L’Orient de
Rembrandt

Rembrandt Harmensz. van Rijn  –
Brustbild eines Mannes in orientalischer Kleidung

Jusqu’au 14.02.2021, au Kunstmuseum Basel | Hauptbau
Commissaire : Bodo Brinkmann, Gabriel Dette
Commissaire invité : Gary Schwartz

Rembrandt Harmensz. van Rijn; Erster Orientalenkopf; 1635 Platte: 15.1 x 12.5 cm
Blatt: 24 x 17.6 cm; Radierung, Kaltnadel; Inv. 2019.168

 

La curiosité de Rembrandt Harmensz. van Rijn pour tout ce qui est étranger et son insatiable appétit de collectionneur sont déjà légendaires de son vivant. Artiste, collectionneur et citoyen, il entre en contact avec des oeuvres d’art, des objets d’usage courant et des individus de toutes les parties du monde connu à l’époque et s’en inspire pour son oeuvre.

L’exposition L’Orient de Rembrandt présentée à l’automne au Kunstmuseum Basel | Neubau explore ce monde des idées au travers d’une sélection d’oeuvres du peintre hollandais et de ses collègues artistes.

Rembrandt (1606-1669)
et ses contemporains n’ont eu de cesse de peindre des objets de pays lointains : turbans et tapis, sabres et soieries. Leurs oeuvres d’art témoignent de la première mondialisation et illustrent l’influence de cultures étrangères dans les Pays-Bas du XVIIe siècle.
La soif de connaissance, le désir de collectionner et la fierté de posséder marquent cette époque significative pour l’histoire de l’art et constituent une source d’inspiration pour les peintres dans la réalisation de scènes d’histoire, de portraits et de natures mortes d’un genre nouveau. Toutefois, comme nous le constatons aujourd’hui, le revers de cette appropriation du monde demeurait absent des représentations ; le déséquilibre des forces entre les cultures se
traduisant également par l’esclavage, la violence, l’exploitation et les guerres commerciales.

L’exposition présente un peu plus de 120 oeuvres au total, parmi lesquelles figurent aux côtés de peintures nombre de gravures, dessins, miniatures, cartes et ouvrages. Parmi ces oeuvres, une centaine sont des prêts consentis par d’importantes collections muséales et particulières du monde entier


Les Sources

Une autre source importante se trouve au sein même de la collection du Kunstmuseum Basel qui possède un témoignage de jeunesse majeur de la confrontation de Rembrandt avec le thème de l’exposition : David présentant la tête de Goliath au roi Saül, peinture réalisée en 1627.

Rembrandt Harmensz van Rijn (1606–1669); David übergibt Goliaths Haupt dem König Saul; 1627 27.4 x 39.7 cm; Öl auf Eichenholz

En outre, le Kupferstichkabinett (cabinet des arts graphiques) dispose d’un fonds de l’oeuvre gravé de Rembrandt remarquable tant sur le plan qualitatif que quantitatif. La généreuse donation d’un ensemble de 150 feuilles consentie par le collectionneur bernois Eberhard W. Kornfeld a contribué à l’élargir considérablement ces dernières années. Plus d’une douzaine de ces feuilles sont visibles au sein de L’Orient de Rembrandt.
Une présentation d’Ariane Mensger se tenant simultanément à l’entresol du Hauptbau montre au public d’autres pans de cet exceptionnel ensemble de la collection.

Le parcours de l’exposition

Avec turban et robe en soie :
l’Orient à domicile

L’expansion du commerce vers d’autres continents n’a pas seulement
engendré une très grande prospérité pour une partie de la bourgeoisie
de la République néerlandaise ; l’augmentation des connaissances et la
disponibilité des marchandises ont également assuré la présence, intellectuellement par l’érudition ou physiquement par les objets, de pays
éloignés de l’Europe. La présence de l’exotique a également influencé les
habitudes et la mode aux Pays-Bas – ainsi que la peinture. Les motifs des
cultures étrangères ont trouvé leur place dans les scènes de genre, les
portraits ou les portraits historiés. Ils ont servi de symboles de statut
social, évoquant la position et la prospérité financière de leur propriétaire.

Les voies de la prospérité.
Commerce et guerre

L’intérêt pour les pays lointains et la disponibilité d’objets exotiques s’explique
par la circulation mondiale des marchandises que les Pays-Bas ont
développée au XVIIe siècle. Les représentations picturales consacrées au
thème du commerce n’étaient pour la plupart ni réalistes ni documentaires ;
elles ne prétendaient pas rendre avec précision une scène quotidienne,
ni présenter un événement historique de manière factuelle. Elles répondaient
davantage à des préoccupations représentatives ou décoratives.
Ceci s’appliquait même à la figuration des conflits armés en cours – la face
cachée du commerce mondial.

La connaissance du monde.
Collectionner et rechercher
Jan van der Heyden; Zimmerecke mit Raritäten; 1712

L’expansion du commerce sur tous les continents a entraîné un élargissement des connaissances et du savoir dans le monde. Une multitude de livres et de cartes décrivent et révèlent des terres lointaines. Amsterdam devient le centre de l’édition. Les portraits d’érudits figurés entourés de
livres soulignent un idéal d’éducation, qui forme un contrepoint à la passion pour le négoce. Des objets tels que des coquillages exotiques deviennent
des pièces de collection convoitées par la bourgeoisie pour ses cabinets de curiosités. Les natures mortes et les peintures d’intérieurs mettent en évidence l’exotisme et le luxe.

Le rotin. Une étude de cas

Les épices orientales et la porcelaine chinoise importées ne sont pas
les seules à jouir d’une grande popularité aux Pays-Bas : l’inventaire d’un
magasin d’Amsterdam datant de 1664 recense un approvisionnement de
pas moins de 1 700 baguettes en rotin ! Le bois léger et robuste de ce
palmier très répandu en Indonésie (qui constituait en ce temps-là les
Indes orientales néerlandaises) était idéal pour fabriquer des cannes.
Mais l’armée l’a aussi utilisé : le commandant habillé à la dernière mode
sur le tableau de Simon Kick exposé ici présente fièrement son bâton
d’officier en rotin brûlé. Des objets similaires sont encore fabriqués
aujourd’hui pour être utilisés dans diverses disciplines d’arts martiaux.

Le paysage de la Bible
Le jeune Rembrandt et ses modèles
Rembrandt, Judah et Tamar

Rembrandt et ses collègues peintres plaçaient leurs représentations des épisodes de l’Ancien ou du Nouveau Testament dans un paysage qui, avec ses
rochers et ses collines gris-brun, semblait en tout cas différent des plaines
verdoyantes du nord des Pays-Bas. Ce décor était peuplé d’hommes
portant des turbans et de femmes souvent magnifiquement habillées de
costumes colorés. Ici aussi, l’imagination était au pouvoir, bien que les
couleurs et les motifs, notamment des soieries, aient pu correspondre
aux modèles réels des tissus orientaux du XVIIe siècle.

La lumière dans le temple.
Rembrandt à Amsterdam et ses suiveurs

Dans les années 1630, Rembrandt et d’autres peintres ont souvent choisi
des thèmes bibliques placés dans un intérieur peu éclairé, qu’il s’agisse
de l’étable de Bethléem ou d’un temple. Là aussi, ils ont utilisé des motifs
exotiques tels que des turbans, des vêtements ou des épées pour rendre
la scène plus authentique.

Rembrandt – Daniel and Cyrus before the Idol Bel

Dans ces oeuvres, l’Orient est rarement le
théâtre d’une splendeur imaginaire, mais un lieu mystique : la sagesse de
Dieu s’y révèle au peuple d’Israël, ou bien le mystère chrétien du Salut
s’accomplit en son sein. Sous les sombres voûtes, Rembrandt déploie
un magistral jeu de lumières avec des rayons réfléchis par des surfaces métalliques. Cet effet sert non seulement à définir l’espace à l’intérieur
de la scène, mais aussi à souligner certains éléments de sa signification.

Le goût des autres
L’assimilation de l’Orient par Rembrandt

La fascination pour l’Orient dans les Pays-Bas du XVIIe siècle n’était pas
seulement basée sur le plaisir esthétique procuré par de beaux et luxueux
objets. Il était également associé au monde de la Bible, à la fois onirique
et positivement connoté, tel qu’il se manifeste dans les peintures de
Rembrandt. La splendeur des vêtements et la préciosité des images orientalisantes contrastent avec l’austérité puritaine du calvinisme.
Dans cet intérêt pour les mises en scène orientalisantes,
l’attrait pour le merveilleux, l’extraordinaire, est alors manifeste.

J. F. F. nach Andries Beeckman; Der Markt von Batavia; nach 1688 144 x 209 cm; Öl auf Leinwand

L’ ‹ Orient › est l’Autre, une idée abstraite de ce qu’il est possible de vivre,
une surface de projection pour les besoins humains auxquels la vision rationaliste de l’Occident, particulièrement prégnante dans le protestantisme, n’offrait aucune place.

De ses propres yeux ?
Authenticité et cliché

Dans le cas des histoires bibliques, les costumes ou les décors orientalisants
servaient à créer une certaine ambiance. La question de savoir
dans quelle mesure ces motifs correspondaient à la réalité n’avait que
peu d’importance. Les paysages et les portraits prétendaient parfois
figurer une région ou une personne réelles.

Cependant, dans les Pays-
Bas du XVIIe siècle, seuls quelques tableaux fournirent une représentation
fiable des régions lointaines et de leurs habitants. On ne recherchait
visiblement pas l’authenticité dans la description d’un pays et de ses
habitants.

Inde environs 1800

De nombreuses peintures ont plutôt confirmé les clichés existants.
Les oeuvres d’art originales de l’Orient, comme les miniatures de
l’Inde ou de la Perse, ont reçu peu d’attention. Elles étaient rarement
collectionnées et seuls quelques peintres néerlandais, dont Rembrandt,
s’y sont intéressés.

Kunstmuseum Basel
St. Alban-Rheinweg 16 / Téléphone +41 61 206 62 62
info@kunstmuseumbasel.ch / kunstmuseumbasel.ch

Visites guidées en français
Dim 22.11., 27.12., 24.1., 14–15h
Frais : Entrée + CHF 5

Roni Horn You are the Weather

Jusqu’au 17 janvier 2021, à la Fondation Beyeler

Focus

En 2016, Roni Horn  une exposition de son travail à la Fondation Beyeler, réunissait des séries et des ensembles de pièces exceptionnelles, riches d’une grande diversité visuelle et matérielle, couvrant les 20 dernières années.
Installations photographiques, travaux sur papier et sculptures en verre se partagent l’espace de six salles d’exposition dont l’ensemble peut être
appréhendé comme une unique installation.

En 1975, tout juste âgée de vingt ans, la jeune newyorkaise Roni Horn se rend pour la première fois en Islande. Depuis, elle y retourne à plusieurs reprises à cette terre de glace qui aura une influence considérable sur son travail. La singularité de cette île volcanique, ses paysages abrupts, les caprices de
son climat changeant, l’éloignement du lieu sont pour l’artiste une source d’inspiration majeure, comme en témoignent plusieurs de ses oeuvres centrales ainsi qu’une série de livres. Pour Roni Horn, l’Islande est :
« Assez grande pour s’y perdre. Assez petite pour m’y retrouver. »

Les photographies

Les 100 photographies qui constituent You are the Weather ont été prises en juillet et août 1994.

« Pendant six semaines, j’ai voyagé avec Margrét à travers toute l’Islande. En suivant les sources d’eau chaude courantes sur l’île, nous nous sommes rendues d’une piscine naturelle à une autre. Nous avons travaillé quotidiennement, la plupart du temps en extérieur, et indépendamment du climat changeant et souvent imprévisible qui règne sur l’île. »

Les photos montrent le visage d’une femme en plein soleil ou par
temps nuageux ; son expression, parfois agacée, parfois impatiente, est causée par le soleil aveuglant, le vent cinglant, etc. Bien qu’il s’agisse de portraits d’une seule et même jeune femme, on n’apprend rien sur elle.

Dans You are the Weather (vue sur la salle), l’identité est, par définition, fluctuante et changeante : elle se manifeste par une série de moments pluriels et variables.

Biographie

Née en 1955 à New York, Roni Horn a grandi dans le comté de Rockland, dans l’État de New York. Elle est diplômée de la Rhode Island School of Design et de l’université Yale. Depuis de nombreuses années, les travaux de Roni Horn font l’objet d’expositions individuelles aussi bien aux États-Unis qu’en Europe.

L’exposition focus a été conçue par Theodora Vischer, Senior Curator de la Fondation Beyeler, avec Marlene Bürgi, conservatrice assistante

Horaires d’ouverture de la Fondation Beyeler:
tous les jours 10h00–18h00, le mercredi jusqu’à 20h00.

Eaux-fortes de Rembrandt
Les donations Eberhard W. Kornfeld

Jusqu’au 24.01.2021, au Kunstmuseum Basel | Hauptbau
Commissaire : Ariane Mensger

Rembrandt Harmensz. van Rijn; Cornelis Claesz. Anslo, Prediger; 1641 Platte: 18.3 x 15.6 cm
Blatt: 18.5 x 15.8 cm; Radierung, Kaltnadel, auf Japanpapier; Inv. 2019.152


Après une première donation substantielle d’
eaux-fortes de Rembrandt en 2007, le
collectionneur bernois Eberhard W. Kornfeld offre 31 oeuvres supplémentaires au Kunstmuseum

Basel. Environ 70 feuilles provenant de ces deux donations sont présentées dans le cadre de l’exposition
Eaux-fortes de Rembrandt à l’entresol du Hauptbau parallèlement à la grande
exposition temporaire
L’Orient de Rembrandt.

La gravure –technique
Rembrandt Harmensz. van Rijn; Der Stelzfuss – Bettler mit einem Holzbein; um 1630
Platte: 11.4 x 6.6 cm
Blatt: 13.6 x 8.6 cm; Radierung; Inv. 2019.158

De son vivant déjà, Rembrandt Harmensz van Rijn (1606-1669) jouit d’une grande estime non seulement grâce à ses peintures, mais aussi à ses gravures à l’eau-forte. Pour nombre d’amateurs d’art, ces eaux-fortes relèvent même d’un véritable exploit : le maniement unique de cette technique graphique par Rembrandt – l’intervention de différents procédés, le traitement
répété des matrices et les variations presque infinies en résultant – fait de chaque gravure une pièce de collection convoitée. Les premières collections virent d’ailleurs le jour dès le XVIIe siècle et, aujourd’hui encore, des épreuves rares et de qualité atteignent des sommes considérables sur le marché de l’art.

Le donateur

Eberhard W. Kornfeld (vidéo), commissaire priseur et collectionneur bernois, est un connaisseur averti de Rembrandt. Depuis ses débuts à la maison de ventes aux enchères Gutekunst und Klipstein à la fin des années 1940, il se consacre à cet artiste et constitue sa propre collection d’eaux fortes de Rembrandt. 

Rembrandt Harmensz. van Rijn; Die Verkündigung an die Hirten; 1634 Platte: 26.2 x 21.9 cm; Radierung, Grabstichel und Kaltnadel; Inv. 2019.166

En 2007, il lègue la plus grande partie de ce fonds au Kupferstichkabinett
(cabinet des arts graphiques) du Kunstmuseum Basel dans le cadre d’une donation substantielle. Une seconde donation a lieu en 2019.
Kornfeld, qui dispose toujours d’un droit de jouissance à vie sur ces oeuvres, confie qu’il ne se passe pas une semaine sans qu’il ne sorte
les eaux-fortes pour les étudier.
L’exposition, qui présente les 31 oeuvres de la seconde donation pour la première fois au public, rend hommage à cet engagement renouvelé et
désintéressé en faveur de la Öffentliche Kunstsammlung (collection publique bâloise). Ces oeuvres s’accompagnent d’eaux-fortes provenant à la fois de la première donation et des fonds du musée. Il s’agit là de souligner à quel point les différents pans de la collection se complètent bien.

L’exposition

Le total d’environ 70 feuilles sélectionnées pour l’exposition offre un panorama qui rend manifeste sous toutes ses facettes la remarquable habileté de Rembrandt comme graveur. Des exemples choisis révèlent les filigranes des récentes acquisitions qui jouent un rôle important pour l’évaluation et la datation des gravures aujourd’hui. D’autres exemples montrent la
provenance de ces oeuvres issues en partie de collections célèbres

L’autoportrait aux yeux hagards

Cet autoportrait Signé et daté, – RHL 1630, Eau-forte et burin – 50 x 43 mm,- d’une taille à peine plus grande qu’un timbre poste, a un côté très spontané et fascinant. Quand on regarde une reproduction, on constate que la gravure supporte très bien l’agrandissement, bien que l’oeuvre soit minuscule, cela est du au génie de l’artiste, cette force qu’il a de rendre en peu de traits et d’économie de moyens, beaucoup d’intensité dans ce regard hagard, L’estampe s’intitule aussi Autoportrait aux yeux écarquillés et Rembrandt au bonnet la bouche ouverte, les yeux et la bouche attirant particulièrement l’attention. Rembrandt réalise un gros plan sur son visage qui occupe presque tout l’espace, déborde même du cadre, surgissant devant le spectateur. L’expression de stupeur, d’étonnement feint peut-être, ou de moquerie, est saisissante. Elle est accentuée par la torsion et le rejet de la tête en arrière. De plus, la position en diagonale et l’éclairage dirigé de haut en bas en diagonale également contribuent encore à dynamiser l’ensemble.
Cette étude d’expression devant le miroir est, comme Rembrandt à la bouche ouverte, davantage expérimentale que les autoportraits des débuts. L’artiste s’en inspira pour exécuter la tête du personnage effrayé dans La Résurrection de Lazare, vers 1632.

Rembrandt Harmensz. van Rijn; Die Taufe des Kämmerers; 1641 Blatt: 18 x 21.3 cm
Platte: 17.8 x 21.1 cm; Radierung; Inv. 2019.165

La parution d’un catalogue comprenant une interview du donateur ainsi que l’ensemble des 31 oeuvres de la seconde donation accompagne l’exposition.

Kunstmuseum Basel | Hauptbau
St. Alban-Graben 8, Postfach
CH–4010 Basel

Horaires

Le lion a faim…Présentation de la Collection à la Fondation Beyeler

Louise Bourgeois, les trois grâces

Jusqu’au 28 mars 2021 à la Fondation Beyeler

Le parc de la Fondation est resplendissant aux couleurs de l’automne. Le parcours des salles permet d’admirer l’accrochage des tableaux tout en harmonie avec le paysage, que l’on aperçoit à travers les baies vitrées.
Un plaisir pour les yeux

Henri Rousseau, Le lion, ayant faim, se jette sur l’antilope, 1898–1905

Tel le lion dans le tableau de Henri Rousseau  (vidéo) se jetant avidement sur l’antilope, nous ressentons, nous aussi, à la Fondation Beyeler une faim puissante – une faim d’art : en ces temps difficiles, il est d’autant plus important de se rappeler combien l’art est passionnant, fascinant. Jusqu’au  28.3.2021, la nouvelle présentation de la collection réunit, dans huit salles différentes, une sélection
de peintures et de sculptures légendaires, toutes des chefs-d’oeuvre du modernisme classique ou de l’art contemporain.

Les autres artistes

Elle permettra d’admirer à nouveau les silhouettes en papiers découpés de Henri Matisse, aussi emblématiques que fragiles, notamment Nu bleu I dont l’élégance, la spatialité et la présence palpable suscitent encore et toujours l’émerveillement. Figurent également à l’honneur le groupe de sculptures
réalisé à l’origine pour la placette devant la banque Chase à Manhattan dans la capitale newyorkaise par Alberto Giacometti à la fin des années 50. L’Homme qui marche, qui a longtemps figuré sur nos billets de
banque de 100 francs, fait partie de l’ensemble.

En outre, une salle entière est consacrée à Louise Bourgeois, artiste qui connaissait bien Giacometti et qui a élargi le concept de sculpture en rendant
l’inconscient, sinon visible, du moins vivable. Autre point fort de cette présentation automnale, la relation
entre Vassily Kandinsky et Paul Klee dont l’amitié extraordinaire fait l’ objet, pour la première fois à la
Fondation Beyeler, d’une appréciation critique. On peut voir sous ce lien, un compte rendu de l’exposition consacrée
à Paul Klee en 2017, en présence de son petit fils.
Trois tableaux particulièrement touchants, peints par Vincent van Gogh, dont le jardin de Daubigny, -dont l’authenticité  contestée -, peu de temps avant sa mort, sont exposés ensemble et engagent un dialogue avec les oeuvres de Paul Cézanne et Edward Hopper.

L’expressionnisme

L’expressionnisme abstrait est au centre d’une autre salle


dans laquelle sont présentées des oeuvres de Willem de Kooning, Clyfford Still et Sam Francis ainsi qu’un tableau grand format de Joan Mitchell.
Pour la première fois, le musée présente l’une des plus récentes
acquisitions de la Collection de la Fondation Beyeler : l’émouvante installation sonore Seven Tears de Susan Philipsz

fait référence à la composition éponyme du contemporain de Shakespeare,
John Dowland, et exprime les états émotionnels qui – accompagnés de larmes – passent de la joie jubilatoire à la profonde tristesse. Trop mélancolique ? Absolument pas ! La mélancolie sert bien souvent de germe à la créativité – comme en témoignent les oeuvres grandioses aujourd’hui à nouveau
exposées à la Fondation Beyeler.

En vidéo par Ulf Küster en anglais

 

Horaires d’ouverture de la Fondation Beyeler:
tous les jours 10h00–18h00,
le mercredi jusqu’à 20h00.

Sommaire du mois de septembre 2020

Robes du soir, présentées dans l’exposition Man Ray et la mode au musée du Luxembourg
Jeanne Lanvin et Jean Charles Worth (1925)

20 septembre 2020 : Le Monument, Le Labeur Et L’hippocampe
15 septembre 2020 :  Delphine Gutron
12 septembre 2020 :  Taro Izumi. ex
08 septembre 2020 : Pour tout le sel de la terre
06 septembre 2020 : Susanna Fritscher, Frémissements
04 septembre 2020 : Richard Chapoy -ARTCHIMIE-

Taro Izumi. ex

C’est jusqu’au 15 novembre 2020 au musée Tinguely de Bâle
Commissaire d’exposition : Séverine Fromaigeat.

La grande exposition d’automne du Musée Tinguely offre une immersion dans le monde malicieux et ludique de l’artiste japonais Taro Izumi (*1976, Nara). Izumi observe nos modes de vie, examine nos relations sociales et celles que nous entretenons avec le monde naturel  et animal.  Il en   conçoit  des  oeuvres multiformes  et inclassables qui, à partir d’une trame simple et d’une certaine économie de moyens, embarquent pour des voyages aux portes de l’absurde.
Dans l’exposition« ex», l’artiste déploie son univers créatif unique, un écosystème organique qui n’appartient, en tant que tel, a aucune catégorie artistique établie.
Sculpture, installation, performance et vidéo s’y mêlent étroitement.
De la même manière, les matériaux s’ajoutent les uns aux autres – bois, textile, plantes, animaux empailles, objets familiers ou éléments recyclés de toutes sortes -, dans des constructions en apparence chaotiques et pourtant précisément conçues et assemblées. Rencontrer cet univers luxuriant et en constante expansion, c’est la promesse de télescopages, de rebonds, de chevauchements. C’est entrer dans un kaléidoscope visuel et mental.

Au Musée Tinguely,  Taro Izumi présente sa première exposition personnelle d’envergure en Suisse, avec des oeuvres spécifiquement conçues pour les espaces du musée et qui proposent une réflexion sur les bouleversements culturels et sociétaux apparus avec le Covid-19.

L’exposition s’accompagne d’une publication qui, pour la première fois,
fournit une description complète de l’oeuvre d’Izum.

 

 

Video as medium as mirror as image as movement as object as video

La technique la plus adaptée à la retranscription instantanée des actions que l’artiste invente est la vidéo. Il l’emploie à la manière d’un stylo qui capte et traduit tout ce qu’il observe. Medium pivot de sa pratique, elle est de toutes ses installations, de toutes ses expositions et joue un rôle sémantique essentiel. Pour « ex », au Musée Tinguely, les écrans, omniprésents, envahissent l’espace: ils rythment les salles, ils se placent au sol et au plafond, s’accrochent aux murs et s’inclinent dans les airs. La vidéo, sur ses supports, déroute : elle accapare, elle captive, et, en cherchant continûment à l’intercepter, sature l’attention des spectateurs et spectatrices. En faisant l’expérience immersive des 0euvres vidéos de Taro Izumi, on ne peut s’empêcher de penser a l’espace urbain tokyoïte débordant de sons et d’images que certaines installations semblent rejouer.

Taro Izumi au Musée Tinguely – Une tentative de saisir l’insaisissable

Tickled in a dream maybe ? (2017) est la plus grand installation multimédia présentée au Musée Tinguely. Cette série, entremêlant sculptures et vidéos, se déploie à partir de photographies de sportifs – principalement des footballeurs – captés en plein élan acrobatique. A partir de ces images décrivant des actions spectaculaires – comme des reprises de volée, des tacles glissés, l’audacieuse pirouette d’un tir légendaire ou le saut dans les airs d’un célèbre basketteur -, Izumi compose des structures de soutien permettant à des performeurs de simuler ces mouvements impossibles à reproduire pour quiconque n’y est pas entrainé. Entre le meuble et la prothèse, le socle et la sculpture, ces structures architecturées aux airs bricolées prennent des formes très variées, qui ne sont pas sans évoquer – tant formellement que conceptuellement – les 0euvres interactives de Jean Tinguely (1925-1991) ainsi que son esprit bricoleur et espiègle. L’artiste tente ici de saisir l’insaisissable : le mouvement, le temps et la gravité.


Exhibition as Gesamtkunstwerk

Les expositions de Taro Izumi ont pris au fil du temps une dimension immersive importante. C’est a travers le medium expositionnel que l’artiste habite les espaces, qu’il élabore une narration. Ces dernières années, il a principalement imaginé ses 0euvres en réponse aux lieux où il est invité à montrer son travail.
Cela l’a conduit à envisager « l’exposition » comme une 0euvre en soi.
Par le biais de la technologie digitale et de l’usage récurrent de la vidéo, du streaming et de la superposition d’images, l’artiste constitue un réseau complexe d’interactions entre ses 0euvres.

Des robots aspirateurs et un théâtre sans spectateurs

Taro Izumi imagine chaque pièce de sa grande exposition au Musée Tinguely comme un organe vivant à l’intérieur de l’organisme qu’est l’exposition. Chaque 0euvre a un rôle à jouer afin que l’exposition respire, vibre, se meuve, chante et s’illumine. Des robots aspirateurs sont suspendus en l’air comme démis de leur fonction première; des lumières clignotent continuellement sur les écrans, des sons arrivent de toutes parts;

(Théâtre Covid-19)
et en contrepoint, un immense théâtre (400) dont 30 000 dans le monde entier, 
silencieux, sans spectateurs ni spectacle attend les visiteurs et est un hommage.
ce sont 10 mn enregistrées, sans rien faire, ni parler, dans un théâtre imaginaire, une mise en scène d’une pièce, une plaque en laiton, avec le numéro de la place, avec un Iphone en life streaming on peut voir ce qui se passe dans le musée sans y être. Izumi nous parle ici de l’absence, du vide et de présence virtuelle, de lieux qui sont devenus inaccessibles. Il propose son regard sur les nouveaux types de comportements qui ont récemment émerge avec l’avènement du Covid-19.

Avec une forme de légèreté et un sens de l’ironie, Taro Izumi parvient à amalgamer ces univers supposément antagonistes. Il navigue entre ces mondes, de l’organique au technologique, et du technologique à l’organique, en passant par tout ce qui existe entre les deux. Son esthétique, rebelle à toute étiquette, renvoie cependant à l’art total prôné par Fluxus

Boules de billard en plexiglass
C’est une boule enfermée dans une cage en plexi, comme lorsque nous étions enfermé, privé d’air, de mouvement, isolé, pendant le confinement, métaphore de notre vie de ces derniers mois.



Missing Cats
Taro Izumi, se pose la question de savoir, où se trouvent ces chats perdus du monde entier. Sur un site Web, qu’on peut consulter, il se demande si on peut voir ou pas, ou simplement imaginer ce qu’ils font et deviennent.



Publication

L’exposition est accompagnée par le premier catalogue qui examine avec profondeur le travail de l’artiste. Cette publication éditée par Hatje Cantz, placée sous la direction de la commissaire d’exposition, a été réalisée en étroite collaboration avec l’artiste, qui a lui­ même élabore le corpus iconographique de l’ouvrage. Le catalogue retrace et examine en profondeur son parcours, avec essais critiques, interviews et un riche cahier iconographique. Traduisant une idée de circularité et de constant mouvement, cet ouvrage peut être lu verticalement et regardé horizontalement, se transformant en un objet ludique,à observer, toucher et interpréter de multiples manières.

Avec une préface de Roland Wetzel, un essai détaille autour de la trajectoire artistique de Taro Izumi par Séverine Fromaigeat, un texte sur la nature ontologique de ses 0euvres par Keren Goldberg, un dialogue entre l’architecte Jun Aoki et le conservateur de musée Kenjiro Hosaka, une brève description biographique par l’historien de l’art Jean de Loisy, des interludes épistolaires par le curateur Gabriel Ritter et l’éclairage du zoologiste Robert Zingg sur le monde animal en captivité. Le catalogue donne un aperçu complet de l’évolution de l’0euvre de Taro Izumi et dévoile son intérêt  pour des thèmes qui affleurent dans sa pratique, comme l’architecture, le monde animal et les questions conceptuelles relative à la conception artistique.

  

Informations pratiques Musee Tinguely :

Titre de l’exposition: Taro Izumi. ex

 

Adresse: Musée Tinguely I Paul Sacher-Anlage 1 I 4002 Bâle

Heures d’ouverture: du  mardi au dimanche, de 11h a 18h

Site  Internet:  www.tinguely.ch  I www.taroizumi.com/en/

Medias sociaux : @museumtinguely I #museumtinguely I #tinguely I #taroizumi

Journee speciale « Taro Izumi» à l‘occasion des Kunst Tage
 Dimanche, 20 septembre 2020
11-18h Videos screenings
15-16h Curator’s tour

16-17h Artist talk:
entretien avec l’artiste Taro Izumi et la commissaire de l’exposition.

Sommaire du mois d’août 2020

Giuseppe Penone
Frontières indistinctes – Noce, 2017
Bronze, marbre blanc de carrare

26 août 2020 : « L’Île Des Morts » D’Arnold Bocklin
23 août 2020 : Christophe Bourguedieu
14 août 2020 : Christo au musée Würth
01 août 2020 : LES FRÈRES BURDA. Une histoire des Collections

« L’Île des morts » d’Arnold Bocklin

Cette île mystérieuse, baptisée l‘île des morts, exerce sur moi une sorte
d’attirance/répulsion. Je ne peux m’empêcher de la scruter et d’imaginer,
une histoire tragique, un mystère terrifiant.
Il en existe cinq versions.

L’auteur de cette toile est Arnold Böcklin. Il est considéré comme le représentant de l’âme germanique.

Cette icône du symbolisme touche un nerf sensible de cette époque et en tant que reproduction gravée a trouvé sa place dans de nombreux intérieurs bourgeois de la fin de siècle.
Largement popularisé par une gravure de Max Klinger, véritable icône européenne du symbolisme fin-de-siècle, il s’agit d’un des tableaux les plus diffusés, reproduits, copiés, plagiés, interprétés et réinterprétés de l’histoire de la peinture et des formes symboliques. Apprécié au plus haut point d’Elisabeth d’Autriche comme de Lénine, de Hitler et de D’Annunzio, Clemenceau et Freud en possèdent une reproduction. Strindberg en fait la toile de fond de la scène finale de La sonate des spectres. Il inspire Serge Rachmaninov, mais aussi des metteurs en scène comme Patrice Chéreau, Martin Scorsese et Richard Peduzzi à Bayreuth, ainsi que des auteurs de bande dessinée. Dali le pastiche. En 1945, Mark Robson en reconstitue le décor pour un film d’horreur avec Boris Karloff. Plusieurs sites Internet lui sont consacrés…

Depuis 1880, elle est conservée au Kunstmuseum de Bâle.
Elle représente une île au coucher du soleil, vers laquelle se dirige une embarcation conduite par un passeur. À ses côtés dans le bateau, un défunt debout, dans son linceul regarde vers la crique dans laquelle va entrer la barque. Sur l’île, une cour dans l’ombre, des rochers escarpés et de hauts cyprès donnent à l’ambiance un parfum de solitude et d’oppression.

Genèse de l’œuvre

En avril 1880, Böcklin travaille sur la première version de L’Île des Morts, quand Marie Berna-Christ lui commande « un tableau propice à la rêverie ». Böcklin décide de faire une seconde version de dimensions légèrement réduites, toutes deux achevées en juin 1880. La forme blanche et le cercueil sont un ajout effectué à la demande de Marie Christ-Berna, commanditaire de la seconde version. Cependant cet ajout convainc Böcklin de sa nécessité, car il retouchera la première version pour l’inclure, et maintiendra ce motif dans toutes les versions suivantes. Cette demande de Marie Christ-Berna ne peut être comprise qu’en évoquant succinctement sa vie.
Elle épouse en 1864 M. Berna qui meurt un an plus tard. En avril 1880, presque au moment où elle commande le tableau à Böcklin, elle se fiance avec le comte Waldemar von Oriola, qu’elle épouse en décembre. On comprend alors cette volonté de Marie Berna de se représenter accompagnant son ancien mari, le confiant à cette île. Elle peut ainsi mettre fin plus facilement à son deuil, et accepter ce nouveau départ par cette forme d’adieu tout en conservant le souvenir de son ancien compagnon. Elle marque la fin et le renouveau de sa vie, sentiment souvent rattaché à la mort.

Arnold Böcklin, L’île des morts, version de 1883 (Alte Nationalgalerie de Berlin).

Au-delà du deuil de Mme Berna, cet ajout équilibre visuellement la composition, et cette tache blanche crée un contraste lumineux avec l’intérieur de l’île recouverte de ces arbres sombres. Cette forme vaporeuse attire le regard, diminuant ainsi l’appréhension du gouffre ténébreux du centre de la peinture. Il est clair que dans les versions suivantes cette forme cesse de ne représenter que Mme Berna mais une sorte de compagnon de route, un adjuvant, voire un ange. La mort apparaît alors juste comme un passage calme, dont cette île est la destination.

Arnold Böcklin, L’île des morts, seconde version de 1880 (Metropolitan Museum de New York)

À partir de la troisième version, le ciel nocturne laisse place à un jour blême, diminuant la portée énigmatique de la traversée. En parallèle, l’île devient plus précise dans ses contours, et la main de l’homme à travers les aménagements se fait plus visible. Dans la cinquième version, la « mystique » de l’œuvre semble avoir laissé place au concept plus « artificiel » de l’île tombeau, bien qu’y réside toujours l’ombre de la mort.

Arnold Böcklin, L’île des morts, version de 1886 (Museum der Bildende Künste de Leipzig).

L’île, dans sa dernière version, est une suite de falaises abruptes, plus hautes et plus claires, formant un hémicycle fermé par une construction humaine absente des premières versions, délimitant ainsi un téménos : en grec, espace coupé du reste du monde et donc sacré. L’horizon plus clair permet de voir l’espace lointain et rien ne s’y trouve, intensifiant l’isolement de l’île. De plus, on n’y accède que par une barque, en traversant une mer d’huile. Le passeur, qui rappelle par sa fonction l’antique Charon, le nocher, dans la dernière version est un homme noir, possiblement pour signifier la distance
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                    Version de 1884, détruite lors du bombardement de Rotterdam

En effet, nous pouvons voir ici l’image d’une île ne se trouvant pas en Europe, voire éloignée de toute réalité ; elle ne représente qu’un ailleurs, inconnu et inaccessible aux gens du commun.
En ajoutant ses initiales A. B. sur la tombe à l’extrême droite de l’île, à partir de la troisième version, Böcklin nous livre ici sa vision de l’artiste et se compte parmi les élus. L’artiste devient cet être isolé, ce héros qui doit sans cesse faire le voyage vers l’île, symbole de l’inaccessible et de l’indéfini. La mort et la solitude deviennent alors synonymes, pour celui qui à travers ce périple tire du néant la matière de la création. C’est d’ailleurs l’interprétation qui se dégage du roman de Roger Zelazny portant le même titre.

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 L’Ile des Vivants
Arnold Böcklin (1827-1901) a peint ce tableau deux ans après la dernière
des cinq versions de « l’île des morts » (1880-1886)
Un peu Kitch

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La galerie aménagée au Kunstmuseum pour Böcklin

 

LES FRÈRES BURDA. Une histoire des Collections

Andy Warhol, The Three Gentlemen, 1982. Acrylique/sérigraphie/toile

Jusqu’au 4 octobre 2020 au Museum Frieder Burda, de Baden-Baden
Un festival de couleurs. Expressionnisme et euphorie.
Une exposition présentant des chefs-d’œuvre de l’expressionnisme des trois
collections de Frieder, Hubert et Franz Burda. Dans une mise en scène du peintre américain Carl Ostendarp.
L’exposition a été conçue et organisée par Patricia Kamp et Udo Kittelmann.

Emil Nolde 1936
L’origine des collections

Les pièces collectionnées par leurs parents, Aenne et Franz Burda, ont attisé l’engouement des trois frères, Franz, Frieder et Hubert pour l’art.
C’est le début d’une passion de toute une vie. Les visages brillent d’un rose intense, les corps se prélassent dans un jaune vif, des paysages colorés s’étalent
devant le spectateur, des bordures noires bordent les surfaces comme des gravures sur bois : c’est l’expressionnisme allemand, auquel les couleurs doivent leur émancipation des choses et de la réalité, qui les met au service de l’expression subjective immédiate des émotions, des univers de l’âme et de
l’expérience du monde.
D’Ernst Ludwig Kirchner, Karl Schmidt-Rottluff et Gabriele Münter à Max
Beckmann, c’est aussi l’expressionnisme allemand par lequel les trois frères, Franz, Frieder et Hubert découvrent l’art pour la première fois.
La collection de leurs parents, tous deux éditeurs et entrepreneurs des médias prospères d’Offenburg, leur permet de faire l’expérience de la puissance immédiate des couleurs, comme la promesse d’un monde fascinant derrière et avec les images. Dans le même temps, la collection encourage et incite les trois frères à s’émanciper de l’héritage de leurs parents et à trouver leur propre voie dans l’art de leur époque.
                                                                                     Karl Schmidt Rottluff

Historique

L’exposition du musée Frieder Burda retrace les origines de la constitution des collections des trois frères. Préparée alors que Frieder Burda était encore ne vie, elle rend justice à son voeu de voir réunis dans une même présentation, les oeuvres d’art des trois frères, sans indiquer le propriétaire respectif de chacune des oeuvres. Elle donne ainsi également les clés de ce que peut signifier une vie avec et pour l’art. Elle a été conçue du vivant de Frieder Burda et reflète son grand désir personnel de réunir l’art des trois frères
dans une exposition commune dans son musée.

                     Ernest Ludwig Kirschner
L’exposition débute par le célèbre portrait de groupe
« The Three Gentlemen » des trois frères Burda par Andy Warhol,
légende du Pop Art américain, dans ses trois différentes variations de couleurs, chacun des frères se voyant attribuer l’une d’entre elles.

Mise en scène

La mise en scène de l’exposition est également expressive et colorée, abandonnant l’architecture blanche classique, (le white cube) du bâtiment de Richard Meier au pouvoir de la couleur. C’est à quoi a été invité le peintre américain contemporain Carl Ostendarp (né en 1961 dans le Massachusetts).
Sa peinture murale repose sur un système ingénieux de codage des couleurs.
Il se réfère dans le même temps à un style BD en deux dimensions qui permet à la couleur de s’exprimer en la laissant couler sur les murs comme un glacis délicat. Les œuvres accrochées auparavant apparaissent comme des étapes
centrales dans le déroulement de ces lignes de vie imaginaires avec leurs hauts et leurs bas. Elles s’intègrent dans les courbes et les amplitudes créées de manière ludique et sont ainsi enrichies et renforcées avec humour dans leur effet. Elles en ressortent magnifiées dans leurs éclatantes couleurs. L’ensemble du musée se transforme en un cosmos coloré global palpable pour l’observateur. Une sorte de danse harmonique, une écriture musicale où le contrepoint est un tableau.


Une salle dédiée sera consacrée aux jeunes visiteurs : les œuvres d’art seront accrochées à hauteur de leurs yeux, comme l’avait fait Andy Warhol dans l’une de ses expositions.

Une exposition sur l’histoire contemporaine

Tout a commencé par la couleur – Hubert Burda le confirme aujourd’hui, tout comme son défunt frère Frieder l’avait souligné très tôt et n’a cessé de le faire. Ici, l’histoire individuelle de la famille et des collections coïncide avec l’histoire culturelle : à une époque comme la nôtre où les images déferlent, la couleur va de soi et est omniprésente.

Cependant, le début du XXe siècle et l’art moderne sont caractérisés par une émancipation de la couleur. Tout a commencé avec l’expressionnisme. Avec la
publicité et la consommation, elle est passée dans la vie urbaine et la vie quotidienne. Avec les médias, elle les domine de plus en plus : ce n’est pas un hasard si le grand magazine allemand d’après-guerre de Burda s’appelle BUNTE (coloré) et est la promesse d’une vie plus colorée. Et avec le Pop Art, on rend définitivement hommage à la vie séduisante et colorée du monde mercantile.

Magazine

Un magazine de 60 pages, que les visiteurs de l’exposition reçoivent gratuitement, suit cette évolution générale en texte et en images, de l’invention de la technologie d’impression de masse en quadrichromie par la société Burda, dont les possibilités ont été inspirées par les techniques
d’impression artistiques, à l’idée d’inviter Andy Warhol comme rédacteur de l’INTERVIEW à Offenburg et consultant pour BUNTE, à partir de l’idylle familiale d’après-guerre jusqu’au déploiement des carrières
individuelles des trois frères, l’histoire familiale des Burda se feuillette ici.
Elle fonctionne donc aussi comme un miroir de l’histoire allemande contemporaine et d’après-guerre, dans une interaction
passionnante entre l’art et les médias, la couleur et la passion.

Heures d’ouverture
Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h
ouvert tous les jours fériés
Accès
depuis la gare DB
bus 201 et 216
arrêt Augusta Platz

Museum Frieder Burda ·
Lichtentaler Allee 8b · 76530 Baden-Baden
Téléphone +49 (0)7221 39898-0 ·
www.museum-frieder-burda.de

Sommaire du mois de juillet 2020

Chez ta mère, la guinguette de Motoco
photo Antonio Piccarreta Talis

25 juillet 2020 : The Incredible World of Photography Collection Ruth et Peter Herzog
23 juillet 2020 : Friedrich Dürrenmatt. La satire dessinée
12 juillet 2020 : POP-UP artistes
03 juillet 2020 : BPM-Biennale de la Photographie de Mulhouse