuvre, de la dimension, des couleurs.
Rien n’est plus triste qu’un musée fermé.
Grand merci à tous ces musées et artistes qui nous permettent des visites virtuelles
et vive le déconfinement

La Fondation Beyeler rouvre ses portes le lundi 11 mai 2020.

Les expositions «Edward Hopper» et «Voir le silence – Images de quiétude» sont prolongées jusqu’au 26 juillet, l’exposition «Goya» est reportée.

25 avril 2020 : Van Eyck. Une Révolution Optique
22 avril 2020 : À La Rencontre de Böcklin
19 avril 2020 : Pascal Henri Poirot
17 avril 2020 : Léa Barbazanges
12 avril 2020 : Joyeuses Pâques
08 avril 2020 : Fondation Fernet Branca
06 avril 2020 :  TINGUELY @ HOME

Van Eyck. Une révolution optique

L’Homme au turban rouge, 1433
Autoportrait présumé de Jan van EyckVan Eyck à Gand

Aujourd’hui je déroge à mon habitude, Covid-19 oblige, je vais vous parler
d’une exposition que je n’ai pas visitée.

Afin de permettre à chacun de profiter pleinement du programme passionnant, l’année Van Eyck sera prolongée jusqu’au 24 juin 2021.

Concernant «Van Eyck, une révolution optique» :

malheureusement, l’exposition au MSK ne peut être prolongée.
elle se termine le 30 avril 2020 au
Musée des Beaux-Arts de Gand (MSK Gent)

Hubert et Jan van Eyck, Retable de l’Adoration de l’Agneau mystique, 1432 (Gand) ouvert


J’emprunte ce texte, avec son aimable autorisation à
Catherine Rigollet de l’agora des arts

un lien ci-dessous vers un documentaire sur le retable 
en français

Avec treize des vingt-trois œuvres mondialement connues de Van Eyck (vers 1390-1441), plusieurs œuvres de son atelier et une bonne centaine de pépites de l’art de la fin du Moyen Âge, cette exposition exceptionnelle révèle tout l’art innovant et érudit du maître gantois, montre son influence auprès des italiens du Quattrocento et raconte la rocambolesque odyssée de son chef-d’œuvre : le retable de L’Agneau mystique.

Quelle incroyable aventure que celle du retable de L’Agneau mystique de van Eyck ! L’histoire commence le 6 mai 1432. Commandé aux frères van Eyck par Josse Vijd et sa femme Elisabeth Borluut, ce retable de douze panneaux en chêne d’une taille considérable (5,20 x 3,75 m ouvert), commencé par Hubert Van Eyck (vers 1366 ?-1426), continué après sa mort, et durant six années, par son jeune frère Jan (vers 1390-1441), est enfin mis en place dans une chapelle de l’église Saint-Bavon de Gand. L’élément central de ce polyptyque qui symbolise le rachat du péché originel par le Christ est l’Agneau mystique, qui verse son sang dans le Saint Graal. Ce drôle d’agneau aux yeux perçants, si humains, est représenté sur un autel au milieu d’un paysage paradisiaque, entouré d’une foule venue l’adorer : anges, pèlerins, ermites, chevaliers du Christ, juges intègres, saints martyrs… C’est la partie la plus spectaculaire de cette œuvre d’une beauté époustouflante, celle qui a donné son nom à l’œuvre. Au-dessus trône le Christ-Roi, entre la Vierge Marie et saint Jean-Baptiste, encadrés d’anges musiciens et d’Adam et Eve quasi statufiés et dont le réalisme de la nudité est stupéfiant pour l’époque. Fermé, le retable montre l’Annonciation, saint Jean-Baptiste et saint Jean l’évangéliste et les portraits des commanditaires.

Hubert et Jan van Eyck, Retable de l’Adoration de l’Agneau mystique, 1432 (Gand), fermé,

L’histoire rocambolesque de L’Agneau mystique

L’histoire de ce chef d’œuvre de la peinture flamande du 15e siècle ne fait que commencer. En 1566, le retable doit être caché dans la tour de la cathédrale durant une révolte protestante. En 1794, des soldats français emportent les panneaux centraux à Paris (ils reviendront en 1815 après Waterloo). En 1816, pour des raisons financières, six panneaux latéraux sont vendus… et se retrouvent en Prusse, à l’exception d’Adam et Eve remisés dans une petite salle d’archives pour cause de nudité scandaleuse. Ils sont vendus à l’État belge en 1822 pour financer les réparations du retable qui vient d’échapper de peu à un violent incendie à la cathédrale, et provisoirement remplacés par une copie les représentant habillés de peaux de bêtes (copie aujourd’hui exposée à l’entrée de la cathédrale). Durant la Première Guerre mondiale, les panneaux centraux sont cachés. En 1920, à la suite du Traité de Versailles, le retable se retrouve à nouveau exposé dans sa totalité. Las ! Deux panneaux sont volés en 1934 contre demande de rançon : Les Juges intègres et la grisaille représentant saint Jean-Baptiste. Seul ce dernier est retrouvé. Caché à Pau pendant la guerre, le retable est volé à la demande d’Hitler et dissimulé dans la mine de sel d’Altaussee, en Autriche. Retrouvé par les « Monuments Men », il retourne enfin à Gand en 1946. Quel dénouement ! Aujourd’hui, seul manque toujours à l’appel le panneau des Juges intègres, remplacé depuis 1945 par une copie du restaurateur -et faussaire- de peintres Primitifs flamands, Jef Van der Veken.

l’Agneau mystique, 1432 (Gand),

Le génie de Jan van Eyck

Avec L’Agneau mystique, van Eyck a atteint le summum de son art. Ce chef-d’œuvre, source de tant de convoitises et de péripéties du fait de sa valeur artistique, a fait l’objet de nombreuses copies, notamment celle de Michiel Coxcie en 1497 qui servira souvent de source documentaire. Peintre officiel, mais aussi diplomate érudit au service du duc de Bourgogne Philippe le Bon, Jan van Eyck est devenu un maître incontesté du portrait par le réalisme des traits des personnages qu’il peint de trois-quarts (quand les Italiens privilégient encore les profils). Ils ont presque l’air vivants, ce qui a fait dire à son biographe Bartolomeo Fazio qu’il ne leur manquait que la voix. Ses architectures et ses paysages aussi sont de plus en plus conformes à la vision humaine et truffés de détails d’une précision de miniaturiste. Outre les deux magnifiques ouvrages publiés à l’occasion de l’exposition et qui fourmillent de gros plans, on ne manquera pas la visite du site internet dédié à la restauration du retable qui permet de zoomer dans l’œuvre jusqu’à discerner : les ailes des oiseaux dans le ciel, la poussière sur les chaussures des pèlerins, les éclaboussures dans la fontaine, les cratères sur la lune, les cils de l’œil d’Adam…Un outil fabuleux (voir lien ci-dessous).
La renommée de Jan van Eyck est immense, notamment à Bruges et surtout à Gand, riche de son textile et de sa localisation à la confluence de la Lys et de l’Escaut. Grâce à l’utilisation toute récente de l’huile comme médium, à laquelle l’artiste a ajouté des siccatifs pour raccourcir le temps de séchage (quand les italiens peignent encore à la détrempe à l’œuf), ses tableaux ont gagné en éclat, transparence et délicatesse des couleurs. « Sa connaissance de la physique l’a aussi rendu capable d’imiter les effets optiques de la lumière qui sont nécessaires pour accentuer l’expérience de l’espace dans son œuvre. Non seulement par le jeu de l’ombre et de la lumière, mais également par la façon dont la lumière se déplace dans l’espace, est absorbée entre les plis des vêtements, se reflète sur les cuirasses convexes et concaves et se fraie naturellement un chemin à travers les surfaces transparentes comme le verre et les pierres précieuses ou encore l’eau courante », commente Johan De Smet, co-commissaire de l’exposition « Van Eyck. Une Révolution optique ». Sur le retable, avoir ajouté le reflet d’une fenêtre dans le bijou d’un ange chanteur est tout simplement incroyable.

L’Agneau mystique : joyau de la culture flamande

Pierre-François de Noter, La chapelle Vijd avec L’Agneau mystique, 1829 (Amsterdam, Rijksmuseum).

Pièce centrale de l’année thématique « Van Eyck », le retable de L’Agneau mystique a été choisi par la ville de Gand pour rendre hommage au maître flamand en 2020. Grâce à une très longue et méticuleuse campagne de restaurations commencée en 2012, réalisée à l’Institut royal du patrimoine artistique, sous la direction de la restauratrice Hélène Dubois, l’œuvre a retrouvé tout son éclat et l’authenticité de ses couleurs radieuses. Elle a révélé des détails longtemps masqués par des surpeints réalisés notamment au 16e siècle dans les tendances de l’époque, et a livré des informations précieuses sur les différentes mains qui ont œuvré à sa réalisation. Durant l’exposition, les panneaux sont exposés à deux endroits, le MSK et la Cathédrale Saint-Bavon. Les huit panneaux restaurés du retable fermé, accompagnés d’Adam et Eve en attente de restauration, dans le MSK, et à hauteur d’œil. Les panneaux restaurés du retable ouvert dans la Cathédrale Saint-Bavon. Afin que vous puissiez admirer l’ensemble de ce chef-d’œuvre dans la Cathédrale Saint-Bavon, les panneaux manquants sont remplacés par une copie haute résolution. Après 2020, les panneaux ne quitteront plus jamais la cathédrale gantoise, installés dans une chapelle entièrement réaménagée pour leur offrir le maximum de visibilité et de sécurité ; leur histoire expliquée et documentée dans le nouveau centre des visiteurs qui ouvre le 8 octobre 2020.

OMG ! Van Eyck was here (Oh My God ! Van Eyck était là)

Jan van Eyck, L’Homme au chaperon bleu, vers 1428-1430. Huile sur panneau, 22 x 17 cm. Muzeul National Brukenthal, Sibiu (Roumanie).

Tout au long de l’année 2020, Gand rend hommage à van Eyck avec de nombreux événements. Point d’orgue de cette année thématique, l’exposition « Van Eyck. Une Révolution optique » est aussi l’unique et dernière occasion d’observer les panneaux dans un contexte plus large. Car au MSK, le visiteur découvre également une dizaine d’œuvres de Jan van Eyck lui-même (signés de sa main, une rareté à l’époque ; les peintres se considérant davantage artisans qu’artistes), sur la vingtaine conservée dans le monde. Des chefs-d’œuvre comme le Saint François d’Assise recevant les stigmates, 1440, prêté par le Philadelphia Museum of Art ; le Portrait de Baudouin de Lannoy (Gemäldegalerie de Berlin) récemment restauré ; L’Annonciation, vers 1430-35 (Andrew W. Mellon Collection, National Gallery of Art, Washington DC) ; Sainte Barbe, 1437 (Musée royal des Beaux-Arts, Anvers) ; La Vierge à la fontaine, 1439 (Musée royal des Beaux-Arts, Anvers) ; Portrait d’un homme au chaperon bleu, vers 1430 (Muzeul National Brukenthal, Sibiu – Roumanie) ; Le Diptyque de l’Annonciation, vers 1435 (Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid). Ou encore ce saisissant Portrait d’un homme (« Leal Souvenir » ou « Tymothée »), 1432 (The National Gallery, Londres).
On regrette dans l’exposition l’absence de trois tableaux majeurs : La Vierge du chancelier Rolin, vers 1435 (seul tableau de van Eyck conservé en France, au Louvre), Les époux Arnolfini, 1434 (avec ce miroir témoin du travail révolutionnaire de van Eyck sur l’optique), ainsi que le Portrait d’un homme au turban rouge, 1436 (sans doute un autoportrait de van Eyck), deux œuvres conservées à la National Gallery à Londres. L’exposition rassemble plus de 100 autres œuvres du Moyen Âge, notamment des italiens Fra Angelico, Pisanello, Masaccio et Benozzo Gozzoli, qui mises en perspective de l’œuvre de van Eyck soulignent d’autant plus sa technique époustouflante et son génial talent qui fascinent encore aujourd’hui. Van Eyck et la belle Gand au riche patrimoine méritent votre venue.

Catherine Rigollet

A lire : L’Agneau mystique – Van Eyck. Art, histoire, science et religion : un ouvrage essentiel pour comprendre l’histoire de ce chef-d’œuvre, découvrir la saga de la grande famille Van Eyck et apprendre tous les détails de la restauration du retable. (Collectif, 368 pages, 200 illustrations, Ed. Flammarion, 60€)

Jan van Eyck, Portrait de Baudouin de Lannoy, vers 1435. Huile sur panneau, 26,6 × 19,6 cm.

Catalogue de l’exposition (anglais, allemand, néerlandais). Éditions Hannibal/Kannibaal. 504 pages. 370 illust. 64,50 €

Tous les détails de l’œuvre dans laquelle on peut zoomer, et de sa restauration sur : http://closertovaneyck.kikirpa.be

Visuels : Hubert et Jan van Eyck, Retable de l’Adoration de l’Agneau mystique, 1432 (Gand), fermé, ouvert et détail de l’agneau.
Pierre-François de Noter, La chapelle Vijd avec L’Agneau mystique, 1829 (Amsterdam, Rijksmuseum).
Jan van Eyck, Portrait de Baudouin de Lannoy, vers 1435. Huile sur panneau, 26,6 × 19,6 cm. Gemäldegalerie der Staatlichen Museen zu Berlin – Preussischer Kulturbesitz, Berlin.
Jan van Eyck, L’Homme au chaperon bleu, vers 1428-1430. Huile sur panneau, 22 x 17 cm. Muzeul National Brukenthal, Sibiu (Roumanie).

À la rencontre de Böcklin

Böcklin L’Ile des vivants 1888

Depuis le 28 janvier 2020, le Kunstmuseum Basel | Hauptbau  a revu la présentation de la collection Arnold Böcklin.
Dès la réouverture du musée après ce cauchemar vous pourrez aller :

À la rencontre de Böcklin.

Arnold Böcklin autoportrait 1893

Arnold Böcklin autoportrait 1893

Arnold Böcklin (1827–1901) est avec Hans Holbein le Jeune un des saints patrons du Kunstmuseum. Les plus de 90 peintures et sculptures que le musée possède constituent la plus importante collection au monde de cet artiste. Böcklin, né à Bâle, atteint dans la deuxième moitié du XIXe siècle une renommée considérable dans les pays germanophones et compte parmi les plus importants protagonistes du symbolisme.

De son vivant, Böcklin n’a cessé de susciter des controverses. Nombreux sont ceux qui ont vu en lui un novateur, mais d’autres (dont l’influent critique d’art Julius Meier-Graefe) lui ont reproché d’avoir freiné tout progrès en matière de peinture.

A travers douze constellations, dans lesquelles Böcklin est mis en relation avec des travaux de ses prédécesseurs, de ses contemporains et d’autres âmes sœurs insoupçonnées – de Walter Kurt Wiemken à Max Ernst à Cy Twombly -, différents aspects biographiques, stylistiques et thématiques de son œuvre se cristallisent. Quant aux ambiances, on voyage entre la satire, une mélancolie remplissant tout l’espace et une gravité festive.

Insaisissable Böcklin, lorsque désir de révolte et attachement aux traditions dans son travail se font face – irréconciliables – on mesure alors combien il était un enfant de la « fin de siècle », époque on ne peut plus riche en contradictions.

REPRÉSENTATION DE SOI ET REGARD EXTÉRIEUR

Adolf von Hildebrand
Marburg 1847–1921 München
1898
Portrait du peintre Arnold Böcklin

 A la fin du XIXe siècle, Böcklin était un peintre célèbre dans tous les pays germanophones, ce que reflètent ces deux portraits des années 1890. Dans l’autoportrait qu’il réalise pour le Kunstmuseum Basel, l’artiste de soixante-six ans se présente vêtu à la dernière mode, sûr de lui et entouré de signes de sa réussite — aucune trace de l’attaque d’apoplexie qui a failli l’emporter peu de temps auparavant. Lorsque Adolf von Hildebrand réalise quelques années plus tard le buste en bronze du peintre bâlois à la suite d’une commande de la Nationalgalerie de Berlin, on découvre en revanche une autre facette de celui qui fut son ami durant de nombreuses années.

Même si la photographie avait été inventée depuis longtemps, on mesurait particulièrement bien dans la peinture l’écart entre la représentation de soi et celle effectuée par un tiers : à la réalisation magistrale d’une mise en scène de soi par un virtuose de la peinture, qui se montre tel un seigneur, Hildebrand oppose la description d’un être pensif, marqué par l’âge. Quand on songe que la fonction primaire du portrait, c’est d’incarner l’être absent, on peut se poser la question : qui était Böcklin, et surtout, combien était-il ?

UN REGARD NEUF SUR LES MYTHES ANCIENS I

                    Jean-François de Troy, Diane und Actéon, 1734

Arnold Böcklin, La chasse de Diane, 1862

Le poète latin Ovide a écrit avec ses Métamorphoses l’une des œuvres mythologiques les plus populaires. Ses histoires de transformations ont inspiré une quantité infinie d’artistes au cours des siècles en leur fournissant une banque d’idées dans laquelle puiser des images. Dans l’histoire de Diane et Actéon, ce dernier, chasseur, est horriblement puni d’avoir surpris la déesse à son bain : il est transformé en cerf et dévoré par ses propres chiens.

Entre les œuvres de Jean François de Troy et Böcklin qui tous deux s’inspirent de différentes scènes de ce même récit, on trouve quelques cent trente années, mais également des mondes.

De Troy se sert du bain de la déesse pour inviter le spectateur dans une scène galante aux couleurs lumineuses et aux lignes claires, avec des nymphes nues ou tout juste vêtues de légers voiles. Le cerf est littéralement réduit à une figure de second plan.

Böcklin à son tour relègue l’intrigue à l’arrière-plan. Le rôle principal est tenu par le taillis panoramique, devant lequel trois figures poursuivent le cerf qui tombe déjà sous les morsures des chiens. Comme c’est le cas dans cette œuvre majeure de jeunesse, les traitements peu conventionnels que fait Böcklin de ces thèmes sublimes de la culture classique ont été perçus par ses contemporains comme la preuve de sa modernité – mais sans toujours susciter l’enthousiasme.

UN REGARD NEUF SUR LES MYTHES ANCIENS II

Homère raconte dans l’Odyssée l’histoire d’Ulysse qui en raison d’une tempête s’est échoué sur l’île de la nymphe Calypso. Cette dernière l’accueille chez elle et le charme avec des promesses d’immortalité. Toutefois, Ulysse a tôt fait de repousser son amour et n’aspire qu’à rentrer auprès de sa femme Pénélope. Pendant sept années, Calypso retient ainsi Ulysse, jusqu’à ce que Zeus lui ordonne de le laisser partir.

Frank Buchser, Ulysse et Calypso, 1872

A quelque dix ans d’écart, Frank Buchser et Böcklin consacrent tous deux une œuvre à cet épisode intemporel d’un amour dédaigné. Buchser accentue le côté dramatique par des effets de lumière et un coup de pinceau expressif. Dans la moitié droite du tableau, les formes se dissolvent carrément en des champs colorés. L’exagération des attitudes présente sous des traits pompeux aussi bien la nostalgie d’Ulysse que le désespoir de Calypso.

Arnold Böcklin, Ulysse et Calypso, 1882

Là où Buchser montre le drame amoureux par le geste de l’amour se détournant, Böcklin illustre la solitude et les âmes en peine par un isolement des figures aussi bien formel que chromatique. Rentré en lui-même et sculptural, enveloppé d’un bleu glacial, Ulysse ignore la lascivité de la nymphe sur son drap rouge brûlant. Utilisée de manière ciblée, l’intensité des couleurs a été perçue comme « criarde » et « tapageuse » par les contemporains de Böcklin. C’est pour autant l’un des aspects les plus visionnaires de sa peinture.

LA CONNEXION BÖCKLIN-BURCKHARDT

Artur Joseph Wilhelm Volkmann, Portrait du professeur Jacob Burckhardt, 1899

Böcklin écume de rage. Une nouvelle fois, la commission des achats a critiqué son projet de fresques pour le musée à l’Augustinergasse. Même son très vieil ami Jacob Burckhardt qui avait été le témoin de son mariage avec Angela Pascucci en 1853 et qui était devenu entre-temps un grand professeur d’histoire de l’art, même ce dernier lui a recommandé de modifier ses fresques sur le bâtiment de l’architecte Berri. Böcklin termine en 1870 cette peinture murale selon son idée et ajoute a fresco par-dessus deux médaillons avec les visages du « hargneux » et du « critique stupide ». Mais son courroux n’est pas apaisé pour autant, il se mue même en raillerie mordante.

Arnold Böcklin, Étude pour le sixième masque à la façade du jardin de la Kunsthalle Basel, 1871

Lorsque l’année suivante, l’artiste propose six masques en grès pour la façade côté jardin de la Kunsthalle Basel, on reconnaît sans peine les visages caricaturés des membres de la commission des achats. Burckhardt lui-même apparaît en critique qui « fait la moue » avec une face grotesquement étirée et un front fuyant. Et ainsi sous ce masque tout sauf classique est immortalisé dans la ville du carnaval le grand spécialiste de la Renaissance qui a joué un rôle clé dans la manière qu’a eu Böcklin de comprendre l’antiquité.

Il ne fait aucun doute que son portrait par Artur Volkmann de 1899 aurait beaucoup plus plu à Burckhardt. Suivant la tradition du buste de la première Renaissance, la tête a un air auguste, le drapé du pardessus tombe à l’antique. Peut-être le modèle aurait-il remarqué que ce classicisme plutôt maniéré dissimule en soi quelque ironie latente. Mais Burckhardt est décédé deux ans auparavant.

LITTÉRATURE PEINTE

Joseph Anton Koch, Macbeth et les sorcières, 1829/1830

 Depuis l’antiquité, la littérature et la peinture ont tissé des liens étroits. Au XIXe siècle, les ouvrages d’auteurs contemporains trouvent souvent des échos dans l’art et servent, en parallèle des thèmes traditionnels de la mythologie, d’inspiration pour des tableaux.

L’artiste autrichien Joseph Anton Koch, actif à Rome, peint ici une scène issue de Macbeth de Shakespeare, dont l’œuvre est très répandue dès le XVIIIe siècle, y compris dans les pays germanophones. Dans le portrait de Pétrarque par Böcklin, littérature et histoire littéraire se mêlent, car les récits biographiques du poète de la Renaissance sont teintés de légende. Au sens propre, Böcklin présente l’auteur à la source de son inspiration : ici, à la fontaine de Vaucluse, où Pétrarque entonne le fameux chant à son amour Laure :
« Clair et tranquille ruisseau, qui dans tes ondes pures, as reçu la beauté qui m’est chère, toi dont les flots heureux ont caressé ses membres délicats. »

Au diapason des conceptions romantiques, la nature est pour les deux artistes une caisse de résonance de l’action qui s’y déroule : sauvage et déchaînée au moment de la rencontre fatale entre le général Macbeth et les sorcières ; protectrice, idyllique et fertile, là où il est question de symboliser le retrait hors du monde et la recherche créative de Pétrarque.

IMAGES D’ENFANTS

Anselm Feuerbach, Sur la plage, jeune fille pêcheur à Antium, 1870

D’une génération plus jeune que Joseph Anton Koch, Böcklin, Hans von Marées et Anselm Feuerbach appartiennent au même cercle des Romains allemands — des artistes et des écrivains germanophones qui ont poursuivi à Rome l’étude assidue de leur idéal esthétique, issu de l’histoire antique et de la Renaissance. Tous trois ont consacré des œuvres assez différentes à la représentation de jeunes enfants.

Sur une toile de format imposant, Feuerbach montre d’une manière classique une relation mère fils idéale, détachée de toute temporalité, qui par sa pompe festive ne se distingue guère de ses représentations mythologiques. Chez Böcklin, les enfants incarnent davantage les premiers pas dans la vie. Il s’agit d’une variation sur le motif populaire de l’escalier de vie qui symbolise depuis le XVIe siècle le parcours terrestre comme une succession de marche à monter ou descendre.

Arnold Böcklin, Vita somnium breve [La vie un rêve court], 1888
Böcklin réalise à partir de ce thème une allégorie de la fugacité. L’enfant chez Marées en revanche n’est à ranger ni du côté de l’idéal ni de celui du symbolisme. Dans une attitude qui fait penser à un adulte, le bambin, dominé par des figures et des chevaux, regarde hors du tableau. Le caractère esquissé du trait de pinceau donne à cette peinture de format imposant un aspect inachevé — comme pour évoquer l’homme qui doit grandir encore ?

FORMES FANTOMATIQUES DU SYMBOLISME

 

Pour Albert Welti, comme pour Böcklin, la fantaisie inventive importe plus que le compte-rendu de ce qu’on peut observer. Entre 1888 et 1891, le jeune peintre de 35 ans travaille comme élève dans l’atelier zurichois de Böcklin. En 1895, il s’établit à Munich et s’efforce de s’affranchir de l’influence de son maître. Voici ce qu’écrit Welti rétrospectivement :

Albert Welti, Cavaliers dans la brume, 1896

« Après deux ans, j’ai ressenti très fort le désir, sans injonction de quiconque, pas même de ce grand esprit, d’entreprendre pour une fois quelque chose qui me soit propre et de le terminer. »
La proximité de son style avec celui de Böcklin se révèle dans sa représentation symbolique d’un phénomène météorologique : dans un combat aérien, les chevaucheurs de nuages virevoltent autour d’un sommet qu’ils recouvrent.

Arnold Böcklin, La Peste, 1898

La manière dont Welti incarne les nuages qui se mélangent est proche de celle dont Böcklin campe la peste qui ravageait l’Inde à l’époque où ce tableau fut peint. La figure cauchemardesque, qui chevauche un dragon à travers les rues d’une ville, s’inspire de travaux préparatoires réalisés en 1876 sur le thème du choléra. La préoccupation de Böcklin pour les maladies terrifiantes, la mort et la fragilité des êtres plonge ses racines dans son propre vécu : le typhus et le choléra ont plusieurs fois menacé et même frappé sa famille nombreuse.

PAYSAGES DE L’ÂME

Le culte exalté dont l’art de Böcklin a fait l’objet dans les pays germanophones au tournant du siècle tire son origine essentiellement de la popularité de son motif le plus célèbre L’Ile des morts. Cette icône du symbolisme touche un nerf sensible de cette époque et en tant que reproduction gravée a trouvé sa place dans de nombreux intérieurs bourgeois de la fin de siècle.

Max Ernst, la Grande Forêt

Dans cette rencontre entre deux visionnaires aux images puissantes, Max Ernst semble proposer un détournement de L’Ile des morts. Il isole sa composition par rapport au cadre à la manière d’une île et dresse des arbres fins et hauts sur un ciel sombre. L’astre qui apparaît derrière la forêt de Max Ernst a la forme d’un anneau immense et diffuse une lumière pâle sur le paysage ; il confère au tableau une aura de mystère au diapason des accents fantastiques de la composition de Böcklin : une figure toute de blanc vêtue qui nous tourne le dos accompagne un cercueil sur une barque.

Arnold Böcklin, L’ Île des morts , 1888

Ces lieux où s’expérimente le passage d’un monde à l’autre — au-delà
lugubre, nimbé de mystère — témoignent en même temps du rayonnement qu’exercèrent les énigmatiques paysages de l’âme de Böcklin sur les générations suivantes d’artistes surréalistes.

CHEVAUX ET CAVALIERS

(Arnold Böcklin, Der Kampf auf der Brücke, 1889, et Edgar Degas, Jockey blessé, 1896/98)

Les chevaux et les cavaliers font partie de l’histoire de l’art depuis l’antiquité. Isolément ou en groupe, du portrait à cheval jusqu’aux représentations d’armées déchaînées, l’homme et sa monture apparaissent dans une puissante symbiose. Comme bel exemple de cette force brute, on observe ici la scène de combat sur un pont de Böcklin, pour lequel il s’inspire de La Bataille des Amazones de Peter Paul Rubens (Alte Pinakothek, Munich). Nue et sauvage, une meute bestiale galope depuis la gauche — elle pourfend une troupe « civilisée » sur la droite incapable de résister à cet assaut.

Le Jockey blessé de Degas tire en partie sa force dérangeante d’une rupture brutale du lien, de la traditionnelle unité entre le cavalier et sa monture. Tout événement de ce type possède sa référence biblique dans les représentations de l’épisode du chemin de Damas, où Paul est désarçonné de son cheval en apercevant Dieu. La chute de Degas est certes complètement profane et elle ne comprend ni conversion ni nouveau départ ; son héros déchu symbolise davantage l’échec. L’histoire de la réalisation de ce tableau comporte de curieux échos de la thématique qu’il illustre. L’artiste a lutté avec ce motif durant quelque trente ans (tableau à la National Gallery of Art, Washington), avant de le reprendre à la présente composition.

JEUX AQUATIQUES

(Arnold Böcklin, Le jeu des Néréides, 1886, et Félix Valloton, Trois femmes et une petite fille jouant dans l’eau, 1907)

Là où les néréides chez Böcklin ne sont qu’exaltation pleine d’éclaboussures et plaisir tourbillonnant – y compris un salto arrière – au milieu d’un puissant ressac, les baigneuses chez Vallotton sont distantes, dégrisées et comme figées dans le temps.

Les deux peintres s’emparent du thème traditionnel des femmes au bain. Böcklin se sert encore, comme tant d’artistes avant lui (dont Jean-François de Troy avec Diane et Actéon), du prétexte de la mythologie. Toutefois, au grand désarroi de nombreux contemporains, il réserve un traitement grotesque à ces sujets nobles.

Potelées, exubérantes, bruyantes, ses nymphes font plutôt sourire le spectateur qu’elles ne réveillent en lui des pulsions voyeuristes. Les côtés ironiques voire comiques de Böcklin déroutaient complètement les critiques et cela a eu pour effet de tels tableaux ont été souvent ignorés au profit de ses œuvres mélancoliques et pleines de pathos.

Vallotton présente ses nus féminins dans une eau gris ardoise au salon des indépendants de 1907 à Paris sous le titre Baigneuses. Les corps sculpturaux, loin de toute idéalisation ou mythologie, semblent autant plongés dans la lumière que dans l’eau.

LONGUES OMBRES


Böcklin l’Ile des Vivants

Afin de sortir de l’ombre immense de Böcklin, de nombreux peintres bâlois ont tenté de se confronter à leur illustre prédécesseur qu’ils ont pu voir tantôt comme une source d’inspiration, mais aussi comme un fardeau presque tétanisant.

Wiemken La Vie

L’œuvre de Wiemken La Vie, qu’il a conçue durant sa période surréaliste au milieu des années 1930, présente des parallèles au niveau du titre et du motif de la ronde de figures chatoyantes avec le tableau de Böcklin L’Ile des vivants. A la place de paisibles nuages de printemps et d’une nature d’Arcadie, le monde de Wiemken porte la mort en son sein. Dans le ventre du sphinx, c’est-à-dire au beau milieu de son tableau, il place une citation de la célèbre Ile des morts de Böcklin. Depuis l’île, un squelette semble tenir en laisse deux autres personnages.

Le mauvais présage trouve un écho dans les mystérieuses scènes d’une exécution et d’un enterrement. Avec l’image du globe, prêt à rouler en bas d’un échafaudage qui fait penser à des montagnes russes, on est confronté à une image du monde au bord du gouffre. Wiemken condense ici toute la peur panique qu’il avait de la guerre. Dans la partie supérieure du tableau — sur une sorte de nuage constructiviste — deux mains sans corps avec des fils aiguillent les événements du monde tout droit vers l’abîme.

PAYSAGES SPIRITUELS

(Arnold Böcklin, Le bosquet sacré, 1882, et Cy Twombly, Étude pour présence d’un mythe, 1959)

Böcklin et Cy Twombly étaient-ils des âmes sœurs ? En tout cas, leur singularité consiste en cela qu’en plus de références à des thèmes concrets de la mythologie, ils ont toujours cherché à transmettre la quintessence artistique de l’antiquité : lieux du sublime, paysages pleins de grandeur et d’esprit. L’importance de la culture méditerranéenne pour leur art est encore soulignée par le fait que chacun a trouvé son Arcadie loin du pays qui l’a vu naître et tous deux ont fini leur vie en Italie.

Böcklin a travaillé sur son paysage du Bosquet sacré avec des moyens symbolistes : le feu sacrificiel et des prêtres en procession signalent qu’on est là dans un lieu de culte. Entre les arbres apparaît une architecture classique de temple, ce qui rattache le sanctuaire à la culture antique la plus noble. Les figures vêtues de blanc accentuent plutôt comme des signes l’atmosphère solennelle du tableau.

L’espace pictural blanc et abstrait de Twombly est également saturé de signes, qui en appellent autant aux domaines de l’esprit qu’à notre mémoire culturelle — que ce soit avec des séquences de nombres ou des inscriptions qui renvoient à Délos, île de la mer Egée passant pour être le lieu de naissance d’Apollon et d’Artémis et qui conserve plusieurs importants sites voués au culte de ces dieux. Les graffitis caractéristiques de Twombly alimentent une tension entre écriture et image et ils fonctionnent comme des traces non concrètes de nos productions culturelles collectives.

Aussi éloignés que soient les mondes artistiques de Böcklin et Twombly, ils ont pour point commun ici de ne proposer aucune narration, ils composent d’éternels instants à partir de simples pièces de décor.

Les notices de cette présentation des collections sont issues de collaboration entre plusieurs étudiants du groupe de travail
« Blickweitungen » dirigé par Dr Markus Rath de la faculté d’histoire de l’art de l’Université de Bâle : Magali Berberat, Flavia Domenighetti, Elena Eichenberger, Lisa Gianotti, Duco Hordijk, Angela Oliveri, Gabriele Pohlig, Juri Schmidhauser, Zoe Schwizer, Katharina Stavnicuk, Mirjam Strasser, Benno Weissenberger.

Rédaction : Claudia Blank, Dr Eva Reifert ; Traduction : Yves Guignard ; Commissariat de l’exposition : Dr Eva Reifert, assistée de Claudia Blank

Pascal Henri Poirot,

Pascal Henri Poirot, la Fonte 2019
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Aujourd’hui je vous emmène à la rencontre de Pascal Poirot, peintre, sculpteur, chargé de cours à la fac et aux Arts-Deco, maître du paysage, comme de l’architecture, je vous ai déjà présenté son livre,
« [EN]QUETE DE PEINTURE  qui est tout à fait imparable. », bilingue, français, anglais, enrichi par les textes de Tiphaine Laroque, entre autres, des photos de Florian Tiedje.

Dans une vidéo de France 3, il se présente.

J’emprunte un extrait de Roland Recht qui parle de ses canapés

Les motifs de Canapés se réfèrent explicitement aux « drôleries » de l’art médiéval que l’oeil ne découvre que progressivement dans les marges des manuscrits, ou plus exactement aux « grotesques » de l’Antiquité et de la Renaissance. Dans les Grotesques, tout comme chez Poirot, les figures sont ordonnées à partir d’un principe de symétrie qui les transmue en motifs. Mais alors que dans les grotesques, le peintre crée de toutes pièces des créatures monstrueuses, mi-homme, mi-animal, chez Poirot, c’est le couple « étalé » dans la figure érotique qui devient une créature monstrueuse

et un autre de

(…)…Par leur insistance répétitive et leur fixité, les canapés apparaissent comme un souvenir-écran, qui à la fois voile et dévoile le travail de la mémoire et fige en une image un précipité de souvenirs. Objet de ravissement et de fascination qui surgit là où la mémoire s’est perdue.(…)
Marie Pesenti-Irrman

Plusieurs thèmes bibliques sont abordés et illustrés par les tableaux de
Pascal Henri Poirot. Ils sont porteurs d’une grande richesse symbolique. Le rapport à l’Écriture a toujours été essentiel pour le protestantisme tant dans l’étude des textes bibliques que, dans la force d’extraits de la bible, mis en évidence sur les murs des temples. La paroisse  d’Abreschviller avait
demandé à l’artiste de faire apparaître cette caractéristique.

                                            La Tour de Babelle
Tous les tableaux sont réalisés au pigment à l’œuf sur bois, sauf celui représentant le temple d’Abreschviller, peint sur des collages sur bois.

Dans son « atelier perché »  de Neuve-Eglise en AlsacePascal Henri Poirot, l'Atelier Perché il prend le temps de peindre. Ses paysages de montagnes sont vides de tout personnage, un peu surréalistes, avec un banc de-ci de-là, une échelle, ou encore ses cabanes, souvenir des coins parcourus et photographiés depuis des décennies.  Pascal-Henri Poirot est un artiste esthète, un philosophe, pour lequel Michel Serre est une référence, pour se mettre en phase avec la nature. Ce livre l’inspire sur le temps, les déséquilibres graves qui adviendront, des dangers que nous courons. Il a choisi un extrait :
le « Contrat Naturel » un autre rapport à la nature, un rapport respectueux. C’est une lecture prémonitoire d’un livre qui a 30 ans,
annonciateur d’un autre mode de vie, d’un autre monde, que nous
serons bien obligé d’adopter.

Ses souvenirs d’enfance, la salle à manger des grands parents
ornée de  l’Angelus de Millet, la vie paysanne, font partie de ses thèmes,
qu’il transpose jusqu’en Australie.
Cela correspond aux mutations actuelles du mode de vie,
aux bouleversements.
Paysage insolite, qu’il mélange avec ses récurrentes échelles.

Nés quelquefois au hasard des bigarrures colorées du mobilier, végétaux personnages, monstres et animaux semblent issus d’herbiers ou d’ouvrages ethnologiques et érotiques. Les canapés déserts sont d’autant plus troublants qu’ils éveillent le souvenir d’une musique de chuchotements, de rires lointains et de petites cuillères que l’on tourne dans une tasse de thé.

Le méticuleux contrecollage des papiers froissés et préparés par toute une alchimie culinaire à un vieillissement prématuré, participe à cette sollicitation de la mémoire.
Evelyne Loux

Ses montres sont-ils prémonitoires ?
Tortue géante ou pangolin aux couleurs rassurantes sous un fabuleux
paysage de science fiction ?

Les paysages de Pascal Poirot sont souvent dépeuplés, dénudés.
Le peintre privilégie l’hiver : les blanchiments
précoces du paysage,
la première couche de
neige, quasi-transparente encore, à travers laquelle
le nervurage du sol commence à se lire, lorsque se développe une belle
gamme de gris comme sur
quelque gravure au burin. L’hiver passant, l’ossature
du paysage se dessine bien davantage encore, toute la végétation basse est aplatie ou morte : ne restent plus que les lignes-forces.Avec les hauteurs vosgiennes, le
peintre a tout son content : il parcourt le « pays vain » par excellence.
François Pétry

Une friandise pour terminer

voici à quoi nous allons ressembler à la sortie du confinement

Différentes techniques donnent lieu à des séries récurrentes de peintures autour des objets, canapés, architectures, peintures à l’huile de
paysages sur le thème du mythe et de la sanctuarisation.

PARCOURS
De nombreuses expositions dans des lieux culturels et galeries, foire,
il est présent dans des collections et musées en France ,Suisse,
Allemagne, Australie.

Léa Barbazanges

La Fondation Fernet-Branca, propose une nouvelle visite d’atelier.
place à l’artiste Léa Bargazanges, qui nous fait découvrir son univers
artistique !
C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

Cliquez sur le lien pour visionner

Les sculptures et installations de Léa Barbazanges sont délicates, raffinées, presque flottantes. Le choix de la matière est au cœur de sa réflexion : des matériaux naturels, bruts, sont choisis pour leur beauté.
La compréhension des propriétés des matériaux et leur capacité métamorphique, passionnent autant qu’elles représentent un défi pour l’artiste.


Léa Barbazanges met en espace des cristaux translucides, brillants, au graphisme étonnant. Ils sont constitués de minéraux envahissant des surfaces planes, comme de l’eau qui, à une certaine température, prend une forme cristalline. Le dessin est à la fois organique et géométrique, prédéterminé par sa nature cristalline, qui se caractérise par une matière ordonnée au niveau des atomes. C’est cette organisation de la matière qui explique la réflexion particulière de la lumière.

Dans le triptyque « Magnolia macrophylla – les masques – » on peut distinguer au sein de l’aluminium les nervures d’une feuille d’arbre grandeur nature dans ses moindres détails. C’est en collaboration avec H.H. Services et notamment avec Isaak Rensing, et ses outils de tôlier formeur que Léa Barbazanges a pu imprimer le graphisme du végétal dans du métal. Dans ce travail à quatre mains l’émerveillement apparaît en se rapprochant, quand on découvre la délicatesse du dessin anthropomorphe. En effet les feuilles ont été perforées par des insectes de façon quasi symétrique. Sa forme est simple, fascinante, concrète.

Finalement, les œuvres de Léa Barbazanges nous montrent ce que la nature nous cache ou que nous ne savons pas voir dans un changement constant. Elle nous montre la beauté de cette transformation qui participe à notre enchantement et notre propre construction.

Léa Barbazanges a exposé à la Fondation lors de l’exposition « L’impermanence » avec également Céline Cleron, Marie Denis, Stephane Guiran et Philippe Lepeut du 26 mai 2018 jusqu’au 30 septembre 2018.

Sur France culture

Fondation Fernet Branca

Communiqué de la Fondation Fernet Branca

C’est une rencontre virtuelle, Covid-19 oblige

« Dans le cadre de la situation actuelle de pandémie du Coronavirus, notre responsabilité est d’assurer la sécurité et le bien-être de nos visiteurs et de l’équipe de la Fondation. En conformité avec les directives gouvernementales, nous avons pris la décision de fermer la Fondation Fernet-Branca.

Bien entendu nous ne pouvons pas prédire la durée de la fermeture. Cependant, nous vous tiendrons informés et nous restons à votre disposition par mail pour toute information.

Dans cette attente, nous vous proposons des
visites d’ateliers d’artistes (cliquez ici) que nous diffusons régulièrement pour le plaisir des yeux et du savoir.
La Fondation Fernet Branca, vous propose de revenir sur certaines expositions passées, de les visiter virtuellement :

Expositions 5 femmes : l’engagement poétique

Exposition David Nash, Nature to Nature

Exposition Sens contresens 

Exposition David Brolliet

HISTOIRE DE LA FONDATION

La Distillerie de Fernet-Branca

L’histoire de cette distillerie ludovicienne commence à Bâle, le 22 juillet 1907, date à laquelle l’entreprise de construction Broggi et Appiani, « entrepreneurs de travaux en maçonnerie et ciment », dépose une demande d’autorisation de bâtir au maire de Saint-Louis pour le compte de la famille Branca de Milan, selon les plans de l’architecte milanais G. Merlini.

Ce permis est accordé le 25 juillet par le maire Jules Tilger.


Un impressionnant bâtiment d’une longueur de 50 mètres sera construit sur un terrain qui longe la voie ferrée, sis 2 rue du Ballon, où l’activité de distillerie débute en 1909 et produit un digestif aux plantes amères appelé
« Fernet Branca » : du nom de son inventeur, le Dr Fernet, médecin et herboriste, et Branca, propriétaires de la fabrique.
Le Dr Fernet a fabriqué une poudre et Bernardino Branca l’a transformée en liqueur.

Dans les caves du bâtiment sont installés des fûts de chêne géants destinés au vieillissement de la liqueur, créés sur place par l’artisan tonnelier strasbourgeois Rodolphe Fruhinsholz.
La distillerie de Saint-Louis produira en moyenne 300 000 bouteilles par an.

Le bâtiment est surplombé d’un aigle en cuivre, emblème de la marque Fernet-Branca, réalisé pour dominer le pavillon de cette entreprise à l’exposition internationale de Milan en 1906.
A la demande de Jean Ueberschlag, député-maire de Saint-Louis, le préfet de la Région Alsace, par arrêté du 04 juillet 1996, a inscrit sur l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, la façade ainsi que l’aigle et le globe qui la surmontent.

Le 22 juillet 2000, la production est définitivement arrêtée à Saint-Louis.

De la distillerie Fernet-Branca à un lieu de diffusion d’art contemporain

L’idée est née en février 2003, lors de la visite des lieux par Jean Ueberschlag, député-maire, et Jean-Michel Wilmotte, architecte, à l’occasion de la mission confiée par le Conseil Municipal de Saint-Louis au Cabinet Wilmotte chargé de définir un nouveau projet urbain pour Saint-Louis.

Fondation Fernet-Branca
2, rue du Ballon
68300 Saint-Louis/Alsace
T +33 3 89 69 10 77

Président :  Jean Ueberschlag
Directeur :  Pierre-Jean Sugier

Horaires d’ouverture :
du mercredi au dimanche
de 13 heures à 18 heures

TINGUELY @ HOME

Cette semaine, TINGUELY @ HOME est dédiée au côté acoustique
de l’art de Jean Tinguely.

Les sculptures de Tinguely ont toujours une dimension tonale qui a été délibérément choisie et équilibrée par l’artiste dans le cadre de l’œuvre. Ils créent des bruits, des sons et une musique apparemment aléatoire.
Sous le titre «Construisez votre propre machine à musique»,
l’ équipe d’éducation artistique a préparé une collection d’idées, de conseils
et d’astuces pour vous permettre de construire une machine à musique selon Jean Tinguely, en particulier pour les écoliers. Amusez-vous !

Les sculptures de Jean Tinguely ont toujours
une dimension acoustique, que l’artiste a lui-même délibérément
composée et réglée comme une partie intégrante de ses oeuvres.
Cet aspect musical culmine dans les quatre Méta-Harmonies(vidéo)
réalisées entre 1978 et 1985.

Totentanz (vidéo)

Avec la contribution de SRF Myschool à Jean Tinguely, vous pouvez également approfondir vos connaissances sur l’art et les idées de Tinguely et les utiliser comme source d’inspiration pour votre propre créativité.
Vue du musée
Les machines

Sommaire du mois de mars 2020

Les expositions et foires prévues pour les mois de mars et avril sont reportées pour la plupart au mois de septembre
La plupart des sites de musées proposent des visites en ligne.

Magritte le Baiser
précurseur du Covid-19 ?

30 mars 2020 : 1518, LA FIÈVRE DE LA DANSE
20 mars 2020 : Coronavirus #Mulhouse Resiste
19 mars 2020 : Bernard Fischbach
13 mars 2020 :  La Fiancée Du Vent – Oscar Kokoschka – Vienne 1900
06 mars 2020 : Amuse-Bouche. Le Goût De L’art.
04 mars 2020 : Karin Kneffel Au Musée Frieder Burda
03 mars 2020 : Jane Evelyn Atwood À La Filature

1518, LA FIÈVRE DE LA DANSE

Voici une « épidémie » qui avait atteint notre région au 16 e siècle
Je fais remonter mon article

Au Musée de l’oeuvre Notre Dame/Arts du Moyen Age
de Strasbourg, jusqu’au 24 FÉVRIER 2019

Albrecht Dürer, « Couples dansants chutant dans une rivière en châtiment de leur attitude irrespectueuse lors de la Fête Dieu », gravure tirée de Hartmann Schedel, Chronique de Nuremberg, Nuremberg, Anton Koberger, 1493, folio CCXVII recto. Strasbourg, Cabinet des Estampes et des Dessins
Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

En juillet 1518, des dizaines de personnes se mettent
soudainement à danser dans les rues de Strasbourg. Hommes
ou femmes, rien ne semble pouvoir les arrêter.
Cette « épidémie », qui s’étend sur plusieurs semaines, ébranle
la communauté strasbourgeoise et frappe les esprits au point
d’être consignée par de nombreux chroniqueurs de l’histoire
municipale du XVIe au XXe siècle.

. Retable de la Crucifixion avec saint Guy et saint Valentin, vue d’ensemble et détail de la console de saint Guy (Sankt Vitus), Chapelle Saint-Materne, Cathédrale de Cologne.
Le détail de ce panneau peint constitue l’une des très rares représentations
de la danse de Saint-Guy

L’exposition se propose, cinq cent ans plus tard, de revenir sur
ce phénomène et d’observer la manière dont le gouvernement
de la ville, le clergé et le corps médical tentèrent d’y remédier.
Reprenant le déroulement des événements, elle s’efforce d’éclairer
le contexte de cet épisode historique particulier et de le mettre
en relation avec d’autres cas de « manies dansantes » qui ont
marqué le Moyen Âge ou les périodes plus récentes.

7. La Mort dansant, vers 1520,
sculpture sur bois polychromée, Strasbourg, Musée de l’Œuvre Notre-Dame Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

Basée sur les sources contemporaines de l’évènement, la présentation
tente de distinguer les faits des interprétations abusives
donnant du monde médiéval la vision simpliste d’un monde
traversé par des pulsions irrationnelles et secoué par les crises.
Cette approche de la réalité et de l’imaginaire du Moyen Âge,
portée par une scénographie immersive, s’attache aussi aux
interprétations qui ont pu être données de ces évènements par
les historiens comme par le monde médical jusqu’à la période
contemporaine. Elle questionne en conclusion d’autres
comportements épidémiques de natures diverses et les
processus mentaux ou sociaux qui les sous-tendent.

Relief avec la Vierge à l’enfant, saint Guy et un saint pape, début du XVIe siècle, sculpture sur bois polychromée provenant de la chapelle Saint-Guy près de Saverne,
Musée du Château des Rohan, Saverne Photo : Musées de Strasbourg, Mathieu Bertola

Commissaire : Cécile Dupeux, conservatrice du Musée de
l’Œuvre Notre-Dame
Collaboration scientifique : Georges Bischoff, professeur émérite
d’Histoire du Moyen Âge et Élisabeth Clementz, maître de
conférences à l’Institut d’Histoire d’Alsace de l’Université de Strasbourg
« Il faudrait se souvenir de ces évènements pendant
mille ans, et limiter les danses, en particulier les danses
obscènes et indécentes… ».
C’est en ces termes que l’humaniste et professeur
strasbourgeois Hieronymus Gebwiller décrit quelques années
plus tard le traumatisme créé par l’épisode de danse collective
qui ébranla la ville durant l’été 1518

5. Extrait du registre des Mandats et Règlements de la Ville de Strasbourg. Interdiction des danses publiques par le magistrat de Strasbourg,
signée Sébastien Brandt (Strasbourg, 2 août 1518).
Archives de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg, AVES, 1 MR3, f. 72 r.

Le parcours de l’exposition

L’aspect théâtralisé des éléments visuels produit un effet
d’immersion attisant l’imagination des visiteurs.
Ces éléments visuels sont mis en page  en étroite relation avec
les textes s’y référant. Les titrages et les cartels guide la curiosité du
public tout en lui fournissant les éléments propices à l’élaboration d’une
prise de conscience réaliste d’un tel phénomène.
La lumière diffuse pour crée des ambiances favorables à la concentration,
ou bien ponctuelle, éclairant faiblement en découpe une gravure
ou un document écrit.
Unité 1 : l’épidémie de danse à Strasbourg et les réactions de
l’administration municipale
La description de plusieurs cas de danse compulsive décrits par
les sources permet une première approche du phénomène tel qu’il
fut vécu par les habitants de Strasbourg.
Le rôle joué par la ville et ses corporations face à ce problème
d’ordre et de santé publics, et en particulier l’intervention de
l’humaniste et poète Sébastien Brant, secrétaire de la ville et
membre des conseils, sont développés.

Unité 2 : les épidémies de danse au Moyen Âge, répartition
géographique, représentations et descriptions
La présentation des cas répertoriés de manies dansantes médiévales
montre leur implantation presque exclusive dans une aire couvrant
la région Rhin-Main et la Belgique, espace de chevauchement entre
deux espaces culturels à la lisière du monde germanique et du monde roman.
Les quelques descriptions, constituées par les témoignages de médecins
ayant pu assister à des phénomènes semblables au cours du XVIe siècle,
et les rares représentations d’épisodes proches, en particulier celles
du pèlerinage des épileptiques de Moelenbeek près de Bruxelles,
tentent de préciser les caractéristiques du phénomène.

Unité 3 : la médecine face à l’épidémie
Cette section permet de développer la position complexe des médecins
de Strasbourg, partagés entre le recours à un diagnostic astrologique
ou humoral traditionnel et une aspiration nouvelle à l’observation
et à l’analyse scientifique, telle que la révèlent les nombreuses et
remarquables éditions médicales publiées dans la ville au début
du XVIe siècle. Elle montre la présence presque constante de
la religion dans l’analyse médicale, le corps étant perçu comme
le reflet de l’âme. Les premières tentatives d’explication du
phénomène de danse épidémique, en particulier par le médecin
et alchimiste Paracelse, présent à Strasbourg quelques années
après l’évènement, expriment l’intérêt porté à cet épisode
historique après son déroulement.

Unité 4 : bonne et mauvaise danse au Moyen Âge
La perception de la danse à la fin du Moyen Âge et en particulier
le jugement ambigüe de l’Église sont évoqués. Si cette forme
d’expression pouvait en effet être considérée comme un moyen
de communication avec Dieu pouvant conduire au Salut, elle était
aussi parfois perçue comme instrument du diable, capable de
provoquer une perte de contrôle menant à tous les dérèglements.
Le refus des danses populaires désordonnées tournées en dérision
par les graveurs, la distinction des bons et des mauvais instruments,
la publication de traités ou pamphlets contre les danses permettent
d’expliciter cette position de défiance, qui aide à comprendre la peur
suscitée par les épidémies de danse.

Unité 5 : les saints patrons de la danse
Le recours à la thaumaturgie religieuse par le biais de la prière,
des messes et des pèlerinages (vers l’église Saint-Vit de Saverne
dans le cas strasbourgeois) est attesté dans les épidémies de danse.
C’est saint Guy (15 juin) et saint Jean-Baptiste (24 juin), réputés
comme saints patrons de la danse et des maladies convulsionnaires
depuis l’Antiquité tardive, que l’on invoquait le plus
fréquemment pour obtenir une guérison, mais leur culte prend
le plus souvent la forme de rites thérapeutiques annuels,
destinés tout autant à la prévention qu’à la guérison.
Car s’ils sont réputés soigner le mal, ces saints peuvent
aussi en être la cause, capables par leur malédiction
de provoquer les transes redoutées.

Unité 6 : la manie dansante vue par les siècles suivants
La mention de l’évènement par les chroniques strasbourgeoises
successives sera marquée par des déformations qui s’amplifieront
au cours des siècles et permettront d’interroger dans l’exposition
la notion même de « source historique ». Les outrances de
l’interprétation moderne et contemporaine, basée sur une lecture
du Moyen Âge comme époque irrationnelle ancrée dans les
superstitions, font l’objet d’une mise au point nécessaire dans
l’exposition.
L’intérêt du monde médical au XIXe siècle pour ce qui apparaît
comme une pathologie s’exprime en particulier dans l’analyse
du docteur Jean-Martin Charcot, qui en fit une explication
neurologique reprise par la plupart de ses successeurs.
Les développements au XXe siècle montrent la tendance
à plaquer sur le phénomène les stéréotypes de la médecine
et de la psychologie modernes.
Unité 7 : d’autres phénomènes épidémiques dans le monde actuel
Si les mentions ou les représentations de danses convulsives
remontent à l’Antiquité, qui voit dans la possession des corps le signe
de la présence des dieux, les exemples de danses rituelles telles
la Tarentelle encore pratiquées dans le monde contemporain
font partie de la réflexion sur le phénomène.