L'art en ville: parcours de découverte

Mulhouse
L’art dans la ville
dans le cadre des journées de l’architecture 2014.

Deux propositions de parcours de découverte d’œuvres d’art contemporain dans l’espace public à Mulhouse, à expérimenter à pieds, à vélo ou en transports en commun.
Samedi 11 octobre : départ à 10h00
– Gare centrale Avenue du Général Leclerc –
Samedi 18 octobre: départ à 14h30
– Fonderie 16 rue de la Fonderie – Mulhouse

Yves Carrey, Schweissdissi
Yves Carrey, Schweissdissi

À l’occasion des Journées de l’architecture (www.ja-at.eu) qui se déroulent du
24 septembre au 26 octobre 2014,
l’association Mulhouse Art Contemporain
propose au public deux parcours de découverte des œuvres de l’espace urbain.
Mulhouse Art Contemporain souhaite, par le biais de ces deux propositions, mettre en lumière les œuvres qui sont installées dans l’espace public et qui appartiennent au quotidien de la ville et de ses habitants.
Parcours
Deux objectifs dans cette démarche : faire connaître ces œuvres et les artistes qui les ont produites mais aussi permettre aux habitants de se les approprier, comme un élément de leur vie de citoyen.
Cette double volonté rejoint le but de l’association : ouvrir l’art contemporain à tous les publics en empruntant tous les chemins possibles…
Les deux parcours donneront lieu à l’édition d’une carte qui sera diffusée gratuitement, à l’office de tourisme de Mulhouse notamment, et qui permettra au public de s’approprier ces parcours en toute autonomie.
Jean Pierre Raynaud, La Roue de Mulhouse vue du ciel
Jean Pierre Raynaud,
La Roue de Mulhouse

Mulhouse Art Contemporain
– Cour des Chaînes – 15 rue des Franciscains –
68100 Mulhouse
www.mulhouse-art-contemporain.fr
– contact: mulhouseartcontemporain@yahoo.fr

Recommandé à lire ci-dessous

Yves Carrey ma visite
Zoom sur Mulhouse (billet, la vidéo de TF1 a été supprimée à sa demande expresse
photos de l’auteur

Hokusai le « fou de dessin » au Grand Palais

Hokusai Katsushika (1760-1849)
Hokusai, autoportrait
« Depuis l’âge de 6 ans, j’avais la manie de dessiner la forme des objets.
vers l’âge de 50 ans, j’avais publié une infinité de dessins, mais tout ce que j’ai produit avant l’âge de 70 ans ne vaut pas la peine d’être compté.
C’est à l’âge de 73 ans que j’ai compris à peu près, la structure de la nature vraie des animaux, des herbes, des arbres, des oiseaux, des poissons et des insectes.
Par conséquent à l’âge de quatre-vingts ans, j’aurai fait encore plus de progrès ; à quatre-vingt dix ans, je pénètrerai le mystère des choses ; à cent ans je serai décidément parvenu à un degré de merveille, et quand j’aurai cent dix ans, chez moi, soit un point, soit une ligne, tout sera vivant ».
Mort à l’âge de 90 ans, il est enterré dans le temple bouddhique de Saïkiodji à Tokyo. Il sera resté toute sa vie un artiste du peuple, ignoré et même souvent honni par la classe aristocratique.
Né dans un faubourg d’Edo, sur la rive orientale du fleuve Sumida, sous le nom de Tokitar, Hokusai est adopté à l’âge de trois ans par un artisan d’art, fabricant de miroirs à la cour du shogun. Ayant développé très tôt un don pour le dessin, il travaille d’abord chez un libraire puis entre en apprentissage chez un xylographe de 1773 à 1778. Il devient ensuite l’élève de l’illustre chef d’atelier populaire Katsukawa Shounshô, spécialisé dans les estampes – jusqu’en 1790. Il étudie aussi les oeuvres des grands artistes anciens, et en particulier celles d’Itshio.
L’exposition
hokusai, vue de l'expo
Le parcours suit la chronologie de la longue vie de Hokusai, ponctuée de multiples changements de noms. La densité des salles d’exposition et des différents types d’oeuvres qui y sont présentées est relative à celle de la production de l’artiste aux différentes périodes de sa vie.
Hokusai et la France
La première salle de l’exposition aborde l’oeuvre de Hokusai par le biais de la réception qui en fut faite en France dans la seconde moitié du XIXe siècle, elle constitue en cela une introduction au parcours monographique qui se déroule ensuite, revenant sur le profond choc culturel que constitua pour les Occidentaux la découverte de l’art japonais à partir de la fin des années 1850. En 1856, C’est la découverte d’un volume des Manga de Hokusai par Félix Bracquemond qui marque le début de l’engouement pour Hokusai. Il est séduit par ce thème qui fera de lui l’initiateur de la vogue du japonisme en France à la fin du XIXe siècle. Thème repris par Monet qui couvrit sa cuisine d’estampes et aménagea son jardin, ou encore Cézanne qui peignit sa Montagne St Victoire
comme les multiples du Mont Fuji de Hokusai. L’œuvre orchestrale du compositeur français Claude Debussy : la Mer, dont la Couverture de l’édition originale de 1905 reproduisait La Grande Vague de Hokusai.

Hokusai, rôle de la courtisane kashiku, cp
Dans son sillage, peintres et dessinateurs trouvent dans ces dessins saisissants de vie, comme dans les Trente-six vues du mont Fuji, un vocabulaire nouveau à étudier, à copier, à transposer dans leurs propres réalisations.
Cinq noms pour un même artiste
Son nom sonne comme la promesse d’un voyage, dans le temps, dont nous occidentaux, malgré la séduction immédiate, n’avons pas les codes.
L’exposition suit les différentes périodes d’Hokusai, et s’intéresse à son œuvre par un biais chronologique. Logique, quand on sait que l’artiste s’est maintes fois réinventé, jusqu’à modifier son nom. Lorsqu’il change de patronyme, il transmet l’ancien à l’un de ses élèves. Il est d’abord Katsukawa Shunrō, dessinateur d’estampes commerciales qui représentent des acteurs de kabuki ou des scènes de la vie quotidienne.
Hokusai vue
Il devient ensuite Sōri, créateur de calendriers raffinés et de gravures. En 1805, le nouveau siècle lui apporte une nouvelle identité, celle de Katsushika Hokusai, peintre et illustrateur. C’est sous le nom de Taito qu’il élabore l’une de ses pièces maîtresses, le Hokusai Manga, manuel d’apprentissage qui montrent aussi bien les hommes que la nature et les animaux. En 1820, il change de nouveau de nom et devient Iitsu. C’est pendant les quatorze années durant lesquelles il porte ce nom qu’il réalise ses plus célèbres estampes : les Trente-six vues du mont Fuji et les superbes Voyages au fil des cascades des différentes provinces, allégories du temps qui passe à travers la nature changeante, se consacrant essentiellement à la conception de ces fameuses
« estampes du monde flottant » (ukiyo-e)
. Naissent alors les grandes séries qui feront ensuite sa célébrité, au premier rang desquelles les Trente-six vues du mont Fuji.

Katsushika_Hokusai-The_Thirty-Six_Views_of_Mt_Fuji-
Katsushika_Hokusai-The_Thirty-Six_Views_of_Mt_Fuji-

C’est surtout la manière dont Hokusai se dégage des contraintes du genre qui fait la modernité de ses grands ensembles : contrairement aux usages, les estampes de paysage conçues par Hokusai ne s’appuient pas sur des sites clairement identifiables, illustrant davantage les métamorphoses du motif choisi. La période Iitsu se caractérise aussi par un regain d’activité dans le genre du surimono, ainsi que par l’originalité et la force de ses peintures. Que ce soit dans ses premières estampes ou dans ses œuvres les plus célèbres couleurs bleu de Prusse, Hokusai s’intéresse avant tout à la nature. Si ses premiers modèles ont été les courtisanes ou les acteurs de Kabuki, très vite ce sont les paysages et les animaux qui imprègnent ses travaux.
Hortensias et hirondelles - Début de l'ère Tempō (vers 1830-1834) - estampe.  Crédits : THIERRY OLLIVIER/ RMN-GRAND PALAIS/MUSEE GUIMET PARIS
Hortensias et hirondelles – Début de l’ère Tempō (vers 1830-1834) – estampe.
Crédits : THIERRY OLLIVIER/ RMN-GRAND PALAIS/MUSEE GUIMET PARIS

Du mont Fuji, montagne sacrée et symbole de beauté par excellence, aux cascades japonaises, immenses face aux êtres humains, en passant par les tigres, les pivoines, les bouvreuils et les canaris qui hantent ses estampes, celui qui voulait vivre plus de cent ans a réussi à signer une oeuvre éternelle, délicate et poétique, quelquefois caricaturale aussi. Dans les célèbres Trente-Six vues du mont Fuji, il réussit à fixer de manière extrêmement intense l’aspect à la fois éternel et fragile de la vie.
Katsushika Hokusai (1760 -1849), « Dans le creux d’une vague au large de Kanagawa », Série : Trente-six vues du mont Fuji, Début de l’ère Tempō, vers l’an II (vers 1830-1834), Estampe nishiki-e, format ōban, 25,6 x 37,2 cm, Signature : Hokusai aratame Iitsu hitsu, Éditeur : Nishimura-ya Yohachi, Bruxelles, Musées royaux d’Art et d’Histoire © Musées royaux d’Art et d’Histoire, Bruxelles.
Katsushika Hokusai (1760 -1849), « Dans le creux d’une vague au large de Kanagawa », Série : Trente-six vues du mont Fuji, Début de l’ère Tempō, vers l’an II (vers 1830-1834), Estampe nishiki-e, format ōban, 25,6 x 37,2 cm, Signature : Hokusai aratame Iitsu hitsu, Éditeur : Nishimura-ya Yohachi, Bruxelles, Musées royaux d’Art et d’Histoire © Musées royaux d’Art et d’Histoire, Bruxelles.

La Grande Vague de Kanagawa (1831). Elle exprime de façon parfaitement harmonieuse, l’opposition entre le yin – le ciel lumineux, calme et limpide – et le yang – la mer, brutale et obscure, qui reflète l’impuissance humaine. Les pêcheurs, petits visages blancs, répartis dans trois barges, ballotés par les flots, s’apprêtent à être engloutis par la gigantesque vague, certainement un typhon, révélant une condition humaine éphémère face à la nature capricieuse. N’a-t-elle pas l’aspect d’un dragon griffu qui menace sa proie ? Hokusai aime à exprimer ce rapport ambivalent de l’homme à la nature.
Hokusai, cascades
À la fin de sa vie, il prend le nom de Gakyō Rōjin Manjin. Au crépuscule de son existence, il rêve de vivre encore des années pour terminer sa production.
Entre les 2 parcours, une vidéo montre la technique de l’estampe.
01 Octobre 2014 – 18 Janvier 2015 Grand Palais, Galeries nationales
Relâche du 21 au 30 novembre 2014 Katsushika Hokusai (1760-1849) est aujourd’hui l’artiste japonais le plus célèbre à travers le monde. Son oeuvre peint, dessiné et gravé incarne la spiritualité et l’âme de son pays, particulièrement ses estampes de paysages, synthèse remarquable entre les principes traditionnels de l’art japonais et les influences occidentales. Conçue en deux volets, l’exposition présente 500 oeuvres exceptionnelles, dont une grande partie ne quittera plus le Japon à compter de l’ouverture du musée Hokusai, à Tokyo en 2016.
commissaires : Seiji Nagata, spécialiste de Hokusai, Directeur du Katsushika Hokusai Museum of Art, en collaboration avec Laure Dalon, conservateur du patrimoine, adjointe du directeur scientifique de la Réunion des musées nationaux – Grand Palais. scénographie: agence DGT Dorell.Ghotmeh.Tane / Architects

Sommaire de septembre 2014

Prendre le temps, fernet Branca
Prendre le temps, Fernet Branca

01 septembre 2014 : Tatiana Trouvé au MAMCO
06 septembre 2014 : Céleste Boursier-Mougenot, persistances
08 septembre 2014 : Gustave Courbet à la Fondation Beyeler
11 septembre 2014 : La Fondation Marguerite et Aimé Maeght, 50 ans
13 septembre 2014 : Prendre le temps à la Fondation Fernet Branca
19 septembre 2014 : Zero Rankine, Sylvain Couzinet-Jacques
22 septembre 2014 : For Your Eyes Only
25 septembre 2014 : Revoir Renoir à la Fondation Pierre Gianadda, Martigny, Suisse

Revoir Renoir à la Fondation Pierre Gianadda, Martigny, Suisse

Après les différentes rétrospectives historiques sur les maîtres de
l’impressionnisme organisées depuis une vingtaine d’années à la
Fondation Pierre Gianadda : Degas (1993), Manet (1996), Gauguin (1998),
Van Gogh (2000), et celles consacrée à Berthe Morisot (2002) et Monet
(2011), le Fondation rend hommage au plus célèbre
portraitiste du temps : Pierre-Auguste Renoir (1841-1919).

Autoportrait en chapeau blanc 1910 Huile sur toile 42 x 33 cm Collection particulière
Autoportrait en chapeau blanc
1910
Huile sur toile
42 x 33 cm
Collection particulière

Cézanne disait de lui, c’est un « porcelainier » Renoir disait il faut embellir, je fais l’amour avec mon pinceau. Comme c’est difficile de trouver exactement le point où doit s’arrêter dans un tableau, l’imitation de la nature. Il ne faut pas que la peinture pue le modèle et il faut cependant qu’on sente la nature.
Sociable et jovial,  il campe des scènes de bals et de théâtre, des sorties au bois de Boulogne, des bords de Seine, parfois accompagné de son ami Monet, des paysages de campagne lumineux, des portraits.  Ses  grands thèmes sont : le paysage, la famille, son entourage, la sculpture, les femmes.
Ce sont ses portraits qui feront sa gloire, l’univers de Renoir est peuplé de grandes bourgeoises et de paysannes, de filles de la rue, d’hommes du monde, d’artistes, d’enfants.
Il les immortalise avec brio en quelques coups de pinceau, irisés nacrés. C’est la femme épanouie et sensuelle qui lui inspire ses toiles les plus inoubliables, auprès d’elles il goûte un bonheur sans nuage, qui durera jusqu’à son dernier souffle.
Renoir, paysage aux enirons d'Essoyes aux deux figures, 1892 Kunsmuseum de Bâle
Renoir, paysage aux environs d’Essoyes aux deux figures, 1892 Kunsmuseum de Bâle

L’exposition propose cet été et jusqu’ l’automne, une lecture nouvelle de l’oeuvre de Renoir (Revoir Renoir), avec plus de cent oeuvres témoignant de toute sa
carrière – soixante ans de création – comme de la diversité sensible de
son inspiration. Ce lumineux panorama chronologique reflète au mieux
dans ses grandes ponctuations sérielles, le tempérament volontiers
intimiste du peintre, qui a aussi bien maîtrisé le paysage que l’éternel
féminin, les scènes familiales que les natures-mortes. Une majorité
d’oeuvres inédites provenant des collections particulières très rarement
prêtées ainsi que de nombreux prêts des plus grands musées
internationaux (Musée Pouchkine, Musée de São Paulo, Musée Thyssen-Bornemisza, Palais Princier de Monaco), des musées français (Musée d’Orsay, Orangerie, Petit Palais et Marmottan, Paris – Le Havre, Rouen, Fondation Ephrussi de Rothschild / Académie des Beaux-Arts, Saint-Jean Cap Ferrat) comme des institutions suisses (Genève, Bâle, Berne, Lausanne, Winterthur, Fondation Bührle et Kunsthaus, Zurich…),
permettent de donner une vision renouvelée de son oeuvre séminale au coeur de l’impressionnisme français.

Renoir
Deux sculptures monumentales rarement exposées (Vénus Victrix du
Petit Palais, Paris et La grande Laveuse accroupie de la Fondation Pierre
Gianadda) terminent le parcours de l’exposition.
Accompagnant l’exposition, un catalogue de référence, faisant appel à
une dizaine de spécialistes, historiens d’art et témoins familiaux, traite de
sujets aussi variés – et nouveaux – que les amitiés du peintre avec les
écrivains (par Sylvie Patry, conservatrice en chef, Musée d’Orsay), son
frère Edmond Renoir (par Marc Le Coeur), le peintre Caillebotte (par
Pierre Wittmer), le marchand Paul Durand-Ruel (par Caroline Godfroy
Durand-Ruel), le peintre Albert André (par Flavie Mouraux Durand-Ruel),
ou de l’admiration de Pablo Picasso (par Augustin de Butler)…
Sous un angle plus muséal, Daniel Marchesseau propose une analyse thématique
complétant ses notices, tandis que Lukas Gloor précise la réception de
l’oeuvre du maître dans les collections suisses au XXe siècle, et Cécile
Bertran, conservatrice du musée Renoir, révèle, grâce à de nombreuses
photographies acquises à l’automne 2013 par la ville de Cagnes-sur-Mer,
la vie familiale de l’artiste dans sa propriété des Collettes.

Renoir
Cette sélection ne manque pas de séduire un large public qui retrouve
certaines de ses références les plus célèbres, mais découvre surtout nombre
de toiles peu – sinon totalement inconnues – provenant de collections privées
européennes. Le visiteur perçoit sans doute l’émotion toute proustienne de
tant d’images aimées que la mémoire collective conserve du plus charnel des
impressionnistes, l’amoureux de l’éternel féminin – grâce et volupté.
Renoir, femme nue
Car le talentueux élève du peintre d’origine suisse Charles Gleyre, dans
l’atelier duquel il se lie à l’Ecole de Beaux-Arts de Paris avec ses camarades
Claude Monet et Frédéric Bazille, cerne bientôt son champ d’inspiration
féminine : Lisa (1872) puis la voluptueuse Suzanne Valadon qui posera rue
Cortot avant de suivre les conseils de Degas et devenir le peintre reconnu que
la Fondation Pierre Gianadda avait exposé en 1996.

Renoir, au jardin sous la tonnelle du Moulin de la Galette,  1875/6 musée d'état  des BA de Moscou, Pouchkine
Renoir, au jardin sous la tonnelle du Moulin de la Galette, 1875/6 musée d’état des BA de Moscou, Pouchkine

C’est d’ailleurs rue Cortot que Renoir peint Le Jardin du moulin de la galette
où ce chantre de la beauté féminine – comme Monet l’est des variations les
plus éphémères de la lumière – s’impose doublement comme portraitiste et
paysagiste avant de répondre à maintes commandes pour la bourgeoisie fortunée parisienne (La Comtesse Edmond de Pourtalès, Elisabeth et Alice Cahen d’Anvers).
Renoir, Cahen d'AnversA ce propos je rappelle un autre billet sur la petite fille au ruban bleu,
vu à la Fondation Bürhle de Zurich
.
Sa rencontre avec Aline Charigot, la mère de ses trois fils, Pierre, Jean et Claude (dit « Coco »), qu’il épouse en 1890, est déterminante pour son inspiration. Au fil des années, elle se recentre autour d’une voluptueuse évocation de la Maternité. Mais c’est naturellement dans les nombreuses variations autour des Nus qu’il
s’impose au public le plus averti. Renoir, dont on apprécie également les natures mortes, les bouquets et les paysages, maîtrise avec un art consommé tout l’éventail de sa palette au profit de sa technique picturale qui sert dans sa lumière propre un moment de bonheur à l’acmé de son génie.
Renoir
Renoir travaille, avec des « pinceaux de martre et des brosses plates en soie », et emploie surtout, dit-il, « Blanc d’argent, Jaune de chrôme (sic), Jaune
de Naples, Ocre jaune, terre de Sienne naturelle, vermillon, laque de Garance, vert Véronèse, vert Emeraude, Bleu de Cobalt, Bleu Outremer – l’ocre jaune, le jaune de Naples et la terre de Sienne n’étant que des tons intermédiaires, dont on peut se passer puisque vous pouvez les faire avec les autres couleurs », sans oublier
« le noir, la reine des couleurs ».
Paul Durand-Ruel (très bientôt au musée du Luxembourg) est le premier à le défendre et l’exposer, à Paris, Londres et aux Etats-Unis. Plus de mille oeuvres passent par ses galeries. Plus jeune, Ambroise Vollard édite ses gravures et ses bronzes, avant d’acquérir, à sa mort, tout le fond de l’atelier. Renoir en brosse trois célèbres portraits dont celui donné par Vollard au Petit Palais de Paris.
Ambroise Vollard au foulard rouge 1899 (1906) Huile sur toile Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Ambroise Vollard au foulard rouge
1899 (1906)
Huile sur toile
Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de
Paris

Avec la consécration, vient la réussite financière au tournant du siècle. Renoir, également soutenu désormais par les frères Bernheim-Jeune, découvre Cagnes-sur-Mer en 1903 et s’installe peu après dans le vaste Domaine des Collettes où il peindra jusqu’à son dernier jour avec la passion irréductible du « beau métier ».
Au sommet de la consécration, et malgré certaines critiques acides, des collectionneurs aussi avertis que Paul Gallimard, Gaston Lévy, Henri Bernstein ou les américains Leo et Gertrude Stein ne s’y trompent pas et s’entoureront de ses oeuvres – avant que le fameux Dr Alfred Barnes ne réunisse dans sa propriété de Merion au
sud de Philadelphie, sur les conseils en particulier de jeunes marchands,
Paul Guillaume et René Gimpel avant Paul Rosenberg, plus de cent quatrevingts
tableaux (la Barnes Foundation est installée depuis 2012 à Philadelphie).
Dans sa maturité, de jeunes artistes comme Aristide Maillol et
Maurice Denis rendent visite au maître dont ils font le portrait.
Quelques mois avant sa disparition, ce sont Amedeo Modigliani et Henri Matisse,
également encouragés par Paul Guillaume, qui vont aux Collettes…
Si Pablo Picasso n’eut pas l’occasion de faire sa connaissance, il n’en acquit
pas moins pour sa collection personnelle sept de ses oeuvres (aujourd’hui,
musée Picasso, Paris). C’est dire quelle valeur novatrice il attachait à son
art dans sa pleine maturité.
Cette exposition riche d’une centaine d’oeuvres permet de redécouvrir
dans le cadre majestueux de la Fondation Pierre Gianadda un Renoir
résolument de son époque.
Renoir, Jean Renoir cousant
Commissaire de l’exposition : Daniel Marchesseau, Conservateur général honoraire du Patrimoine.
Catalogue de l’exposition : reproduit en couleurs toutes les oeuvres exposées avec des textes de Cécile Bertran, Augustin de Butler, Caroline Durand-Ruel Godfroy, Flavie Durand-Ruel, Lukas Gloor, Marc Le Coeur, Daniel Marchesseau, Sylvie Patry, Pierre Wittmer, complétés d’une riche iconographie
complémentaire.
Prix de vente : CHF 45.- (37,50 €)
Exposition jusqu’ au 23 novembre 2014
Tous les jours de 9 heures à 19 heures
FONDATION PIERRE GIANADDA
Rue du Forum 59, 1920 Martigny, Suisse
+ 41 27 722 39 78
www.gianadda.ch
Ouvert tous les jours de 9 h à 19 h
Y compris, la collection Franck, le parc de sculptures,
le musée gallo-romain et le musée de l’automobile.
photos courtoisie de la Fondation Gianadda

For Your Eyes Only

Jusqu’ au 4 janvier 2015,
le Kunstmuseum de  Basel présente une sélection de plus de cent oeuvres de la
collection privée de Richard et Ulla Dreyfus-Best.
Pour la première fois, cette exposition permet à un large public de porter un regard exclusif sur l’interaction des oeuvres d’une collection incomparable aussi bien de par son exigence que par l’attitude individuelle qui a présidé à sa composition.
La collection est exemplaire de la perception contemporaine globale de l’art comme crossover : non plus structurée strictement selon les époques et les genres, mais en tant qu’entité globale et simultanée.

Stefanus Lagerensis buste, bronze 12e s
Stefanus Lagerensis buste, bronze 12e s

Ainsi trouve-t-on un buster rare du 12e siècle côtoyant des curiosités provenant de la nature ; des artefacts profanes contrastent avec des travaux de l’Ars erotica et de l’Ars religiosa ; des dessins de Maîtres du baroque sont confrontés à des peintures surréalistes, des oeuvres fantaisie maniéristes à des oeuvres symbolistes.
Magritte Das rote Modell René Magritte 1947 oder 1948 Gouache auf Papier 45 x 36 cm Privatsammlung © 2014, ProLitteris, Zurich
Magritte Das rote Modell
René Magritte 1947 oder 1948 Gouache auf Papier 45 x 36 cm Privatsammlung © 2014, ProLitteris, Zurich

De nombreuses oeuvres de la collection privée bâloise de Richard et Ulla Dreyfus-Best ont pu être admirées pendant des années dans le monde entier, à l’occasion d’expositions importantes. Elles n’ont cependant jamais été présentées jusqu’ici dans leur propre contexte de collection.
Dali Fourmis Salvador Dalí 1936 Gouache und schwarze Tinte auf Papier 24 x 13.5 cm Privatsammlung © Salvador Dalí, Fundació Gala-Salvador Dalí / 2014, ProLitteris, Zurich
Dali Fourmis
Salvador Dalí 1936 Gouache und schwarze Tinte auf Papier 24 x 13.5 cm Privatsammlung © Salvador Dalí, Fundació Gala-Salvador Dalí / 2014, ProLitteris, Zurich

For Your Eyes Only – pour la première et sans doute pour la seule et unique fois, cette exposition permet à un large public de porter un regard exclusif sur l’interaction privée de ces oeuvres.
A l’aide d’une sélection de plus d’une centaine d’entre elles, l’exposition tente de mettre en lumière l’univers éminemment spécifique de cette collection qui, de par son exigence et par l’attitude individuelle qui a présidé à sa composition, n’est comparable à aucune autre. En même temps se manifeste à cette occasion sa relation d’une brûlante actualité avec la question du pouvoir agissant de l’art, par-delà le temps et par-delà les âges.
Francken Hexenküche Frans Francken d.J. 1604 oder kurz danach Öl auf Kupfer 28 x 22 cm Privatsammlung
Francken Hexenküche
Frans Francken d.J. 1604 oder kurz danach Öl auf Kupfer 28 x 22 cm Privatsammlung

A une époque où c’est le cross over qui détermine notre perception globale de l’art, la collection Dreyfus-Best peut s’enorgueillir de revendiquer un caractère d’exemplarité. Régie en l’occurrence par un principe directeur excluant tout hasard, elle met en présence des objets, des dessins et des peintures issus du Moyen-Âge précoce jusqu’à nos jours. Principe qui non seulement favorise l’originalité et la qualité au titre de critères inéluctables, mais présuppose aussi pour chacune des oeuvres un potentiel de référence particulièrement puissant quant à leur « artificialité » (au sens propre) : c’est un véritable cabinet contemporain des arts et des merveilles, à nul autre pareil, qui nous ouvre ses portes.
Arcimboldo luft Nach Giuseppe Arcimboldo Öl auf Leinwand 74.8 x 57 cm Privatsammlung
Arcimboldo luft
Nach Giuseppe Arcimboldo Öl auf Leinwand 74.8 x 57 cm Privatsammlung

De même que sont confrontés Symbolisme et Pop-Art, de même se côtoient des artefacts profanes et des objets de l’Ars erotica et de l’Ars religiosa ; des dessins de Maîtres de la Renaissance et du Baroque affrontent les mondes des figurations mystérieuses du Surréalisme, des images oniriques et excentriques du 18e siècle rencontrent des oeuvres fantaisie du Maniérisme. Le dénominateur commun à toutes les oeuvres est une « artificialité » qui expérimente et convoque l’intégralité des possibles des formes de l’art, jusqu’à leurs limites les plus extrêmes.
Füssli Nachtmahr Johann Heinrich Füssli 1810 Öl auf Leinwand 75 x 95 cm Privatsammlung
Füssli Nachtmahr
Johann Heinrich Füssli 1810 Öl auf Leinwand 75 x 95 cm Privatsammlung

Oeuvres de : Hans Baldung Grien, Hans Bellmer, Arnold Böcklin, Victor Brauner, Pieter Brueghel d. Ä., Angelo Caroselli, Giorgio de Chirico, Francesco Clemente, Salvador Dalí, Monsù Desiderio, Gustave Doré, Max Ernst, Johann Heinrich Füssli, Marten van Heemskerk, Jan van Kessel, Alfred Kubin, René Magritte, Man Ray, Gustave Moreau, Richard Oelze, Yves Tanguy et Andy Warhol.
Vanity, Portrait of a Lady, maître autrichien 18e s
Vanity, Portrait of a Lady, maître autrichien 18e s

Une collaboration avec la Peggy Guggenheim Collection, Venise.
Catalogue
Avec la contribution de Andreas Beyer, Bodo Brinkmann, Giulia Mazzolani, Christian Müller, Philip Rylands et Seraina Werthemann
Conférences
15.10. Andrei Pop: Füsslis Exzentrik
18.11. Der Kurator Andreas Beyer im Gespräch mit der Sammlerin Ulla Dreyfus-Best
17.12. Philip Rylands: Peggy Guggenheim – Doyenne of Surrealism
De 18h30 à 19h30 dans la salle de conférences du Kunstmuseum.
Entrée libre.
St. Alban-Graben 8, case postale
CH-4010 Basel
Heures d’ouverture (pour les deux musées)
Mar–Dim 10–18h,
Lundi fermé Le 25 et le 26 décembre 2014, le musée ouvert.
Le 24 décembre 2014, le musée fermé.
images courtoisie Kunstmuseum

Zero Rankine, Sylvain Couzinet-Jacques

à la Galerie Hors-Champs, Mulhouse
jusqu’au 19 octobre 2014
Une programmation dans le cadre de la
Biennale de la photographie de Mulhouse / Mulhouse Art Contemporain
Commissariat :  Anne Immelé
Sylvain Couzinet-Jacques
Dans son travail, Sylvain Couzinet-Jacques interroge une iconographie stéréotypée liée à des territoires et à des individus s’y inscrivant. La pratique de la photographie de ce jeune artiste formé à l’Ecole de la Photographie d’Arles est résolument contemporaine, tant par le souci de la technique que par l’originalité de sa mise en oeuvre.
Les images qu’il malmène sont toujours des signes de notre époque contemporaine dans sa face la plus sombre. Fragments d’une ville américaine fantomatique, crise économique, émeutiers aux contours flous comptent parmi les figures fortes qu’il déploie.
Ses séries photographiques jouent avec les seuils de visibilité, voilées par des verres teintés qui rappellent les lunettes de soleil, surexposées ou sous-exposées jusqu’à perdre trace du motif représenté, parfois même maltraitées au point de rendre impossible une lecture plane et complète. Il faut prendre du temps et scruter les images pour suivre le fil de la pensée, développée par l’artiste, partant de son titre obscure et barbare pour non averti :
Zero Rankine, quoique le memento mori lui très lisible, donne le ton dès l’entrée.
Il a mis un soin particulier à adapter sa scénographie à son thème et au lieu.

 
Sylvain Couzinet-Jacques
A travers une écriture affirmant un engagement documentaire tout en imposant de nouveaux codes esthétiques, Sylvain Couzinet-Jacques se situe dans une nouvelle génération de photographes à la frontière de plusieurs disciplines (vidéo, sculpture, installation…) tout en renouvelant le genre photographique
prédominant dans son travail.
« Zero Rankine » fait référence a un terme de mesure thermodynamique qui a pour valeur le zéro absolu
– la température la plus basse qui puisse exister.
Lors de cette exposition, la Galerie Hors-Champs est utilisée par l’artiste comme un laboratoire de création en investissant l’espace et en déployant des matériaux peu utilisés dans le champ photographique, jusqu’à explorer leur seuil de résistance. L’exposition montre ainsi une série d’oeuvres pour la plupart inédites, que l’artiste a conçues in situ.
Sylvain Couzinet-Jacques
Biographie
Sylvain Couzinet-Jacques est né en 1983. Il vit et travaille à Paris. Son travail a notamment été exposé au BAL, à Paris Photo, au Salon de Montrouge ou encore aux Rencontres d’Arles.
En 2014, son travail a été remarqué au prix Leica Oskar Barnack, au prix Science Po pour l’Art Contemporain, et au Prix Levallois. Il est représenté par la Galerie Foucher-Biousse (Galerie Particulière – Paris/Bruxelles) !
Informations pratiques
Galerie Hors Champs
16 rue Schlumberger
Ouvert du mercredi au samedi de 13h30 à 18h30.
Les dimanches de 14h à 18h ou sur rdv.
Contact galerie : Laurent Weigel
03 89 45 53 92

info@horschamps.fr
Contact : Biennale de la photographie de Mulhouse
L’agrandisseur, Anne Immelé,
06 99 73 81 80
agrandisseur@gmail.com
agrandisseur.tumblr.com
Contact :
Mulhouse Art Contemporain
Président Dominique Bannwarth
contact@mulhouse-art-contemporain.fr
www.mulhouse-art-contemporain.fr
Les organisateurs
L’association Mulhouse Art Contemporain s’inscrit dans le prolongement de l’association de préfiguration du centre d’art contemporain de la Fonderie de Mulhouse – ouvert depuis sous le nom de La Kunsthalle. L’association a pour objectif d’assurer la promotion de l’art contemporain et sa diffusion la plus large en créant un réseau de personnes mobilisées sur ces mêmes désirs et d’accompagner les initiatives des structures et acteurs agissant dans le domaine de l’art contemporain.
Mulhouse Art Contemporain a été partenaire de l’Agrandisseur pour la production d’une affiche de Michel François, diffusée auprès du public au Musée des Beaux-arts dans le cadre de Play & Replay, première Biennale
de la photographie de Mulhouse.
Créée à Mulhouse en novembre 2010, l’association l’Agrandisseur organise des expositions, des conférences, des rencontres et workshop avec des photographes et des théoriciens de l’image.
L’association souhaite impulser un questionnement sur le médium photographique, ses transformations et ses usages dans le champ de l’art contemporain. Son activité principale est l’organisation de la Biennale de la Photographie de Mulhouse, dont la programmation soutient et diffuse les pratiques photographiques au sein de l’art contemporain, avec une vocation internationale et une volonté de montrer des talents émergents.

La Fondation Marguerite et Aimé Maeght, 50 ans

C’est toujours un enchantement d’aller à la Fondation Maeght, blottie à St Paul de Vence, inondée par le soleil et rythmée par le chant des cigales.
Fondation Maeght, parc
Face à l’oeuvre jusqu’au 11 novembre.
« Oui mon cher Joan, nous réaliserons une oeuvre unique au monde » Correspondance d’Aimé Maeght à Joan Miró, 29 août 1959
La Fondation Marguerite et Aimé Maeght est un exemple unique de fondation privée en Europe. Inaugurée le 28 juillet 1964 par André Malraux, alors Ministre des Affaires Culturelles (INA), cet ensemble architectural a été entièrement conçu et financé par Aimé et Marguerite Maeght pour présenter l’art moderne et contemporain sous toutes ses formes.
Marguerite et Aimé Maeght
Des peintres et des sculpteurs ont étroitement collaboré à cette réalisation avec l’architecte catalan Josep Lluís Sert en créant des œuvres, souvent monumentales, intégrées au bâtiment et aux jardins : la cour Giacometti, l’une des oeuvres « in situ » les plus connues au monde le labyrinthe Miró peuplé de sculptures et de céramiques, les mosaïques murales de Chagall et de Tal-Coat, le bassin et le vitrail de Braque, la fontaine de Bury

Pierre Bonnard, L’Eté, 1917. Photo Archives Fondation Maeght © Adagp Paris 2014.
Pierre Bonnard, L’Eté, 1917. Photo Archives Fondation Maeght ©
Adagp Paris 2014.

Véritable musée dans la nature, la Fondation Maeght est un lieu exceptionnel qui possède une des plus importantes collections en Europe de peintures, sculptures, dessins et œuvres graphiques d’art moderne du XXe siècle (Bonnard, Braque, Calder, Chagall, Chillida, Giacometti, Léger, Miró, Ubac) mais également d’artistes contemporains (Adami, Calzolari, Caro, Del Re, Dietman, Kelly, Mitchell, Monory, Oh Sufan, Takis, Tàpies...).

Pour leur grande exposition d’été 2014, Adrien Maeght, président du conseil d’administration, et Olivier Kaeppelin, directeur de la Fondation Maeght, ont choisi de rendre hommage aux oeuvres, dans cet esprit de face à face singulier, favorisé par l’architecture épurée et lumineuse de la Fondation Maeght.
« La Fondation Maeght a toujours refusé les a priori sur les oeuvres. Elle est d’abord au service des artistes et de l’art, dans une passion partagée avec le public ; c’est ce qui la rend si unique. Je crois qu’Aimé Maeght nous a appris que l’expérience importante était ce moment précis où s’ouvrent, pour chacun d’entre nous, un espace, un temps, une surprise qui contribuent à inventer la pluralité des mondes » explique Olivier Kaeppelin.

Vassili Kandinsky, Le Noeud rouge, 1936. Photo Claude Germain Archives Fondation Maeght. © Adagp Paris 2014.
Vassili Kandinsky, Le Noeud rouge, 1936.
Photo Claude Germain Archives
Fondation Maeght. © Adagp Paris 2014.

Entre « chefs-d’oeuvre » et singularité, grands maîtres internationalement reconnus et artistes plus confidentiels, cette exposition souligne l’importance du regard et de toutes les facultés qu’il met en jeu. Ces face-à-face auront lieu avec Pierre Bonnard, Georges Braque, Alberto Giacometti, Joan Miró et Alexander Calder, mais également avec ceux qui sont encore aujourd’hui l’expression d’une conviction originale et d’une prise de risque. François Fiedler, Gérard Gasiorowski ou encore Richard Lindner rejoindront, comme le souhaitaient les fondateurs, les artistes contemporains récemment exposés par la Fondation.

Calder - Derain
Calder – Derain

Un héritage vivant. Ni musée, ni centre d’art, la Fondation Maeght est un lieu unique où, jour après jour, s’invente et se partage l’art. Comme le soulignait André Malraux lors de l’inauguration de la Fondation Maeght le 28 juillet 1964 : « ici est tenté quelque chose qu’on n’a jamais tenté : créer l’univers, créer instinctivement et par l’amour, l’univers dans lequel l’Art Moderne pourrait trouver à la fois sa place et cet arrière-monde qui s’est appelé jadis le surnaturel ».

vue d'une salle Fondation Maeght

Plusieurs artistes ont affirmé qu’Aimé Maeght leur avait permis, avec la Fondation, de réaliser leurs rêves ; de nombreuses générations de visiteurs racontent en retour y avoir découvert l’art. Cet héritage, vivant et partagé, est au coeur de l’exposition de cet été 2014.
« Face à l’oeuvre ». L’exposition met en perspective la manière dont Aimé Maeght avec son épouse Marguerite, puis Adrien Maeght et les équipes à leurs côtés, ont choisi les oeuvres. Pour leur univers, leur force d’expression, leur engagement comme leur poésie et la cohérence de leur puissance d’émotion. Sans préjugés, qu’ils soient théoriques ou esthétiques, ni réduction à la notion d’ « école », uniquement soucieux de la « présence de l’oeuvre », Aimé Maeght a toujours conduit son exigence artistique et son goût pour la découverte dans une réelle volonté de partager l’art avec autrui. Avec ses contemporains et, selon son espérance, avec les générations futures. C’est à partir de cette volonté que l’exposition présente au public à la fois des « chefs-d’oeuvre » et des oeuvres encore en proie à l’histoire et aux débats.
Alberto Giacometti
Les amoureux de la Fondation Maeght ont ainsi le bonheur de retrouver les grandes oeuvres qui ont marqué la création, les aventures de la Fondation comme les mémoires et la vie de ses visiteurs. Il s’agit également pour Adrien Maeght et Olivier Kaeppelin de proposer des oeuvres « surprenantes », qui rappellent l’importance de la force de conviction et de l’esprit de découverte, confiés en héritage à la Fondation Maeght.
« Revivre avec passion la beauté des oeuvres de Bonnard, de Braque, de Derain comme éprouver l’intensité toujours croissante d’un grand Gasiorowski en train de prendre sa place dans le siècle, c’est tout le plaisir que nous souhaitons offrir aux visiteurs de Face à l’oeuvre » explique Adrien Maeght.
200 000 visiteurs viennent chaque année à la Fondation Maeght qui a réalisé plus de 100 expositions monographiques ou thématiques depuis son ouverture.
Une salle montre des sculptures de Giacometti, ainsi que 3 portraits que l’artiste a réalisés pour Marguerite Maeght et dédiés à celle-ci.

 A.Giacometti Portrait de Mme Maeght
A.Giacometti Portrait de Mme Maeght

La Fondation Maeght est dédiée, selon la volonté de ses fondateurs, à la création de notre époque. Lors des expositions temporaires, seule une partie de la collection permanente est exposée. A partir de ses collections, de nombreuses expositions sont également organisées, chaque année, dans des musées en France et à l’étranger.
La Saga Maeght
Saga Maeght
Yoyo Maeght, petite-fille d’Aimé, raconte le quotidien de sa famille élargie, ou artistes et écrivains se côtoient et travaillent. Elle livre ses souvenirs d’une vie passée dans un tourbillon de vernissages, fêtes, expositions, projets, échecs et réussites, drames et joies, entre Paris et Saint-Paul-de-Vence. Elle évoque aussi les fractures qui vont progressivement disloquer la famille.
La Saga Maeght est à la fois l’épopée d’une dynastie amoureuse des arts sur trois générations, digne d’un roman policier, l’aventure triste d’un clan déchiré à la mort du patriarche et un voyage dans l’intimité des plus grands artistes de notre histoire contemporaine.
lecture conseillée
Photos courtoisie Fondation Maeght
sauf  la 1/4/5/6

Gustave Courbet à la Fondation Beyeler

Après cet obscur objet de désirs,  autour de L’Origine du monde, au musée Gustave Courbet à Ornans,
Gustave Courbet Le Fou de peur (Portrait de l’artiste), ca. 1844/45 Huile sur papier sur toile, 60,5 x 50,5 cm Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design, Oslo

Gustave Courbet
Le Fou de peur (Portrait de l’artiste), ca. 1844/45
Huile sur papier sur toile, 60,5 x 50,5 cm
Nasjonalmuseet for kunst, arkitektur og design, Oslo



La Fondation Beyeler consacre régulièrement ses expositions à des artistes dont l’oeuvre a exercé une influence déterminante sur l’évolution de la peinture moderne.
Gustave Courbet, né en 1819 à Ornans, dans le Jura, et mort en 1877 à la Tour-de-Peilz en Suisse, est l’une de ces figures clés de l’histoire de l’art.
L’exposition de la Fondation Beyeler, dont le paysage automnal extérieur s’allie parfaitement  aux soixante dix oeuvres, se concentre sur le rôle de premier avant-gardiste, de Courbet.
Par des tableaux provocants où s’affirme son individualité d’artiste, il s’est imposé parmi les pionniers de l’art moderne, rompant avec les conventions de la formation académique traditionnelle. Le refus de Gustave Courbet de se plier aux conventions formelles, son remarquable aplomb, l’affirmation opiniâtre de son individualité d’artiste, son goût pour la provocation et sa propension à briser les tabous ainsi que sa technique picturale révolutionnaire ont établi des critères qui ont marqué plusieurs générations d’artistes. Il compte parmi les principaux précurseurs de l’art moderne.
Autoportraits
À travers des autoportraits, des représentations de femmes, des tableaux de grottes et de paysages marins, l’exposition met l’accent sur son approche novatrice de la couleur et sur sa stratégie d’ambiguïté. La rupture avec la tradition académique, le développement du réalisme dans l’histoire de l’art, la technique révolutionnaire d’empâtement de Courbet qui exprimait son individualité d’artiste y sont également abordés, au même titre que son traitement ludique de motifs et de symboles du passé.
L’exposition s’ouvre sur les autoportraits de jeunesse, des oeuvres complexes à travers lesquelles Courbet s’est mis en scène au début de sa carrière parisienne.
Bonjour Monsieur Courbet montre l’importance affirmée déjà, alors qu’il croise son éventuel mécène.

la rencontre du jour, Bonjour Monsieur Courbet, musée fabre de Montpellier 1854 300mmx267mm
la rencontre du jour, Bonjour Monsieur Courbet, musée fabre de Montpellier 1854
300mmx267mm

Presque tous les autoportraits de Courbet ont été réalisés entre 1840 et 1855. Ils occupent une place déterminante au cours de cette période durant laquelle Courbet devient en quelque sorte réellement Courbet.
En se prenant pour modèle, il a pu multiplier les expériences et ce dialogue artistique avec sa propre apparence lui a permis de développer ses moyens d’expression. Les poses et rôles divers qu’il adopte doivent être considérés comme autant d’exercices qu’il s’est imposés à lui-même et l’on comprend aisément qu’il ne se soit jamais défait d’un grand nombre de ces tableaux : il y voyait les témoignages de son parcours artistique.
On peut y voir un étonnant autoportrait de 1858 intitulé Autoportrait sous forme de pipe, provenant d’une collection privée. On y distingue des personnages fumant la pipe, comme un dessin sous-jacent.
Courbet détail d'Auoportrait sous forme de pipe, 1858, collection particulière
Courbet détail d’Autoportrait sous forme de pipe, 1858, collection particulière

Le Fou de Peur (Portrait de l’artiste), vers 1844/1845 – également exposé autrefois sous le titre -Le Suicide –  (en en-tête) incarne indéniablement l’exemple extrême de cet ensemble d’oeuvres. On aurait peine à dire s’il s’agit de la représentation d’un individu affolé, d’un candidat au suicide ou d’un homme animé d’une idée fixe. La partie inférieure du tableau paraît inachevée et ses contemporains ne purent qu’y voir une esquisse pourtant, Courbet ne désigne pas cette oeuvre comme telle lors de son exposition de 1855. Si cette toile était effectivement achevée à ses yeux, on peut l’interpréter comme une déclaration de programme. Il s’agit là d’une entreprise audacieuse et périlleuse : on voit ici, littéralement, la main de l’artiste. Sur la plage blanche en bas à droite, on a en effet l’impression de distinguer les contours d’une main écartée, très probablement une empreinte de main « peinte ». Sous le regard des spectateurs, l’artiste ambitieux se jette dans l’indéterminé, dans quelque chose d’entièrement nouveau. Est-ce la mort ? Ou bien la nouvelle peinture dans laquelle Courbet se précipite en s’affranchissant de toute tradition ?
L’Origine du monde
L’exposition « Gustave Courbet » recèle une oeuvre qui a fait et continue à faire sensation, une toile qui compte parmi les plus célèbres et les plus sulfureuses de l’histoire de l’art : L’Origine du monde. Ce tableau constitue tout à la fois une rupture de tabou et un jalon, un hommage à la femme et une manifestation de voyeurisme, une peinture magistrale et une provocation. C’est précisément dans cette contradiction que réside son secret : célèbre-t-on ici le lieu de naissance, l’origine de l’humanité ou ne s’agit-il que du regard masculin posé sur  la femme ? Est-ce Courbet le voyeur, ou le sommes-nous tous ? Peut-être Courbet voulait-il également prouver que la peinture n’avait pas à redouter la
concurrence de la photographie, qui commençait alors à se répandre. Tel est le champ de tension qui fait toute l’importance de cette oeuvre, laquelle n’était initialement pas destinée à être présentée au public.
Thierry Savatier Fruit de plusieurs années de recherche, ce livre retrace toute l’histoire de L’Origine du monde, des arcanes de sa création en 1866 jusqu’à son entrée au musée d’Orsay en 1995

L’Origine du monde, est au centre de cette exposition. Cette peinture de 1866 est le chef-d’oeuvre inconnu du XIXe siècle, le tableau que peu avaient vu à l’époque de sa création, mais dont tous parlaient. Il n’a rien perdu de sa force de provocation. Ne parle t’on  pas de « la Joconde de l’art moderne »
Cette toile est présentée sans mise en scène particulière, comme on a pu la voir au Grand Palais en 2008, et plus récemment à Ornans, où durant tout l’été, les amateurs de belles oeuvres ont pu admirer  une exposition autour du thème « Cet obscur objet de désirs »; l’oeuvre particulière et sulfureuse de Gustave Courbet a attiré plus de 40 000 visiteurs.
Courbet lui-même se réclame du Titien et de Véronèse – avec son aplomb habituel, il aurait déclaré à des amis réunis chez Khalil Bey et qui venaient d’admirer cette toile :
« Vous trouvez cela beau… et vous avez raison… Oui, cela est très beau, et tenez, Titien, Véronèse, leur Raphaël, moi-même n’avons jamais rien fait de plus beau ».
Le Jura, la mer, la neige : un traitement révolutionnaire de la couleur
La plupart des tableaux réalisés après 1855 sont des paysages : à cette date, Courbet avait déjà peint la majorité de ses grandes oeuvres réalistes. Courbet associe volontiers les paysages typiques de sa région natale, le Jura des environs d’Ornans, caractérisé par ses sources, ses grottes, ses falaises calcaires escarpées et ses forêts profondes à des représentations de nus féminins. L’être humain, la sexualité et la nature intacte s’associent ainsi en formant un équilibre fascinant. D’autres tableaux se concentrent sur l’obscurité impénétrable des grottes du Jura. Courbet s’y affirme comme un maître de l’allusion et comme un authentique peintre de l’invisible.
C’est un artiste qui a su imposer de nouvelles idées picturales.
Gustave Courbet La Source du Lison, 1864 Huile sur toile, 91 x 73 cm Collection privée Photo: Paul Mutino
Gustave Courbet
La Source du Lison, 1864
Huile sur toile, 91 x 73 cm
Collection privée
Photo: Paul Mutino

Les paysages lui permettaient de donner la démonstration de son
individualité artistique. De plus, ils se vendaient bien. Le style de Courbet devient une véritable marque de fabrique, il existe une demande et un marché pour ces oeuvres. Une grande partie de ses tableaux de paysages sont consacrés à la représentation de sa région natale, les environs d’Ornans.
Un motif récurrent et prégnant des paysages de Courbet est la transition entre plateau (les environs de Flagey) et plaine (Ornans) – caractéristique de son Jura natal. Les paysages de Courbet ne sont pas marqués par un regard idéalisateur mais réaliste. Même si la plupart de ses toiles ont vu le jour dans son atelier, elles témoignent d’une minutieuse étude de la nature sur les différents motifs choisis.
Lorsqu’on se rend sur les plateaux entaillés de profondes vallées, que l’on observe les formations rocheuses spectaculaires, les cours d’eau obscurs et les grottes imposantes où ils prennent leur source, on ne peut manquer de remarquer la virtuosité de Courbet qui semble façonner littéralement les structures géologiques des rochers grâce à la couleur. La Source du Lison, 1864, en offre un bon exemple – l’effet spatial des différentes
strates sédimentaires est tout à fait étonnant. Lorsqu’on s’approche de la toile, tout se dissout en touches de pinceau parfaitement identifiables, qui communiquent une impression plastique des formations rocheuses. De même, dans La Source de la Loue, 1864, les couleurs claires, généralement pures, transforment en quelque
sorte la substance des rochers et de l’eau en une masse colorée abstraite. Il en résulte une nature qui paraît puissamment animée et correspond, sous sa forme pure et authentique, à l’expérience sensorielle du motif faite par Courbet.
Une toile somptueuse, étonnante et presque inconnue (1867), sauf pour ceux qui ont eu la chance de visiter la Fondation Barnes à Philadelphie en Pennsylvannie, montre un thème cher à son contemporain, Jean François Millet : la Bergère ou la Fileuse bretonne, avec ses moutons.
Gustave Courbet, la Bergère
Courbet utilisait la matière picturale d’une manière tout à fait inhabituelle pour son temps, appliquant manifestement la couleur à la brosse, au couteau, à l’aide d’un chiffon ou même de son pouce. L’intervention fréquente du couteau à palette jouait un rôle particulier. Cet outil qui ressemble à une petite truelle est généralement employé par les peintres pour mélanger les couleurs sur leur palette. Courbet en revanche s’en servait pour appliquer directement la couleur sur la toile, donnant ainsi l’impression que ses tableaux étaient
moins peints que « construits ».
Gustave Courbet, le coup de vent dans la Forêt de Fontainebleau, 1865, Museum of Fine Art Huston
Gustave Courbet, le coup de vent dans la Forêt de Fontainebleau, 1865, Museum of Fine Art Huston

Le Coup de vent, forêt de Fontainebleau vers 1865 révèle, lui aussi, une application particulière de la couleur.
Cette oeuvre remarquable est le plus grand paysage qu’il ait jamais réalisé. Il s’agissait probablement d’un travail de commande pour le décor d’une villa parisienne. Dans cette représentation d’un orage qui approche, Courbet manifeste toute la gamme de sa maîtrise et de son étonnante modernité. Cette composition audacieuse prend pour thème le mouvement, sous l’aspect du vent. En même temps, on peut y observer le traitement
différencié de la couleur, appliquée tantôt de façon précise et détaillée à l’aide d’un pinceau fin, tantôt de façon franchement « tempétueuse » en couches chromatiques translucides apposées par touches rapides, qui évoquent une grande liberté et se rapprochent de l’abstraction.
Gustave Courbet La Vague, ca. 1869 Huile sur toile, 65,4 x 88,7 cm Brooklyn Museum, donation de Mrs. Horace Havemeyer
Gustave Courbet
La Vague, ca. 1869
Huile sur toile, 65,4 x 88,7 cm
Brooklyn Museum, donation de Mrs. Horace Havemeyer

Dans les représentations de l’océan, aussi bien étale qu’agité, la transformation apparente de la couleur en forme exerce un effet si direct que Paul Cézanne s’est écrié à propos de la mer qui figure sur ces tableaux :
« On la reçoit en pleine poitrine. On recule. Toute la salle sent l’embrun. » Le commentaire de Joan Miró affirmant à propos de La vague qu’on percevrait la présence de la toile même en lui tournant le dos va dans le même sens. La technique d’application de la couleur de Courbet lui permettait de peindre particulièrement
vite, et il s’en vantait auprès de ses connaissances : une nuance pour le ciel, une pour la mer, et une pour la plage. Mépris du public, vantardise devant des collègues ? Ne s’agirait-il pas plutôt de la description d’une réduction radicale des moyens picturaux ? Trois tonalités, associées au geste pictural, ont produit des tableaux
qui comptent aujourd’hui parmi les oeuvres les plus belles et les plus chargées d’atmosphère de Courbet.
Gustave Courbet Les Trois Baigneuses, 1865–68 Huile sur papier sur toile, 126 x 96 cm Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris © Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris / Eric Emo
Gustave Courbet
Les Trois Baigneuses, 1865–68
Huile sur papier sur toile, 126 x 96 cm
Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
© Petit Palais, Musée des Beaux-Arts
de la Ville de Paris / Eric Emo

Femmes et eau
Les représentations de femmes dénudées au bord de l’eau entourées d’une nature foisonnante datent des années situées entre 1866 et 1868. Les trois toiles de format presque identique présentées dans l’exposition sont autant de variations sur le thème de l’unité de la femme et de la nature, un thème qui s’inscrit dans une longue tradition de l’histoire de l’art. On rencontre dès l’Antiquité des personnifications féminines de
sources ainsi que de charmantes figures de jeunes filles s’ébattant au bord de cours d’eau, de grottes ou de lacs. La femme, médiatrice entre l’eau de source et la végétation, incarne la fécondité, l’initiation et la sexualité. Courbet a exploité délibérément la charge érotique de ce motif. La Source, 1868, fait songer à des motifs comparables, que l’on rencontre par exemple chez Ingres. Courbet refuse toutefois d’idéaliser son modèle. La chair de la femme vue de dos est rendue avec un grand réalisme par le peintre, qui en souligne les irrégularités. De même, l’insistance sur les rondeurs féminines, exagérées par le peintre ou par le corset alors en usage, ne correspondait pas aux représentations courantes de la beauté. Pour la plupart de ses contemporains, un tel réalisme, parfois outrancier, était choquant.
Gustave Courbet Effet de neige, ca. 1868 Huile sur toile, 72 x 92 cm French and Company, New York
Gustave Courbet Effet de neige, ca. 1868 Huile sur toile, 72 x 92 cm French and Company, New York

Dans la salle intitulée « Traces dans la neige » où sont présentés les paysages de neige de Courbet, les oeuvres font découvrir au spectateur la manière dont sa peinture prend la couleur elle-même pour objet: pâteux et expressif, et en même temps d’une légèreté dynamique, le blanc se transforme ici en neige, semblant créer sa propre réalité.
Le centre obscur de la peinture de Courbet
Ses représentations de grottes et celles de vagues partagent un mystérieux centre obscur. Courbet affirmait explicitement qu’il construisait ses toiles à partir de l’obscurité et reproduisait l’incidence lumineuse par des moyens picturaux. Cette technique apparaît clairement dans la représentation de la veste bleu foncé du chasseur de droite de Braconniers dans la neige, 1867, que le peintre modèle par des accents de couleurs
appliqués avec parcimonie.
Dans les paysages en revanche, les rochers semblent graviter autour d’un centre noir encore indistinct, comme l’eau autour des ouvertures de grottes ou comme l’intérieur de la vague. La toile la plus célèbre de Courbet sans doute, L‘Origine du Monde, 1866, fascine par une construction picturale identique. Les spécialistes d’art y voient des parallèles formels et conceptuels. Le XIXe siècle, littéralement obsédé de fantasmes sexuels –
essentiellement masculins – avait élaboré toute une panoplie de moyens pour les représenter de manière plus ou moins explicite. Courbet était un maître de l’allusion érotique, au point que, même en l’absence de personnages féminins, on interprète ses tableaux de grottes comme des paysages anthropomorphes. Les
grottes seraient-elles des évocations cachées du sexe féminin ?
Gustave Courbet Le Bord de mer à Palavas, 1854 Huile sur toile, 38 x 46,2 cm Musée Fabre, Montpellier Agglomération © Musée Fabre, Montpellier Agglomération / Frédéric Jaulmes
Gustave Courbet
Le Bord de mer à Palavas, 1854
Huile sur toile, 38 x 46,2 cm
Musée Fabre, Montpellier Agglomération
© Musée Fabre, Montpellier Agglomération / Frédéric Jaulmes

Épilogue
À la Fondation Beyeler, le ravissant petit paysage de mer de Courbet Le Bord de mer à Palavas, 1854, qui représente probablement l’artiste lui-même, prend congé des visiteurs à la fin de l’exposition par un geste plein d’élan. En quelque sorte un pendant à la toile d’entrée, Bonjour Monsieur Courbet, réaffirmation de son désir d’importance, dans la la peinture.
Procès
Cette exposition est montée en coopération avec le Musée d’Art et d’Histoire de Genève, qui présente la création de Courbet datant de la période de son exil en Suisse.
Les expositions de Riehen/Bâle et de Genève donneront le coup d’envoi à la
« Saison Courbet » qui commence à l’automne 2014.

Catalogue
À l’occasion de l’exposition « Gustave Courbet », la Fondation Beyeler publie un catalogue en allemand et en anglais avec un tiré à part en français. L’édition commerciale est éditée par Hatje Cantz Verlag, Ostfildern. Ce catalogue abondamment illustré contient des contributions d’Ulf Küster, Stéphane Guégan, Michel Hilaire, Laurence Madeline, Bruno Mottin et James Rubin.
Manifestations organisées à l’occasion de l’exposition Gustave Courbet
Informations pratiques
Conférence de Laurence Des Cars
Mercredi, 17 septembre 2014, 18h30
Laurence Des Cars, directrice du Musée de l’Orangerie de Paris, parle de la création de Gustave Courbet.
En collaboration avec l’Alliance Française de Bâle et la Société d’Etudes Françaises de Bâle.

La conférence se tiendra en français.
La manifestation est incluse dans le prix d’entrée du musée.
Débat : l’art dans le champ de tension du scandale et de la rupture de tabou
Jeudi, 9 octobre 2014, 18h30–20h00
Depuis qu’il existe, l’art a été jalonné de scandales artistiques. Quel rôle joue la rupture des tabous dans l’art contemporain ? Dans quelle mesure les scandales et les ruptures de tabous sont-ils mis en scène ou provoqués ? Où se situent les champs de tension et les frontières entre tabous, provocation, art et culture ?
Voici quelques-unes des questions dont discutent l’artiste Tracey Emin, le conservateur et historien de l’art Norman Rosenthal ainsi qu’Elisabeth Bronfen et Andreas Beyer. Ce débat a lieu en anglais.
En collaboration avec DAS MAGAZIN
Prix : CHF 35.- entrée du musée incluse / Art Club et Amis CHF 10.-
Journée Familles « Gustave Courbet »
Dimanche, 26 octobre 2014, 10h00–18h00
Courtes visites guidées de l’exposition « Gustave Courbet »
pour enfants, jeunes, adultes et familles en différentes langues. Un jeu dans le musée et différents ateliers invitent le public à des expériences.
Prix : gratuit pour les enfants et pour les jeunes de moins de 25 ans ; adultes : prix d’entrée habituel du musée.
Lecture d’extraits du livre « Gustave Courbet »
Mercredi, 29 octobre 2014, 18h30
Ulf Küster, commissaire de l’exposition et auteur lit des extraits de son livre « Gustave Courbet ».
Ce nouvel ouvrage publié à l’occasion de l’exposition présente l’artiste et son oeuvre.
La manifestation est incluse dans le prix d’entrée du musée. En langue allemande.
Visite guidée publique en français
Dimanche, 15h00–16h00
28 septembre
19 octobre
30 novembre
21 décembre
Visite guidée dans l’exposition « Gustave Courbet »
Prix: Tarif d’entrée + CHF 7.-

Céleste Boursier-Mougenot, persistances

Exposition à l’ Aubette 1928 Strasbourg
jusqu’au 22|11|2014
L’Aubette 1928 accueille l’artiste Céleste Boursier-Mougenot dans le cadre de la programmation d’expositions temporaires consacrée aux formes les plus actuelles et pluridisciplinaires de l’art.
Céleste Boursier-Mougenot
Musicien de formation, Céleste Boursier-Mougenot réalise depuis une vingtaine d’années des installations qui prennent en compte leur lieu de présentation, leur environnement et donnent une place au visiteur qui en fait partie intégrante le temps de sa visite. L’artiste s’attache à rendre perceptible le potentiel musical de situation ou d’objets les plus divers en élaborant des dispositifs dont les formes varient mais qui toujours font de l’écoute le motif central de l’œuvre. Les formes sonores ainsi créées, que Céleste Boursier-Mougenot qualifie de vivantes, livrent une nouvelle perception de l’espace avec lequel elles entrent en résonance.
Céleste Boursier-Mougenot présente deux installations à l’Aubette 1928, parmi lesquelles une est produite pour l’exposition. Dans la salle des fêtes, Céleste Boursier-Mougenot développe une nouvelle version de l’installation videodrones (2000-2011) recomposant sur fond des décors de Theo Van Doesburg le paysage urbain environnant de la place Kléber filmé en direct et dont la bande son résulte « du bruit des images » ou plus exactement de la modulation du signal vidéo amplifié et converti en audio.
La subtilité du travail ingénieux de l’artiste demande quelques explications, pour la bonne compréhension et son appréciation.

 
videodrones, 2000-2014 (extrait de la vidéo)
Installation audio et vidéo, technique mixte,
Six caméras vidéo, six projecteurs
Vidéo, système multi canal de traitement et de diffusion audio, différents sofas.
Videodrones, présentée dans la salle des fêtes, donne à voir les mouvements de la vie publique captés par six caméras orientées sur la place Kléber. Ce flux d’images produit, via un amplificateur, une gamme sonore, dont la forme s’apparente à un bourdonnement continu, résonant dans l’espace. L’intensité sonore est modulée en fonction de l’exposition des caméras à la lumière, au mouvement, à la vitesse et à la taille des personnes et objets qui traversent leurs champs. Chaque flux d’images en provenance d’une caméra devient une source sonore qui s’ajoute à la composition. Les images captées sur la place sont ainsi diffusées par six caméras en temps réel sur les murs latéraux et le plafond de la salle des fêtes et se surimpriment aux décors géométriques réalisés en 1928 par Theo Van Doesburg, créant ainsi une étonnante mise en abyme du décor de Van Doesburg.
Au centre de l’espace, un meuble crée par le designer Stéphanie Marin, permet l’immersion dans cette oeuvre dont l’imaginaire peut se saisir et exploiter le potentiel fictionnel, autant qu’être troublé par le surdimensionnement des images projetées, créant une réalité seconde, hypnotique.
videodrones est issue d’une série d’installations audio et vidéo développées depuis 2000 par Céleste Boursier-Mougenot.
Conçue pour le Foyer-bar de l’Aubette, une nouvelle installation intitulée bruitformé est à découvrir au moment de l’ouverture de l’exposition. Un microphone capte la fluctuation de fréquences acoustiques audibles ou non qui adviennent et sont analysées pour insuffler un ensemble de sculptures fragiles, éphémères, utopiques qui forment un paysage atone.
Céleste Boursier-Mougenot, persistance IFoyer-bar
persistance I, 2014
Sculpture, technique mixte
Pompe à air, réservoir, solution tensioactive, modulateur électronique avec entrées audio,
microphones, socle en bois, tuba harmonium
Céleste Boursier-Mougenot a conçu pour le Foyer-bar de l’Aubette persistance I, oeuvre
composite formée d’un euphonium (sorte de tuba) présenté seul au milieu de la pièce conçue en 1928 par Sophie Taeuber-Arp. La substance mousseuse qui s’en échappe doucement résulte de approches, pièce sonore présentée dans le Ciné-dancing, en fonction des variations mélodiques de ce chant. A mesure que le son produit la mousse, celle-ci entoure l’instrument puis s’écoule lentement sur le socle rugueux sur lequel l’instrument est déposé. Un jeu de matière se créer alors ; la matière sonore donnant forme à la mousse aérienne et soyeuse, qui est entravée, à mesure de sa dissolution, par le matériau irrégulier et ingrat habillant le socle.
L’articulation de différentes matières, qu’il s’agisse du cuivre du tuba, des fines bulles de la
mousse ou du crépi industriel, fait apparaitre persistance I comme une concrétion
contemporaine, figurant, au moyen du caractère symbolique de l’instrument, le caractère révolu de cet espace, autrefois lieu festif et sonore.

Céleste Boursier-Mougenot , persistance I, 2014
Céleste Boursier-Mougenot , persistance I, 2014

Ciné-dancing
approches, pièce musicale pour voix, Joana Preiss, 23 mns, 1993
immersions, pièce musicale pour violon et altos, 66 mns, 1993
approches et immersions sont deux pièces musicales composées par Céleste Boursier-
Mougenot en 1993 pour la pièce De mes propres mains de Pascal Rambert présentée pour la première fois au festival Théâtre en mai à Dijon.
Dans le ciné-dancing de l’Aubette, approches, composition pour quatre voix à capella, est mise en espace et diffusée via huit haut-parleurs. Les quatre pistes, qui donnent à entendre les variations harmoniques de la monodie, se multiplient et se superposent. Ces variations vocales illustrent l’épisode du chant des sirènes, mythe fondateur de l’Odyssée, lors duquel Ulysse et son équipée parviennent à résister au pouvoir de séduction du champ des sirènes. Cet épisode s’entend comme une métaphore de l’aliénation et de la domestication de la nature légitimée par le progrès et la modernité, concepts développés par Max Horkheimer et Theodor Adorno dans La dialectique de la raison.
approches est accompagnée d’immersions, pièce pour quatuor de violons et d’altos, écrite et jouée par l’artiste.
Il vaut mieux ne pas être trop nombreux, pour déguster pleinement cette  délicieuse musique.
Né en 1961 à Nice, Céleste Boursier-Mougenot vit et travaille à Sète et expose depuis une dizaine d’années dans les lieux importants de l’art contemporain comme la Barbican Art Gallery à Londres ou la maison rouge – Fondation Antoine de Galbert à Paris. Lauréat de l’International Studio Programm du PS 1 en 1998-99,  Céleste Boursier-Mougenot a également été lauréat du David pour l’art contemporain en 2009 puis nommé pour le Prix Duchamp en 2010. En 2014, une importante exposition intitulée perturbations lui a été consacrée aux Abattoirs à Toulouse.
Céleste Boursier-Mougenot représentera la France à la Biennale de Venise en 2015.
Céleste Boursier-Mougenot et Camille Giertler
Commissariat : Camille Giertler, responsable de l’Aubette 1928
 photos de l’auteur
 

Tatiana Trouvé au MAMCO

Musée d’art moderne et contemporain, Genève
10, rue des Vieux – Grenadiers CH-1205
Genève
www.mamco.ch
Cycle Des histoires sans fin, séquence été 2014, 25 juin — 21 septembre 2014
Tatiana Trouvé
Tatiana Trouvé
Le Mamco présente « The Longest Echo/L’Écho le plus long« , une exposition de Tatiana Trouvé (née en 1968 à Cosenza (Italie), vit et travaille à Paris) qui réunit un ensemble de travaux développés par l’artiste depuis le milieu des années 2000 jusqu’à aujourd’hui. Sans être une rétrospective, L’Écho le plus long propose un vaste choix d’oeuvres qui occupe en totalité les deux premiers étages du musée et qui se concentre sur un ensemble de séries structurant ce travail.
Tatiana Trouvé
La constitution d’un espace en prise avec le développement de phénomènes psychiques est au coeur de l’oeuvre de Tatiana Trouvé. Le Bureau d’Activités Implicites, ou B.A.I., commencé en 1997, et déjà montré au Mamco en 2004, en fut le premier élément. Il s’est développé en différents « Modules », qui sont autant de lieux de travail et de concentration dont on ne sait précisément si la fonction consiste à produire des pensées ou à recenser les traces de l’activité de l’artiste. Cette recherche s’est poursuivie dans la réalisation de Polders, espaces en réduction se greffant à des espaces déjà là : énigmatiques, combinant des éléments faisant référence à des univers hétérogènes (sport, médecine, musique…), les Polders (présentés au 1er étage) portent l’empreinte d’une expérience rêvée.
Tatiana Trouvé, Polder
De semblables échanges entre espaces physiques et psychiques sont aussi à l’oeuvre dans les dessins de Tatiana Trouvé, dans la série Intranquillity, notamment, qui présente des architectures intérieures dont l’étrangeté est immédiatement perceptible : quelque chose, quelqu’un, semble avoir disparu ou tout au moins fait défaut, ce dont témoignent la disposition des lieux et la coexistence des objets. Ici, comme dans ses installations, l’artiste nous engage à croire que la réalité d’un lieu, sa vérité, ne peuvent se réduire à ce que l’on en voit, que dans leurs déploiements (titre d’une autre série de dessins) et dans leurs plis, les espaces ne sont ni stables ni fixes, mais frémissants et flottants. Une large place est d’ailleurs accordée au travail graphique de l’artiste dans cette exposition.
Ainsi sur le Plateau des sculptures, au premier étage du Mamco, une vaste structure métallique inventée par Tatiana Trouvé permet l’exposition d’une quarantaine de dessins de grand format et envahit l’ensemble de l’espace. C’est la première fois qu’un tel dispositif est conçu et montré.
Tout se passe donc comme si, pour Tatiana Trouvé, non seulement les lieux disposaient d’un inconscient, mais aussi comme si l’espace et le temps présents n’étaient guère plus
qu’un fragment d’un espace et d’un temps beaucoup plus étendus.
Ses oeuvres parmi les plus récentes en portent encore directement la marque,
comme 350 points à l’infini (un champ magnétique perturbé où des fils à plomb pointent dans des directions différentes),
Tatiana Trouvé
I Tempi Doppi (qui propose une vision stéréoscopique du temps à travers deux ampoules reliées l’une à l’autre, la première allumée et la seconde éteinte), ou encore I Cento Titoli (une sculpture qui dispose de cent titres, pour cent ans…).
La construction de l’oeuvre de Tatiana Trouvé est comparable à la croissance d’un monde structuré par la redistribution, l’altération, la modification et le redéploiement permanent des éléments qui le composent. Car les forces créatrices de la mémoire sont au coeur de cette oeuvre : mémoire du vécu, des pensées, des projets, des formes…
Pour le Mamco, Tatiana Trouvé a élaboré, en fonction de l’identité architecturale du lieu, un nouveau et ample visage de cet univers en perpétuelle métamorphose.
L’Ombre du jaseur (d’après Feux pâles)
Au quatrième étage l’exposition : L’Ombre du jaseur (d’après Feux pâles), présentée à l’occasion de la rétrospective Philippe Thomas au printemps, est prolongée.
En 1990, Philippe Thomas est invité par le capc Musée d’art contemporain de Bordeaux à concevoir l’exposition Feux pâles. Sous couvert de son agence les ready-made appartiennent à tout le monde, il voit dans l’invitation du musée l’occasion d’élever le principe de fiction développé dans ses travaux précédents à la hauteur de l’institution, lieu neutre d’un savoir scientifique, généralement peu suspecté de partialité.
L’Ombre du jaseur présentée par le Mamco, n’est pas une reprise littérale de l’exposition-oeuvre Feux pâles – proposition aujourd’hui vouée à l’échec – mais se conçoit comme une exposition dans l’ombre de la première.
Dans l’espace consacré aux Collections aux Collections du 3e étage, le Mamco propose un accrochage inédit.
mamco, feux pâles