« Dans le cadre de la situation actuelle de pandémie du Coronavirus, notre responsabilité est d’assurer la sécurité et le bien-être de nos visiteurs et de l’équipe de la Fondation. En conformité avec les directives gouvernementales, nous avons pris la décision de fermer la Fondation Fernet-Branca.
Bien entendu nous ne pouvons pas prédire la durée de la fermeture. Cependant, nous vous tiendrons informés et nous restons à votre disposition par mail pour toute information.
L’histoire de cette distillerie ludovicienne commence à Bâle, le 22 juillet 1907, date à laquelle l’entreprise de construction Broggi et Appiani, « entrepreneurs de travaux en maçonnerie et ciment », dépose une demande d’autorisation de bâtir au maire de Saint-Louis pour le compte de la famille Branca de Milan, selon les plans de l’architecte milanais G. Merlini.
Ce permis est accordé le 25 juillet par le maire Jules Tilger.
Un impressionnant bâtiment d’une longueur de 50 mètres sera construit sur un terrain qui longe la voie ferrée, sis 2 rue du Ballon, où l’activité de distillerie débute en 1909 et produit un digestif aux plantes amères appelé
« Fernet Branca » : du nom de son inventeur, le Dr Fernet, médecin et herboriste, et Branca, propriétaires de la fabrique. Le Dr Fernet a fabriqué une poudre et Bernardino Branca l’a transformée en liqueur.
Dans les caves du bâtiment sont installés des fûts de chêne géants destinés au vieillissement de la liqueur, créés sur place par l’artisan tonnelier strasbourgeois Rodolphe Fruhinsholz.
La distillerie de Saint-Louis produira en moyenne 300 000 bouteilles par an.
Le bâtiment est surplombé d’un aigle en cuivre, emblème de la marque Fernet-Branca, réalisé pour dominer le pavillon de cette entreprise à l’exposition internationale de Milan en 1906.
A la demande de Jean Ueberschlag, député-maire de Saint-Louis, le préfet de la Région Alsace, par arrêté du 04 juillet 1996, a inscrit sur l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, la façade ainsi que l’aigle et le globe qui la surmontent.
Le 22 juillet 2000, la production est définitivement arrêtée à Saint-Louis.
L’idée est née en février 2003, lors de la visite des lieux par Jean Ueberschlag, député-maire, et Jean-Michel Wilmotte, architecte, à l’occasion de la mission confiée par le Conseil Municipal de Saint-Louis au Cabinet Wilmotte chargé de définir un nouveau projet urbain pour Saint-Louis.
Fondation Fernet-Branca
2, rue du Ballon
68300 Saint-Louis/Alsace
T +33 3 89 69 10 77
Président :
Jean Ueberschlag
Directeur :
Pierre-Jean Sugier
Horaires d’ouverture :
du mercredi au dimanche
de 13 heures à 18 heures
Les expositions et foires prévues pour les mois de mars et avril sont reportées pour la plupart au mois de septembre La plupart des sites de musées proposent des visites en ligne.
Voici une « épidémie » qui avait atteint notre région au 16 e siècle
Je fais remonter mon article
Au Musée de l’oeuvre Notre Dame/Arts du Moyen Age de Strasbourg, jusqu’au 24 FÉVRIER 2019
En juillet 1518, des dizaines de personnes se mettent
soudainement à danser dans les rues de Strasbourg. Hommes
ou femmes, rien ne semble pouvoir les arrêter.
Cette « épidémie », qui s’étend sur plusieurs semaines, ébranle
la communauté strasbourgeoise et frappe les esprits au point
d’être consignée par de nombreux chroniqueurs de l’histoire
municipale du XVIe au XXe siècle.
L’exposition se propose, cinq cent ans plus tard, de revenir sur
ce phénomène et d’observer la manière dont le gouvernement
de la ville, le clergé et le corps médical tentèrent d’y remédier.
Reprenant le déroulement des événements, elle s’efforce d’éclairer
le contexte de cet épisode historique particulier et de le mettre
en relation avec d’autres cas de « manies dansantes » qui ont
marqué le Moyen Âge ou les périodes plus récentes.
Basée sur les sources contemporaines de l’évènement, la présentation
tente de distinguer les faits des interprétations abusives
donnant du monde médiéval la vision simpliste d’un monde
traversé par des pulsions irrationnelles et secoué par les crises.
Cette approche de la réalité et de l’imaginaire du Moyen Âge,
portée par une scénographie immersive, s’attache aussi aux
interprétations qui ont pu être données de ces évènements par
les historiens comme par le monde médical jusqu’à la période
contemporaine. Elle questionne en conclusion d’autres
comportements épidémiques de natures diverses et les
processus mentaux ou sociaux qui les sous-tendent.
Commissaire : Cécile Dupeux, conservatrice du Musée de
l’Œuvre Notre-Dame
Collaboration scientifique : Georges Bischoff, professeur émérite
d’Histoire du Moyen Âge et Élisabeth Clementz, maître de
conférences à l’Institut d’Histoire d’Alsace de l’Université de Strasbourg « Il faudrait se souvenir de ces évènements pendant mille ans, et limiter les danses, en particulier les danses obscènes et indécentes… ». C’est en ces termes que l’humaniste et professeur
strasbourgeois Hieronymus Gebwiller décrit quelques années
plus tard le traumatisme créé par l’épisode de danse collective
qui ébranla la ville durant l’été 1518
Le parcours de l’exposition
L’aspect théâtralisé des éléments visuels produit un effet
d’immersion attisant l’imagination des visiteurs.
Ces éléments visuels sont mis en page en étroite relation avec
les textes s’y référant. Les titrages et les cartels guide la curiosité du
public tout en lui fournissant les éléments propices à l’élaboration d’une
prise de conscience réaliste d’un tel phénomène.
La lumière diffuse pour crée des ambiances favorables à la concentration,
ou bien ponctuelle, éclairant faiblement en découpe une gravure
ou un document écrit. Unité 1 : l’épidémie de danse à Strasbourg et les réactions de
l’administration municipale
La description de plusieurs cas de danse compulsive décrits par
les sources permet une première approche du phénomène tel qu’il
fut vécu par les habitants de Strasbourg.
Le rôle joué par la ville et ses corporations face à ce problème
d’ordre et de santé publics, et en particulier l’intervention de
l’humaniste et poète Sébastien Brant, secrétaire de la ville et
membre des conseils, sont développés.
Unité 2 : les épidémies de danse au Moyen Âge, répartition
géographique, représentations et descriptions
La présentation des cas répertoriés de manies dansantes médiévales
montre leur implantation presque exclusive dans une aire couvrant
la région Rhin-Main et la Belgique, espace de chevauchement entre
deux espaces culturels à la lisière du monde germanique et du monde roman.
Les quelques descriptions, constituées par les témoignages de médecins
ayant pu assister à des phénomènes semblables au cours du XVIe siècle,
et les rares représentations d’épisodes proches, en particulier celles
du pèlerinage des épileptiques de Moelenbeek près de Bruxelles,
tentent de préciser les caractéristiques du phénomène.
Unité 3 : la médecine face à l’épidémie
Cette section permet de développer la position complexe des médecins
de Strasbourg, partagés entre le recours à un diagnostic astrologique
ou humoral traditionnel et une aspiration nouvelle à l’observation
et à l’analyse scientifique, telle que la révèlent les nombreuses et
remarquables éditions médicales publiées dans la ville au début
du XVIe siècle. Elle montre la présence presque constante de
la religion dans l’analyse médicale, le corps étant perçu comme
le reflet de l’âme. Les premières tentatives d’explication du
phénomène de danse épidémique, en particulier par le médecin
et alchimiste Paracelse, présent à Strasbourg quelques années
après l’évènement, expriment l’intérêt porté à cet épisode
historique après son déroulement.
Unité 4 : bonne et mauvaise danse au Moyen Âge
La perception de la danse à la fin du Moyen Âge et en particulier
le jugement ambigüe de l’Église sont évoqués. Si cette forme
d’expression pouvait en effet être considérée comme un moyen
de communication avec Dieu pouvant conduire au Salut, elle était
aussi parfois perçue comme instrument du diable, capable de
provoquer une perte de contrôle menant à tous les dérèglements.
Le refus des danses populaires désordonnées tournées en dérision
par les graveurs, la distinction des bons et des mauvais instruments,
la publication de traités ou pamphlets contre les danses permettent
d’expliciter cette position de défiance, qui aide à comprendre la peur
suscitée par les épidémies de danse.
Unité 5 : les saints patrons de la danse
Le recours à la thaumaturgie religieuse par le biais de la prière,
des messes et des pèlerinages (vers l’église Saint-Vit de Saverne
dans le cas strasbourgeois) est attesté dans les épidémies de danse.
C’est saint Guy (15 juin) et saint Jean-Baptiste (24 juin), réputés
comme saints patrons de la danse et des maladies convulsionnaires
depuis l’Antiquité tardive, que l’on invoquait le plus
fréquemment pour obtenir une guérison, mais leur culte prend
le plus souvent la forme de rites thérapeutiques annuels,
destinés tout autant à la prévention qu’à la guérison.
Car s’ils sont réputés soigner le mal, ces saints peuvent
aussi en être la cause, capables par leur malédiction
de provoquer les transes redoutées.
Unité 6 : la manie dansante vue par les siècles suivants
La mention de l’évènement par les chroniques strasbourgeoises
successives sera marquée par des déformations qui s’amplifieront
au cours des siècles et permettront d’interroger dans l’exposition
la notion même de « source historique ». Les outrances de
l’interprétation moderne et contemporaine, basée sur une lecture
du Moyen Âge comme époque irrationnelle ancrée dans les
superstitions, font l’objet d’une mise au point nécessaire dans
l’exposition.
L’intérêt du monde médical au XIXe siècle pour ce qui apparaît
comme une pathologie s’exprime en particulier dans l’analyse
du docteur Jean-Martin Charcot, qui en fit une explication
neurologique reprise par la plupart de ses successeurs.
Les développements au XXe siècle montrent la tendance
à plaquer sur le phénomène les stéréotypes de la médecine
et de la psychologie modernes. Unité 7 : d’autres phénomènes épidémiques dans le monde actuel
Si les mentions ou les représentations de danses convulsives
remontent à l’Antiquité, qui voit dans la possession des corps le signe
de la présence des dieux, les exemples de danses rituelles telles
la Tarentelle encore pratiquées dans le monde contemporain
font partie de la réflexion sur le phénomène.
Partager la publication "1518, LA FIÈVRE DE LA DANSE"
Activiste, militante, engagée, Jane Evelyn Atwood présente ses photographies de la période 1976 – 2010 à la Galerie de la Filature de Mulhouse, jusqu’au 8 avril 2020.
communiqué de la Filature : malheureusement nous ne sommes pas en mesure d’ouvrir notre Galerie dès cette semaine comme nous l’escomptions. En effet l’autorisation d’ouverture des galeries d’exposition exclut dans l’immédiat la catégorie administrative dans laquelle est classée La Filature. Nous restons en attente d’une nouvelle étape du déconfinement, annoncée pour le 22 juin prochain, et ne manquerons pas de vous tenir informés de la réouverture dès qu’elle sera possible, afin de (re)découvrir l’exposition de la photographe Jane Evelyn Atwood.
Commissaire : Emmanuelle Walter
L’exposition consacrée à la photographe américaine Jane Evelyn Atwood rend compte de 35 ans de travail. Organisée autour de séries majeures ( Les prostituées, Les aveugles, Les femmes en prison, Jean-Louis ) et d’une vingtaine de photographies inédites sur différents sujets, les nombreux tirages de l’exposition retracent le parcours d’une photographe sans concession, sensible aux destins de ceux qui ont été rejetés à la périphérie, loin des regards de la société, de par leur condition et drames de la vie. « À travers ses choix personnels, Jane Evelyn Atwood va toujours, semble-t-il, vers la difficulté, comme un défi, se plaçant souvent, au regard des autres, de nous, spectateurs, à la frontière de l’interdit… Toujours une histoire d’enfermement et de frontière, de gens à part, et, à chaque fois, la photographe s’immerge dans son sujet, s’y engage corps et âme, à ses risques et périls, avec un désir de témoigner ou de changer certaines idées reçues sur ces mondes clos et les drames qu’elle rencontre, en révélant à la fois la beauté et la cruauté, la mélancolie et l’ambiguïté. Complice et compatissante, curieuse et concentrée sur ses sujets, saisissant d’instinct le moment qui s’imprime, l’émotion qui s’exprime. Un regard généreux qui transforme la vie en art, le résultat d’un long parcours. » eDuarDo manet Extrait de sa préface pour le livre Photo Poche Extérieur Nuit (Centre national de la photographie, 1998)
Jane Evelyn Atwood est née à New York et vit en France depuis 1971. Son œuvre traduit la profonde intimité qu’elle entretient avec ses sujets pendant de longues périodes. Fascinée par les gens et par la notion de l’exclusion, elle a réussi à pénétrer des mondes que la plupart d’entre nous ignorent ou choisissent d’ignorer. Elle décrit elle-même sa méthode de travail comme obsessionnelle. Elle continue un sujet jusqu’à ce qu’elle sente qu’elle l’a complètement compris ainsi que sa relation à celui-ci.
En 1976, elle achète son premier appareil et commence à photographier les prostituées de la rue des Lombards à Paris. Ce travail qui durera un an, toutes les nuits, deviendra son premier livre. En 1980, elle est récompensée par le premier prix W. Eugene Smith pour réaliser un sujet en profondeur sur les enfants aveugles. Dans les années qui suivent, elle s’engage dans plusieurs projets photographiques au long cours. En 1983, elle réalise un reportage sur la Légion étrangère et suit des soldats à Beyrouth, au Liban et au Tchad durant 18 mois.
Jane Evelyn Atwood Jean Louis En 1987, elle photographie Jean-Louis qu’elle suit durant les quatre mois qui précèdent son décès. C’est la première personne atteinte du sida en Europe qui ait accepté que son histoire soit publiée dans la presse. Malgré les milliers de morts causés par cette maladie, le sida n’avait eu auparavant aucun visage.
En 1989, elle se lance dans un vaste projet sur les femmes incarcérées dans plusieurs pays du monde. Elle parvient à avoir accès aux établissements pénitenciers les plus difficiles, y compris au couloir de la mort aux États-Unis. Ce travail monumental qui reste une référence, dure dix ans et révèle les conditions de détention féminine dans quarante prisons de neuf pays d’Europe, d’Europe de l’Est et des États-Unis. Exposé internationalement, il est publié dans le livre Trop de Peines, Femmes en Prison (Albin Michel, Paris ; Too much time , Phaidon, Londres ; 2000).
Durant quatre ans à partir de l’an 2000, elle documente les victimes des mines antipersonnel au Cambodge, en Angola, au Kosovo, au Mozambique et en Afghanistan. Puis elle passe trois ans à Haïti où elle réalise des photographies de vie quotidienne, une approche en couleur de « street photography », en rupture avec sa pratique habituelle.
Histoires De prostitution, paris 1976-1979 rue des lombards (1976-1977) pigalle people (1978-1979) Cela a commencé comme cela, en 1976, sans expérience et sans idée préconçue. Elle avait cette envie de savoir qui étaient ces hommes, ces femmes et ces transsexuelles qui vendaient leurs corps et qu’elle côtoyait sur les trottoirs de la capitale. Cela faisait quelques années à peine que Jane Evelyn Atwood, pas encore photographe, s’était installée à Paris. Elle a alors acheté son premier vrai appareil et a rencontré Blondine
et les autres prostituées de la rue des Lombards, dans le quartier du futur Beaubourg. Puis plus tard, ce furent Barbara, Miranda, Nouja ou Ingrid, tout ce peuple de travestis et de transsexuelles de Pigalle. Sans le savoir, Jane Evelyn Atwood signait ses premiers reportages et débutait une œuvre poignante et magistrale guidée par la rencontre et la nécessité d’intimité avec l’autre. Histoires de prostitution rassemble les séries Rue des Lombards (réalisée entre 1976 et 1977) et Pigalle People (produite entre 1978 et 1979).
Jean -Louis – Vivre et mourir du sida (Prix World Press Photo, 1987) est emblématique de la démarche de Jane Evelyn Atwood voulant comprendre par elle-même la réalité de cette maladie nouvelle et, plus encore, donner un visage aux malades. Elle a accompagné et photographié jusqu’à sa mort Jean-Louis, première victime de la pandémie en Europe ayant accepté d’être médiatisée. La série, cette fois en couleur, est parue dans Paris Match en 1987.
Extérieur Nuit (1988) Sur une période de dix ans, Jane Evelyn Atwood est entrée dans les écoles d’aveugles de France, d’Australie, d’Israël, du Japon et des États-Unis. La photographe, fascinée par le visuel, s’est passionnée pour ces jeunes aveugles qui ne peuvent pas voir et a souhaité restituer leur évolution dans un monde de voyants. Elle a su créer des portraits poignants, en noir et blanc, de ces aveugles rencontrés tout autour du monde.
Jane Evelyn Atwood a reçu le W. Eugene Smith Award pour ce projet initié dans les années 70 et poursuivi pendant une dizaine d’années.
Trop De peines, femmes en prison (1989-2000) Dès 1989, Jane Evelyn Atwood photographie les femmes incarcérées ; sur une période de près de dix ans, elle est parvenue à obtenir l’accès aux pires prisons du monde, y compris le quartier des condamnés à mort.
Auto-mutilations Pour ce travail, la photographe s’est rendue dans quarante prisons situées dans neuf pays d’Europe et aux États-Unis où le nombre de femmes incarcérées a décuplé depuis les années 80. Cette plongée dans le monde carcéral féminin nous amène à poser un regard neuf sur les femmes, le crime et l’incarcération. Divers Sélection de photographies sur divers sujets qui retracent le parcours de la photographe.
Horaires De la galerie pour cette exposition (entrée libre) du mardi au samedi 14h-18h30 + dimanche 14h-18h + les soirs de spectacles la Filature scène nationale Mulhouse 20 allée nathan katz 68100 mulhouse 03 89 36 28 28 www.lafilature.org
5 RenDez-vous en entrée libre projection en avant-première mardi 3 mars 18h Fragments d’un Parcours : Jane Evelyn Atwood / Autour de Pigalle de Thomas Goupille suivie d’une rencontre avec Jane Evelyn Atwood
club sanDwich jeudi 5 mars 12h30 visite guidée de l’expo + pique-nique tiré du sac sur inscription 03 89 36 28 28 Week-enD De l’art contemporain GranD Est du vendredi 13 au dimanche 15 mars programme sur www.versantest.org apéro photo mercredi 18 mars 19h15 visite guidée de l’expo + apéritif offert sur inscription 03 89 36 28 28
Partager la publication "Jane Evelyn Atwood à la Filature"
Suis-je une travailleuse du clic, malgré moi, pour mon plaisir de retraitée ? Et voilà que certaines de mes interrogations trouvent un début de réponse. A commencer par mon premier GPS, qui m’amusait par ses facéties. En fait malgré sa voix synthétique, ce sont des petites mains qui s’activent derrière. Je m’étais à peine trompée, lorsqu’en plaisantant je disais que :
« Juliette tourne les pages du bottin » car lorsque que je ne suivais pas la direction indiquée par elle, que j’en prenais une autre, elle avait un temps de réaction assez lent, qui me semblait incompatible avec un appareil à la pointe de la technologie. Ou encore mon étonnement lorsque je me promenais outre Rhin, elle prenait l’accent allemand, cela me faisait bien rire, du coup j’en avais rédigé une chronique. Quelle surprise aussi, Il y a quelques jours : j’essaie de publier des photos sur un réseau social, avant d’avoir écrit, le texte pour justifier la publication, dès que le visage de la personne dont je souhaitais parler, apparait, son nom s’affiche !!! Reconnaissance faciale en flagrant délit.
Aussi l’exposition de la Kunsthalle de Mulhouse, retient toute mon attention et excite ma curiosité. Sous la houlette de Aude Launay les artistes, Emanuele Braga & Maddalena Fragnito (MACAO) (IT), Simon Denny (NZ), Elisa Giardina-Papa (IT), Sam Lavigne (US), Silvio Lorusso (IT), Jonas Lund (SE), Michael Mandiberg (US), Eva & Franco Mattes (IT),Lauren McCarthy (US), Julien Prévieux (FR), RYBN.ORG (FR), Sebastian Schmieg (DE), Telekommunisten (CA/DE)… opèrent à la jonction humain-machine et ont pris cette interaction comme sujet de recherche et comme outil de production. L’instant M (documentaire)
L’exposition s’attache à la question du taylorisme algorithmique qui est cette division du travail poussée à l’extrême chez ceux que l’on nomme les « travailleurs du clic » et qui préfigure peut-être la fin du salariat comme organisation dominante du travail. Libellée sous forme de quatre chapitres, les artistes tentent de répondre à ces hypothèses : Travaille-t-on à notre insu ? / A-t-on un algorithme pour supérieur ? / Fait-on office d’intelligence artificielle ? / Pense-t-on une société non centrée sur le travail ?
Alors que de plus en plus de capacités que l’on pensait propres à l’humain sont désormais applicables à des machines, comment penser le travail qui a justement longtemps caractérisé l’humain ? Qu’est-ce que le travail à l’ère numérique mondialisée ? D’un côté, un taylorisme algorithmique grandissant — la division du travail poussée à l’extrême chez les travailleurs du clic —, d’un autre, une illusion machinique persistante — nombre de tâches que l’on pense effectuées par des ordinateurs le sont en fait par des êtres humains de manière plus ou moins dissimulée. À l’heure du management algorithmique, qu’en est-il de la mesure de la performance et des instruments d’optimisation des travailleurs ? Et puis, dans ce que l’on nomme à présent « économie de l’attention », il n’y a pas que les travailleurs qui travaillent : toute activité en ligne est susceptible d’ajouter à l’accumulation de capital des géants du net par sa marchandisation. Toute donnée est monétisable. Tout internaute est générateur de profit. Être en ligne = travailler ?
Chapitre 1 Travaille-t-on à notre insu ? Si l’exposition Algotaylorism s’ouvre sur cette vidéo de Julien prévieux, c’est que cette dernière en introduit parfaitement le propos. Chaque seconde que nous passons en ligne fait de nous un producteur de ces données dont se repaissent tant et tant d’entreprises et, bien souvent, un travailleur à notre insu. De nombreux logiciels et applications sont conçus pour extraire de la valeur de leur utilisateur quand c’est justement celui-ci qui croit les utiliser à son escient
Chapitre 2 A-t-on un algorithme pour supérieur ? À l’automne 2018, à l’occasion de la publication d’un article des chercheurs Kate Crawford et Vladan Joler1, le monde apprenait, éberlué, le dépôt par Amazon, deux ans plus tôt, d’un brevet décrivant « une cage métallique destinée au travailleur, équipée de différents accessoires cybernétiques, qui peut être déplacée dans un entrepôt par le même système motorisé qui déplace les étagères remplies de marchandises ».
Ces cages étaient destinées à introduire des travailleurs humains dans la zone d’exclusion humaine de ses entrepôts. Car, si l’entreprise la plus puissante au monde2 utilise une main d’œuvre abondamment robotique, notamment pour le traitement de ses expéditions, elle continue de faire appel à des êtres humains pour certaines tâches, bien que ces derniers ne soient pas corvéables à merci comme ses betty bots qui, hormis pour recharger leur batterie, ne s’arrêtent jamais de travailler. Dans les entrepôts, c’est l’organisation algorithmique qui prévaut, les objets étant classés et agencés selon un ordre destiné à optimiser les allées et venues des robots qui vont et viennent chargés d’étagères emplies de marchandises. La cage, de dimensions équivalentes à celles d’une étagère, aurait été transportée de la même manière, soulevée puis acheminée par ces infatigables travailleurs mécaniques, en un paroxysme de la soumission du travailleur humain à la régie algorithmique. Simon Denny en présente ici le brevet, sculpté à l’imprimante 3D pour en faire ressortir les éléments saillants, au sens propre comme figuré.
Chapitre 3 Fait-on office d’intelligence artificielle ? Cleaning Emotional Data est la troisième d’une série d’œuvres d’ Elisa Giardina-papa explorant la manière dont le travail et le soin sont restructurés par les économies numériques et l’automatisation. Après Technologies of Care (2016) et Labor of Sleep (2017), cette nouvelle installation vidéo se concentre sur l’infrastructure mondiale des micro-travailleurs qui étiquettent, catégorisent, annotent et valident de grandes quantités de données visuelles utilisées pour former les algorithmes de reconnaissance des émotions. Au cours de l’hiver 2019, alors qu’elle faisait des recherches sur les systèmes d’informatique affective depuis palerme, Giardina-papa a travaillé à distance pour plusieurs entreprises nord-américaines qui disent mettre « l’humain dans la boucle ». parmi les tâches qu’elle a exécutées, on peut citer la taxinomie d’émotions, l’annotation d’expressions faciales et l’enregistrement de son propre visage pour animer des personnages en trois dimensions.
Certaines des vidéos dans lesquelles elle a enregistré ses expressions émotionnelles ont été rejetées car ses expressions faciales ne correspondaient pas parfaitement aux catégories affectives « standardisées ». il lui a été impossible de savoir si ce rejet provenait d’un algorithme ou d’un autre travailleur à distance qui aurait pu interpréter ses expressions différemment en raison de son propre contexte culturel. Cleaning Emotional Datadocumente ces micro-tâches tout en retraçant l’histoire des méthodes et des théories psychologiques qui sous-tendent la schématisation des expressions faciales.
Chapitre 4 Pense-t-on une société non centrée sur le travail ? MACAo, centre d’arts, de culture et de recherche, a vu le jour à Milan lors d’un soulèvement national qui a mené à l’occupation d’espaces publics dans une lutte pour une meilleure accessibilité de la culture. L’espace, auto-géré, a agrégé en son sein une vaste communauté d’artistes et de techniciens du monde de l’art dans une réflexion sur le rôle social de ce type de travail. Fin 2016 est née CommonCoin, sa monnaie locale intégrant un revenu de base pour les membres de la communauté. Le schéma économique de MACAo, privilégiant la collaboration à la compétition, diffère du schéma traditionnel : vous ne gagnerez pas plus en travaillant plus. en témoignant de l’expérience de mise en commun des richesses conduite par MACAo,
VALEUR/S expose l’argent, littéralement et conceptuellement. Au sein de MACAo, c’est la valeur sociale de l’activité qui est repensée, le montant de rémunération de chaque tâche étant discuté lors des assemblées dans un processus d’attribution non conventionnelle de valeur aux actions. ici, les mentions sur les liasses de billets réfèrent aux tâches effectuées par les membres de la communauté. Mais, même si l’argent occupe une place centrale dans cette pièce ainsi que dans nos vies divisées en milliers de tâches, pour Maddalena Fragnito et emanuele braga, la question est de savoir s’il est possible de donner d’autres significations au travail dans le cadre de pratiques collectives durables visant à « défaire le capitalisme ».
wEEK-EnD DE L’ARt COntEMPORAIn gRAnD ESt vendredi 13, samedi 14 et dimanche 15 mars à LA KunSthALLE Vendredi 13, samedi 14 et dimanche 15 mars R 14:00 – 18:00 ATELIER BRODER LA MACHINE entrée libre Dans la continuité des ateliers publics menés en 2019, l’artiste tanja boukal vous invite à broder dans la convivialité une série de canevas aux motifs de machines textiles imprimés à partir d’images d’archives. néophytes, amateurs ou brodeurs aguerris, vous êtes les bienvenus pour participer à cet atelier qui est à la fois un lieu de rencontre et de travail, ouvert à tous ! En partenariat avec les Archives Municipales de la Ville de Mulhouse et la société DMC. L’atelier sera déployé jusqu’à mi-avril à Mulhouse : Au fil de la Mercerie, Musée electropolis, bar Le Greffier, Archives Municipales , Restaurant Universitaire de la Fonderie … Samedi 14 mars VISITE GUIDÉE DE L’EXPOSITION R 14:00 Entrée libre RENCONTRE DANS L’ESPACE D’EXPOSITION R 16:00 Avec RYbn.oRG et Aude Launay, curatrice Entrée libre Dimanche 15 mars VISITE GUIDÉE DE L’EXPOSITION 14:30 Entrée libre REVUE M U S C L E R 16:00 présentation de la revue de poésie de Laura Vazquez, auteure et éditrice Entrée libre
UN APRÈS-MIDI « CRYPTO » À LA KUNSTHALLE Dimanche 19 avril CONFÉRENCE14:00 Les contes de la crypto, initiation aux blockchains et à leurs usages artistiques par Aude Launay, curatrice de l’exposition entrée libre entre le marché de l’art qui s’en empare pour marchandiser ce qui jusque-là lui échappait, un artiste qui permet à ses collectionneurs d’acheter des parts d’influence sur lui et un centre d’art sans juridiction d’origine, les blockchains se dévoilent comme un outil artistique aussi subversif que nécessaire. Mais de quoi s’agit-il au fond ?
La Kunsthalle Mulhouse Centre d’art contemporain La Fonderie
Partager la publication "Algotaylorism à la Kunsthalle de Mulhouse"
Hans Hartung : « Je déguste la nature et la vie comme chacun, ça n’a rien à faire avec ma position picturale »
À l’occasion de sa réouverture après une année de travaux de rénovation, le Musée d’Art Moderne de Paris présente Hans Hartung, La fabrique du geste.
L’exposition se termine le 1er mars 2020. La dernière rétrospective dans un musée français datant de 1969, il était important de redonner à Hans Hartung (1904-1989) toute la visibilité qu’il mérite. L’exposition porte un nouveau regard sur l’ensemble de l’œuvre de cet artiste majeur du XXe siècle et sur son rôle essentiel dans l’histoire de l’art. Hans Hartung fut un précurseur de l’une des inventions artistiques les plus marquantes de son temps : l’abstraction. Acteur d’un siècle de peinture, qu’il traverse avec une soif de liberté à la mesure des phénomènes qui viennent l’entraver – de la montée du fascisme dans son pays d’origine l’Allemagne à la précarité de l’après-guerre en France et à ses conséquences physiques et morales – jamais, il ne cessera de peindre. Le parcours de la rétrospective comprend une sélection resserrée d’environ trois cent œuvres, provenant de collections publiques et particulières françaises et internationales et pour une grande part de la Fondation Hartung-Bergman.
Cet hommage fait suite à l’acquisition du musée en 2017 d’un ensemble de quatre œuvres de l’artiste. L’exposition donne à voir la grande diversité des supports, la richesse des innovations techniques et la panoplie d’outils utilisés durant six décennies de production. Hans Hartung, qui place l’expérimentation au cœur de son travail, incarne aussi une modernité sans compromis, à la dimension conceptuelle.
Les essais sur la couleur et le format érigés en méthode rigoureuse d’atelier, le cadrage, la photographie, l’agrandissement, la répétition, et plus surprenant encore, la reproduction à l’identique de nombre de ses œuvres, sont autant de recherches menées sur l’original et l’authentique, qui résonnent aujourd’hui dans toute leur contemporanéité. Hans Hartung a ouvert la voie à certains de ses congénères, à l’instar de Pierre Soulages qui a toujours admis cette filiation.
L’exposition est construite comme une succession de séquences chronologiques sous la forme de quatre sections principales. Composée non seulement de peintures, elle comprend également des photographies, témoignant de cette pratique qui a accompagné l’ensemble de sa recherche artistique. Des ensembles d’œuvres graphiques, des éditions limitées illustrées, des expérimentations sur céramique, ainsi qu’une sélection de galets peints complètent la présentation et retracent son itinéraire singulier. Afin de mettre en relief le parcours d’Hans Hartung, en même temps que son rapport à l’histoire de son temps, cette exposition propose des documents d’archives, livres, correspondances, carnets, esquisses, journal de jeunesse, catalogues, cartons d’invitations, affiches, photographies, films documentaires, etc. Figure incontournable de l’abstraction au XXe siècle, Hans Hartung ne se laisse pas pour autant circonscrire dans ce rôle de précurseur historique, car sa vision d’un art tourné vers l’avenir, vers le progrès humain et technologique, vient nous questionner aujourd’hui encore. Le parcours met en tension et en dialogue ces deux aspects complémentaires qui constituent le fil rouge de cette exposition.
Un catalogue comprenant une quinzaine d’essais et une anthologie de textes est publié aux Éditions Paris Musées. podcast France culture
Informations pratiques Musée d’Art Moderne de Paris 11 Avenue du Président Wilson 75116 Paris Tél. 01 53 67 40 00 www.mam.paris.fr Ouvert du mardi au dimanche De 10h à 18h Nocturne le jeudi jusqu’à 22h
Partager la publication "Hans Hartung, La fabrique du geste"
Jusqu’au 15 mars 2020 à l’Espace d’Art Contemporain André Malraux de Colmar.
(vidéo à visionner) Entre rêve et cauchemar l’artiste Sarah Jérôme, ancienne danseuse a exposé aux quatre coins du monde, de Paris à Bali en passant par la Suisse… Avec à la Santé du Serpent, elle investit l‘espace d’art contemporain André Malraux.
« Ce titre est d’abord un texte de René Char, mais aussi le nom d’une nouvelle d’Andrée Jérôme, ma mère. Une loi veut qu’un serpent se glisse au cœur de toute chose, écrit-elle. Il y a dans ses mots comme une résonance, un effet miroir entre son verbe et mes images », révèle Sarah Jérôme.
Entre l’âge de sept ans et vingt ans, Sarah Jérôme exerce la danse quotidiennement. Au fil des étirements, des enchaînements et des efforts, elle parvient à sculpter et à modeler son corps. La danse classique appelle à un dressage du corps, une discipline que l’artiste a peu à peu refusée et abandonnée. En 2008, elle décide de se plonger dans le dessin, la peinture et la sculpture. Le corps constitue la colonne vertébrale de sa réflexion plastique. Des ramifications s’opèrent vers d’autres territoires comme le temps, la mémoire, le paysage et la matière. Ses œuvres génèrent des impressions contradictoires. Si la danse représente une source de jouissance et de beauté, elle renferme aussi la douleur, la privation et la soumission. La grâce y est synonyme de torture.
À travers différentes séries de dessins, de peintures et de sculptures, l’artiste tente d’exprimer ce cheminement, elle montre les corps – sa thématique fétiche – ainsi que les rapports dualistes entre hommes et femmes dans de poreuses frontières entre le bien et le mal. Souvent, ses œuvres génèrent des impressions contradictoires, tout comme la danse représente à la fois une source de beauté et une source de douleurs, entre la séduction et la répulsion. Elle met en exergue, les paradoxes, les contradictions, les clichés et même les incompréhensions humaines, les conflits nés de problèmes d’interprétation. La santé du serpent, qu’en est-il de la pomme croquée, du ver dans la pomme et du prétendu paradis et de cette manière d’y échapper et rester prisonnier ? Quelle est la signification de l’Éden, quel est le sens du bien et du mal, est-ce que c’est binaire, est-ce que c’est manichéen ? Cette exposition est organisée comme différents mondes.
Au rez-de-chaussée le monde du dessous, l’installation Champ de Pensées, présente comme des têtes germées en grès noir, qui auraient été découvertes après une fouille archéologique, une civilisation oubliée, têtes recouvertes d’excroissances, la nature ayant repris ses droits. Derrière il y a un triptyque « Fossile » ou Dream d’après la fiche technique, qui vient étayer la notion de corps paysage, en fragments, une peinture à l’huile sur papier calque, technique personnelle de l’artiste qui lui donne la possibilité de travailler la chair dans la transparence et la fragilité, de manière à pouvoir voir les éléments en transparence sous la peau. Dans la 2e partie du bas, c’est le monde de la mise en scène, on entre dans l’univers de Pina Bausch avec des images tirées de deux pièces , Kontakthof et les oeillets.
A l’étage, telle une chambre, pour la sphère privée, un volet qui serait plutôt celui de l’intériorité. Un Livre en porcelaine plein de stigmates de temps ouvert raconte le corps intime, ses blessures et ses mutations.
Infos pratiques : Espace d’art contemporain André Malraux 4, rue Rapp — 68000 Colmar 03 89 20 67 59 — 03 89 24 28 73 Horaires : du mardi au dimanche de 14h à 18h sauf le jeudi de 12h à 17h — Entrée libre Site internet Un concert-performance avec Sarah Jérôme et la chanteuse-scénographe Ruppert Pupkin sera proposé le 5 mars à 19 h au Grillen à Colmar. Entrée : 5 €.
Partager la publication "Sarah Jérôme, à la Santé du Serpent"
Jusqu’au 22 juin 2020 commissaire : Frédérique Goerig-Hergott, conservatrice en chef, collections d’art moderne et contemporain au Musée Unterlinden
Conçue comme une rencontre entre art et science, l’exposition De mains et d’yeux est née d’une collaboration entre leMusée Unterlinden et le programme scientifique « Création, cognition, société » de l’Université Paris Sciences et Lettres, développée dans le cadre de la #restauration du Retable d’Issenheim entreprise depuis 2018.
L’équipe de chercheurs étudie la manière dont le regard des visiteurs est guidé par les formes, les couleurs et la lumière des panneaux peints de Grünewald et dans quelle mesure ce regard est modifié par les changements résultant de sa restauration. Pour enregistrer les mouvements des yeux et donc l’attention visuelle, les chercheurs utilisent un ensemble de techniques dites eye tracking (oculométrie en français) et un outil, l’eye tracker (oculomètre). Celui-ci enregistre les mouvements des yeux capturés par des caméras et envoie ces informations à un logiciel qui en extrait avec une grande précision les tracés. Il permet ainsi de connaître la manière dont nous regardons un tableau et de repérer les éléments qui accrochent le plus fortement le regard.
Dans ce contexte, l’exposition du travail de Michel Paysant constitue l’indispensable pendant artistique à cette démarche scientifique. Son titre, De mains et d’yeux, est à prendre à la lettre, les dessins ayant été dessinés par les yeux de l’artiste grâce à cet outil, l’oculomètre. Les mouvements des yeux de l’artiste, tel un crayon, tracent les lignes et les formes des œuvres. L’enregistrement de son regard porté sur les panneaux du Retable d’Issenheim et sur la tapisserie Guernica, ou plus précisément la transcription des lignes des déplacements et des points de fixation de ses yeux face à l’œuvre, donne naissance à une nouvelle interprétation de l’œuvre originale.
1er lieu de l’exposition : la tribune, 1er étage du Cloître L’atelier de [M] DENKRAUM
Inspirée librement du Retable d’Issenheim, de la vie de Grünewald et de l’inventaire après décès de ses biens établit en octobre 1528, cette installation propose une version contemporaine de l’atelier du Maître. L’installation évoque l’univers de l’atelier, l’envers fictionnel et théâtralisé de sa peinture, les coulisses de sa pensée. La définition du lieu Lieu de création et de vie, l’installation rappelle autant un cabinet de dessin qu’une cellule de moine, une chambre de dispensaire ou un jardin de méditation. Au sein de la tribune de la chapelle, l’aménagement de l’installation en fait un endroit où l’on peut s’immerger, se ressourcer, être à l’écoute. Halte, étape ou simple respiration dans la visite du musée, il fournit au visiteur un havre de paix, un lieu d’accueil et d’hospitalité à l’image de la mémoire des lieux. L’évocation, l’atmosphère Exposée en regard du Retable d’Issenheim, l’installation crée une atmosphère étrange de tourment et de quiétude, de feu et de froid, de sang et de larmes, d’interrogations et d’espoir. Le lieu imaginé par l’artiste est un espace « en suspens » qui ouvre sur l’infini des interprétations.
Redonner à voir Les objets créés, qu’ils soient liés au dessin, au songe, à la rêverie, au corps, à la botanique et à l’art du jardinage, sont mis en espace afin de permettre aux visiteurs de se recueillir et de leur fournir un point de vue différent, intérieur et sensible, sur le chef-d’œuvre de Grünewald.
Œuvres exposées dans la tribune Le grand dessin (Das große Bild) Impression numérique sur papier Hahne Mühle Ce dessin monumental est extrait des Carnets des Regards de Michel Paysant. La ligne est générée par le mouvement des yeux enregistré sur un détail du Retable d’Issenheim : les mains de la Vierge dans le panneau de la Crucifixion.
L’atelier [M] Le jardin des larmes de verre en goutte de rosée (Der Garten der Glass Tränen)
Produite au Centre International d’art verrier (CIAV) de Meisenthal, cette œuvre est constituée de deux séries : – 189 mains en verre réalisées au chalumeau reproduisant, en langage des signes, un court extrait des notes de Michel Paysant sur le Retable d’Issenheim :
« Ici tout n’est que dialogues de mains et d’yeux Passants Comme il est profond de laisser une trace sur le sable et sur l’eau De remuer ciel et terre Comme en un souffle Ligne d’erre et de larmes Pour dire l’indicible Dessiner l’invisible » – 28 mains, interprétation des mains dans les panneaux de Grünewald.
La maison-inventaire Un « inventaire » (Das Inventar) de divers objets « réversibles » : outils et accessoires d’artiste-botaniste inspirés librement de l’inventaire après décès de Grünewald. À la fois fictionnels et fonctionnels, ces objets évoquent tous l’art de peindre et l’art de cultiver son jardin.
2e lieu de l’exposition : la galerie
Michel Paysant Voir la guerre les yeux retournés (Guernica revisited) Michel Paysant a réalisé des dessins en eye tracking sur une autre œuvre majeure de la collection du musée : la tapisserie Guernica réalisée par Jacqueline de la Baume-Dürrbach en 1976 d’après le chef-d’œuvre de Picasso. Tout comme l’étude sur Grünewald, il s’agit ici d’une copie du regard, une production immatérielle qui a pour but de « redonner à voir » et de questionner l’art par la science.
À la différence des dessins créés à partir du Retable d’Issenheim, il s’agit ici d’un regard qui crée à partir de deux autres : celui porté par Jacqueline de la BaumeDürrbach sur l’œuvre de Picasso et celui de l’œuvre originale gardée en mémoire par Michel Paysant. Pourtant ces deux modèles, celui de la tapisserie et celui de la mémoire, ne se combattent pas, mais se fondent l’un dans l’autre. En témoigne le fait que l’œil dessine en une ligne continue, comme en un souffle.
Opening night 13.03.20
Concert – Performance musicale « Guernica » par Nocto
En réponse au film de l’artiste Michel Paysant, Guernica, Nocto propose une pièce ambiante faite de lignes et d’improvisations. Horaire 20h Entrée libre Lieu Piscine – Entrée par le bâtiment des Bains Cette performance musicale est aussi proposée 26/04 à 15h – Tarif : Accès libre pour les visiteurs du musée
Discussion avec un médiateur autour des dessins de Guernica de Michel Paysant
Horaires de 19h à 22h Entrée libre Lieu salle d’exposition, Ackerhof – Entrée par le bâtiment des Bains
Partager la publication "De mains et d’yeux au musée Unterlinden"
« Le choix de dessiner est éthique maintenant, le dessin a quelque chose d’essentiel, l’affirmation de l’humanité, il n’y a pas de distance entre la pensée et la main, c’est l’homme, c’est l’humanité. Depuis 50 ans mes images ne font qu’interroger l’homme et sa relation avec ce qui l’entoure, les autres, l’histoire, la politique, la pratique des Pietà, interroger l’homme et les violences qu’on lui fait« . EPE
L’artiste Ernest Pignon- Ernest a investi la Grande chapelle du Palais des Papes jusqu’au 29 février 2020. L’exposition, baptisée « Ecce Homo » retrace le parcours de l’artiste et explique sa démarche artistique, intellectuelle, politique depuis plus de 60 ans, par un panel d’œuvres provenant de la galerie Lelong & Co de Paris, de collections privées, du musée de Montauban et des témoignages photographiques de son travail prolifique dans les rues du monde entier. Près de 400 œuvres – photographies, collages, des dessins au fusain, pierre, encre noire et gomme, des documents – sont ainsi exposés évoquant ses interventions de 1966 à nos jours. Ernest Pignon-Ernest est considéré comme l’initiateur du « street art » de par les images grand formats à la pierre noire, au fusain, les collages qu’il réalise dans les rues des villes et sur les murs des cités depuis près de 60 ans. C’est en voyant Guernica de Picasso, qu’il décide de devenir artiste. Il explique qu’il expose dans la rue, parce que c’est tout simplement la plus grande galerie du monde. Il voyage, se nourrit de rencontres, réalise des décors pour le théâtre, élabore des revues, réalise des portraits, des affiches, des collages…des milliers d’œuvres, toujours dans un esprit d’engagement politique et social, de défenseur de grandes causes, en gardien de la mémoire et de l’histoire collective.
En janvier 2020 il a l’intention de créer « in situ » une œuvre pour Avignon dans l’espace du trésor bas du Palais des Papes. (La personne qui a commenté la visite guidée, dit qu’elle ignorait ce qu’il en est du projet.) Depuis 2011, date à laquelle j’ai vu « les Mystiques du Carmel » qu’il a exposé Musée d’art et d’histoire de Saint-Denis(voir sur mon blog) il me tardait de voir l’ensemble de ses oeuvres exposées à Avignon. L’exposition, dans l’immense nef de la grande chapelle du Palais, d’une dimension très solennelle, le lieu où il appose ses sérigraphies a une importance primordiale, l’harmonie entre certaines oeuvres et l’architecture est évidente. L’exposition faite de dessins et sérigraphies, de photographies in situ est trop dense. Une présentation plus dépouillée aurait été plus forte, nous aurait interpellée encore davantage. Podcast
Le ton est donné dès l’entrée, face à ces linceuls suspendus de la prison Saint-Paul à Lyon et transposés ici sur ces murs du XIV siècle.
En 1971, il pose ainsi sur une dizaine de marches du Sacré-Cœur des silhouettes de gisants, hommage aux fusillés de la Commune contre la mémoire desquels cette architecture pâtissière fut érigée. Plus tard la fusillade du métro Charonne
Trois ans plus tard, pour protester contre le jumelage de Nice avec Le Cap, dans une Afrique du Sud alors sous le joug de l’apartheid, il placarde dans les rues de la ville le dessin d’une famille noire parquée derrière des barbelés.
Depuis, il n’a cessé de plaider, à coups d’images, pour le droit à l’IVG ou contre le mur de séparation entre Israël et la Palestine.
Mahmoud Darwich dont le portrait est apposé à Ramallah, à Bethléem, à Naplouse, sur le mur de séparation et aux checkpoints
Depuis, ses sérigraphies grandeur nature façon suaires ont tapissé les rues de Paris, Nice, Naples ou Ramallah. Hommage d’un artiste à un poète, afin de ramener à sa place, celui qui en a été mis hors, par les ignominies. Sa méthode consiste à faire se rencontrer un lieu et un thème.
C’est de nuit qu’il colle, sans jamais d’autorisation – il a été arrêté plus de cinquante fois –, repérant de jour, calculant la pose au millimètre près, sa méthode qui consiste à faire se rencontrer un lieu et un thème. A Naples qu’ il a arpentée de jour comme de nuit, sur les pas de Virgile, du Caravage et d’Erri De Luca. Il lui a fallu trois mois et quatre versions déchirées avant de trouver son Pasolini assassiné, portant son propre cadavre « AutoPietà« , image ô combien saisissante, que l’on retrouve « face au mur » de la Chapelle.
L’artiste indique que le siècle de Vivant Denon est loin, que le XIX e est passé par là. La femme de face, exhibe son sexe, mais détourne la tête, se cache les yeux, la culpabilité a fait son ouvrage, dessin fascinant.
C’est encore à Naples qu’Ernest Pignon-Ernest a collé durant la nuit une citation de la mort de la vierge du Caravage. Il n’a gardé que le visage, le buste, la main droite et le bras gauche de la vierge. Le lendemain matin, deux vieilles femmes, deux vendeuses de cigarettes et autres babioles, toujours assises derrière une petite table dans la rue, se sont mises à veiller cette image.
Quelques années plus tard,Ernest Pignon-Ernest est revenu à Naples. Les deux vielles napolitaines n’étaient plus là. A partir d’une photo, il a redessiné Antonietta, l’une deux, et a collé ce dessin à l’endroit où elle avait tenu, avec son amie, son petit commerce. Toute la rue a été bouleversée par cette image et voulait la protéger par une vitre. Ernest Pignon-Ernest a refusé mais a promis de revenir dessiner Antonietta si le dessin était détruit. Et c’est ce qu’il a fait en 2011.
Les immigrés, la guerre à Haïti, les poètes, (Neruda, Rimbaud, Maïakovsky) les humiliés les opprimés, les injustices, tout s’élabore dans la perspective des relations et interactions avec les lieux, soigneusement repérés, auxquels ils sont destinés. Son humanité transperce et nous interpelle et nous laisse pensif et ému.
vue de l’exposition Ernest Pignon Ernest Ecce Homo