Alexander Calder – Arbres – Désigner l’abstraction

La Fondation Beyeler présente la deuxième Calder Gallery, aménagée en collaboration avec la Calder Foundation et consacrée à un aspect encore inexploré de la création d’Alexander Calder.
En 1933, quand la situation politique internationale pousse l’artiste à quitter Paris pour regagner l’Amérique du Nord, il s’installe à demeure avec son épouse Louisa à Roxbury, Connecticut, dans une vieille ferme du XVIII
e siècle. Cet environnement exerce un effet immédiat sur lui, ouvrant un nouveau chapitre de son évolution. L’espace extérieur apparaît de plus en plus comme un élément déterminant de son œuvre.
 


Alexander Calder pendant le montage de « Nine Discs » (1936) à Roxbury, CT, 1938
Calder Foundation, New York
© 2013, Calder Foundation, New York / ProLitteris, Zurich
Photo: Herbert Matter

 
 
Les premiers mobiles de la période parisienne étaient d’empreinte géométrique —conformément à l’esprit du mouvement artistique Abstraction-Création —, et leur mouvement était assez souvent d’origine mécanique, produit par de petites manivelles ou des moteurs. À Roxbury, ce sont désormais la nature, le vent et les phénomènes météorologiques qui inspirent à l’artiste de nouvelles possibilités.
 
Parallèlement au côté géométrique, un élément surréaliste accompagné d’un façonnement biomorphique devient de plus en plus perceptible. C’est à cette époque décisive que voient le jour les premières sculptures d’extérieur, qui rappellent vaguement des clochetons ou des girouettes. Explorant ces nouvelles pistes artistiques, elles constituent le point de départ des monumentaux travaux d’extérieur de l’après-guerre.
 
 
Calder Gallery

La présentation de la Fondation Beyeler s’ouvre sur un groupe insolite de Stabiles-Mobiles de 1939, des maquettes de 2 mètres de haut destinées à la transformation avant-gardiste du zoo du Bronx. Exécutées en dur sous forme de sculptures monumentales, elles devaient constituer une sorte d’arbre ornemental pour la cage des félins d’apparence africaine. Le projet, qui n’a finalement pas abouti, offre un témoignage impressionnant du potentiel d’avenir des idées artistiques de Calder.
 
Bien que ces œuvres soient toujours des abstractions dans l’espace, les titres choisis décrivent des éléments particuliers du mouvement, des répétitions de formes échelonnées ou de subtils rapports d’équilibre. L’abstraction est ici désignée sous une forme tangible, comme on peut s’en convaincre avec deux œuvres choisies. Des associations organiques déterminent les structures formelles telles que couronnes de feuillages, cascades de branches, étages des frondaisons. Le libre jeu des œuvres présentées dans l’espace intérieur du Musée densément animé s’assemble pour composer une véritable « forêt Calder ». Le lien qui s’établit ainsi entre espaces intérieur et extérieur reprend un thème majeur de la Fondation Beyeler, intégrant la Collection dans une juxtaposition harmonieuse entre architecture et paysage.
 
Calder Otto’s Mobile, 1952 Stahl, bemalt, Aluminium, 533,4 x 243,8 cm
Foto: Museo Guggenheim Bilbao/Erika Barahona

 
 
Un deuxième ensemble d’œuvres éclaire enfin la genèse de Tree, une œuvre appartenant à la Collection de la Fondation Beyeler, avec la maquette d’origine accompagnée de travaux apparentés et d’étapes intermédiaires. Pendant l’été, Tree, le monumental stabile-mobile de la Collection d’Ernst et Hildy Beyeler retrouvera en outre sa place d’origine dans le Berower Park, sur le terrain de la Fondation Beyeler.
En plus de prêts consentis par la Calder Foundation, on pourra également voir des œuvres prêtées par des collectionneurs privés, ainsi que par la Fundació Joan Miró de Barcelone et le Moderna Museet de Stockholm.
La Fondation Beyeler s’est engagée en 2012 dans une collaboration prévue pour plusieurs années avec la Calder Foundation de New York. Des œuvres appartenant aux collections des deux Fondations sont ainsi rassemblées et exposées dans une série de présentations réalisées par des commissaires d’exposition, la « Calder Gallery ». L’objectif est de permettre une présence permanente, unique en Europe, d’œuvres d’Alexander Calder (1898–1976) à la Fondation Beyeler, et d’apporter ainsi une contribution à l’étude de l’œuvre de ce grand artiste américain. La Fondation Beyeler s’inscrit ainsi dans l’esprit de sa grande exposition « Calder – Miró » (2004) aussi bien que de sa série des « Rothko Rooms ».
 
Alexandre Calder

 
Alexander Calder (1898 – 1976)
Alexander Calder, dont la carrière couvre la quasi intégralité du XXe siècle, est l’un des sculpteurs les plus renommés et les plus influents de notre temps. Né dans une célèbre famille d’artistes de formation essentiellement classique, Calder a mis sa force créatrice au service d’un élargissement durable de l’horizon de l’art moderne. Il a ainsi élaboré une nouvelle méthode de sculpture : en pliant et en tordant du fil de fer, il « dessinait » des figures en trois dimensions dans l’espace. Calder est connu pour l’invention du mobile dont les éléments abstraits, maintenus en équilibre, bougent en formant des combinaisons harmonieuses et toujours nouvelles. Calder s’est également engagé dans la réalisation de grandes sculptures d’extérieur, faites de tôle d’acier boulonnée. Aujourd’hui, ces géants en filigrane ornent de nombreux lieux publics aux quatre coins du monde. 
Calder Foundation
La Calder Foundation dont le siège se trouve à New York est une organisation sans but lucratif fondée en 1987 dans l’objectif de collectionner et de préserver l’art et la succession d’Alexander Calder, tout en les rendant accessibles à un vaste public. Cette Fondation dispose d’une collection incomparable d’œuvres et de documents d’archives. Les activités de la Fondation consistent pour l’essentiel à participer à des expositions et à des publications, à développer et assurer la conservation des archives Calder et à procéder au catalogage de l’ensemble des œuvres de cet artiste.
 
Fondation Beyeler, Beyeler Museum AG, Baselstrasse 77, CH-4125 Riehen
Heures d’ouverture de la Fondation Beyeler: tous les jours 10h00–18h00, le mercredi jusqu’à 20h00
exposition jusqu’au 12 janvier 2014
 
Photos courtoisie Fondation Beyeler 3
4e photo de l’auteur 

Kaputt – Maurizio Cattelan

Samuel Keller, ancien directeur de la foire de Bâle « Art Basel » et directeur de la Fondation Beyeler, avait promis une surprise avec la venue de Maurizio Cattelan.

Alléchée par l’affiche, où le petit homme avec son air de Roberto Benigni, teinté de Pinocchio, pointait son nez, avec son air ahuri, je me demandais où la Fondation Beyeler avait creusé le plancher pour faire surgir la tête hors du sol. Pour une surprise cela en était une vraie. Une œuvre unique, selon l’habitude du facétieux artiste, à la retraite, 5 chevaux taxidermisés, allignés
« Kaputt, » la tête plantée dans le mur.

Kaputt Maurizio Cattelan

A la Dogano, chez François Pinault, le cheval était  unique. Pourquoi 5, pour dépasser
Adel abdessemed et ses quatre Christ de Décor ?
Toujours est-il que l’artiste jouait à l’Arlésienne et que ce sont deux avocats qui prirent sa défense. D’abord Sam keller pour expliquer l’aventure et les tractations pour préparer l’exposition, puis le florentin Francesco Bonami, historien d’art, parla de l’installation.
Kaputt de Maurizio Cattelan – Francesco Bonami

« Maurizio préfère les ânes, (Warning, Enter at your own risk. Do not touch, Do not feed, No Smoking, no photographs, No Dogs, New York) »
Il évoqua Kounellis et son cheval bien vivant, puis Malaparte avec ses chevaux enflammés qui se jetèrent dans l’eau glacée et pourrirent à la retraite de Russie. Il évoqua Lucio Fontana et ses tableaux découpés dans la même veine que Cattelan. Il nous renvoya au magazine Toilet Paper de MC, racontant que Bellow et Salinger aux aussi avaient coutume de disparaître dans le décor.
Dans la salle attenante quelques toiles et une sculpture de Willem De Kooning, préparent au quintette.
Jusqu’au 6 octobre 2013
photo 1 courtoisie de la Fondation Beyeler
Autre photos de l’auteur
Né en 1960 à Padoue, dans le nord de l’Italie, Maurizio Cattelan se consacre tout d’abord, sans avoir suivi de formation particulière, à la production d’objets de design qui n’ont guère d’autre fonction qu’esthétique. C’est à partir de la fin des années 1980 qu’il se tourne ensuite vers les arts plastiques. Il se forge très rapidement une réputation de provocateur sur la scène artistique internationale. Faisant exploser le cadre à la fois conceptuel et spatial de la galerie et du musée, ses mises en scène suscitent l’enthousiasme du public, en même temps qu’elles le laissent souvent déconcerté. Ses sculptures et ses installations font fi des conventions, subvertissent les images et les règles tacites de la publicité. Le remarquable succès international de Cattelan témoigne de l’originalité de son langage visuel, qui sait traiter de manière subtile et choquante certains thèmes actuels, en leur donnant une dimension amusante et grotesque, et révéler un monde de faillite et de désespoir, de finesse d’esprit et de sentimentalité que les hommes et les animaux partagent étrangement. Aussi à l’aise avec le vocabulaire visuel de notre univers voué aux plaisirs de la consommation qu’avec la mélancolie d’un monde ancien, l’artiste surprend son public : devant ses oeuvres, le rire nous reste souvent en travers de la gorge. Des expositions personnelles de son oeuvre ont eu lieu à la Wiener Secession, au musée d’Art moderne de Francfort, à la Kunsthalle de Bâle et au MoMA de New York. Cattelan a participé à de nombreuses expositions collectives dans des institutions aussi prestigieuses que le Museum Fridericianum de Kassel, le MoMA PS1 de New York, le Castello di Rivoli près de Turin, l’Institute of Contemporary Arts et la Tate Gallery de Londres, le Moderna Museet de Stockholm. Il a pris part plusieurs fois à la Biennale de Venise. À l’occasion de sa rétrospective All présentée en 2011/12 au Guggenheim Museum de New York, Cattelan a annoncé son retrait de la scène artistique. Cattelan a fondé avec les critiques d’art et curateurs Massimiliano Gioni et Ali Subotnick la revue Charley. Le trio a également assuré ensemble le commissariat de la Biennale de Berlin 2006, intitulée Des souris et des hommes. C’est une relation de longue amitié qui unit Cattelan et les curateurs Francesco Bonami et Massimiliano Gioni. Avec Gioni et Subotnick, l’artiste a ouvert en 2002 à New York la Wrong Gallery, un minuscule espace qu’on découvrait une fois franchie la porte d’entrée, avant de la déménager à la Tate Modern. Avec Gioni toujours, Cattelan a de nouveau ouvert en 2012 à New York une galerie, Family Business, située à proximité immédiate de l’immense galerie Gagosian et consacrée à l’expérimentation libre. La fascination éprouvée par Cattelan pour les images se manifeste également dans ses projets de revues. Fondée en 1995 avec Dominique Gonzalez-Foerster et développée ensuite en collaboration avec Paola Manfrin, Permanent Food se compose entièrement d’images trouvées, qui oscillent entre l’esthétique de séduction de la photo de mode et le voyeurisme éhonté de la presse à scandale. C’est dans le cadre de l’exposition de la Fondation Beyeler que paraît le huitième numéro de la revue Toiletpaper, que Cattelan produit depuis 2010 avec le photographe de mode Pierpaolo Ferrari. Toutes les photos sont spécialement conçues, mises en scène et réalisées pour ce magazine publié à intervalles irréguliers. Qu’ils soient traités en noir et blanc ou dans des couleurs intenses et saturées, leurs motifs rappellent l’univers des images surréalistes, avec des scènes de grand style où comme dans les rêves, l’absurdité se mêle aux perversions ou à la violence. Maurizio Cattelan vit à Milan et à New York.
 
 

Max Ernst – rétrospective à la Fondation Beyeler

Jusqu’au 8 septembre 2013

L’ange du foyer (Le triomphe du surréalisme), 1937
Huile sur toile, 114 × 146 cm
Collection privée
© 2013, ProLitteris, Zurich

Rassemblant plus de 160 œuvres, la vaste exposition montée par la Fondation Beyeler en collaboration avec l’Albertina de Vienne, constitue la première grande rétrospective consacrée à Max Ernst (1891–1976), l’un des plus grands peintres du Xxe siècle, présentée en Suisse depuis sa mort, et dans tout l’espace germanophone depuis 1999. Bien que ces deux manifestations aient l’une comme l’autre pour vocation d’attirer le regard du public actuel sur la création de Max Ernst et de lui permettre de découvrir celle-ci dans toute son envergure, les expositions de l’Albertina et de la Fondation Beyeler se distinguent par leur optique et par leur accrochage.
Ajoutons que 21 de ces œuvres seront présentées aux seuls visiteurs de Riehen . Un certain nombre d’entre elles, comme « L’ange du foyer (Le Triomphe du Surréalisme)», «L’habillement de l’épousée», «La Vierge corrigeant l’enfant Jésus (…) et «Oedipus Rex » comptent parmi les plus célèbres de l’opus de cet artiste. Ernst Beyeler avait été tellement impressionné par Max Ernst que ce dernier réalisa dès 1953 le portfolio lithographique « Das Schnabelpaar » pour le galeriste bâlois. La Collection Beyeler comprend sept œuvres de Max Ernst : quatre peintures et trois sculptures. Le travail le plus ancien , « Fleurs de neige», remonte aux années 1920, le plus récent , « Naissance d’une galaxie», a vu le jour en 1969.
Max Ernst est l’un des artistes les plus éclectiques de l’art moderne. En 1922, après avoir brandi l’étendard de la révolte dadaïste à Cologne, il partit s’installer à Paris où il s’imposa rapidement parmi les pionniers du surréalisme. Interné à deux reprises pendant la Seconde Guerre mondiale en tant que ressortissant d’une puissance ennemie, il fut libéré grâce à l’intervention de son ami, le poète Paul Éluard. En 1941, Max Ernst s’exila aux État-Unis où il trouva de nouvelles sources d’inspiration tout en donnant lui-même de nouvelles impulsions à la génération des jeunes artistes américains. Dix ans plus tard, Max Ernst regagna une Europe ravagée par la guerre, dans laquelle cet artiste, jadis très apprécié, sembla d’abord bien oublié, avant que l’on ne redécouvre en lui l’un des Créateurs les plus polymorphes du Xxe siècle. Max Ernst qui avait renoncé en 1948 à sa citoyenneté allemande au profit de la nationalité américaine est devenu citoyen français en 1958.
Ernst a été véritablement un artiste du siècle — non seulement par la qualité et la portée de son œuvre, mais également d’un point de vue objectif, par la simple durée de sa carrière de créateur qui a englobé toute la période allant de 1915 à 1975, soit soixante années. Contemporain de puissants bouleversements artistiques, sociaux, politiques et techniques, il a su intégrer ces ruptures dans une œuvre qui retrace des traits marquants du XXe siècle. Le plaisir avec lequel il expérimentait les techniques les plus diverses a également fait d’Ernst un précurseur de l’expression multimédia. Sans difficulté apparente, il a su rassembler dans son œuvre les thèmes, les styles et les techniques majeurs des différentes générations. Sa recherche inlassable de nouvelles formes d’expression, de nouvelles interrogations et de nouveaux sujets peut être considérée comme emblématique de l’homme moderne. Max Ernst nous apparaît comme l’artiste qui «n’a jamais voulu se trouver» (on se souvient de sa citation : «Un peintre est perdu quand il se trouve». Avec ses débuts de dadaïste, sa position centrale dans le cercle des surréalistes et l’anticipation de l’Action Painting, cet artiste qui s’est toujours mu entre les mondes et les cultures a relié Paris à Cologne, New York à la France. En un temps d’instabilité politique, il a toujours conservé son regard critique et créateur.
 Réfugié dans un pays, les États-Unis, qu’il ne connaissait guère, il a abordé cette nouvelle patrie avec curiosité et a su y trouver d’importantes impulsions pour sa création ultérieure. À travers des expositions à New York, des projets en Arizona ou enTouraine, ses participations à la Biennale de Venise ou à la Documenta, Max Ernst a incarné dès le début du XX e siècle une image promise à un bel avenir, celle du «nomade de la culture et de l’art». Ernst a également su gérer les contradictions de sa vie privée, passant sans heurt de la condition de réfugié de guerre à une vie nettement plus mondaine aux côtés de sa mécène Peggy Guggenheim, qui fut brièvement son épouse. Il renonça brutalement à cette existence pour se retirer dans le désert de l’Arizona, en compagnie de l’artiste Dorothea Tanning. Qu’il s’agisse de Luise Straus (morte à Auschwitz, sa première épouse, mère de son fils Jimmy, de Gala Eluard, Leonora Carrington, Peggy Guggenheim et Dorothea Tanning, Max Ernst s’est souvent entouré de femmes artistes, dotées d’une forte personnalité. Intellectuel tout aussi à l’aise en littérature que dans les beau-arts.
Max Ernst éprouvait également une vive curiosité pour la technique et pour la science, et plus particulièrement pour la biologie et pour la psychanalyse, une discipline qui a joué un rôle majeur pourle surréalisme. La diversité des techniques dont Max Ernst a été l’initiateur et le promoteur est aussi impressionnante que surprenante, comme le révèle la liste suivante :
Collage
Dès 1919, Max Ernst a commencé à utiliser la technique du collage qui lui permettait d’élaborer ou de simuler de nouvelles réalités picturales. Il réalisait ses collages à partir d’illustrations empruntées à des romans, des catalogues de matériel pédagogique et des brochures de mode du XIX e siècle. Pour obtenir un résultat parfait, avec des bords sans la moindre irrégularité ni aspérité, il découpait ces gravures sur bois à l’aide d’un scalpel Max Ernst a réalisé vers 1929/1930 ses romans collages les plus célèbres : La femme 100 têtes et Rêve d’une petite fille qui voulut entrer au Carmel comptent parmi les œuvres les plus fascinantes et les plus énigmatiques du surréalisme.
Frottage
Max Ernst a entrepris vers 1925 sa série intitulée Histoire Naturelle, dans laquelle il a utilisé pour la première fois la technique du «frottage», un procédé semi-automatique : il posait des objets ramassés dans la nature, des feuilles et du bois par exemple, sous une feuille de papier, sur laquelle il passait alorsune mine de plomb. L’artiste complétait ensuite les structures qui apparaissaient sur le papier pour créer des images fantastiques. Ses frottages prêtent une vie nouvelle aux objets inanimés et leur apportent une signification différente, souvent insolite. Max Ernst a élaboré cette technique pendant un séjour en Bretagne. Dans son essai intitulé «Au-delà de la peinture » il décrit une sorte de vision qui le conduisit à exécuter un frottage sur papier du plancher et d’autres objets de sa chambre d’hôtel.
Grattage
La technique du « grattage», inventée vers 1927,constitue en quelque sorte la traduction picturale de la technique du «frottage». Max Ernst commençait par superposer plusieurs couches de peinture sur une toile. Sous le fond pictural ainsi préparé, il posait ensuite des objets tels que des grilles métalliques, des planches ou des ficelles dont le relief se dessinait à travers la toile. Pour faire apparaître ces structures sur son tableau, il grattait les couches picturales supérieures. Dans une étape ultérieure, l’artiste retravaillait les motifs qui avaient surgi sur la toile et les interprétait pour faire naître des forêts, des fleur – coquillages, des oiseaux ou des villes pétrifiées.
Décalcomanie
La décalcomanie est une technique de transfert qui consiste à reporter à plat sur une toile la couleur encore humide appliquée sur une plaque de verre ou une feuille de papier. Son retrait fait naître des dessins subtils, tracés, bulles et marbrures de couleur. L’artiste retravaille ensuite la structure superficielle complexe ainsi créée . Ce procédé artistique connu dès le XVIII e siècle a été utilisé par d’autres Représentants du surréalisme. Max Ernst a adopté cette technique vers la fin des années 1930 et s’en est servi pour représenter des paysages énigmatiques, peuplés de visages, de silhouettes et d’animaux inquiétants, dissimulés dans les profondeurs de la nature.
Oscillation
Exilé aux États-Unis, Max Ernst a commencé à mettre au point la technique de l’oscillation vers 1942. Il remplissait de peinture une boîte percée de trous qu’il suspendait ensuite au-dessus d’une toile au bout d’une longue ficelle, lui imprimant de vastes gestes de balancement. La peinture gouttait par le trou au gré de ses oscillations. Ce processus largement incontrôlable et lui aussi semi-automatique fait apparaître à la surface de la toile des réseaux de cercles, de lignes et de points évoquant des orbites planétaires. Le recours à l’oscillation ajoutait une facette de plus aux procédés et techniques artistiques du surréalisme tout en anticipant le drip-painting de Jackson Pollock.
Cette exposition présente dans un ordre chronologique toutes les phases de création et tous les ensembles thématiques majeurs de Max Ernst .
Dorothea Tanning et Max Ernst avec la sculpture en ciment « Capricorne », Sedona, Arizona, 1948
© 2013, ProLitteris, Zurich
Photo: Documentation Max Ernst, Deutsches Forum für Kunstgeschichte, Paris / John Kasnetzis

Elle s’ouvre sur « Capricorne», la plus importante de ses sculptures.
Né le 2 avril 1891 à Brühl, en Allemagne, Max Ernst apprend la peinture avec son père, peintre amateur. Il reçoit une éducation conservatrice et bourgeoise très stricte, contre laquelle il se révolte rapidement. À partir de 1910, il entreprend des études d’histoire de l’art, mais aussi de psychologie, De langue et de littérature romanes et dephilosophie. Influencé d’abord par l’expressionnisme et le futurisme, il entre rapidement en contact avec d’autres artistes et mouvements artistiques. L’œuvre de jeunesse «Stadt mit Tieren» (La ville avec des animaux) témoigne de cette association singulière entre différents styles et présente des traits cubistes aussi bien que futuristes. La rencontre avec Hans Arp (lui aussi représenté dans la Collection Beyeler, comme les Surréalistes Dalí,Giacometti et Miró) coïncide avec cette période riche en contradictions. Dada est né et les années qui suivent la Première Guerre mondiale sont une phase de bouleversements, de protestations et d’expériences. Max Ernst découvre les artistes surréalistes par le biais du dadaïsme . Il quitte alors son statut d’artiste allemand pour devenir une figure de proue du mouvement surréaliste parisien. Ses tableaux se parent de traits énigmatiques, le surréalisme faisant en effet la part belle aux éléments déterminants de la psychanalyse que sont l’inconscient et le rêve .
Max Ernst reste un innovateur, qui se livre à partir du milieu des années 1920 à ses premières expériences de frottage. Ce moyen d’expression donne naissance à des créatures hybrides associant différents genres, l’intérêt de l’artiste pour les sciences naturelles apparaissant clairement dans ses œuvres. « Au premier mot limpide», sorte de rébus monumental, faisait initialement partie du décor de la maison que Max Ernst partageait avec Paul Éluard et son épouse Gala (la future muse de Dalí). On n’a retrouvé cette peinture murale, recouverte au cours de travaux ultérieurs, que dans les années 1960. « La Vierge corrigeant l’enfant Jésus devant trois témoins: André Breton, Paul Éluard et le peintre», une œuvre scandaleuse aux éléments blasphématoires, n’est guère moins spectaculaire. Geste radical d’affranchissement de l’éducation bourgeoise reçue par Ernst, elle déconstruit l’image sainte habituelle et la représentation traditionnelle de la maternité.
Max Ernst
La Vierge corrigeant l’enfant Jésus devant trois témoins: André Breton, Paul Éluard et le peintre, 1926
Huile sur toile, 196 × 130 cm
Museum Ludwig, Cologne
© 2013, ProLitteris, Zurich
Photo: Peter Willi / ARTOTHEK

Le thème de la «forêt» occupe toute une salle de l’exposition qui regroupe des œuvres majeures de cette série. Les tableaux de «hordes» de la fin des années 1920 se voient également attribuer un rôle important : ces figures métamorphiques illustrent clairement le motif de la transformation. Les «fleurs» et les «villes» (opposition entre «nature» et «culture») constituent d’autres groupes thématiques essentiels .
La salle 11 présente une accumulation d’œuvres clés avec les tableaux de jungle de la deuxième moitié des années 1930, dont la toile «La nature à l’aurore» au caractère sombre et inquiétant. On voit confluer ici différentes traditions, depuis des emprunts à Henri Rousseau jusqu’au romantisme d’un Caspar David Friedrich .
« L’habillement de l’épousée» extrait audio-guide fait référence à l’art de la Renaissance tout en évoquant, peut-être, la diversité des images de la femme. La transformation de la femme en animal et d’un animal en femme est un motif érotique, qui encadre également la toile d’une multitude de détails. «L’ange du foyer» de 1937 en revanche prend pour thème la guerre civile espagnole de la fin des années 1930, qui passionna de nombreux artistes et intellectuels. Dans la dimension colorée, insondable, effrayante comme un masque de la figure représentée qui semble se précipiter vers le spectateur sous forme d’un tourbillon inexorable entre agression et persiflage, Max Ernst anticipe la catastrophe politique qui était sur le point de s’abattre sur l’Europe.
L’œuvre tardive d’Ernst se caractérise par des ruptures thématiques — on relève d’une part la réflexion poétique et sensuelle recourant à la technique du recouvrement pictural du «Jardin de la France», de l’autre « Naissance d’une galaxie», une œuvre somptueuse de la phase tardive qui fait s’épanouir l’air, l’eau, la terre et la lumière dans un astre céleste.
Max Ernst
Au premier mot limpide, 1923
Huile sur plâtre, reporté sur toile, 232 × 167 cm
Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen, Düsseldorf
© 2013, ProLitteris, Zurich
Photo: Walter Klein, Düsseldorf

Max Ernst était à maints égards un esprit fort ironique, élégant et rebelle — et il apparaît aujourd’hui encore comme un artiste dont la création est tout à la fois accessible et complexe. Ses œuvres s’adressent à nous, elles font surgir des abîmes et des secrets cachés , elles provoquent la réflexion Insaisissable comme du mercure — présentant inlassablement des formes d’un renouvellement fascinant —, Max Ernst reste près de quarante après sa mort un phénomène singulier, exemplaire dans son autonomie artistique, dont la liberté irréductible et le courage qui lui a fait accueillir un changement constant dans son œuvre comme dans sa vie préservent l’œuvre de tout opportunisme stylistique et de toute paralysie.
Cette exposition a été conçue par Werner Spies et Julia Drost, commissaires invités, et a vu le jour en collaboration avec l’Albertina de Vienne. La commissaire d’exposition pour l’Albertina est Gisela Fischer. Le commissaire de l’exposition de la Fondation Beyeler est Raphaël Bouvier. la Fondation Beyeler remercie Dr. Christoph M. et Sibylla M. Müller pour leur engagement tout particulier en faveur de l’exposition.
À l’occasion de cette exposition, la Fondation Beyeler publie un catalogue en allemand et en anglais. L’édition destinée au commerce est éditée par Hatje Cantz Verlag, Ostfildern. Ce volume édité par Werner Spies et Julia Drost contient une préface de Klaus Albrecht Schröder et Sam Keller, avec des essais de Werner Spies, Julia Drost, Adrian Sudhalter, Raphaël Bouvier, Jürgen Pech, Ralph Ubl, Gabriele Wix et autres.
Il  est disponible au musée au prix de 62.50CHF
Le catalogue est aussi disponible auprès de l’ Art Shop de la Fondation Beyeler : www.fondationbeyeler.ch
Fondation Beyeler,
Beyeler Museum AG,
Baselstrasse 77, CH –
4125 Riehen
Heures d’ouverture de la Fondation Beyeler:
tous les jours 10h00 – 18h00, le mercredi jusqu’à 20 h
texte presse
Images courtoisie de la Fondation Beyeler

Les Picasso sont là

Par conséquent il ne faudrait surtout pas les rater.
C’est une exposition unique qui couvre toute la période artistique de Picasso.
C’est à Bâle au KUNSTMUSEUM jusqu’au 21 juillet 2013.

Pablo Picasso
Arlequin assis, 1923
Öl auf Leinwand
130.2 x 97.1 cm
Kunstmuseum Basel
Depositum der Einwohnergemeinde der Stadt Basel 1967
Foto: Kunstmuseum Basel, Martin P. Bühler
© Succession Picasso / ProLitteris, Zürich

 
Cette histoire singulière débute par une catastrophe. Le 20 avril 1967, un avion de la compagnie charter bâloise Globe Air s’écrase sur l’île de Chypre, provoquant la mort de 126 personnes et la faillite de Peter Staechelin, propriétaire de la compagnie. Pour payer ses dettes, il vend quatre oeuvres d’art achetées par son père, dont un van Gogh. Mais quand il annonce vouloir aussi vendre les deux tableaux de Pablo Picasso,
« Les Deux frères » et « Arlequin assis » ,
Pablo Picasso
Les deux frères, 1906
Öl auf Leinwand
141.4 x 97.1 cm
Kunstmuseum Basel
Depositum der Einwohnergemeinde der Stadt Basel 1967
Foto: Kunstmuseum Basel, Martin P. Bühler
© Succession Picasso / ProLitteris, Zürich

que son père avait donné en prêt à long terme au Kunstmuseum, les évènements prennent une tournure exceptionnelle. La valeur marchande des deux toiles était alors estimée à 8,4 MF (millions de francs suisses) de l’époque. Pour sauver ces deux pièces maîtresses du musée des Beaux-arts, le gouvernement cantonal vote un prêt de 6 MF et lance un appel au mécénat pour financer les 2,4 MF restant. Un comité de citoyens, mobilisé par un garagiste peu sensible à l’art moderne, lance alors un référendum, qualifiant d’« insensé » ce prêt pour des oeuvres d’un peintre vivant qui incarne à leurs yeux le « déclin de l’art ». C’est le premier référendum pour des oeuvres d’art. Une campagne digne d’enjeux politiques se déroule alors à Bâle et dans tout le canton, les pro-Picasso organisent des rassemblements avec badges et banderolles « We like Picasso » . C’est dans une ambiance survoltée que se déroule le 17 décembre 1967, pour la première fois en Europe, un référendum pour ou contre l’achat d’oeuvres d’art. Le « oui » l’emporte avec 5 000 voix d’avance (32 118 contre 27 190).
Foto Kurt Wyss
20.12.1967: In seinem Atelier in Notre Dame de Vie bei Mougins stellt Picasso zwei Gemälde aus der aktuellen Produktion nebeneinander. Kurz darauf wird er sie Basel schenken und ihnen die Titel „Vénus et l‘Amour“ und „Le couple“ geben.

Les Bâlois ont sauvé leurs deux Picasso. Picasso, âgé de 86 ans à l’époque, fut si touché par cette marque d’amour de la population bâloise qu’il invita, dès le lendemain, le directeur du Kunstmuseum, Franz Meyer, dans sa maison à Mougins. « Picasso lui a dit de choisir une des toiles de l’année 1967 qui remplissaient son atelier », raconte Kurt Wyss, ancien photographe du journal bâlois National Zeitung , témoin de la scène. Franz Meyer a demandé au maître espagnol de poser deux toiles « Vénus et l’Amour » et « Le Couple » côte à côte. « Je ne sais pas laquelle des deux choisir. » Face à l’indécision du Bâlois, Jacqueline Picasso suggère à son mari : « Pourquoi pas les deux ? Ils doivent rester ensemble… » Picasso acquiesce. Puis, dans la salle à manger où ils allèrent boire un thé, était posée en évidence contre un mur une toile  » Homme, Femme et Enfant » de la période rose comme les deux tableaux sauvés par les Bâlois. Picasso rajouta cette toile, qu’il avait gardée 61 ans, au « cadeau » pour les Bâlois, ainsi qu’une grande esquisse des Demoiselles d’Avignon.
Foto Kurt Wyss
Banner an der Fassade des Kunstmuseums Basel, 6. Januar 1968

Et le Kunstmuseum hérita, cette année-là, d’un cinquième Picasso, Le Poète , un portait offert par Maja Sacher, l’une des héritières du fondateur du groupe chimique Hoffmann-La Roche.
Mais les relations privilégiées entre des Bâlois et Picasso remontent encore plus loin. Déjà avant la seconde guerre mondiale des collectionneurs comme Raoul La Roche, Rudolf Staechelin, Karl Im Obersteg et Maja Sacher-Stehlin ont constitué des collections significatives, au sein desquelles Picasso occupait une place centrale. Les tableaux de premier ordre qui furent achetés par ces amateurs ont pour la plupart enrichi, depuis lors, le fonds du Kunstmuseum Basel où ils y sont présentés en tant que prêts à long terme. Le musée lui-même a procédé à ses premiers achats de Picasso dans les années 1920 pour le cabinet des estampes, par la suite, dès les années 1950, il n’a cessé de développer ce fond par l’achat de toiles importantes.
Pablo Picasso
Le repas frugal, 1904
Radierung
65.6 x 50.9 cm
Kunstmuseum Basel, Kupferstichkabinett
Foto: Kunstmuseum Basel, Martin P. Bühler
© Succession Picasso / ProLitteris, Zürich

Après la guerre, Ernst Beyeler a fait mieux connaître l’œuvre de l’artiste espagnol aux amateurs bâlois en organisant des expositions dans sa galerie, tandis qu’il constituait sa propre et imposante collection. C’est ainsi que se trouve aujourd’hui en mains bâloises une étonnante concentration d’œuvres, aussi bien en termes qualitatifs que quantitatifs.
La réunion de tous ces fonds donne lieu à une exposition exhaustive qui traite toutes les phases importantes de la carrière de Picasso à travers l’exemple d’œuvres de première qualité. Pour la première fois depuis l’exposition van Gogh en 2009, c’est l’intégralité du 2e étage du musée qui est consacré à cette exposition. On y découvre des peintures, des dessins, des gravures, tout comme des sculptures de l’artiste. Cela permet au visiteur de jouir d’une vue d’ensemble de toutes ses périodes les plus fascinantes, des périodes bleue et rose, en passant par le cubisme, le néoclassicisme et les tableaux surréalistes des années 1930, jusqu’aux travaux des années 1940-50, sans oublier l’œuvre tardive.
La collection de la Fondation Jean et Suzanne Planque est déposée au musée Granet à Aix-en-Provence pour quinze ans. Chapelle des Pénitents blanc – ouverture le 24 mai 2013.
Jean Planque rencontre le marchand bâlois Ernst Beyeler dont il restera le collaborateur jusqu’en 1972. Envoyé par la Galerie Beyeler de Bâle, il apporte une peinture de Cézanne
« Portrait de Mme Cézanne » que Picasso souhaitait acheter. La vente n’aura pas lieu, le tableau ayant été fortement restauré mais cette réunion sera la première de beaucoup d’autres.  C’est en découvrant cette collection à la Fondation Fernet Branca de St Louis (anciennement Centre d’art) que nous avons découvert l’étroite collaboration entre Ernst Beyeler et Jean Planque, mais surtout le lien qu’il établit avec Picasso.
L’exposition du Kunstmuseum réunit environ 60 toiles, 100 travaux sur papier, ainsi que des sculptures. Des photographies et un film de la télévision suisse documentent la fameuse « Année Picasso »
Un catalogue richement documenté illustré chez Hatje Cantz Verlag, paraît. Un programme de médiation culturelle variée est proposé.
photos courtoisie du Kunstmuseum
texte presse

Sommaire de mars 2013

Week end de l’art contemporain – performance au FRAC Alsace

04 mars 2013 : Week-end de l’art contemporain en Alsace
08 mars 2013 : Art Kalsruhe 2013 10e salon
13 mars 2013  : Des vitraux de Hans Erni dans le temple de Martigny
21 mars 2013 : Sam Szafran, 50 ans de peinture
22 mars 2013 : Collection Renard à la Fondation Beyeler
29 mars 2013 : « Interférences / Interferenzen. Architecture. Allemagne – France, 1800-2000 »

Collection Renard à la Fondation Beyeler

Sam Francis

La Fondation Beyeler est la bénéficiaire d’une généreuse donation de trente-trois œuvres de la collection d’art du couple français Claude et Micheline Renard. En raison de la grande estime qu’ils éprouvaient pour Ernst Beyeler et pour son musée, les Renard ont exprimé le vœu explicite de transmettre à la Fondation Beyeler les œuvres clés de leur collection. Cadre chez Renault, Claude Renard (1928–2005) a été en 1967 l’initiateur de la création de la division « Recherches, art et industrie », fondant ainsi la première grande collection d’entreprise d’art contemporain en France. Avec sa femme Micheline, il a conçu et organisé, toujours dans le cadre de l’association
« L’incitation à la création », de nombreuses expositions d’art contemporain à l’abbaye de Sénanque. Cet engagement durable et cette passion pour l’art se sont concrétisés à travers une remarquable collection de toiles, de sculptures et de travaux sur papier d’artistes internationalement reconnus comme Jean Fautrier, Jean Dubuffet, Sam Francis, Jean Tinguely, Antoni Tàpies, Sigmar Polke et Jean-Michel Basquiat – des artistes qui sont souvent devenus des amis du couple Renard. La transmission des pièces de la donation de la Collection Renard à la Fondation Beyeler est à l’origine de la rencontre entre deux collections, largement différentes certes par leur profil et leur portée, mais qui se caractérisent par des parallèles et des points de contact tout à fait opportuns.

Alors que la Collection Beyeler illustre de manière exemplaire l’art moderne de la fin du XIXe jusqu’au début du XXIe siècles à travers de nombreux chefs-d’œuvre, la Collection Renard se concentre sur un petit nombre d’œuvres d’artistes internationaux de l’après-guerre. On ne peut manquer d’être frappé par d’étroites correspondances entre ces deux collections, qui ne portent pas seulement sur le choix des artistes, mais concernent également les critères artistiques et la prédilection pour certaines positions esthétiques. Ces correspondances s’expriment de façon particulièrement significative dans les œuvres de Jean Dubuffet, Sam Francis et Antoni Tàpies – trois artistes représentés aussi bien dans la Collection Beyeler que dans la Collection Renard. Avec les œuvres de ces représentants majeurs de l’art d’après-guerre principalement, la Collection Renard apporte une contribution substantielle qui vient renforcer et compléter le fonds de la Fondation Beyeler.

La donation Renard permet en outre à certains artistes encore absents de la Fondation Beyeler d’y faire leur entrée, une présence qui élargit la collection de façon cohérente par des apports de toute première importance. On peut citer ainsi Jean Fautrier, Jean Tinguely, Sigmar Polke et Jean-Michel Basquiat, dont les œuvres permettent de prolonger de façon dynamique certains fils conducteurs déjà existants de la Collection Beyeler. L’intégralité des œuvres données — dont certaines n’ont encore jamais été montrées en public — est présentée dans le cadre de cette exposition, ce qui permet à de nombreux visiteurs de les découvrir pour la toute première fois.
Le commissaire de cette exposition est Raphaël Bouvier.
Fondation Beyeler, Beyeler Museum
AG, Baselstrasse 77, CH-4125 Riehen
Heures d’ouverture de la Fondation Beyeler :
tous les jours 10h00–18h00, le mercredi jusqu’à 20h00
Images courtoisie de la Fondation Beyeler

Ferdinand Hodler à la Fondation Beyeler

Ferdinand Hodler exposition  27 janvier – 26 mai 2013
La Fondation Beyeler consacre à l’oeuvre tardive de Ferdinand Hodler une vaste exposition. Parmi les 80 objets on peut voir de  majestueux paysages alpins, quelques uns de ses  autoportraits, sa fascination pour les femmes, la mort, l’éternité.  Eros, Chronos, Thanatos.

Ferdinand Hodler Le lac Léman et le Mont Blanc à l’aube 1918
Huile sur toile, 60 x 126 cm
Collection privée
Photo: Hulya Kolabas

C’est précisément au cours de ces années 1913 à 1918, les dernières de son existence, que son importance pour l’art moderne apparaît véritablement. Ses oeuvres se font alors plus radicales et plus abstraites. Un rebelle et un artiste d’une grande sensibilité qui aimait se mettre en scène et entretenait un important réseau de relations à Munich, Vienne et Paris : Ferdinand Hodler a marqué comme aucun autre l’image que la Suisse se fait d’elle-même, et ses créations font indissolublement partie du patrimoine culturel de ce pays. Cette exposition s’attache notamment à mettre en évidence le rôle international de Hodler comme précurseur d’une peinture moderne. L’exposition d’oeuvres tardives de Ferdinand Hodler intitulée « Ferdinand Hodler – View to Infinity », montée par la Neue Galerie de New York en 2012 en collaboration avec la Fondation Beyeler de Riehen/Bâle et que l’on pouvait voir à New York jusqu’au 7 janvier, a été la plus grande jamais consacrée à ce peintre suisse aux États-Unis : Hodler, grand modèle des Sécessionnistes viennois, y est apparu comme un pionnier et précurseur de l’art moderne. Les paysages de Hodler, ses séries de vues du lac Léman, des sommets, des massifs et des torrents alpins, le rythme presque chorégraphique de ses portraits émanaient de sa conviction que le monde réel aussi bien que sa représentation artistique sont soumis aux lois du parallélisme :
« le parallélisme est une loi qui dépasse l’art, car il domine la vie » — tels sont les propos que C.A. Loosli attribue à son ami artiste.
Par ce terme de « parallélisme », Hodler désignait une succession réitérée, mais jamais identique, de lignes, de mouvements, ou aussi de sommets, de nuages par exemple, qui définissent le caractère d’un paysage, en même temps que les sensations que celui-ci fait naître chez le spectateur. Le parallélisme devient une impression stylisée, sans nier pour autant l’individualité : à l’image d’un chant polyphonique, d’une sorte de pendant rythmique de la vie, les lignes et les mouvements parviennent à une union harmonieuse, comme en témoigne la version bâloise en grand format de
Regard dans l’Infini (Blick in die Unendlichkeit).

Kandinsky lui-même prétendait reconnaître dans ce type de « composition mélodique » de Hodler un moyen d’éloigner le figuratif, afin de mieux dégager les lignes et les formes. Regard dans l’infini révèle également l’intérêt de Hodler pour les réformes de l’art de la danse, incarnées notamment par Isadora Duncan et Emile Jaques-Dalcroze avec la danse d’expression moderne.  Dans ces mouvements répétés et fluides, dans le rythme infini de figures changeantes, Hodler retrouvait le parallélisme en même temps que le beau va-et-vient de la vie et de la mort, un des éléments qui unit tous les êtres humains. La technique du peintre oscille entre représentation figurative et abstraite. Grand amateur d’auxiliaires techniques (il utilisait notamment le compas), Hodler n’hésitait pas à recourir au calque et au portillon de Dürer, sur la vitre duquel il dessinait les contours de ses modèles qu’il reportait ensuite sur son support après un travail de mesure presque pointilleux. Il lui arrivait aussi de recopier partiellement les silhouettes des chaînes alpines de ses paysages, ce qui explique que de nombreuses oeuvres existent en différentes versions, réalisées parfois plusieurs années après la création initiale. Ce procédé présentait également l’avantage de permettre au peintre de satisfaire la demande de ses très nombreux acheteurs. L’idée de parallélisme se transforme en série, un aspect marquant de l’oeuvre de Hodler. On remarque, surtout dans ses monumentaux tableaux de figures, qu’ils ont été réalisés à partir de différents éléments, constamment variés et re-combinés. Sa théorie du parallélisme, qui ne lui valut pas l’admiration unanime de ses collègues artistes — certains raillaient en effet sa méthode de composition presque tatillonne —, trouvait son expression dans la recherche d’un ordre et d’une symétrie formels, ainsi que dans la répétition, avec ou sans variations, du semblable.  En même temps, Hodler s’est passionné pour la photographie, il en collectionnait et s’en servait également pour la préparation et l’exécution de ses oeuvres. C’est en partie à son intérêt pour ce moyen d’expression encore relativement récent que nous devons les impressionnantes photographies de son amie, la collectionneuse Gertrude Dübi-Müller, des clichés qui nous font découvrir les méthodes de travail de Hodler ainsi que sa nature même et nous permettent également d’être témoins de son dernier jour.

Cette exposition s’ouvre sur une salle de documentation qui ne rend pas seulement hommage à la vie et à l’oeuvre de Hodler, mais présente de nombreuses photographies de Gertrude Dübi-Müller qui rappellent comme par un sinistre effet de miroir les adieux de Hodler à Valentine Godé-Darel. « L’art pour la vie » et non « l’art pour l’art »— voilà ce que Hodler prenait à coeur. Le spectateur ne peut qu’être troublé par les portraits qu’il a réalisés de sa compagne, Valentine Godé-Darel, atteinte d’une maladie incurable à quarante ans et dont Hodler accompagna par le dessin et la peinture le chemin de croix, jusqu’à sa mort en 1915.
Ferdinand Hodler
ferdinand Hodler – Bildnis Valentine Godé-Darel (Französischer Frauenkopf), vers 1912
Portrait de Valentine Godé-Darel (Tête d’une Française)
Huile sur toile, 43 x 33 cm
Kunsthaus Zürich, Vereinigung Zürcher Kunstfreunde
Photo: © Kunsthaus Zürich

Hodler démontre ici que sa théorie du parallélisme s’appuie effectivement sur une observation pénétrante de la vie, car son regard, lorsqu’il retrace la déchéance physique de Valentine et de La splendeur de ses lignes (Linienherrlichkeit) est lucide et pourtant aimant, et profondément humain.
Ferdinand Hodler Portrait de Valentine Godé-Darel malade 1914 Rudoph Staechelin Collection dépôt Kunstmuseum Basel

 
Cette exposition consacre une salle entière à 14 oeuvres de cette période de sa création. Les images de Valentine mourante paraissent, dans leurs contours, dessiner les paysages de la souffrance. Elles nous renvoient par sa facture au Christ mort de Holbein (Kunstmuseum Basel), ou à celui de Jean Jacques Henner (musée des Beaux Arts de Lille.
La toile de Claude Monet peignant Camille sur son lit de mort, ne sera révélée que 80 ans plus tard, seul Clemenceau sera dans la confidence, sans que le nom de la morte soit révélé. Est-ce la pudeur, la mauvaise conscience de s’être laissé aller à son instinct de peintre, ou était-ce la seule manière de surmonter son chagrin et de conserver l’image de l’être aimé. Une autre toile d’Edward Munch « L’enfant malade », l’artiste peint sa sœur malade, il y exprime toute la tristesse et la douleur ressenties.
Ferdinand Hodler Bildnis der toten Valentine Godé-Darel, 1915Collection privée, 65,5 x 81 cm

En revanche, les petites vues du Mont Blanc et du lac Léman que Hodler esquisse après la mort de Valentine marquent le passage à un traitement libéré de la couleur.
Le point fort de cette exposition est consacré aux paysages aussi renommés que populaires de Hodler qui célèbrent la splendeur et la monumentalité des montagnes suisses. Hodler met en scène en vue lointaine ou rapprochée les paysages alpins, donnant l’impression de « zoomer » littéralement sur les sommets, tout en les laissant planer comme des apparitions, détachés de la réalité.
Ferdinand Hodler Paysage de Montana 1915

Hodler, qui jusqu’alors avait toujours accentué les contours de ses toiles et pensé à partir de ceux-ci, se transforme dans ces tableaux de paysages en peintre de surfaces chromatiques. La peinture abstraite de champs colorés d’un Mark Rothko ou d’un Barnett Newman s’annonce déjà. Ses « gros plans » de torrents et de formations rocheuses dévoilent leur matérialité dans une lumière d’une clarté éblouissante. Les vues de paysages d’une grande sobriété renoncent aux détails à quelques exceptions près — vaches qui paissent au loin, limite des arbres ou cygnes sur les rives du lac, aussi stylisés que mystérieux. Le spectateur est séparé des sommets par une grande distance, marquée par des plans d’eau, de la brume ou des nuages, qui transforment les Alpes en tableau abstrait méditatif. Le cadrage a une importance primordiale pour Hodler : il détermine l’ordre, la symétrie et apparaît comme une « abréviation de l’infini ». Ses expériences de répétition de formations nuageuses font pressentir les ovales des tableaux d’arbres et d’embarcadères de Mondrian. Cette synthèse entre vue rapprochée et vue lointaine est un aspect que l’on retrouve dans les autoportraits de Hodler.
Ferdinand Hodler
ferdinand Hodler Selbstbildnis, 1914
Autoportrait
Huile sur toile, 43 x 39 cm
Museum zu Allerheiligen, Schaffhouse
Photo: Museum zu Allerheiligen, Schaffhouse

Le regard que le peintre porte sur le spectateur est interrogateur, sceptique ; son attitude est pleine d’assurance. Contradictoire de nature — artiste, séducteur, théoricien et praticien passionné du parallélisme —, tout à la fois sensible, pragmatique et sanguin, Hodler possédait en tant qu’artiste une personnalité très extravertie, parfaitement en mesure de faire face aux critiques occasionnelles suscitées par son oeuvre et qui, dans sa jeunesse, cherchait de façon presque agressive à participer à des concours et à des expositions publiques. Artiste du contour affirmé dans ses jeunes années, Hodler a évolué pour devenir un peintre qui dessinait à l’aide de la couleur. Si dans ses propres « Dix Commandements », il évoquait la surface comme unique point de départ géométriquement divisible permettant de parvenir finalement à la ligne en passant par le contour ainsi obtenu, il formula vers la fin de sa vie des idées très nuancées sur le rôle de la couleur dans son oeuvre. Il est parvenu à la conclusion que la forme vit à travers la couleur. Le bleu, qui revient dans les paysages de lacs et de montagnes comme dans les vêtements fluides des figures féminines du Regard dans l’infini, était sa « couleur préférée ». Le bleu typique de Hodler domine du reste cette exposition.
 
Ferdinand Hodler

 
L’exposition s’accompagne d’une série de manifestations, parmi lesquelles une représentation de « Trois Anges », spectacle du célèbre artiste de cabaret Emil Steinberger. Le professeur Oskar Bätschmann présente le deuxième volume du catalogue raisonné de l’oeuvre de Hodler réalisé en collaboration avec le S.I.K. de Zürich. Gian Domenico Borasio, médecin et auteur à succès, tient une conférence sur son livre intitulé « Über das Sterben », tandis que le commissaire de l’exposition, Ulf Küster, présente la nouvelle biographie « Ferdinand Hodler ». Un débat organisé en collaboration avec « Das Magazin », animé par le rédacteur en chef Finn Canonica met un point final à tous ces événements.
Les commissaires de l’exposition sont Ulf Küster (Fondation Beyeler) et Jill Lloyd (Neue Galerie). Les tableaux prêtés pour cette exposition font partie des oeuvres clés de l’artiste et proviennent de célèbres collections particulières suisses et américaines, ainsi que de musées nationaux et internationaux de renom, comme le Musée d’art et d’histoire de Genève, le Kunstmuseum Basel, le Kunsthaus Zürich, le Musée d’Orsay de Paris et le Kunstmuseum Solothurn. La Fondation Beyeler remercie: Artephila Stiftung ; Ernst Göhner Stiftung ; Max Kohler Stiftung ; Novartis ; Walter Haefner Stiftung pour les généreuses subventions liées au projet et leur contributions exceptionnelles. À l’occasion de cette exposition, la Fondation Beyeler publie un catalogue en allemand et en anglais. L’édition destinée au commerce est éditée par Hatje Cantz Verlag, Ostfildern. Ce volume contient une préface de Sam Keller et Ulf Küster, des contributions d’Oskar Bätschmann, Sharon Hirsh, Ulf Küster, Jill Lloyd et Paul Müller ainsi qu’une digression de Peter Pfrunder. Il comprend 212 pages, env. 200 illustrations et est disponible au musée au tarif de 68 CHF (ISBN 978-3- 906053-05-9, allemand ; ISBN 978-3-906053-06-6, anglais).
extrait du texte de la Fondation Beyeler

Images courtoisie de la Fondation Beyeler

Fondation Beyeler 2012/2013

 

Fondation Beyeler ©

La Fondation Beyeler a tourné la page de l’année 2012 sur une note de succès puisqu’elle a attiré 368 705 visiteurs. Ce chiffre en fait une nouvelle fois le musée le plus fréquenté de Suisse. Les visiteurs étrangers sont en augmentation de 16,9 %. Le site internet a enregistré 826 259 visites au cours de l’année écoulée, un résultat sans précédent qui situe la Fondation Beyeler à la 10e place pour les activités des médias sociaux parmi les musées de l’espace germanophone. Le programme de l’année 2013 s’ouvre sur Ferdinand Hodler,( billet à venir) probablement le plus célèbre des peintres suisses. Avec Max Ernst et Thomas Schütte, ce sont deux des plus grands représentants allemands de l’art moderne et contemporain qui seront présentés au public. En 2012, la Fondation Beyeler a organisé quatre expositions : « Pierre Bonnard » (107 465 visiteurs),
 
Jeff Koons nettoyant ses chaussures après avoir » inspecté « Split Rocker

 « Jeff Koons » (109 567 visiteurs), « Philippe Parreno » (91 326 visiteurs au cours de ce laps de temps) et « Edgar Degas » (130 073 visiteurs à la date du 20 janvier 2013), cette dernière exposition se poursuivant jusqu’au 27 janvier 2013. Dans le cadre de l’exposition « Jeff Koons », un nouveau projet spectaculaire a été réalisé dans l’espace public avec Split Rocker.
 
La Fondation Beyeler achève la restauration de « Passage à niveau » de Fernand Léger (1912) avec la coopération de la Fondation BNP Paribas Suisse
« Le passage à niveau » de Fernand Léger a vu le jour il y a tout juste un siècle, en 1912. Dans le cadre du projet de restauration soutenu depuis 2011 par la Fondation BNP Paribas Suisse, l’équipe de restauration de la Fondation Beyeler s’est engagée dans une étude approfondie de cette œuvre. Cette toile de Fernand Léger fait partie de la Collection Beyeler et a été acquise grâce à une contribution de Kurt Schwank.
restauration Passage à niveau de Fernand Léger

 
Fernand Léger (1881-1955) occupe une place majeure dans la collection puisqu’il y est représenté par douze toiles, qui reflètent tout l’éventail de sa création. Ernst Beyeler s’est intéressé précocement à Léger, fasciné par la position originale qu’il occupe parmi les principaux acteurs de l’art moderne et par l’influence qu’il a exercée sur des artistes américains comme Roy Lichtenstein et Ellsworth Kelly, eux aussi présents dans la Collection Beyeler.
 
« Le passage à niveau », un rare paysage de jeunesse de Léger situé à l’intersection entre représentation figurative et abstraction, n’exerce pas seulement une fonction de charnière dans l’œuvre de l’artiste. Il joue également un remarquable rôle de passerelle entre les œuvres de Paul Cézanne et Henri Rousseau et les tableaux cubistes de Pablo Picasso et Georges Braque.
 Le recours à de nombreuses méthodes d’analyse scientifique a permis aux restaurateurs d’obtenir de précieuses informations sur les matériaux, la technique et l’histoire de cette toile.
Ces nouvelles connaissances ont montré qu’il n’est pas indispensable de classer « Le passage à niveau » parmi les œuvres d’une fragilité fondamentale. Selon la restauratrice de toiles Friederike Steckling : « C’est plutôt le choix des matériaux opéré par l’artiste et les effets de l’histoire qui sont responsables de l’état actuel du « Passage à niveau ».
 
Léger 2

 Pour préparer sa toile, Fernand Léger s’est servi d’un apprêt exceptionnellement sensible à l’eau. Un contact très précoce avec une forte humidité, probablement pendant la Première Guerre mondiale, ainsi qu’une restauration antérieure avec un produit liquide ont provoqué des dégâts. L’équipe s’est donc mise en quête de reproductions historiques afin de reconstituer les modifications subies par cette œuvre.
 L’ampleur de la restauration et les mesures concrètes à prendre ont été définies à partir des résultats obtenus. Certaines retouches mal intégrées réalisées lors d’une restauration antérieure ont été retirées en priorité. On a également harmonisé la couleur de certaines zones d’usure, grosses comme une pointe d’épingle, réparties uniformément sur la surface. Les retouches, réversibles, ont concerné exclusivement ces zones déjà endommagées.
L’objectif de l’équipe de restauration était de remédier à l’aspect irrégulier et écaillé de la couche picturale pour rendre dans toute la mesure du possible à cette œuvre son état originel de 1912, sans dissimuler pour autant son histoire et son âge. L’étude d’autres œuvres de jeunesse de Fernand Léger a été fort utile en l’occurrence, car l’observation de leurs surfaces intactes et de leur fonctionnement a permis d’en rapprocher celle du
« Passage à niveau ».
 Enfin, on a retiré des bandes de tissu dénuées de toute justification historique du dos du châssis et on a stabilisé les bords de la toile. L’œuvre a obtenu un nouvel encadrement plus stable et a été munie d’une protection contre les vibrations fixée sur l’arrière du châssis pour éviter d’éventuels dégâts lors de transports. Les mesures de restauration réalisées sont discrètes et ne sont visibles, en grande majorité, que sur des détails.
La restauration est l’art de préserver l’art. Le temps laisse en effet des traces sur les œuvres d’art. Le service de restauration de la Fondation Beyeler emploie depuis 2001 une équipe sous la direction du restaurateur Markus Gross. La restauration des œuvres d’art est une discipline scientifique, qui associe les méthodes de recherche les plus récentes à de vastes connaissances historiques et exige dans certains cas un véritable  travail de détective. En tant qu’institution muséale, la Fondation Beyeler a pour mission de préserver durablement les œuvres d’art afin de les transmettre aux générations à venir.
 
Leger 3

Ce travail de restauration a duré plus d’un an. Sam Keller, directeur de la Fondation Beyeler, déclare à ce sujet : «  La Fondation BNP Paribas Suisse a permis la restauration d’une remarquable toile de Fernand Léger. En sa qualité de musée possédant une importante collection d’œuvres de cet artiste, la Fondation Beyeler est très reconnaissante du soutien et de l’engagement de la Fondation BNP Paribas Suisse en faveur du patrimoine culturel et est très heureuse que « Le passage à niveau » ait pu être étudié, restauré et rétabli dans un état permettant son exposition et son transport ».
Mue par le désir de participer activement à la préservation des fonds des musées afin qu’ils puissent être transmis aux générations futures, la Fondation BNP Paribas Suisse s’engage depuis plus de 20 ans en faveur de la restauration d’œuvres d’art en Europe, en Asie et aux États-Unis. En Suisse, elle a déjà soutenu plus d’une douzaine de projets visant à la conservation d’œuvres majeures de Max Ernst, Mattia Preti, Auguste Rodin, Bram van Velde et Paolo Véronèse. Elle poursuit jusqu’en 2014 son projet de restauration avec la Fondation Beyeler, qui concerne au total trois œuvres de la collection.
À partir de février 2013, la toile de Fernand Léger restaurée sera présentée dans le nouvel accrochage de la Collection à la Fondation Beyeler. En même temps et dès le début de la nouvelle année sera lancé le projet de restauration suivant portant sur le plâtre original de la sculpture de Max Ernst « Le roi jouant avec la reine » (Der König spielt mit seiner Königin) de 1944. Celui-ci sera présenté à l’occasion de la rétrospective que la Fondation Beyeler consacrera à Max Ernst du 26 mai au 8 septembre 2013. Avec plus de 170 toiles, collages, dessins, sculptures et livres illustrés, cette exposition présentera toutes les phases de la création de cet artiste, ses découvertes et ses techniques, à travers un grand nombre de chefs-d’œuvre. Conçue par Werner Spies et Julia Drost, cette exposition est réalisée en collaboration avec l’Albertina de Vienne. Le commissaire de l’exposition pour la Fondation Beyeler est Raphaël Bouvier.
 
 Image 1 et 3 /4 / 5  courtoisie Fondation Beyeler
 
image 2 de l’auteur
 
 
 
 

 

 

 
 
 

Paul Durand-Ruel et le terrible Edgar Degas

Dans le cadre de l’exposition « Edgar Degas », la Fondation Beyeler propose une conférence en français de Caroline Durand-Ruel sur
« Paul Durand-Ruel et le terrible Edgar Degas ».
 

Edgar Degas – Le Petit Déjeuner à la sortie du bain, vers 1895−98
Pastel sur papier transparent rapporté, 122 x 92 cm
Collection privée

 
L’arrière-petite-fille du célèbre marchand d’art parisien, énergique défenseur de Degas, parle des relations de l’artiste avec la maison Durand-Ruel et évoque quelques figures de grands collectionneurs de travaux de Degas ainsi que plusieurs œuvres majeures découvertes dans l’atelier de l’artiste après sa mort, et vendues par la suite.
Le premier contact entre Edgar Degas et Paul Durand-Ruel remonte à 1872. Malgré le caractère parfois ombrageux de l’artiste, le marchand d’art et ses fils réussissent à préserver cette relation pendant de nombreuses années. La galerie organise en 1892 la première exposition individuelle d’œuvres de Degas à Paris, où le public peut découvrir, avec des réactions mêlées, une sélection de ses monotypes en couleurs de paysages réalisés à partir de 1890. L’exposition « Edgard Degas » de la Fondation Beyeler réserve toute une salle au motif des paysages de l’œuvre tardive de Degas, présentant ainsi une douzaine de monotypes provenant de collections particulières et de musées internationaux. 
 
Edgar Degas portrait

Caroline Durand-Ruel a travaillé aux côtés de son père, après la mort duquel elle a dirigé la galerie pendant 20 ans. Dans le cadre d’un colloque, elle a publié des lettres de Degas conservées dans les archives de la galerie. Elle a également rédigé plusieurs articles à l’occasion d’expositions internationales, dont celles consacrées à Sisley au Musée d’Orsay et à la Collection Havemeyer également au Musée d’Orsay, à Théo van Gogh au Van Gogh Museum d’Amsterdam ainsi qu’à Monet à la Fondation Gianadda.
Il est possible de visiter l’exposition « Edgar Degas », en place jusqu’au 27 janvier 2013, avant la conférence. Après avoir tourné le dos à l’impressionnisme vers 1880, Edgar Degas a atteint le sommet incontesté de sa création dans son œuvre tardive pleine d’audace et d’originalité. La vaste exposition de la Fondation Beyeler présente ses célèbres représentations de danseuses, ainsi que des nus féminins, des cavaliers et des paysages. On peut y voir environ 150 peintures, pastels, sculptures, dessins, gravures et photographies provenant de collections publiques et privées du monde entier.
Programme :
Cette manifestation se déroule le 7 novembre 2012 de 18h30 à 20h00 à la Fondation Beyeler.
Tarif :
Manifestation gratuite pour les visiteurs du musée.
Cette conférence est organisée en collaboration avec l’Alliance Française de Bâle.

« L’Art, c’est quoi ? 27 questions, 27 réponses »

«L’Art, c’est quoi ? »: une nouvelle publication de la Fondation Beyeler donne, par le mot et par l’image, des réponses accessibles à tous.

L'art c'est quoi ? ISBN Fondation Beyeler: 000-3-905632-96-9 (D) / 000-3-905632-97-7 (F) / 000-3-905632-99-3 (E) / 000-3-905632-98-5 (I)

En 216 pages, « L’Art, c’est quoi ? 27 questions, 27 réponses » propose une introduction divertissante au monde de l’art. 27 questions directes, surprenantes et pleines d’humour trouvent des réponses claires et aisément compréhensibles. À travers des clichés exceptionnels, le célèbre photographe Andri Pol a visualisé la rencontre entre l’homme et l’art en différents lieux artistiques. Cet ouvrage a pour objectif de faciliter l’accès à l’art des jeunes et des adultes intéressés.

Des jeunes dessinent le Porte-bouteilles de Marcel Duchamp au Philadelphia Museum
of Art © Photo: Andri Pol
Qu’est-ce qui fait de quelque chose une oeuvre d’art? Quand une oeuvre ne lui plaît pas, que fait l’artiste ? Est-ce qu’Andy Warhol aimait la soupe à la tomate? Pourquoi l’art est-il si intéressant ? Les graffitis est-ce que c’est de l’art? Pourquoi la plupart des artistes célèbres sont-ils des hommes ? À quoi ressemblerait la vie si l’art n’existait pas ? L’équipe de Médiation artistique de la Fondation Beyeler a préparé cette publication en collaboration avec des jeunes et a rassemblé leurs questions personnelles sur le thème de l’art. Ce livre offre des réponses facilement intelligibles aux 27 questions les plus fréquentes, et les plus captivantes.

Jeune homme devant Le lion, ayant faim, se jette sur l’antilope (1898/1905) d’Henri Rousseau à la Fondation Beyeler, Riehen / Bâle
© Photo: Andri Pol
«L’Art, c’est quoi? 27 questions, 27 réponses» amène le lecteur à l’art par les voies les plus diverses. On a également interrogé sur leur rapport personnel à l’art des artistes connus, un restaurateur, une organisatrice d’expositions, un directeur de musée, un galeriste, un assureur d’art, une enseignante d’art, un commissaire-priseur et le principal responsable culturel de Suisse. Parmi ces spécialistes figurent des personnalités comme John Armleder, le conseiller fédéral Alain Berset, Bice Curiger, Sam Keller, Elodie Pong, Simon de Pury ou Ivan Wirth. Ce livre donne également la parole à des jeunes qui posent un regard sans préjugé sur la question-titre «L’Art, c’est quoi?»

Visiteuse devant Untitled (Red, Orange) (1968) de Mark Rothko
© Photo: Andri Pol
39 photographies d’Andri Pol immortalisent des instants de rencontre entre l’homme et l’art. Elles montrent les effets qu’exerce l’art, ainsi que ses incidences sur notre vie. La maquette très esthétique de ce livre, parfaitement en harmonie avec son contenu, a été conçue par Müller + Hess. En plus du soutien généreux qu’elle a accordé à ce projet, l’UBS encourage t sa diffusion en tant que Partenaire de la Médiation artistique pour les familles et les jeunes.
Des visiteuses regardent la sculpture de Jeff Koons Michael Jackson and Bubbles (1988) à la Fondation Beyeler, Riehen / Bâle
© Photo: Andri Pol
Cette publication est éditée en allemand, en français, en italien et en anglais. Elle est disponible à partir de la mi-octobre 2012 en librairie ainsi qu’à la boutique de la Fondation Beyeler Riehen / Bâle.
La présentation du livre a lieu le dimanche 21 octobre 2012 de 16 à 18 heures dans le cadre de la Journée familles à la Fondation Beyeler.
Références
Titre : « L’Art, c’est quoi ? 27 questions, 27 réponses »
Format : 170 x 130 mm, 216 pages, 39 illustrations
Date de parution : disponible à partir de la mi-octobre 2012 en allemand, français, italien, anglais.
Editeur scientifique : Fondation Beyeler, Riehen/Bâle
Auteurs : Stefanie Bringezu, Daniel Kramer, Janine Schmutz Photos: Andri Pol
Maquette : Müller + Hess
Editeur : Hatje Cantz
ISBN Fondation Beyeler: 000-3-905632-96-9 (D) / 000-3-905632-97-7 (F) / 000-3-905632-99-3 (E) / 000-3-905632-98-5 (I)
ISBN Editeur: 978-3-7757-3526-1 (D), 978-3-7757-3528-5 (F), 978-3-7757-3527-8 (E)
Renseignements :
Fondation Beyeler, Beyeler Museum AG, Baselstrasse 77, CH-4125 Riehen
Heures d’ouverture de la Fondation Beyeler : tous les jours de 10h00 à 18h00, le mercredi jusqu’à 20h00.