Estelle Hanania – Fred Jourda – Gisèle Vienne jusqu’au samedi 30 avril en entrée libre à la Galerie de la Filature, Scène nationale – Mulhouse Estelle Hanania, Fred Jourda, photo Emmanuelle Walter
Les univers d’Estelle Hanania et de Fred Jourda s’unissent dans une exposition sur le thème de la forêt.
Photographies saisies dans le décor sylvestre d’un spectacle de Gisèle Vienne d’un côté, images de sous-bois du Morvan fixées par la lumière de l’autre. Le seuil des forêts – à la fois réaliste et symbolique chez Estelle Hanania, naturaliste chez Fred Jourda qui représente une frontière que l’on ne franchit pas impunément, qui nous interroge sur ce qui nous anime, sur notre instinct primitif, sur l’ivresse que peuvent générer nos
énergies et notre rapport sensoriel au monde. Au regard de ces deux séries, on retrouve le court métrage Brando, écrit et réalisé par Gisèle Vienne pour la chanson éponyme de Scott Walker + Sunn O))). On y croise les interprètes de The Pyre dans un chalet au coeur d’une forêt inquiétante qui nous plonge dans un délicieux cauchemar. Estelle Hanania présente principalement une série d’images prises lors de différentes
répétitions et représentations du spectacle This is how you will disappear de Gisèle Vienne (présenté en 2014 à La Filature). Cette exposition est alimentée de photographies issues d’autres séries que l’artiste aime à réactiver et confronter au fil du temps.
ESTELLE HANANIA
Diplômée de l’École des Beaux-arts de Paris en 2006, lauréate du prix photographie du Festival d’Hyères la même année, Estelle Hanania a d’abord fréquenté la chambre noire de l’École des Beaux-arts, où elle y réalisait ses tirages couleurs grands formats. S’en suivra une expérience de directrice artistique chez Ogilvy avant qu’elle ne se lance complètement dans la photographie. Elle associe rapidement à son travail personnel des commandes pour la presse, y imprimant un style aussi poétique qu’épuré. Ses images, tantôt baignées
d’une lumière chaude, tantôt enveloppées d’un voile bleu et hivernal, oscillent entre douceur et âpreté.
Masques et déguisements sont des motifs récurrents de son iconographie, marionnettes ou hommes des champs, hésitant eux aussi entre figures affables et créatures inquiétantes. Estelle Hanania a publié cinq livres dont trois en collaboration étroite avec la maison d’édition Shelter Press. Le dernier en date, Happy Purim sorti en octobre 2015, sera suivi d’un prochain en 2017 qui retracera la collaboration au long cours
entre la photographe et la metteuse en scène Gisèle Vienne.
FRED JOURDA « Je suis né à Paris en 1963. Aujourd’hui je suis tireur couleur. Je passe le plus clair de mon temps dans l’obscurité de ma cabine. Je voyage à travers le monde pour trouver d’autres lumières et d’autres horizons. Je travaille sur le paysage depuis 1996. J’y trouve une source d’émotion, de contentement, et d’infinie tranquillité intérieure que j’essaye d’exprimer au travers de la lumière, de la couleur et du cadrage. J’utilise un appareil de type Instamatic, qui du fait du non-contrôle de l’exposition (ouverture et temps de pose), de la mise au point fixe et de la facilité d’emploi, me permet de photographier à tout moment et rapidement, sans autre geste que celui d’appuyer sur le déclencheur. Les pictorialistes de la fin du 19e siècle et du début du 20e comme Edward Steichen,Alfred Stieglitz, Alvin Langdon Coburn, sans oublier les pictorialistes français dont Robert Demachy, m’ont particulièrement influencé dans ma démarche. Mais c’est sans conteste le photographe Bernard Plossu qui est à l’origine de mes débuts. Ma première exposition intitulée Minimalist s’est tenue au Cap en Afrique du Sud en février 1998, et la deuxième Dépaysage à Paris à la Galerie 213 lors du 1er trimestre 2000. J’ai aussi exposé à la Galerie Chab Touré à Bamako au Mali pendant les 4es rencontres de la Photographie Africaine enoctobre 2001. Du 15 au 30 septembre 2002, j’ai participé au 6e Festival International de Photographie d’Alep en Syrie. J’ai également exposé du 20 septembre au 19 octobre 2003 à la Galerie Segeren à Breda aux Pays-Bas dans le cadre du Festival Breda Photo 2003. Puis du 5 février au 27 mars 2004, Land & Urban Scapes, à la Galerie Acte 2, à Paris. Parallèlement aux photographies de paysages et leurs instantanéités, j’ai travaillé sur la durée en réalisant des portraits de personnes endormies, sans lumière, que j’ai exposées à la Galerie Madé du 2 décembre 2004 au 7 janvier 2005, sous le titre Sombre. Ces photos de visages et de « paysages intérieurs » ont été réalisées de nuit, sans lumière principale, avec uniquement la réverbération de la lumière de la rue dans la pièce où repose la personne. Personnes endormies, assoupies, en tout cas détendues. Ce qui m’intéresse, outre le fait de faire des photos de nuit, c’est de voir apparaître petit à petit leurs visages au repos, relâchés, voire tranquilles. L’abandon presque total de la personne dans le sommeil. Puis après plusieurs expositions collectives, j’ai participé aux 150 ans de l’Hôtel Scribe de Paris en montrant une série de paysages sous le titre Dense, du 10 décembre 2010 au 16 janvier 2011. Et dernièrement, en avril 2011, j’ai été invité au Festival Itinéraires des Photographes Voyageurs à Bordeaux, à montrer des paysages tirés de mon premier livre, Dépaysage, publié fin 2010 aux Éditions Filigranes. » GISÈLE VIENNE
Née en 1976, Gisèle Vienne est une artiste, chorégraphe et metteuse en scène franco-autrichienne.
Après des études de philosophie et de musique, elle se forme à l’École Supérieure Nationale des Arts de la Marionnette où elle rencontre Étienne Bideau-Rey avec qui elle crée ses premières pièces. Elle travaille depuis régulièrement avec, entre autres collaborateurs, les écrivains Dennis Cooper et Catherine Robbe-Grillet, les
musiciens Peter Rehberg et Stephen O’Malley, l’éclairagiste Patrick Riou et le comédien Jonathan Capdevielle.
Créée en 1999, sa compagnie compte aujourd’hui 14 pièces à son répertoire, dont 10 qui tournent régulièrement en Europe et dans le monde.
Depuis 2005, Gisèle Vienne expose régulièrement ses photographies et installations. Elle a publié le livre/CD Jerk / Through Their Tears en collaboration avec Dennis Cooper, Peter Rehberg et Jonathan Capdevielle aux Éditions DISVOIR en 2011. Le livre 40 Portraits 2003-2008, en collaboration avec Dennis Cooper et Pierre
Dourthe, sort aux Éditions P.O.L en 2012.
oeuvre présentée à La Filature Brando (création 2014 – durée 9’28)
un court métrage écrit et réalisé par Gisèle Vienne pour la
chanson éponyme de Scott Walker + Sunn O)))
à visionner sur ici
On y croise la mère et le fils de The Pyre dans un chalet au
coeur des montagnes. Grâce à la voix du crooner Scott Walker
et aux sonorités « drone » inquiétantes du groupe de Stephen
O’Malley, on est plongés dans un délicieux cauchemar. Un
océan de mystères entoure ces êtres, bientôt rejoints par
l’écrivaine dominatrice Catherine Robbe-Grillet.
Un clip complètement hypnotique « Club Sandwich » : jeudi 24 mars de 12h30 à 13h40
visite guidée le temps de la pause déjeuner avec pique-nique tiré du sac gratuit sur inscription :
T 03 89 36 28 34 ou heloise.erhard@lafilature.org LA GALERIE DE LA FILATURE, SCÈNE NATIONALE
20 allée Nathan Katz – 68090 Mulhouse cedex
T +33 (0)3 89 36 28 28 – www.lafilature.org
en entrée libre du mardi au samedi de 11h à 18h30,
les dimanches de 14h à 18h et les soirs de spectacles
La Filature est membre de Versant Est, Réseau art contemporain Alsace.
L’édition 2016 du salon art KARLSRUHE vient d’ouvrir ses portes
Ce sont 218 galeries qui occupent les 35 000 m2 environs,
dont 31 galeries supplémentaires , de nouveaux visages dans les 4 halls d’exposition.
Du 18 au 21 Février c’est l’art en 3 D, à la « Messe », un dialogue entre
peintures, photos et sculptures.
C’est la 13e édition, regroupant 13 pays et tout ceci à l’initiative
depuis 2003, du commissaire Ewald Karl Schrade Ewald Karl Schrade
C’est un « paysage artistique » clairement structuré, à l’architecture expressive, qui voit le jour, ceci afin de favoriser la confrontation intensive avec les œuvres d’art et leur plus forte perception, tout en invitant à l’achat plaisir en toute détente.
Beaucoup One-Artist-Shows, généreux espaces d’art sculptural et de nombreuses oasis de repos procurent un meilleur aperçu pour flâner agréablement dans les halls. Visiteurs et collectionneurs savourent le plaisir de partir à la découverte. Les organisateurs
Compte sur à peu près 50 000 visiteurs
Les créations plastiques déjà établies sont délibérément mises en balance avec des expériences artistiques récentes. C’est ce qui fait la séduction particulière du salon.
La structure thématique des halls apporte aussi une plus grande clarté. Dans le hall 1, vous trouverez essentiellement les éditions originales et la photographie, les halls 2 ( Classique moderne (après 1945) + Art contemporain)
et 3 étant entièrement consacrés à la peinture et aux sculptures ( L’art moderne classique (avant 1945) » + Art contemporain ) .
Pour mieux l’apprécier, la «Contemporary art 21» est regroupées dans un hall qui leur est réservé:
le hall 4 (dm Arena).
Parmi les moments les plus attendus de l’édition 2016, l’exposition exceptionnelle de la fondation messmer (kunsthalle messmer, RIEGEL AM KAISERSTUHL), présente les oeuvres d’André Evard, un des peintres les plus importants de l’art moderne suisse (« André Evard – Pionnier de l’art concret et constructif », dm-arena).
Tout comme l’exposition exceptionnelle du Musée Kirchner de Davos, qui montre des peintures et des gravures du peintre et graphiste Ernst Ludwig Kirchner mais met l’accent également sur les créations photographiques de l’artiste peu connues aujourd’hui et jamais exposées par le passé (« Le peintre en photographe », hall 1).
J’ai retenu celle-là, un dessin et la photo ci-dessus, où Kirchner pratique le nudisme entre amis.
la Galerie van der Koelen, Jens J. Meyer et son installation/sculpture Jens. J. Meyer Radial Art Contemporain, Frédéric Croiser, avec Ewerdt Hilgemann et sa sculpture momumentale
fait partie de la section One-Artit-Show
Autre strasbourgeois et ses artistes baroques Ritsch-Fisch galerie
L’Estampe de Strasbourg, ses aquatintes et peintures, gravures, dessins
Les Editions Remy Bucciali de Colmar
ici une oeuvre de Michel Cornu présentée par Rémy Bucciali un coup de coeur pour Yann Faisant et Opus Magnum, horticulteur, alchimiste, artiste
séduit avec sa pomme bronze et or, appuyée sur la théorie du nombre d’or, garnie d’une feuille de Gingko Biloba aux propriétés de résistance (Fukushima)
présentée par la galerie Laurence Guerrieri, A la galerie Valentien, de Stuttgartquelques belles signatures où tout un mur
extérieur est consacrée à Anne-Sophie Tschiegg anOTHER art gallery ltd.
un anglais Paul Critchley a peint des trompe l’oeil
vous pouvez vous promener à travers sa maison tout en achetant ses peintures
Il faut bénéficier d’une santé solide pour arpenter tous les 4 Halls de 12 500 m² chacun, sans colonnes, de plain-pied, avec éclairage naturel, climatisés, avec des coins pause
pour des drinck et des en-cas.
Jusqu’au 27 mars 2016 A la Fondation Fernet Branca, c’est à l’instar de la synagogue, mais
dans un mode inversé. Ce sont les femmes qui sont au rez-de-chaussée
et les hommes à l’étage. Ce contre point des propositions artistiques fonctionne très bien en regard de celles des trois artistes du rez de chaussée.
Lorsque l’on pénètre au premier étage c’est un spectacle surprenant,
réjouissant, Didier Paquignon a accroché aux cimaises, à touche touche, 138 corps d’hommes à moitié dévêtus, topless, pas plus bas que la ceinture.
Ce sont des monotypes, un concept particulier de Didier Paquignon, un travail artisanal
dans son atelier, qu’il a entamé depuis 5 ans, les Muses.
D’abord il photographie ses modèles consentants, tous cadrés de la même
manière, de face, de profil, voire de dos, sur 1 m, 20 de hauteur, en gommant tous les attributs sociaux, puis il peint sur plexiglass, les imprime à la presse sur de grandes feuilles, avec des rectangles de la taille des plexiglass, en essayant d’être au plus près de la photo, puisque c’est de la peinture, en noir et blanc, avec ses ombres portées.
Un sorte d’homme de Vitruve de Léonard de Vinci,revu par l’art contemporain
Au cours de sa carrière, Didier Paquignon n’a cessé de revisiter des thèmes classiques : des natures mortes, des vues d’intérieur, des paysages urbains… Ancien élève des Beaux-Arts de Paris et ancien prof des Beaux-arts de Reims, il s’intéresse et s’interroge sur les nus masculins.
Pour cette série initiée depuis 2010 et intitulée Muses, Didier Paquignon a pioché dans le cercle des artistes et des médias pour réaliser une centaine de portraits d’hommes : des journalistes, graphistes, photographes, écrivains, peintres, scénographes, danseurs. Michel Houellebecq, François Morel, Denis Lavant, Sylvain Tesson,
(avant son accident) ou encore Robert Ménard, Jean-Claude Dreyfus , Olivier Roller , mais aussi des anonymes, ont accepté son invitation et ont posé torse nu, sans fard. Didier Paquignon ne fait que retirer la chemise à ses muses, il leur laisse libre court dans leurs mouvements.
Ces monotypes sont alignés les uns à côté des autres sur un grand mur, nous interrogeant sur la nudité masculine, inversant pour une fois les rôles entre hommes et femmes : « Puisque le corps masculin en tant que monument, est à bout de souffle, dans nos sociétés occidentales, pourquoi pas en reparler et le réinterroger pour poser la question : c’est quoi ? »
Des gros, des maigres, des grands, des petits, des poilus, des imberbes, des tatoués, des musclés, des ridés, des vieux, pas trop de jeunes, des chevelus, des chauves, les bras ballants, croisés, derrière le dos ont pris la pose face au peintre. A l’évidence, ce n’est plus l’Apollon de l’Antiquité ! Sa préférence va aux yeux, qui le fascinent. Denis Lavant hoche la tête, de face de dos, de 3/4 déclame du Céline (non l’exposition n’est pas sonore) ont croit l’entendre. François Morel tel un enfant, qui cache une bêtise, rejoue un de ses rôle dans les Deschiens. Olivier Roller, pudique, comme on ne l’imagine pas, avec un regard de voyou, Jean Claude Dreyfus dans toute la splendeur de
son abdomen, se pince les tétons avec son aplomb de comédien.
Ce n’est pas une histoire de plaisir, ni de désir, mais une interrogation sur le corps de l’homme, dans les époques que nous traversons, avec ses modification physiques,
son interrogation sur la virilité, sur son vécu, sur son devenir. Didier Paquignon s’interroge sur lui-même, qu’est-ce qu’un homme de son âge ? Traversé par le doute, troublé par la disparition du patriarcat de son enfance italienne, son projet est
d’interroger les femmes, des écrivains, des sociologues, de leur demander d’écrire des textes.
Cette masse d’hommes, posant en toute humilité, joue un jeu difficile que peu de femmes
accepteraient mais ne sont-elles pas conditionnées par « l’obligation » de séduction qu’on leur demande de jouer, et qu’on les relègue très vite au passé, dès l’apparition des premières rides ? Didier Paquignon, traite avec bienveillance et douceur, presque avec tendresse, dans cette pièce monumentale, sous une lumière crue, dans un effet de masse, les hommes qui ont du mal à trouver leur place. Cela nous fait dire aussi à nous les femmes, les hommes se sentent le mieux, entre copains, entre eux.
Commissaire de l’exposition : Pierre Jean Sugier, directeur de la Fondation Fernet Branca
La Fondation Fernet Branca est ouverte pour la nuit des musées de Bâle, avec un buffet et une possibilité d’appendre le tango, en présence de l’artiste le 22 janvier 2016. voir les détails ci-dessous. Un catalogue est édité par l’Imprimerie de St Louis, avec les photos de Laurent Troendle.
préfacé par un texte succulent d’Eric Chevillard,écrivain, journaliste au Monde, intitulé :
Du bon usage des Muses
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Le festival les Vagamondes a démarré avec le vernissage de l’exposition « Dérive » de Yusuf Sevinçli, dans la galerie. Feuilletez ici le programme du Festival les Vagamondes du 13 janvier au 23 janvier 2016 Sans titre, série POST II (015), 2013
Le noir et blanc contrasté du jeune photographe turc Yusuf Sevinçli
oscille entre geste artistique et approche documentaire. Gert Petrus Fieret et Miroslac Tichy, sont des références pour lui parmi « Ils sont trop nombreux, tout au long de l’histoire de la photographie, pour les énumérer tous. August Sander, pour l’approche particulière de ses sujets, Eugène Atget pour son incroyable atmosphère. Robert Frank est très important pour moi, et continue de m’inspirer. Il y a aussi nombre de photographes japonais des années 70, comme Moriyama et Kitajima. William Klein et Nan Goldin figurent parmi mes photographes favoris, et Anders Petersen aussi, qui a une grande influence sur mes
débuts. D’un point de vue plus contemporain, je trouve les travaux de Rinko Kawauchi et Antoine D’Agata extrêmement intéressants. Yusuf Sevinçli Né en 1980 à Zonguldak en Turquie, Yusuf Sevinçli vit et travaille à Istanbul. Il est représenté par la Galerie Les filles du calvaire à Paris et Elipsis Gallery à Istanbul. Diplômé de la section Communication de l’Université Marmara d’Istanbul en 2003, Yusuf Sevinçli intègre l’année suivante une Masterclass consacrée à la photographie documentaire en Suède, avant de suivre la Reflexions Masterclass de Venise. Il construit alors son travail personnel à travers plusieurs séries, dont Good Dog, qui ont fait l’objet de nombreuses expositions individuelles et collectives en Turquie et à travers le monde (Mois de la Photo de Moscou, PhotoBiennale de Thessalonique, Festival de photographie Fotografia Europa Reggio Emilia en Italie, Fotografie Noorderlicht aux Pays-Bas, FotoFreo en Australie…). Yusuf Sevinçli présente également ses oeuvres en France, notamment au festival Circulation(s) à Paris en 2012, au Festival Voies Off à Arles en 2013 et au festival Portrait(s) de Vichy en 2015.
Yusuf Sevincli, selfportrait
Depuis 2008, son travail fait souvent l’objet de publications dans des ouvrages collectifs consacrés à la photographie (Image Makers, Image Takers: The Essential Guide to Photography chez Thames&Hudson) ainsi que dans différents magazines internationaux. « J’ai démarré vers l’âge de 20 ans, pendant mes années universitaires. J’étais étudiant en journalisme et mon premier contact avec la photographie s’est fait lors des cours d’histoire du photojournalisme. Plus que par sa pratique, j’ai donc tout d’abord été attiré par l’histoire de la photographie et par ses figures iconiques, par le sens de ses messages et par l’effort de compréhension de la puissance de l’image. Je reste aujourd’hui persuadé qu’au-delà du style de chacun, un photographe ou un artiste usant de la photographie se doit de connaître l’histoire de cette dernière, afin de pouvoir appréhender à leur juste valeur les capacités du médium. »
Yusuf Sevinçli Ilnous livre les vestiges d’une culture encore vivace dans un pays en pleine mutation, comme par exemple l’image d’une des dernières maisons stambouliotes, bâtie en bois, livrée au feu, ou celle d’oiseaux s’envolant du fond d’une ruelle pentue et ruisselante. Ou bien encore, il capte cette vision hallucinatoire d’un réparateur qui ne descendra probablement plus de son lampadaire tant il semble y être accroché pour toujours. La nostalgie est au coin de l’énième impasse du quartier Beyoglù où Sevinçli se promène à longueur de jour et de nuit, mais la vivacité photographique de ses captations rappelle leur contemporanéité.
À l’occasion, il nous parle d’amour, s’arrête sur le charme d’un corps en livrant au regard un morceau de peau d’où affleure une sensuelle fragrance. Quelques visages enfantins frappent par leur innocence illuminée, rappelant l’imagerie des frères Lumière ou de Chaplin. Des bambins masqués jouent dans les ruelles et les terrains vagues, tandis que des petites filles surgissent dans des images, telles des merveilles, anges éternels, emblèmes du désir d’enfance. Leurs minois, au regard malin, fixent avec candeur le spectateur, comme ceux de ces jeunes filles que l’on dirait siamoises tant leurs frimousses se serrent l’une contre l’autre. Yusuf Sevinçli sait aussi saisir les errants et autres noctambules qui colorent Istanbul demixité et de fantaisie, à la croisée des cultures. Il tire de leurs corps des volumes et des aplats contrastés, tel ce dos d’homme où s’étale un liquide blanchâtre qui rappelle un « dripping » abstrait. Il capte souvent un détail, un fragment, comme les jolies jambes au collant percé d’une punkette, des chardons plantés dans un vase, l’ampoule pendant d’un plafond écaillé (…) pour lui accorder un autre destin visuel. Les formes surgissent de l’ombre, traversant des rais de lumière et les rayures subies par le négatif, pour créer des prismes et des illuminations. Les images sont généralement structurées par l’éclairage mais peuvent contenir une géométrie de par leur sujet : pans d’immeubles abstraits, ossature de barnum laissé à l’abandon sur une plage lunaire, architectures au futurisme vieillot issues des vestiges d’un palais de la découverte décati. Il n’y a pas nécessairement de message dans l’oeuvre de Yusuf Sevinçli, ou alors, il est allusif, comme s’il désirait s’abstraire des remous politiques, pour se soucier de ce qu’il reste de l’humanité, à la manière d’un Sergio Larrain dont les images éclairent le futur douloureux du Chili de leur pureté éblouissante4. Ce photographe est en effet un fabricant de rêves en image. Dans les derniers travaux, son errance visuelle s’est élargie à l’Europe où il voyage. De Naples à Paris en passant par Marseille5, il poursuit sa quête d’un monde silencieux où seul le bruissement fugace de la vie le maintient en éveil.
SÉRIES EXPOSÉES À LA FILATURE « MARSEILLE » : 15 tirages en noir et blanc et en argentique
aux formats 50 x 75 cm et 30 x 45 cm
Suite à une résidence en 2013 au Percolateur, plateforme pour la création photographique en Méditerranée, Yusuf Sevinçli a livré sa vision de Marseille dessinant le portrait d’une ville multiculturelle.
Les photos réalisées ont été publiées sous forme de livre en 2014 aux Éditions Le Bec en L’Air. « GOOD DOG » : 17 tirages en noir et blanc et en argentique aux formats 80 x 120 cm, 50 x 75 cm et 30 x 45 cm Yusuf Sevinçlidéveloppe un concept picaresque, une approche photographique faite d’instabilité et d’errance. Il se contente de photographier son environnement, ses angoisses et ses questionnements au quotidien, et voit en la photographie le moyen de rester connecté aux choses et aux êtres, une réponse – sa réponse – à l’environnement qui l’entoure et aux mouvements qui l’habitent, une réflexion à la fois profonde et naïve. Sa série Good Dog a donné lieu à un ouvrage publié en 2012 aux Éditions Filigranes. « L’aspect émotionnel des photographies de Good Dog est physiquement instable. Yusuf Sevinçli ne s’attarde pas. Il marche, il explore, il observe et il repart. Il prélève presque compulsivement des morceaux de réalité qui sont toujours différents, mais qui peuvent finalement trouver des similitudes et devenir une série d’images. C’est un concept picaresque de la photographie, presque sans-abri, errant, qui rejette la stabilité et la sérénité d’un foyer, même visuel, et qui rendent vivant. Les sujets deviennent des pièces qui s’assemblent et révèlent la matière qu’est la représentation de la réalité à travers l’oeil de l’artiste. L’émotion s’éloigne des sentiers battus et réinvestit la rue, nous montrant sa vraie nature. » Christine Ollier, 2012 « VICHY, 2015 » : 11 tirages en noir et blanc et en argentique aux formats 80 x 120 cm, 50 x 75 cm et 30 x 45 cm En résidence à Vichy pendant un mois, Yusuf Sevinçli a arpenté la ville et posé un regard plein d’humanité sur ses habitants, leur rapport à la ville, à l’autre, au monde. Son travail a fait l’objet d’un focus lors du festival Portrait(s) 2015, ainsi que de la publication de Walking aux Éditions Filigranes. « À quoi tient l’âme d’une ville ? À la rectitude des trottoirs étroits, lissés par le temps ? Aux taches de rousseur d’enfants saisis par les frimas ? Aux noctambules qui errent sous la fusion des lampadaires ? Une ville livre ses secrets à ceux qui l’arpentent sans fin, poussent la porte des bars, déjeunent sur le coin d’un comptoir et dînent au coin d’un autre, croisent les gavroches le matin sur le chemin de l’école et les retraités l’après-midi, qui siestent sur les bancs. En acceptant de conduire au printemps dernier une résidence à Vichy, Yusuf Sevinçli a endossé la figure du photographe marcheur, du flâneur indocile qui guette les offrandes du jour et les blêmissements du couchant : ici un croupier à la pâleur lunaire, là un chien mouillé convoquant les derniers fantômes de la nuit. Bien malin qui serait capable de reconnaître dans les images funambulesques de ce jeune photographe turc les coquetteries de Vichy la française, Vichy la bourgeoise, arc-boutée sur ses façades art nouveau, ses villas néoclassiques et les splendeurs de l’Allier. La ville thermale, qui vit naître l’écrivain voyageur Albert Londres, devient une terre de rencontres et d’aventures, une projection mentale, un poème visuel né des chimères d’un artiste stambouliote qui pratique les déplacements dans tous les sens du terme, physiques et psychiques. Vichy, grâce à lui, s’éveille d’un drôle de rêve où passent des guirlandes de lumières et des gamins aux poings serrés. […]Sous la griffe du regard nomade de Yusuf Sevinçli, Vichy est dessaisie de son histoire et de sa géographie, elle flotte dans un espace-temps qui est celui du rêve éveillé, elle chaloupe et chavire, traversée de fulgurances, filochée de brouillard, sertie de noirs charbon et de blancs incandescents qui la rendent à la fois plus ardente, plus nerveuse et plus insaisissable. » Natacha Wolinski, Walking, Éditions Filigranes / festival Portrait(s) 2015 « POST I » : 17 tirages en noir et blanc et en argentique aux formats 80 x 120 cm, 50 x 75 cm et 30 x 45 cm « POST II » : 8 tirages en noir et blanc et en argentique aux formats 80 x 120 cm, 50 x 75 cm et 30 x 45 cm « PARIS » : 4 tirages en noir et blanc et en argentique
2 Michel Poivert, La Photographie contemporaine, Paris, Flammarion, 2002.
3 Christian Caujolle accorda une place importante à leurs images dans les colonnes de Libération dont il fut le directeur photo pendant des années, il collabora par la suite avec nombre d’entre eux dans la cadre de l’agence et de la galerie VU’.
4 Cf. expositions Sergio Larrain, commissariat Agnès Sire, église Sainte-Anne, RIP d’Arles et Fondation Henri Cartier-Bresson Paris, 2013.
5 Yusuf Sevinçli a été invité en résidence par l’association Le percolateur, exposition à l’Atelier de Visu, Marseille, octobre 2013.
Cours Publics est un cycle de conférences proposé conjointement par le Service Universitaire de l’Action Culturelle de l’Université de Haute-Alsace, la Haute école des arts du Rhin et La Kunsthalle.
C’est la 6e année que les cours reprennent, au vue de leur succès.
Autour d’une thématique, trois intervenants présentent un courant artistique, un pan de l’histoire de l’art permettant de recontextualiser la création contemporaine.
Les cours, assurés par des personnalités universitaires ou du monde de l’art,
sont ouverts à tous, sur inscription.
Thème 2016 : ART ET ESPACE(S) PUBLIC(S)
Si l’on considère l’espace public comme l’ensemble des espaces de passage et de rassemblement à l’usage de tous, il semble alors évident que son devenir est une affaire partagée.
Comment les artistes s’y inscrivent-ils ? La pluralité des réponses est à l’image de la richesse du sujet. Certains créent dans la ville, d’autres avec la ville. Il y en a qui composent avec l’architecture et d’autres qui privilégient les expériences sensibles et sociales. Quelques-uns se rangent du côté de la ville minérale quand d’autres lui préfèrent
ses terrains vagues et indéfinis.
Entre gestes affirmés et micro-actions, entre objet monumental et interpellation participative, les enjeux de l’art dans l’espace public ne cessent d’évoluer et de se réinventer.
Ce cycle a pour objet de donner la parole à différents acteurs de ce jeu urbain qui dépasse largement la sphère artistique et s’inscrit en profondeur dans la métamorphose de notre société. Cycle thématique de 3 séances de 1h30 de 18:30 à 20:00
– La Fonderie / Amphithéâtre Jeudi 25 février – Conférence d’Yvan Detraz Jeudi 3 mars – Conférence d’Alain Bernardini Jeudi 10 mars – Conférence de Jérôme Poggi
Bruit du Frigo, LE RING-Bordeaux – 2013 Jeudi 25 février 2016 – Yvan Detraz
Peut-on imaginer un urbanisme laboratoire, complémentaire à l’urbanisme planifié et
« fait pour durer » ?
Un urbanisme de préfiguration qui défriche et teste des possibles, un urbanisme qui mise sur l’imagination et la capacité d’action des habitants, un urbanisme permissif, reposant sur des interventions légères et éphémères et offrant une place réelle à l’appropriation, un urbanisme qui révèle et augmente le potentiel poétique et d’usage
des lieux… Un urbanisme qui contribue à lutter contre l’appauvrissement de l’espace public et le repli sur soi, en réinventant des espaces communs désirables… Yvan Detraz est architecte,directeur et cofondateur du Bruit du frigo, collectif pluridisciplinaire de création et d’intervention urbaine, créé en 1997. Il y développe notamment un travail exploratoire sur la réappropriation des
périphéries urbaines, à travers les projets Refuges périurbains et Randonnées périurbaines. Bruit du frigo initie des démarches artistiques, contextuelles et participatives mêlant installations temporaires ou pérennes, microarchitectures
et actions collectives. Alain Bernardini, les Appuyées, Toulouse Jeudi 3 mars 2016 – Alain Bernardini
En s’appuyant sur une sélection de ses images et installations photographiques, Alain Bernardini questionnera la notion de « pouvoir » de l’image, qu’il rattache à la connaissance de l’iconographie, au contexte de l’élaboration, à la
forme de présentation, et au lieu de l’exposition. Dans sa recherche artistique, non seulement le contexte social du territoire et /ou de l’individu, mais aussi les espaces publics sont des éléments déterminants qui influencent ce qu’il
qualifie de puissance active de l’image et de sa réception.
Tout passant est amené un jour à être spectateur, mais
aussi usager, voire acteur, de l’espace public et les enjeux de cette puissance varient ainsi selon les rôles tenus tour à tour. Alain Bernardini est artiste, professeur associé et directeur du Master Département Photographie et Art contemporain à l’Université Paris 8. Il participe à de nombreuses expositions et répond depuis 2014 à une commande publique du Cnap et du BBB de Toulouse sur le thème de la photographie dans l’espace public avec le projet Recadrée. Porte-Image. Borderouge Nord. Mathieu Lehanneur Jeudi 10 mars 2016 – Jérôme Poggi
Les Nouveaux commanditaires est un dispositif initié et soutenu par la Fondation de France. Cette action permet à tout groupe de personnes qui en exprime le désir et en justifie le besoin dans un but d’intérêt général de passer commande d’une oeuvre d’art à un artiste. Un réseau de huit médiateurs agréés par la Fondation de France, et réunis au sein de la Société des Nouveaux commanditaires, met en oeuvre cette action à travers la France. Le modèle des Nouveaux commanditaires a été repris dans plusieurs pays européens, dont la Belgique, l’Italie, l’Allemagne, l’Angleterre, la Suède… Jérôme Poggi est médiateur pour l’action des Nouveaux Commanditaires qu’il met en oeuvre en Ile-de-France à travers la structure « not-for-profit » SOCIETIES (anciennement Objet de production) qu’il a fondée en 2004. Historien
et critique d’art, spécialisé dans l’histoire du commerce de l’art, il est l’auteur de nombreux articles, ouvrages et films documentaires. Jérôme Poggi a fondé sa galerie en 2009 après avoir exercé pendant plusieurs années dans le milieu institutionnel de l’art. Modalités d’inscription
Inscription uniquement par courrier auprès du Service Universitaire de l’Action Culturelle de l’Université de Haute- Alsace – Maison de l’Etudiant – Campus Illberg – 1, rue Werner 68100 Mulhouse Tarif plein : 20 euros / tarif réduit 10 eurospour l’ensemble des conférences. Gratuit pour les étudiants de la HEAR
et de l’UHA.
Bulletin téléchargeable sur : www.kunsthallemulhouse.com
Pour tout renseignement concernant l’inscription
s’adresser au Service Universitaire de l’Action Culturelle de l’Université de Haute-Alsace : 03 89 33 64 76 / isabelle.lefevre@uha.fr
Valérie Favre, Balls and Tunnels, 2015
En levée de rideau, ellepropose d’ouvrir l’exposition sur une oeuvre abstraite, le dernier Balls and Tunnelsréalisé en 2015.
Il s’agit du nouvel opus de la série éponyme débutée il y a vingt ans pour laquelle Valérie Favre ne réalise qu’un tableau par an et ce, jusqu’à la fin de sa vie, comme elle l’a déjà énoncé. OEuvres rares, les Balls and Tunnels série de cosmogonies colorées sont tous réalisées selon le même protocole, celui d’une peinture voulue « avec le moins de décisions possibles » ; l’artiste travaille la toile libre en laissant le hasard induire des rencontres de couleurs, sous forme de taches et de dégoulinures.
Le résultat doit à la fois au hasard et aux reprises minutieuses de l’artiste qui travaille ensuite glacis et empâtements pour réaliser une oeuvre « qui n’a plus de sens ».
Placé au tout début de l’exposition, véritable « morceau de peinture », il permet d’évacuer l’image restrictive parfois associée à l’artiste connue pour sa peinture figurative.
Valérie Favre, Lady Bird 2010
Les Théâtres Vastes polyptiques s’étirant sur près de 400 cm, les Grands Théâtres ici réunis sont pour une majeure partie des travaux très récents. Décrits par l’artiste comme des grandes « scèneries »,
les cinq formats monumentaux auxquels vient s’adjoindre un inattendu petit format, accueillent le visiteur dans une salle écarlate qui rappelle le théâtre ou le cirque. Traitant de la « folie du monde » sur le mode de la parade, ces grandes compositions entrecroisent nombre de références visuelles et allégoriques (références à l’Histoire de l’Art, au cinéma, à la mythologie,…). La figure de la Mort y est fréquente, elle côtoie un catalogue de personnages, d’animaux et de créatures hybrides réunis pour jouer la comédie ou le drame sous les feux de la rampe. Les oeuvres – toutes baptisées d’un titre qui évoque les circonstances de leur éclosion – sont porteuses de signes qui renvoient d’un tableau à l’autre.
Accrochées volontairement assez bas, ces Théâtres invitent le regardeur à entrer dans le spectacle qui se joue sous ses yeux et à rejoindre le cortège de Madame Rêve, à se pavaner aux côtés de Laby Bird, à gagner la foule qui se presse autour de La Voyante/Die Hellseherin, à se faufiler parmi les acteurs du Cristal Palace
ou encore à « perdre oeil », comme on perd pied, dans le paysage infini de Play-Back.
Odilon Redon, James Ensor, ou encore Brueghel se cotoyant. Thomas l’Obscur Au sortir de la salle rouge, le visiteur soulève un rideau de velours qui ouvre sur une salle aux murs blancs. Là, il se trouve nimbé d’un ensemble dense de dessins accrochés selon un rythme très particulier, entrecoupé par endroits de tableaux : les dessins, comme une portée musicale, sont disposés sur plusieurs lignes et créent un vaste environnement où les tableaux surgissent comme des taches de couleurs. L’oeuvre présentée ici relève d’une démarche nouvelle de l’artiste : Valérie Favre a, en effet, opéré un copiage minutieux et intégral du roman de Maurice Blanchot,Thomas l’Obscur. Ce travail réalisé sur un grand carnet démantelé contient le texte in extenso ainsi que plusieurs dessins à l’encre et à l’aquarelle qui entrent littéralement dans les mots de Blanchot. Roman en forme de voyage intérieur, Thomas l’Obscur inspire aussi à l’artiste
plusieurs peintures où le thème de la noyade est récurrent. Férue de littérature, Valérie Favre qui se présente elle-même comme une « fausse écrivaine », s’est passionnée pour les textes de l’auteur de L’Écriture du Désastre. Elle livre ici une oeuvre d’art totale qui rencontre et prolonge le texte de Blanchot dans un déploiement, certes, monumental, mais néanmoins intime pour qui sait s’approcher tout près de ces pages manuscrites où affleure la sensibilité de leur copiste. Les Fragments Puis c’est un nouveau choc, on pénètre dans une salle obscurcie.
Série débutée en 2010 et close en 2012, Les Fragments, sortes de maelströms sombres qui ne sont pas sans rappeler les dessins de Victor Hugo, voient ici leur épilogue. Valérie Favre conçoit ces tableaux abstraits de dimensions différentes comme « des morceaux d’univers ». Galaxies, constellations, trous noirs ou voie lactée, Les Fragments renvoient à ce qui nous dépasse, à ce qui se place au-delà : l’infini est malaisé, sinon impossible, à concevoir, plus encore à peindre.
L’artiste s’attaque à cette impossibilité et retient du grand tout quelques fragments. De ses tableaux, elle a fait réaliser de minuscules photographies qu’elle a fait imprimer en grande
quantité. Ces minuscules Fragments ont été soigneusement assemblés les uns avec les autres, cousus ensemble pour former un tapis aux motifs ornementaux, façon de transformer les questionnements qui nous taraudent en un élément domestique – ou magique – un tapis. Les Ghosts
Les Ghosts de Valérie Favre, série entreprise depuis 2012 et toujours en cours, revêtent plusieurs formes. Ceux qu’elle a choisi de réunir ici s’inspirent du tableau de Goya, Le Vol des Sorcières (1797/1798). Dans le tableau du Prado, trois créatures portant des chapeaux pointus portent à bout de bras le corps d’un homme nu et s’envolent dans un ciel noir, tandis qu’au sol un personnage erre à l’aveugle et qu’un autre se désole. Valérie Favre retient cette ascension du corps pour une série de tableaux de petits formats où elle opère diverses variations. Le gisant change d’apparence, de genre, d’état, les « sorcières » se font danseuses, secouristes bienveillantes ou facétieuses. Toutes ensemble, ces petites peintures forment une nuée qui décline tous les tons possibles pour jouer la même scène, telle une multitude de prises enchaînées par un acteur qui seraient vues simultanément. Les Petits Théâtres de la vie
Pratique autonome et rare de l’artiste, le dessin constitue ici un ensemble « à portée de main » ; l’artiste a, en effet, souhaité les présenter différemment des autres oeuvres de l’exposition.
Posés sur des lutrins, les dessins invitent à une contemplation rapprochée, nécessaire tant leurs multiples détails sollicitent l’attention. Combinant écritures, collages, photocopies, dessins dans les marges, les oeuvres graphiques de Valérie Favre se présentent comme une cartographie moult fois retravaillée. On y lit le nom de Kleist, on relève des marques d’antidépresseurs, on rencontre des animaux et des formes géométriques, agencés sur ce qui ressemble à une scène ou une piste de cirque. Une fois encore, Valérie organise à la façon d’un metteur en scène de théâtre de petites scènes peuplées de personnages et de situations improbables, coeur d’un récit qui emprunte, ça et là, des éléments de la réalité et de sa vie personnelle, tout en restant une création résolument fictive.
Un travail original, qui nécessite l’attention du regardeur, où l’ingéniosité côtoie
la diversité, l’éclat et la profondeur des couleurs, un regard aigu et ironique sur le monde.
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A vos agendas
LES VAGAMONDES : festival d’arts & de sciences humaines
4e édition dédiée aux cultures du Sud Fellag / Blitz Theatre Group / Rocío Molina / Dhafer Youssef / Emma Dante Héla Fattoumi & Éric Lamoureux / Lina Majdalanie & Rabih Mroué Amir Reza Koohestani / Zad Moultaka / Cie Massala / Yusuf Sevinçli
Un focus sur la création méditerranéenne du 13 au 23 janvier où se succéderont des propositions de théâtre, danse, musique, humour, mais aussi des événements en entrée libre : rencontres avec les artistes, conférences, expositions… Pour cette 4e édition, La Filature s’associe à de nombreux partenaires et propose des rendez-vous « sciences humaines » dans tout Mulhouse !
Une mer qui relie autant qu’elle sépare. Car la coexistence ne va
jamais de soi. Il faut la vouloir, il faut la construire, l’interroger, en
permanence. C’est bien là que réside la raison d’être de ce festival
qui, à travers les arts et les sciences humaines, nous ouvre vers la
connaissance et la reconnaissance de l’Autre dans sa diversité. Par
les arts, mais aussi la géographie, l’histoire, la géopolitique ou
encore la gastronomie et le vin, nous aborderons beaucoup des
questions de société qui animent notre actualité. Nous entendrons
parler de logique des frontières, de migration des peuples et de
mondialisation. Nous verrons également que nombreux sont les
spectacles qui questionnent – parfois avec beaucoup d’audace – la
place de la femme dans le périmètre méditerranéen.
Pour cette 4e édition, l’équipe de La Filature s’est entourée d’une multitude d’acteurs locaux à l’initiative de l’association « Les Cafés Géographiques ».
Nous oeuvrerons ainsi à ce que ce festival soit une véritable
rencontre de l’Autre. Une fête mêlant allègrement arts visuels, théâtre, cinéma, conférences, débats, danse et performances avec comme ligne de mire cette mer qui nous est donnée en partage. mercredi 13 janv. 19h en entrée libre INAUGURATION DU FESTIVAL + VERNISSAGE DE L’EXPOSITION DE YUSUF SEVINÇLI
mais aussi de l’installation végétale de Sophie Larger & Stéphanie Buttier dans le hall de La Filature RESTAURATION Du mercredi 13 au mercredi 20 janvier, l’association Épices proposera une restauration les soirs de spectacles. Vendredi 22 et samedi 23 janvier, l’association Franco-Amazigh concoctera des spécialités berbères :
restauration, salon de thé et pâtisseries à savourer en musique ; et samedi 23, le couscous traditionnel du Nouvel An berbère. Programme complet à consulter