MONDRIAN EVOLUTION

Avond (Soir) :
L’Arbre rouge, 1908–1910
Huile sur toile
70 x 99 cm
Kunstmuseum Den Haag
La Haye, Pays-Bas

A la Fondation Beyeler jusqu’au 9 OCTOBRE 2022
Cette exposition de la Fondation Beyeler, Riehen/Bâle, a été organisée en coopération avec le Kunstmuseum Den Haag.
Elle est placée sous le
commissariat d’Ulf Küster, Senior Curator, Fondation Beyeler.
Elle sera ensuite présentée
à la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen à Düsseldorf.

Fondation Beyeler célèbre ses 25 années d’existence

La collection de la Fondation Beyeler comprend surtout des œuvres tardives de Mondrian, mais l’exposition se concentre principalement sur les œuvres des débuts de l’artiste, dont le développement est influencé non seulement par la peinture de paysage hollandaise de la fin du 19ème siècle mais aussi par le symbolisme et le cubisme. Ce n’est qu’au début des années 1920 que Mondrian commence à se concentrer sur un vocabulaire pictural pleinement non figuratif composé d’agencements rectilignes de lignes noires sur fond blanc et des trois couleurs primaires bleu, rouge et jaune.

Vous allez suivre ici comment Piet Mondrian (1872–1944), l’un des artistes les plus célèbres de l’art moderne, s’est métamorphosé de peintre paysagiste en avant gardiste et pionnier de l’art abstrait. L’année 2022 marque le 150ème anniversaire de sa naissance.
L’ÉQUIPE DE RESTAURATION AU TRAVAILSept oeuvres importantes de l’artiste se trouvent dans la Collection Beyeler. À l’occasion de cette exposition, elles ont été examinées par des expert·e·s en conservation et en restauration, permettant d’acquérir des connaissances pour partie tout à fait nouvelles.
Avec 89 oeuvres provenant de collections privées et publiques en Europe
et aux États-Unis,

Piet Mondrian
Composition losange avec huit lignes et rouge / Picture N° III, 1938
Huile sur toile, diagonales 141,5 cm, côtes 100 x 100 cm
Fondation Beyeler, Riehen/Bâle, Collection Beyeler
© Mondrian/Holtzman Trust
Photo: Robert Bayer, Bâle


«Mondrian Evolution» retrace le parcours saisissant de l’artiste, de peintre paysagiste du 19ème siècle à l’un des protagonistes majeurs de l’art moderne. L’exposition offre une rare occasion de découvrir sous un jour
nouveau le travail de Mondrian, qui a profondément influencé le 20ème siècle non seulement dans le domaine de l’art mais aussi dans ceux du design, de l’architecture, de la mode et de la culture pop. Il s’agit de la première exposition individuelle consacrée à l’artiste en Suisse depuis 50 ans.

CONTRASTES

Piet Mondrian
Femme au fuseau, ca. 1893–1896
Huile sur toile, 36,8 × 29,8 cm
Prêt de la Pace Gallery
© 2022 Mondrian/Holtzman Trust
Photo: Kerry Ryan McFate

L’exposition est conçue de manière chronologique mais elle tire son expressivité de la confrontation
d’oeuvres précoces et tardives, qui met en lumière les forces de transformation à l’oeuvre dans le travail de Mondrian. Au fil de neuf salles d’exposition, on retrouve des motifs récurrents tels les moulins à vent, les
dunes, la mer, les bâtiments de ferme se reflétant dans l’eau et les plantes, représentés à des degrés divers d’abstraction.
Dans ses paysages, Piet Mondrian explore l’éclat et le rayonnement de la couleur – ce qui donne à ces tableaux leur apparence extraordinairement lumineuse et vive – ainsi que l’influence de la lumière et l’expérience de l’espace, de la surface, de la structure et des reflets.

Moulin à Oostzijde dans le crépuscule, vers 1907–1908
Huile sur toile, 67,5 × 117,5 cm
Musée d’Art de La Haye, Pays-Bas
Legs Salomon B. Slijper
© 2022 Mondrian/Holtzman Trust
Photo: Musée d’Art de La Haye

Le tableau Moulin au soleil, 1908

Piet Mondriaan
Molen bij zonlicht
Post Restauratie 2011

Le tableau Moulin au soleil, 1908, dont la radicalité apparaît encore aujourd’hui, avait provoqué un tollé parmi les critiques de l’époque avec son explosion de couleurs et sa technique picturale d’apparence sommaire. L’exposition présente également l’oeuvre Le nuage rouge, 1907, qui saisit le moment magique et fugace auquel le soleil couchant teinte un nuage rouge vif alors même que le paysage et le ciel demeurent
encore d’un bleu éclatant. Ce tableau appartient à un groupe d’oeuvres que Mondrian a peintes au crépuscule, lorsque les couleurs et les combinaisons chromatiques sont soumises à des transformations intenses. Dans ses autoportraits dessinés de 1908, il se représente également au crépuscule, les pupilles grand ouvertes et réceptives aux plus infimes nuances chromatiques produites par la lumière. Le tableau de grand format Forêt près d’Oele, 1908, du Kunstmuseum Den Haag offre une perspective dirigée vers le soleil, situé au-dessus de l’horizon. La succession des troncs d’arbres qui se teintent de rouge ou de violet dans le contre-jour crée l’illusion de spatialité.


Piet Mondriaan
Bosch; Bos bij Oele
128 x 158 cm

Rencontre avec le cubisme à Paris

Après les explosions chromatiques des années 1907 à 1911, Mondrian, inspiré par sa rencontre avec le cubisme à Paris, revient à des couleurs moins éclatantes. Des tons gris et ocres dominent désormais ses tableaux et la ligne en tant que telle devient toujours plus importante. Mondrian poursuit son exploration de thèmes comme l’abstraction. La métamorphose de ses représentations d’arbres est particulièrement impressionnante, donnant à voir le raisonnement qui sous-tend sa quête picturale. L’expérience de ces
tableaux permet à Mondrian de se détacher entièrement de la figuration. Composition No. IX, 1913, un prêt du Museum of Modern Art à New York,
est une imbrication de formes pour la plupart caractérisées
par des angles droits.

New York City 1

New York City 1 est l’oeuvre la plus récente de l’exposition et appartient à un petit groupe de tableaux créés autour de 1941. Sa composition est semblable à celle de Forêt près d’Oele de 1908, mis à part le fait qu’elle
n’entretient plus aucun rapport avec un paysage réel mais tient d’une «abstraction pure». L’oeuvre est inachevée et apporte un

NEW YORK CITY 1, 1941
Huile et papier sur toile, Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen, Düsseldorf

témoignage important du processus de travail de Mondrian dans les dernières années de sa vie. À New York, il avait commencé à reconfigurer ses images et à les rendre plus dynamiques et plus rythmiques à l’aide de bandes de papier. Les surfaces colorées cèdent alors le pas aux lignes de couleur.

Petite Biographie

Né en 1872 à Amersfoort aux Pays-Bas, Mondrian entre tôt en contact avec l’art : son père enseigne le dessin, son oncle est un peintre amateur à succès, influencé par la peinture de paysage de l’École de La Haye, incarnation spécifiquement néerlandaise de Piet Mondrian
Ferme près de Duivendrecht, vers 1916
Huile sur toile, 86,3 x 107,9 cm
The Art Institute of Chicago, don de Dolly J. van der Hoop Schoenberg
© 2022 Mondrian/Holtzman Trust
Photo: bpk/The Art Institute of Chicago/Art Resource, NY

l’impressionnisme. Après une éducation calviniste et une formation en tant que professeur de dessin, entre 1892 et 1895 Mondrian étudie à la Rijksakademie van Beeldende Kunsten à Amsterdam. Il continue à travailler en tant que professeur de dessin, peint des  portraits sur commande et réalise des dessins scientifiques pour l’Université de Leyde. Mais il poursuit également ses ambitions artistiques et développe rapidement son propre style. La plupart des oeuvres de cette période, qui représentent majoritairement des moulins à vent, des rivières et des bâtiments de ferme,
témoignent encore de l’influence de l’École de La Haye. À partir de cette base, Mondrian élargit avec détermination le champ de ses possibilités artistiques.

Philosophie et Esotérisme

L’art de Mondrian est étroitement lié à son intérêt pour la philosophie et l’ésotérisme. À partir de 1908, il se passionne pour la théosophie ; influencé par les écrits de Rudolf Steiner – alors encore théosophe – en  1909 il adhère à la section néerlandaise de la Société théosophique. Sa rencontre avec le cubisme mène fin 1911 à un premier séjour à Paris qui dure jusqu’en 1914, lorsque Mondrian ne peut y retourner en raison du début de la Première Guerre mondiale. En 1919, il s’installe durablement à Paris.
Après la Première Guerre mondiale, les artistes sont nombreux à chercher un renouveau culturel radical.
Aux Pays-Bas, un groupe d’artistes d’avant-garde se constitue et publie à partir de 1917 la revue De Stijl.
Mondrian formule l’intention du groupe de démanteler les traditions afin de refonder tous les aspects de la vie sur la base des éléments essentiels de l’art tels qu’il les défend.

No. VI / Composition No.II

Dans des écrits théoriques, Mondrian tente d’exposer son programme artistique. Il désigne sa nouvelle forme d’expression picturale sous le terme de «néoplasticisme», qu’il conçoit en première ligne comme une concentration sur les moyens d’expression essentiels de la peinture : d’une part le noir et le blanc,
situés aux extrêmes opposés de l’échelle des couleurs, d’autre part les couleurs primaires jaune, rouge et bleu. Le noir est généralement celui des lignes qui s’étirent à la verticale et à l’horizontale, se croisant à angle droit. La combinaison de ces éléments ouvre des possibilités de composition infinies. Mondrian s’intéresse à l’image essentielle, à la création d’un équilibre parfait et tendu à la fois, dans lequel tous les éléments semblent à leur place.
Mondrian passe les 25 dernières années de sa vie dans les trois métropoles de l’art moderne: Paris, Londres et New York. De fin 1911 à 1938, avec une interruption due à la Première Guerre mondiale, il vit à Paris. Après quelques années à Londres, en 1940 il s’installe à New York, où il décède en 1944 âgé de 71 ans. En tant que membre de la Société théosophique, Mondrian accordait une grande importance à l’internationalité. Il accède au statut de célébrité dès les années 1920 en tant qu’artiste d’avant-garde et co-initiateur de la peinture abstraite. Ses ateliers deviennent des lieux légendaires, sources d’inspiration
surtout pour des artistes plus jeunes dont Willem de Kooning et Lee Krasner.

Le film «Piet & Mondrian»

Dans le cadre de l’exposition, la Fondation Beyeler présente le film «Piet & Mondrian», un court-métrage de Lars Kraume, l’un des cinéastes les plus renommés de langue allemande. Le film prend pour point de départ l’essai Réalité naturelle et réalité abstraite, formulé par Mondrian en 1919/20 sur le mode du dialogue pour y exposer ses considérations et ses réflexions sur l’abstraction dans l’art. Le grand acteur allemand de théâtre et de cinéma Lars Eidinger donne vie au texte théorique de Mondrian.
«Piet & Mondrian» a été produit par Felix von Boehm / Lupa Film avec le soutien financier du Medienboard Berlin-Brandenburg. Le scénario a été écrit par Constantin Lieb.

Le catalogue

Le catalogue de l’exposition a été conçu par Irma Boom, graphiste de renom international qui au fil des dernières années a renouvelé les possibilités infinies du livre. Le catalogue paraît en allemand et en anglais au Hatje Cantz Verlag, Berlin. Sur 264 pages, il réunit des articles rédigés par Benno Tempel, Caro
Verbeek, Ulf Küster, Kathrin Beßen, Susanne Meyer-Büser, Charlotte Sarrazin et l’artiste Bridget Riley, avec une préface de Sam Keller et Ulf Küster. À l’occasion de l’exposition, le Hatje Cantz Verlag, Berlin publie
également Mondrian A–Z : dans ce texte amusant, Ulf Küster explore en ordre alphabétique les thèmes qui intéressaient le peintre et nous offre ainsi des aperçus de son univers mental et sensoriel.
Il existe un tiré à part en français
N’oubliez pas de scanner le code barre à l’entrée de l’exposition pour avoir le livret de salle en français

Informations

La Fondation Beyeler est ouverte tous les jours de 10.00 à 18.00 h,
le mercredi jusqu’à 20.00 h
Tram depuis la SBB
Depuis Bâle CFF : Tram n° 2 direction « Eglisee » jusqu’à l’arrêt « Bâle, Badischer Bahnhof », changer pour le tram n° 6 arrêt Fondation Beyeler


FONDATION BEYELER
Baselstrasse 101
CH-4125 Riehen/Basel
Tél. +41 61 645 97 00
Fax +41 61 645 97 19
info@fondationbeyeler.ch

Sommaire du mois de mai 2022

Nos Iles, Fondation Schneider

Oeuvre de Brankica Zilovi

A la Fondation Schneider jusqu’au 18 septembre 2022

Au commencement était le vent … puis le naufrage … puis le sable… puis la jungle…puis la solitude…
et peut-être le paradis.

Commissaire : Marie Terrieux directrice du Centre d’art contemporain de la Fondation François Schneider de Wattwiller.
Sa narration rythmée d’extraits littéraires évoque l’insularité en jetant l’ancre sur des territoires troublants ou saisissants.
Conception du dossier : Morane Remaud avec l’aide de Lucie Strohm

Les artistes exposés

Hoda Afshar • Cécile Beau • Benoit Billotte • Stéphane Clor • Olivier Crouzel • Pauline Delwaulle . Gilles Desplanques • Pierre Fraenkel • Charles Fréger • François Génot • Axel Gouala • Sébastien Gouju . Rodney Graham • Yohanne Lamoulère • Philippe Lepeut • Aurélien Mauplot • Abraham Poincheval
Eleonore Saintagnan • Stéphane Thidet • Brankica Zilovic

L’exposition

Très riche, elle aborde aussi bien des questions géographiques (flux migratoires), historiques (colonialisme), qu’utopiques et artistiques et vous permet d’explorer diverses thématiques. L’écriture et la littérature sont aussi à l’honneur avec une scénographie ponctuée de textes et citations allant de Marivaux à Michaël Ferrier en passant par Jules Verne et Saint-John Perse. Cela peut être l’occasion pour vous, selon vos programmes scolaires, de faire découvrir à vos élèves des textes issus de la littérature classique et contemporaine liés aux îles.

Dans un espace clos et sombre, un son grandissant, une houle répétitive, enveloppante nous happe et nous embarque sur de nouveaux rivages. Apparait alors dans l’oeuvre voisine un curieux corsaire qui nous invite à explorer un territoire où se côtoient une drôle de cabane de pluie, des masques et autres objets. Il nous perd dans une jungle de cuir ou de plastique ponctuée de douces vahinés aux déhanchés hypnotiques. L’itinérance se poursuit sur des îles plus hostiles. S’y croisent des prisonniers au large des côtes australiennes, un individu loufoque échoué sur une île de béton, des jeunes femmes isolées en Bretagne ou une famille confinée sur un bras du Rhône. Des cartographies encrées, tissées, brillantes, bleutées nous entraînent vers des songes lointains quand un nuage de coquillages sonore ouvre vers de joyeux horizons.
Composée comme un voyage et née au printemps 2020, lors d’une expérience globale d’enfermement, où l’isolement et la solitude furent prégnants, Nos îles est aussi la suite de L’Atlas des Nuages*, l’exploration des multi-composantes de l’eau formant des paysages visuels, naturels, imaginaires qui habitent tout un chacun.
Morceau de terre entouré par les eaux, îles aux trésors oubliées, abandonnées, mystérieuses, fantasmées, le sujet a un potentiel narratif inépuisable et se déploie aussi bien dans la littérature que dans les arts visuels. Pour rejoindre Ithaque, Ulysse parcourt différents archipels pendant de longues années, Robinson Crusoé fonde un des mythes majeurs de l’explorateur et d’une certaine vision de l’ailleurs, Marivaux plante son décor en paysage insulaire pour une utopie sociale.
Entre tragédie et burlesque, documentaire et fiction, 20 artistes sont conviés pour ce voyage en pays ilien.
Nos îles est une vision subjective de l’insularité et ses métaphores variées ; les artistes eux-mêmes ne sont ici pas ou peu insulaires mais nous livrent leurs différentes visions du naufrage, de la robinsonnade, de l’exotisme, de l’enfermement et des utopies.
*L’Atlas des Nuages, exposition de 25 artistes en 2018 à la Fondation François Schneider.

Thèmes & pistes de réflexion

L’exposition Nos îles propose un voyage insulaire dont découlent de nombreuses thématiques liées au voyage, à la robinsonnade, à l’exotisme mais aussi la solitude, l’exil, l’ouverture sur le monde grâce à la cartographie. Le visiteur est plongé dans un univers onirique qui s’inscrit toutefois dans la réalité en abordant des thèmes et enjeux sociaux et contemporains. Imaginée pendant la difficile expérience de confinement et de renfermement sur soi dûs
à la crise sanitaire mondiale, l’exposition illustre la rêverie, l’ouverture vers l’ailleurs mêlées à l’isolement mais aussi et surtout à l’eau par les multiples manières de représentations de ces grandes thématiques. Conçue comme une histoire avec une narration qui évolue au fil du parcours, l’exposition tisse de multiples liens avec la littérature. Tout le parcours est ponctué de citations d’auteurs classiques ou contemporains qui guident le visiteur au fur et à mesure de sa déambulation : comme si ce dernier ouvrait un roman afin de se plonger dans une histoire bien particulière.

ACTE 1 – La tempête & le naufrage

Le parcours débute par un naufrage… qui fait échouer le visiteur sur l’île et lui ouvre la voie vers la suite de son aventure. Plongé dans une salle obscure éclairée par une lumière succincte, le voyage débute avec une installation immersive dont jaillit le puissant bruit du vent. Pris dans la tempête, on pourrait imaginer être dans la cale d’un bateau, bercé, ou emporté par ces sons, par la mer en colère, on ne sait pas où l’on va atterrir…
Philippe Lepeut, C’est du vent, 2015, Installation sonore, 5 haut-parleurs, banc, ampoule électrique


C’est du vent est une installation sonore qui plonge le visiteur dans une pénombre et invite au recueillement. Dans une salle aveugle, des haut-parleurs diffusent le bruit léger, répétitif et enveloppant du vent. Ce son familier, pourtant capté à des milliers de kilomètres d’ici, devient fond sonore qui ne tarde pas à encercler le visiteur. Oeuvre mystérieuse et intime, C’est du vent peut s’entendre comme la révélation d’un secret à demi-mots et à mi-voix.

ACTE 2 – L’arrivée sur l’île : La robinsonnade

a. Vexation Island (L’île de la contrariété), Rodney Graham

Après cette tempête, tel un pirate, le visiteur échoue sur une île paradisiaque de sable blanc avec des cocotiers et une eau transparente. À son réveil difficile après ce naufrage, il tente de s’emparer d’une noix de coco pour assouvir sa soif mais celle-ci lui tombe sur la tête. Assommé par le choc, il retombe aussitôt dans un état d’inconscience…
Rodney Graham,Vexation Island, 1997, boucle vidéo de 9 min.
Revisitant le mythe de Robinson Crusoé, le film nous fait assister au réveil difficile du naufragé sur une île déserte. Filmée en boucle, l’oeuvre évoque l’idée du cycle perpétuel, il y est aussi question d’autodérision. L’artiste dépeint un corsaire un peu idiot, symbolise à la fois une génération d’aventuriers anciens mais aussi le fantasme du tourisme balnéaire, comme un spot publicitaire tropical… L’humour et l’absurde ainsi qu’une certaine théâtralité habitent son oeuvre. Tournée aux îles vierges et jouant lui-même le rôle de ce pirate en perdition, Rodney Graham met en exergue la contradiction dans laquelle il se trouve, sauvé sur une île, dont il ne peut s’échapper… Avec Vexation Island, Rodney Graham aborde une étape supplémentaire avec le film dans son travail, jusque-là plus photographique et textuel, introduit la couleur et le costume ses films et érige une recherche entre fiction et réalité et mise en abîme.

b. Le refuge, Stéphane Thidet

« Hélas ! Voici l’orage encore ! Ce que j’ai de mieux à faire est de me glisser sous son caban, il n’y a pas d’autres abris aux environs. Le malheur vous donne de bizarres compagnons de lit. Je vais m’abriter là jusqu’à ce que la tempête ait jeté sa lie. »
William Shakespeare, La tempête, Acte II, scène 2, vers 1610

Une cabane en bois, meublée succinctement. Un abri dans lequel il pleut sans cesse… à l’intérieur. Ainsi le mot refuge perd tout son sens. Question de temps ou de contre-temps, de point de vue, de dépérissement, d’inquiétude. Le monde de Stéphane Thidet, souvent lié à l’enfance ou au divertissement, place le spectateur dans un état de gène et d’incertitude. C’est un refuge qui se refuse à nous puisque la seule solution pour y entrer serait d’accepter d’être entièrement trempé, de s’installer au sein de ce déluge pour en profiter. Le refuge se trouve alors entièrement détourné de sa fonction première, celle d’abriter, en oscillant entre hostilité et fascination parce que l’on a très envie d’y entrer, malgré son caractère peu accueillant. L’oeuvre joue sur les sensations, le bruit de la pluie diluvienne qui s’écoule, l’humidité fraîche sur notre peau au fur et à mesure que l’on s’approche de l’entrée, des fenêtres. Une forme de réalité très proche s’entremêle à une métaphore quasi surréaliste de la
« maison qui pleure » parce que nous avons tous cette volonté d’être abrité, par la maison de famille, par un cocon que l’on aimerait avoir ou que l’on arrive à avoir, que l’on perd mais que l’on rêve de retrouver, que l’on pleure de chagrin.

ACTE 3 – SOS Bouteille à la mer

Le premier réflexe d’un naufragé sur une île serait d’appeler au secours, de chercher de l’aide. Mais que faire quand nous nous trouvons livrés à nous même, abandonnés, coupés de tout contact humain et du monde extérieur ?
Une bouteille lancée à la mer…
Abraham Poincheval, Bouteille, 2016, sérigraphie, gouache, feutre et aquarelle sur papier, 89 × 113 cm

ACTE 4 – À la découverte de l’île

L’exploration de l’île permet au visiteur de découvrir de nombreux objets particuliers, incongrus, que l’on ne trouverait pas dans notre quotidien plus urbain. Elle soulève aussi certains questionnements quant aux populations auxquelles il se trouve ici confronté.

a. Des objets étranges en lien avec l’artisanat

 Pierre Fraenkel, Monstrum : des coiffes inquiétantes et fascinantes
. Pierre Fraenkel, Monstrum, 2020, fils coton DMC, bois d’animaux.
Trophée de fil rouge, coiffe chamanique, déguisement d’un autre temps, curiosité d’une île lointaine ?
Lesdéroulent des histoires étranges et effrayantes et provoquent en nous un possible malaise, une exploration de nos pulsions intimes, animales, aux confins du morbide. Pierre Fraenkel réinvente une civilisation habitée par l’étrangeté. On aurait envie d’animer ces parures fascinantes dans des cérémonies rituelles, celles-ci se faisant aussi l’écho du monstre de la grande machine industrielle d’antan, ayant englouti une part de nos sociétés. Sous ces chevelures, échouées sur une plage abandonnée, on peut s’y cacher, s’y réfugier et épuiser les possibilités de la transformation.

. Sébastien Gouju et ses palmiers revisités
Sébastien Gouju, Fougère, 2019, Cuir, bois peint et acier, environ 102 × 157
Palmier, 2019, Cuir, bois peint et acier, environ 230 × 340

Les arbres noirs de   nous font pénétrer dans un monde sombre, ténébreux. Avec un feuillage de cuir et de peau, qui n’est pas totalement innocent, un décalage se créé dans la représentation classique du palmier romantique au soleil couchant. Ce n’est pas non plus la jolie plante d’intérieur, mais peut-être plus l’évocation d’un jardin secret. Invité en résidence dans un atelier de ganterie par la Fondation Hermès l’artiste a développé cette série d’arbres qui s’inscrit dans sa réflexion autour du monde animal et végétal développée depuis une quinzaine d’années. La sensualité du cuir, la texture et la dentelle délicate de fines lamelles en font des arbres aux allures fantastiques pour une petite forêt à l’exotisme nouveau.

b. Des objets étranges en lien avec des questionnements contemporains

• Axel Gouala et ses joyeuses sculptures
« J’ai toujours senti deux moteurs dans le travail. L’un est l’amour du dessin, l’envie de matérialiser des images, considérant aussi la sculpture comme du dessin. L’autre étant l’envie de m’amuser. Un terrain de jeu où partager avec les amis et le spectateur des stupidités qui me passent dans la tête. Dans mes pièces récentes, je porte un regard ironique sur mon propre romantisme et mon rapport à la marche ou au paysage, ce qui oppose des pièces très littérales à des pièces second degré. »

• Un paradis bleu ?
Charles Fréger, Blue Heaven, 2013. Installation de 6 boucles vidéos.


Charles Fréger
explore les ailleurs proches ou lointains notamment à travers les coutumes et les costumes. Avec Blue Heaven, le paradis est revisité, il est ici au féminin, avec 6 vahinés, figures typiques de l’imaginaire occidental de l’exotisme. Pour la réalisation de ses vidéos, l’artiste fait le choix de ne pas se rendre sur les terres originelles des vahinés, il rend visite à ces danseuses polynésiennes établies sur le continent, à Toulon. Il les filme, une à une, et ralentit leurs mouvements. Les vahinés font front, colliers de fleurs et air rieur, leur épaisseur mystérieuse intacte. La danse hypnotique des vahinés évoque le chant des sirènes qui appelle le marin à sans cesse reprendre la mer. Et dit tout autant le désir tenace du photographe de poursuivre sa quête, vers l’autre.

ACTE 5 – Le sentiment de solitude, d’isolement, d’enfermement

Après de longues heures de marche rythmées par de multiples découvertes sur cette île, apparaît le sentiment de solitude chez le visiteur. Seul, abandonné, ses proches lui manque, il a le goût d’ailleurs et se sent alors prisonnier de cette île aux aspects paradisiaques qui finissent par le hanter…
a. L’isolement
Le mot isolement vient du latin «insula» qui désigne l’île. L’exposition Nos îles a été pensée durant la difficile épreuve de confinement connue ces deux dernières années suite à la pandémie mondiale. L’isolement, l’enfermement et le repli sur soi sont alors devenus communs à nous tous, qui avons connu ce sentiment de solitude, comme enfermés, chacun sur notre île. Car l’île présente une dualité permanente entre enfermement et ouverture sur le monde, deux visions paradoxales, entre paradis et solitude…
« Nul homme n’est une île, complète en elle-même ; chaque homme est un morceau de continent, une part de l’océan… ». John Donne
Notion musicale Le mash-up7Le son a une importance toute particulière pour Thomas Teurlai dans cette oeuvre, il donne ainsi oeuvre le titre Mash-up qui est un style musical.C’est une technique et style consistant à mélanger deux, voire plusieurs titres en une seule piste sonore à partir de compositions préexistantes.Ce terme anglais, qui vient du verbe « to mash », n’a pas réellement d’équivalent français. Il signifie « réduire en purée » et, par extension, mélanger ou mixer. Le mash-up, c’est l’art d’associer différentes choses ; cela s’applique aux domaines de la musique ou l’informatique, par exemple. Cabine de douche, stroboscope, platine vinyle, 200 x 120 x 80 cm.

Yohanne Lamoulère, L’île, 2020, photographies, 5 x (60×60), 13 x (40×40),
13 x (30×30) cm

Yohanne Lamoulère met en photographie deux mois de confinement sur u
n bras du Rhône entre avril et mai 2020. C’est l’expérience de la vie sauvage, telle une Robinson Crusoé des temps modernes. Douce – amère, sa série L’île dépeint l’innocence des jeux, l’ambiguïté du déguisement, adossées à la spontanéité du bocage et de la mangrove.

b. La solitude en béton
Gilles Desplanques, Île de béton, 2016, vidéo, 9 min. 20


 Un homme égaré sous un échangeur autoroutier, noeud urbain des métropoles du XXème siècle, dans un paysage de glace et de béton … Ainsi est posé le décor de la performance vidéo de Gilles Desplanques au cadrage minutieux. Son héros s’agite de manière peu cohérente en petite tenue orange, il est sur le point de basculer… dans quel monde ? Inspiré par la nouvelle éponyme de J-G. Ballard où un architecte plonge dans un trou lors d’un accident automobile, ici notre Robinson des temps modernes descend aux enfers mais doit s’adapter, comme tout un chacun dans une humanité loufoque, grave et aux rebondissements nombreux.

c. L’île prison

Hoda Asfhar, Remain, 2018, installation vidéo à deux canaux.

Remain n’a pas été filmé au paradis mais sur Manus Island, île prison, au nord de la Papouasie-Nouvelle- Guinée. Sur cette île de sable blanc, d’eau azur et à la jungle luxuriante, des centaines de demandeurs d’asile sont isolés et parqués par le gouvernement australien… L’artiste y recueille les témoignages terribles, où chacun raconte la violence et le désespoir qu’il a connu, dans cet enfer tropical.

d. L’île en perdition

Olivier Crouzel, Yali, 2021, installation vidéo, sable de pierre ponce de l’île, 400 × 250 cm
L’eau fait partie des sujets récurrents explorés par Olivier Crouzel avec ses grandes installations vidéos questionnant l’érosion du littoral, la représentation des bords de mer, le niveau de la mer qui monte…
Yali s’inscrit dans le projet « White Beach » démarré l’été 2017 en Grèce. Sur l’île volcanique de Nisyros, l’artiste y débusque un hôtel abandonné depuis 2010. Il filmera entre autre ses 43 vues sur la mer et repère en face une île blanche qui se détache, c’est l’île de Yali.

ACTE 6
L’ouverture au monde et la cartographie

Pour échapper à cette île, il faut étudier la cartographie. Les îles ne sont jamais seules au monde et structurent de vastes réseaux. Les artistes contemporains s’y intéressent en explorant divers matériaux.
Le visiteur est ici amené à découvrir les nombreuses formes que peuvent prendre la cartographie sur des supports traditionnels ou innovants.

a. Cartographie numérique
Pauline Delwaulle, Haïkus cartographiques, 2019, 11 boucles vidéos
Pauline Delwaulle a grandi à Dunkerque, où l’on va voir la mer, la regarder vraiment, la contempler. À proximité se trouve Calais, pour un autre type de rapport à l’eau, de départ ou d’arrivée. La relation de l’artiste avec la mer est double, à la fois poétique et politique. La carte et l’île traversent toute son oeuvre.
Les multiplicités plastiques qu’offre l’île, ses variétés toponymiques et les vastes réflexions concernant les frontières, les limites territoriales que l’homme inscrit pour ordonner le monde, permettent à Pauline
Delwaulle de composer depuis 10 ans un archipel d’images, de films, de cartes numériques, de traces où elle renverse et brouille les paysages.

b. Cartographie sur de nouveaux matériaux
Benoît Billotte, Insulae, 2015, 4 sérigraphies sur couverture de survie160 × 210 cm chacune.

Sur de grandes surfaces dorées, des silhouettes noires se détachent, ce sont des îles qui flottent sur des couvertures de survie.

c. Cartographie à l’encre
Aurélien Mauplot, Les Possessions, 2014, impressions numériques sur pages de livres, dimensions variables
Le tour du monde en quatre-vingts jours est un récit qui correspond au monde du XIXème siècle : Jules Verne y rêvait une possession complète, une connaissance absolue, un voyage au rythme

Histoire – L’île de la Rose
Les îles naissent, disparaissent, sont exploitées, cartographiées, baptisées,
colonisées. Aurélien Mauplot, avec son oeuvre tend à créer des îles utopiques,
imaginaires, en tissant des liens entre poésie, politique et cartographie. Le principe utopique d’îles de liberté n’est pas nouveau dans l’histoire, l’histoire de l’art ou encore le cinéma. Dans les années 60-70, ce modèle utopique donne naissance à quelques micro-nations insulaires. Des îles sont créées de toutes pièces, comme c’est ici le cas dans le travail de l’artiste Aurélien Mauplot. L’année 1968 vit l’apparition, au large de Rimini mais hors des eaux territoriales italiennes, de l’Insulo de la Rozoj (L’île de la Rose), plateforme d’environ 400 m2 construite par l’ingénieur Giorgio Rosa.

Il fut le président de cet état indépendant du 1er mai 1968 au 26
février 1969. En plus d’une monnaie, d’un drapeau, d’un timbre postal et d’un
hymne, la république de l’île des Roses adopte une langue destinée à symboliser sa vocation internationaliste : l’esperanto. C’est d’ailleurs dans cette langue que
fut rédigé l’acte de constitution du territoire libre de l’île de la Rose. Les autorités italiennes décident finalement de sa destruction en 1969.
Le film «L’incroyable histoire de l’Île de la Rose» réalisé en 2020 par Sydney Sibilia retrace cette histoire vraie maîtrisé.

S’emparant de ce roman, Aurélien Mauplot imprime sur chaque page du livre,
de façon arbitraire, la carte d’une île ou d’un état reconnu par l’ONU.                                  

ACTE 7 : L’ailleurs, le paradis

Stéphane Clor, Sans titre (partie de l’installation Imaginary Soundscape), 2016, coquillages suspendus et ventilateur, dimensions variables.

Nuage de coquillages tintinnabulant, écho de nacre et de calcaire, corps sonore flottant et envoutant, Imaginary Soundscape, vient à la fois clore et ouvrir cette promenade insulaire en nous emmenant sur d’autres rives, d’autres îles et de nouvelles contrées célestes.

Philippe Lepeut, On air, 2015, pierre de galène, coquillage non identifié, support et équerres en laiton, verre et système de diffusion sonore intégré, 120 × 120 × 30 cm
Robinson, l’écoute, le son, la langue…la tempête, les paysages multiples sont certains sujets qui habitent Philippe Lepeut, depuis plusieurs années. Bercé par Le Robinson Suisse, roman du pasteur suisse alémanique Johann David Wyss (1812), il consacrera d’ailleurs 10 ans de son oeuvre au sujet avec notamment « Le Projet Robinson », film mettant en scène trois personnages s’exprimant en langue des signes. La question de l’isolement et du pouvoir du langage oral s’y trame. Philippe Lepeut est un artiste multifacette, qui peut donner le sentiment de faire le grand écart, et nous porter d’un univers à un autre, tour à tour cartomancien, constructeur de cabanes, sculpteur de buis ou enregistreur de vent. Il apparaît que la nature et l’instable position de l’homme en son centre relient ses dessins, performances, installations visuelles ou sonores. Il est souvent question de son dans son oeuvre, nous poussant à écouter pour mieux voir. Avec On Air, seconde pièce sonore de l’artiste exposée, une chimère est créée, telle les étrangetés des cabinets de curiosités d’antan. En plongeant son oreille dans ce coquillage de fiction, ce sont les ondes d’un autre monde qui nous arrivent, une île où l’on tente d’échapper au libéralisme qui consomme et consume tout un chacun, artistes y compris.

Juliette Armanet, L’amour en solitaire, 2017.
« Après de longues heures de marche rythmées par de multiples découvertes sur cette île, apparaît le sentiment de solitude chez le visiteur. Seul, abandonné, ses proches lui manque, il a le goût d’ailleurs et se sent alors prisonnier de cette île aux aspects paradisiaques qui finissent par le hanter..« 

Informations pratiques

Fondation François Schneider
27 rue de la Première Armée – 68700 Wattwiller
Ouvert du mercredi au dimanche de 11h à 18h
  fondationfrancoisschneider.org

Jouée de stalles – Unterlinden

Jouée de stalles provenant de l’église de la commanderie des Antonins d’Issenheim (Alsace), Rhin supérieur, atelier bâlois, 1493

Contexte

Cette sculpture provient de la commanderie des Antonins d’Issenheim (Alsace). C’est un élément des stalles des chanoines de l’église de la commanderie d’Issenheim. Ces stalles sont décrites en 1628 (Archives départementales ADMM H 1788) :
« en 1493, Guers a fait faire dans le choeur des stalles d’un travail remarquable, au nombre de 54, ornées de 50 figures et de plus de cent bustes ».

Le même ensemble fait l’émerveillement d’un vicaire de l’abbé général chargé de visiter les maisons de l’Ordre antonin. Il arrive le 25 septembre 1650 et précise : « Le choeur est tout entier travaillé à jour, avec des petites figures d’une menuyserie approchant de celle des Dominicains de Troyes ».
Enfin l’Inventaire estimatif rédigé le 4 février 1793 par Louis Vaillant et Louis Homburger mentionne : « Nous observons qu’il règne tout autour du choeur une boiserie moderne en panneaux de bois de chêne, mais que les stalles qui sont aussi en chêne sont d’une structure antique ». (ADHR L 608 1 Q boite 172).
Les stalles au même titre que l’orfèvrerie, les objets liturgiques, la grille du choeur ont sans doute été vendues peu après leurs estimations (les retables, panneaux peints et sculptures dignes de l’intérêt des commissaires de la république sont transférés au musée de Colmar). De la fin du 18e siècle à la collection de Madame D. mise en vente à Paris le 1er avril 2022, l’histoire de cette oeuvre nous est inconnue à ce jour.

Description

Ce relief en chêne est le registre supérieur d’une jouée de stalles.
Le vieillard en prière, tenant entre ses mains jointes un chapelet et vêtu de feuillages est saint Onuphre, anachorète de la Thébaïde au 4e siècle. Ce saint priant dans le désert égyptien, comme son prédécesseur saint Paul l’ermite, se distingue de ce dernier, soit par son absence de vêtement où seuls ses poils ou sa chevelure et sa barbe cachent sa nudité, soit par un vêtement de feuillages (Gravure d’Albrecht Dürer, Saint Jean Baptiste et saint Onuphre, 1503, Bristih Museum ou Retable de Bergheim sculpté par Veit Wagner vers 1515, Musée Unterlinden, détail du relief avec Saint Onuphre).
La présence de saint Onuphre, associé à de très nombreux autres saints et saintes, s’inscrit parfaitement dans le programme iconographique des stalles réalisées pour l’église de la commanderie des Antonins d’Issenheim dont le saint patron a lui aussi vécu dans le désert égyptien.
En outre l’étude matérielle, formelle et stylistique prouvent que cet élément faisait bien partie des stalles des religieux de la commanderie d’Issenheim dont plusieurs éléments, datées de 1493 sont conservés au Musée Unterlinden.
Les dimensions (approximatives données dans le catalogue, 131 x 36,5 cm) de ce fragment de jouée en chêne, découpée dans sa partie inférieure et dans sa largeur correspondent aux dimensions des registres supérieurs des deux jouées en chêne conservées au musée Unterlinden : approximativement 127 x 41 cm. Sont représentés Saint Jérôme et Sainte Catherine, et sur la seconde, Saint Augustin et Sainte Barbe. Les sculptures des deux saints des registres supérieurs, sculptées au revers, sont positionnées, comme le Saint Onuphre, entre deux colonnes torses sous un arc de rinceaux ouvragés. Le traitement des rinceaux ajourés est strictement le même que celui visible sur un élément des stalles d’Issenheim conservé au Musée Unterlinden : les tiges se terminent en palmettes aux multiples petits lobes.
L’aspect hiératique de Saint Onuphre, pas seulement lié à sa fonction, les mains surdimensionnées, le visage aux joues creusées, les sillons descendant sous les yeux, les pattes d’oies et les lignes de rides sur le front sont autant de motifs formels qui se retrouvent sur les autres sculptures des stalles conservées au Musée Unterlinden. Les différences de traitement et de qualité entre les figures s’expliquent par les diverses mains oeuvrant dans cet atelier très certainement bâlois.
La sculpture bâloise a été étudiée dès le début des années 1950 par Annie Kaufmann Hagenbach (Die Basler Plastik des fünfzehnten und frühen sechzehnten Jahrunderts, éd. Birkhäuser, Bâle, 1952). Autour de 1500, quatre ateliers sont identifiés à Bâle : celui du Maître de Saint Laurent identifié à Heinrich Isenhut, Jos et Domenicus Guntersumer, Martin Lebzelter et Martin Hoffmann. Le sud de l’Alsace dépendant du diocèse de Bâle, beaucoup de sculptures de Haute Alsace proviennent d’ateliers bâlois. Guy Guers, qui vient d’être nommé précepteur de la commanderie des Antonins d’Issenheim y commande ces stalles datées 1493. Il est encore prématuré d’attribuer les stalles à un atelier précis.
Cette acquisition, rendue possible grâce à la perspicacité de Damien Berné, conservateur en chef au Musée de Cluny, qui a repéré l’oeuvre, permettra de relancer le travail de recherche autour de cet ensemble provenant du site le plus connu d’Alsace grâce au Retable réalisé par Grünewald et Nicolas de Haguenau.

Les éléments de stalles d’Issenheim actuellement dans les collections du Musée ont été données entre 1855 et 1858 par l’artiste colmarien Gustave Saltzmann (1811-1872).
Cette acquisition ajoute un élément aux reliefs et jouées des stalles d’Issenheim déjà conservés au musée, et sa redécouverte permet d’imaginer que d’autres éléments de ces stalles existent encore après leur dispersion à la Révolution française.
Pantxika De Paepe
Direcrice et conservatrice en chef du Musée Unterlinden

Nouvelle acquisition du Musée Unterlinden

Don de Jean Louis et Esther Mandel
Le Christ au mont des Oliviers et La Dérision du Christ,
panneaux peints sur bois réalisés vers 1480 par l’atelier
d’un peintre actif dans le Rhin supérieur

Le Christ au Mont des Oliviers, huile sur panneau, dimensions 143 cm (haut) x 54,6 cm (large), Musée Unterlinden, Colmar
La Dérision du Christ, huile sur panneau, dimensions 143 cm (haut) x 54,6 cm (large), Musée Unterlinden, Colmar
À partir du 25 mai 2022, le Musée Unterlinden de Colmar présente le Christ au Mont des Oliviers et la Dérision du Christ dans la salle consacrée à l’art des années 1480-1500 au rez-de-chaussée du cloître. C’est ainsi que la directrice du musée Unterliden, Pantxika De Paepe, nous a accueilli avec enthousiasme
et excitation.

Description

Ces deux oeuvres sont des peintures à l’huile et tempera sur résineux illustrant des scènes de la Passion du Christ décrites dans les Évangiles.
Le premier volet représente
le Christ au Mont des Oliviers.
Alors que le Christ se retire à Gethsémani, sur le Mont des Oliviers pour prier,
un ange apparaît et lui offre un calice à boire
en acceptation de sa destinée.
 Au premier plan, les apôtres
Pierre, Jean et Jacques le Mineur sont plongés dans le sommeil.

Le deuxième volet illustre La Dérision du Christ.

 Le Christ vient de comparaître devant Ponce Pilate, gouverneur romain de la province de Judée qui le condamne à mort. Il est ensuite flagellé, puis frappé et insulté par plusieurs hommes. Afin de le tourner en ridicule, ces derniers l’ont déguisé en « roi des Juifs ». Il porte ainsi un manteau pourpre, couleur de la royauté et une couronne faite d’épines. Un de ses agresseurs lui tend un roseau pour faire office de sceptre. Ponce Pilate assiste à la scène, il est représenté debout derrière le Christ avec une barbe et un long manteau.
Les deux panneaux ont fait l’objet d’une restauration pour permettre leur exposition au sein du musée. La face et le revers de chaque panneau ont été dépoussiérés, l’adhérence de la couche picturale a été vérifiée et a fait l’objet d’un re-fixage ponctuel. La restauratrice Julie Sutter a ensuite procédé à un décrassage de la couche picturale avant de combler les lacunes et d’atténuer les retouches anciennes qui gênaient la lecture de la composition.

Contexte

Ces deux panneaux offerts au Musée par Jean Louis et Esther Mandel sont apparus sur le marché de l’art au début des années 2000. Ils étaient à l’époque attribués au Maître du Retable de Maikammer. Ce nom de convention fut donné par l’historien de l’art allemand Alfred Stange dès 1955 à l’auteur anonyme du Retable de la Passion du Christ peint vers 1450 pour l’église de Maikammer, ville située à l’Ouest de Spire dans le Palatinat-Rhénan.
L’étude plus approfondie de ces deux panneaux permettra d’affiner leur origine, mais d’ores et déjà l’expressivité des personnages ou la violence des bourreaux placent ces deux panneaux dans la continuité d’artistes tel le Maitre de la Passion de Karlsruhe à Strasbourg ou Gaspard Isenmann à Colmar. Ces deux peintres oeuvrant au milieu du 15e siècle ont marqué durablement la peinture du Rhin supérieur et des régions limitrophes.
En attendant de mieux cerner la provenance des deux panneaux, il n’est pas possible de préciser leur fonction. Leur format étroit indique qu’il s’agit de deux volets de retable. Le fait qu’ils ne soient pas peints au revers prouve, qu’accrochés à la caisse centrale, ils encadraient de façon fixe une paire de volets mobiles qui eux pouvaient s’ouvrir ou se refermer.


Les dimensions des panneaux, leur iconographie et leur style, permettent d’affirmer aujourd’hui qu’ils proviennent du retable de la Passion, conservé au
Wilhelm Hack Museum de Ludwigshafen depuis son acquisition en France en 1977. La partie centrale de la caisse montre une Crucifixion sur laquelle se referment deux volets dont les faces internes illustrent le Portement de Croix
et la Descente de Croix, et les faces externes, le Lavement des mains de Pilate
et la Flagellation.
Les deux panneaux s’inscrivent ainsi parfaitement dans la configuration où les volets se fermaient. A ce moment quatre panneaux de la Passion du Christ se suivaient : Christ au Mont des Oliviers, Lavement des mains de Pilate, Flagellation, Dérision du Christ.


Il est malheureusement impossible de savoir à quel moment les panneaux du Musée Unterlinden ont été séparés du reste du retable.
Des étiquettes et inscriptions en allemand au revers leur permettront sans doute d’avoir quelques renseignements sur l’histoire de ces panneaux. A cette fin, nous diffuserons largement les photographies du revers auprès des visiteurs du musée et des internautes.

Important :

Nous profitons également de cet accrochage pour demander des informations que pourraient avoir des visiteurs concernant les inscriptions gravées au dos des deux œuvres écrites en langue allemande. Celles-ci pourraient révéler des informations concernant le lieu de conservation des panneaux entre les années 1935 et 1945, aujourd’hui encore inconnu. Toute indication à ce sujet sera ainsi la bienvenue.

A vous

Une animation vous permet de suivre l’histoire des panneaux ici

Informations

Horaires d’ouverture
Musée Unterlinden

Mercredi au lundi : 9h – 18h
Mardi : fermé

Clôture des caisses 30 minutes avant la fermeture du Musée.

Jours fériés de fermeture : 1.1., 1.5., 1.11., 25.12

Café-Restaurant Schongauer

Mercredi au dimanche :  11h00 à 17h00
Fermé le lundi et le mardi

Marcelle Cahn, en quête d’espace

Marcelle Cahn, Femme et voilier, 1926-1927,
huile sur toile, 66 x 50 cm, MAMCS.
Photo : Angèle Plisson, Musées de la Ville de Strasbourg

Jusqu’au 31 JUILLET 2022 au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg MAMCS
Commissariat général : Cécile Godefroy, historienne de l’art et commissaire indépendante.
Commissariat associé : Barbara Forest, conservatrice en chef du Patrimoine au MAMCS et Alexandre Quoi, responsable du département scientifique du MAMC+.
Scénographie : atelier FCS – Frédéric Casanova
Identité visuelle de l’exposition : Atelier Bastien Morin

Cette exposition, également présentée au Musée d’art moderne et contemporain Saint-Étienne Métropole (MAMC+) et au Musée des beaux-arts de Rennes, verra son format varier à chaque étape en fonction du site.

Rétrospective

Le MAMCS présente la première grande rétrospective consacrée à Marcelle Cahn (1895-1981). Dans l’histoire de l’art du XXème siècle, le parcours de cette artiste se situe à ses débuts à l’orée des courants expressionnistes et puristes, et s’épanouit dans les années 1950 au travers d’une abstraction libre, dotée tout à la fois de fantaisie et d’une grande rigueur, dont les tableaux-reliefs et les spatiaux des années 1960 sont un remarquable aboutissement. De l’infiniment petit à la quête d’un espace architectural, Marcelle Cahn, qui parallèlement n’a jamais renoncé à la figuration considérant ses
« choses lyriques » comme une « récréation », a développé un langage singulier de l’abstraction, épuré et sensible, dépourvu de tout dogmatisme.

Cette exposition illustre la richesse et la singularité de l’oeuvre de Marcelle Cahn. Elle restitue les différents contextes de création au sein desquels cette artiste a évolué, de l’expressionnisme allemand du début du XXème siècle aux principaux courants de l’abstraction géométrique et lyrique. Ce parcours chronologique rassemble plus de 400 oeuvres – peintures, arts graphiques, sculptures, photographies et collages – provenant d’institutions culturelles et de collections particulières françaises et étrangères, couvrant l’ensemble des techniques engagées par l’artiste. Parmi elles, le Musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg, à qui l’artiste avait donné son fonds d’atelier et ses archives en 1980.

Estelle Pietrzyk vous présente « Guitare et éventail » de Marcelle Cahn, issue des collections du MAMCS.

Biographie

Alsacienne, née à Strasbourg où elle vécut la majeure partie de sa jeunesse, Marcelle Cahn se forma à Berlin pendant la Grande guerre auprès de Lovis Corinth et Eugen Spiro, puis à Paris auprès de Fernand Léger et Amédée Ozenfant, où elle choisit de passer les trente-cinq dernières années de sa vie. Marcelle Cahn participe dès l’entre-deux-guerres aux grands rassemblements de défense de l’art abstrait. Soutenue et appréciée des artistes et des critiques influents de son temps, elle ne bénéficia que de rares expositions personnelles dans les dernières années de sa vie et vécut dans un certain isolement accru par des périodes de mises en retrait du monde de l’art. Pour des raisons matérielles et de santé, les collages sont la pratique dominante des quinze dernières années d’une artiste encline à s’appuyer sur le minimum de ressources à sa disposition. Ils traduisent l’appétence d’une créatrice animée toute sa vie durant par la liberté et la poésie du geste, ainsi que le jeu des infinies variations.

Film

Ci-dessous un film provenant des archives du regard

Le tableau en relief

Étendue 1955 Tempera sur isorel 200 x 74 x 7,5 cm
Photographie © Musée de Grenoble

À partir de 1953, Marcelle Cahn renoue avec l’abstraction géométrique avec un ensemble remarquable de tableaux-reliefs que l’on peut situer dans la continuité des peintures les plus abstraites de la période puriste. Dans chaque tableau peint sur bois, isorel ou contreplaqué, l’artiste incise la matière blanche de traits noirs parallèles et perpendiculaires qui dessinent des trames géométriques plus ou moins serrées et dont l’entrecoupement, à l’intérieur du tableau, donne lieu à un univers de carrés et de rectangles ponctués de prismes et de triangles blancs ou colorés. Pour rythmer ses peintures, l’artiste appose à la surface des tableaux des petits éléments de format géométrique et circulaire en bois, isorel ou balsa, puis, à partir de 1960, les premières sphères blanches et colorées. Ces peintures de moyen et grand format dialoguent avec les oeuvres de la tendance abstraite internationale qui, par des chemins divers, empruntés pour beaucoup dans le sillage du néoplasticisme, considère le relief comme l’une des voies possibles de renouvellement de l’abstraction, visant l’architecture elle-même.

Objets cosmiques

Pour Marcelle Cahn, qui cherche à s’échapper des intérieurs bourgeois et contrer l’idée de décoration, les « Spatiaux sont des équivalences spatiales à partir de panneaux fixes et mobiles qui devront participer à la structure de notre univers ». En 1961, Marcelle Cahn conçoit son premier 

avec les encouragements de l’artiste suisse Gottfried Honegger. Nés du découpage et de l’assemblage de petites boîtes de médicament, les Spatiaux sont exécutés en bois peint par un praticien et s’appréhendent pour la plupart frontalement en déclinant un registre de formes élémentaires cadencées par le relief, les pastilles de couleur et des angles découpés qui modulent la lumière. Avec les tableaux-reliefs et les photocollages, les Spatiaux convoquent l’imagerie spatiale – stations, fusées aérospatiales et satellites en orbite – nourrie par la rivalité qui oppose États-Unis et URSS dans le domaine astronautique depuis la fin des années 1950, et constituent probablement l’un des aboutissements les plus sensationnels de la quête d’espace engagée par Marcelle Cahn depuis le milieu des années 1920.

Musique et poésie

Musique et peinture sont étroitement liées dans l’imaginaire des artistes, en particulier dans les débats synesthésiques qui préludent à la naissance de l’abstraction coloriste.

La thématique musicale est présente chez Marcelle Cahn, comme nous pouvons l’apprécier dans Éventail et guitare, 1926, mais aussi à travers les titres qui font allusion aux syncopées du jazz et autres tempos. Les nombreuses variations que l’artiste opère à partir de sérigraphies, de cartons d’invitation et de photographies, faisant danser des motifs identiques de façon sans cesse renouvelée, témoignent d’une sensibilité musicale qui rappelle la famille de musiciens dont l’artiste, formée au violon et au piano dans sa jeunesse, est elle-même issue.

Proche des compositeurs autant que des poètes, celle qui déclara
« développe[r] des formes initiales, simples, comme un musicien développe un thème dans une fugue » sans « exclure la poésie » fut enfin l’auteure d’une vingtaine de courts textes poétiques auxquels s’ajoutent les dessins-poèmes composés à partir de 1956.

Le collage en jeu

Les collages que Marcelle Cahn entreprend depuis 1952 et qui, à partir du milieu des années 1960, constituent l’essentiel de sa production, oscillent entre géométrie stricte et fantaisie lyrique. D’un côté, la rigueur de la pensée construite, de l’autre, la spontanéité, l’amusement qui déconstruit. Tandis qu’elle doit quitter son logement-atelier de la rue Daguerre en 1969 pour intégrer la maison de retraite pour artistes de la fondation Galignani à Neuilly,

Marcelle Cahn restreint ses usages et pratiques aux matériaux qui lui restent facilement accessibles : papiers de couleur, autocollants, transparents et autres articles de papeterie, nécessaire de pharmacie, carton gaufré, laine et tissus divers, enveloppes de sa correspondance, lames de rasoir, tickets de métro, matériaux d’emballage et de récupération plus ou moins inattendus sont rehaussés de crayon, de craie grasse ou de peinture blanche, réemployés et détournés à l’envi dans des compositions majoritairement abstraites, mais qui parfois convoquent le réel. La poésie et l’humour avec lesquels Cahn métamorphose les plus modestes objets et rebuts du quotidienLe collage sur carte postale semble être autant une occupation qu’un jeu pour l’artiste qui déploie tout son sens de l’espace à partir de cartes postales de la ville de Paris dont elle se plaît à adresser les détournements poétiques et espiègles à ses proches.
Pour l’étape dijonnaise de l’exposition Marcelle Cahn en 1973, Serge Lemoine fait commande à l’artiste d’un ensemble de collages à partir de cartes postales de la ville. À l’aide de gommettes de couleurs et de formats variés, l’artiste met en scène avec humour et poésie les monuments les plus emblématiques de la ville bourguignonne, qu’ils relèvent du patrimoine médiéval ou de constructions plus récentes à l’instar du grand projet urbanistique du lac Kir construit en périphérie et bordé de tours à étages. nous transportent dans un monde sensible et vibrant, sans cesse renouvelé.

Amitiés en partage

En 1980, Marcelle Cahn fait une considérable donation au Musée d’Art moderne de Strasbourg, comprenant ce qu’elle conserve encore de son oeuvre ainsi que ses archives et livres. Ce fonds est constitué de près de 350 oeuvres originales dont plusieurs peintures inachevées, des Spatiaux, des dessins, estampes et de nombreux collages des années 1960 et 1970. Elle inclut également des dessins et photographies d’artistes ami.e.s. Dans ses archives personnelles, figurent plusieurs centaines de lettres et cartes, des dizaines de négatifs et photographies de ses oeuvres comme de sa famille, ses poèmes originaux, des dizaines de cartes de voeux ainsi que des cartons d’invitation et articles de presse. Ses archives professionnelles sont principalement composées d’échanges avec des éditeurs, galeries et institutions. L’ensemble de la correspondance éclaire enfin la richesse des relations et amitiés artistiques de Marcelle Cahn, dont l’internationalisme, l’écart générationnel et la diversité des styles témoignent de sa grande ouverture d’esprit.
Cette donation si généreuse un an avant sa disparition trouve dans cette exposition sa présentation la plus complète et témoigne, au-delà des oeuvres, d’une personnalité attachante, l’amie des artistes.

Informations pratiques

Musée d’Art moderne et contemporain (MAMCS)
1 place Hans-Jean-Arp, Strasbourg Tél. : +33 (0)3 68 98 50 00
Horaires : tous les jours – sauf le lundi – de 10h00 à 18h00
Fermé le 1er janvier, Vendredi Saint, 1er Mai, 1er et 11 Novembre et le 25 décembre.

La Couleur en fugue

Sam Gilliam – Katharina Grosse – Steven Parrino – Megan Rooney – Niele Toroni

Fondation Louis Vuitton jusqu’au 29 AOÛT 2022

Commissaire générale
Suzanne Pagé, Directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton, Paris
Commissaires
Ludovic Delalande, Nathalie Ogé et Claire Staebler avec Claudia Buizza

Architecte scénographe
Jean-François Bodin et associés

« L’exposition « La couleur en fugue » s’est donnée pour objet de rendre sensible aux visiteurs l’« expansion de la couleur dans l’espace ». Je ne peux donc former qu’un vœu : qu’une telle initiative, bénéficiant du dialogue fécond entre une artiste et un architecte visionnaire, réalise ce que Frank Gehry a maintes fois affirmé : ce bâtiment, qu’il a inventé pour accueillir des œuvres de plusieurs époques de l’art moderne comme de l’art contemporain est aussi une création vivante à la rencontre du public le plus large et le plus divers. »

Extrait La Fondation au prisme de la couleur
(texte tiré du Journal #13)
 
Bernard Arnault
Président de LVMH / Moët Hennessy – Louis Vuitton Président de la Fondation Louis Vuitton

Si la couleur échappe,

« Si la couleur échappe,
on n’échappe pas à la couleur« 

Suzanne Pagé
Directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton

Depuis son ouverture, la couleur est l’invitée permanente de la Fondation Louis Vuitton.

En témoignent d’emblée les expositions et commandes de l’inauguration. Tandis qu’Olafur Eliasson, jouant de réflexions et diffractions, a conçu, dans le Grotto, son chemin de lumière sur la rémanence d’un halo de couleur jaune, Ellsworth Kelly a créé, pour l’Auditorium, une installation permanente où cinq panneaux monochromes – jaune, rouge, bleu, vert et violet – s’égrènent telles des notes de musique dans l’espace, le rideau de scène y ajoutant un accord arc- en-ciel. Primordial déjà, le dialogue de la couleur avec l’architecture.

« La Couleur en fugue », programmée ici aujourd’hui s’inscrit dans cette même ligne illustrée par l’exposition « Les Clefs d’une passion » en 2015. La couleur y triomphait au fil des quatre axes sensibles fondateurs de la Collection.

Avec ces artistes, Sam Gilliam, Steven Parrino, Niele Toroni, Katharina Grosse, Megan Rooney, la couleur s’affranchit de toutes les frontières et réaffirme un rôle premier. À un moment où triomphe, portée par de fortes et talentueuses personnalités, une peinture figurative électivement consacrée au portrait, cette exposition – sans doute trop contrainte au regard de l’ampleur du phénomène – pointe la coexistence d’une puissante forme d’expression « abstraite » avec un ensemble d’œuvres forçant les limites du lieu et du qualificatif, s’agissant d’œuvres où partout s’infiltre le réel.

Si la dénomination « La Couleur en fugue » induit d’abord la métaphore musicale et avec elle l’idée de rythme, de danse, de mouvement, la fugue renvoie aussi à un état juvénile ivre de liberté où tout est possible et à une fraîcheur libre d’attaches et de dépendances. Le monde est à découvrir, un monde est à réinventer. La couleur y aura son rôle, au plus près. C’est à ce carrefour sensible que se situent les cinq peintres retenus ici.

Galerie 8 – Megan Rooney

Artiste pluridisciplinaire, Megan Rooney associe dans une même oeuvre peinture, sculpture, performance et écriture. L’acte de peindre est pour elle un engagement physique et mental intense qui culmine dans ses peintures monumentales, comme ici avec With Sun, peinture murale inédite et éphémère réalisée spécifiquement pour la Galerie 8, reliant dans un même élan les parois sur toute leur hauteur.

Munie de différents outils et aidée d’une nacelle élévatrice, Megan Rooney s’est engagée dans une performance de longue haleine qui s’est déroulée sur plusieurs semaines. Comme toujours chez l’artiste, l’oeuvre se construit dans un dialogue étroit avec l’architecture, sans esquisse préparatoire. Au fil des jours, les couches de peinture s’accumulent, avant d’être révélées par endroits à l’aide de disques abrasifs, laissant apparaître des configurations abstraites où l’on croit deviner les indices d’éléments anthropomorphes. Rooney explore ici la densité d’une palette solaire, riche et colorée, dominée par des teintes et des variations chatoyantes d’orangé, de mauve, de jaune, de vert, de rose, jusqu’à des tonalités pastel. Inspirée par les spécificités de cet espace ouvert sur le ciel, l’artiste a créé une peinture en connexion avec la nature environnante – dans laquelle elle puise continuellement – en écho avec les modulations lumineuses d’un soleil printanier et ses vibrations qui envahissent l’espace.

Galerie 9 – Sam Gilliam – Steven Parrino

Sam Gilliam est une figure majeure de la peinture américaine d’après-guerre. Son oeuvre est associée à la Washington Color School, un courant du Color Field painting qui se développe à New York au cours des années 1950 à partir de l’expressionnisme abstrait.

En 1968, il inaugure les Drape paintings à travers lesquels il définit un langage pictural nouveau, en explorant le potentiel de la surface et l’étendue du champ coloré. Les trois oeuvres monumentales exposées ici sont emblématiques de cette série qui marque à la fois l’abandon total du châssis et l’avènement d’une peinture dont la forme se déploie à chaque fois en fonction des particularités architecturales du lieu d’exposition. Dans l’atelier, Gilliam travaille sur une toile posée à même le sol sur laquelle il verse des pigments acryliques largement dilués avant de tamponner, frotter ou presser la matière à l’aide de pinceaux et de chiffons. Dans le flot des couleurs qui se répandent largement sur les deux faces de l’étoffe, le long des plis, dans les creux et dans les courbes, apparaissent des formes aléatoires – aplats, lignes, coulures, gouttes, traces et autres empreintes – qui se construisent sur le vif. Lorsque la toile est imbibée l’artiste la manipule, la plie, la froisse, l’enroule avant de la laisser sécher. Parfois il ajoute de la poudre d’aluminium et applique par touches, ici et là, de la peinture acrylique dont les effets de matière et de texture contrastent avec la surface plane imprégnée de couleurs. Dans un second temps, la toile est nouée en plusieurs points avant d’être suspendue librement dans l’espace, entre sol, mur et plafond. Dans cette présentation inédite, la puissance lyrique et vibrante des couleurs requalifie l’architecture de Frank Gehry, dans une tension entre ordre et désordre.

Bousculant les frontières entre peinture et sculpture, Steven Parrino libère la toile de sa planéité et fait sortir la couleur du cadre, la laissant déborder dans l’espace. Les oeuvres présentées appartiennent à la série des misshaped canvases (toiles déformées) que l’artiste développe à partir de 1981.

Steven Parrino définit à l’avance le processus de réalisation des oeuvres : une fois décidés le support et ses dimensions, il peint la surface de façon uniforme – à l’acrylique, à la bombe, à la peinture émail ou la laque. Puis il opère toute une série d’actions violentes : il décadre, arrache, tord et froisse le support peint, puis le refixe sur son châssis, souvent après l’avoir retouché. Ces opérations font passer les surfaces bi-dimensionnelles de la peinture à la tri-dimensionalité du relief et de la sculpture. De plus, l’importante implication physique de l’artiste dans le processus confère aux oeuvres un caractère performatif.

Au mur, quatre tondi et un carré percé dont les toiles ont été peintes soigneusement par Parrino avant d’être manipulées pour créer des effets de vortex en relief.

Au sol, deux installations de toiles froissées entourées d’adhésif. Ces toiles deviennent sculptures. Au carrefour de la high et de la low culture, Parrino privilégie ici les couleurs brillantes, également choisies pour leur portée symbolique

Galerie 11 – Niele Toroni

Artiste connu pour ses pratiques hors champ et nomades, réalisant ses empreintes à l’intérieur comme à l’air libre, Niele Toroni requalifie les espaces qu’il investit en adaptant ses oeuvres au lieu d’exposition. Depuis 1966, il réalise des empreintes monochromes au moyen de pinceaux plats, larges de 5 cm, qu’il applique sur une surface donnée à intervalles réguliers de 30 centimètres. Bien que ce « travail-peinture » soit le résultat d’un geste répété à l’identique, chaque empreinte est différente et varie en fonction de la quantité de peinture, de la vigueur du geste, du type de support, de sa forme, et de la couleur choisie.

Toroni est présent ici par un ensemble d’oeuvres réalisées entre 1967 et 1997 qui témoigne de la diversité des supports utilisés. La toile cirée, utilisée par l’artiste à ses débuts, lui permet de déployer ses empreintes en fonction de la dimension du mur. Découpée selon les besoins, c’est le lieu qui détermine la quantité de peinture visible.

Avec Flambo, marque de présentoir des magasins de décoration, Toroni pose ses empreintes de différentes couleurs sur les panneaux mobiles qui composent cet objet, tandis que l’Hommage aux hirondelles est placé en hauteur dans un angle, tel un nid d’oiseau. Les tondi aux « rouges » de Bordeaux proviennent des empreintes réalisées par l’artiste sur des barriques de vin. Les quatre peintures formant un ensemble accueillent chacune des empreintes de couleur différente : rouge, jaune, bleu, noir. La couleur rythme chaque toile de cette partition picturale.

Galerie 10 – Katharina Grosse

Depuis la fin des années 1990, Katharina Grosse explore les potentialités de la peinture au-delà des limites du cadre et de la toile. Embrassant sols, murs, plafonds, objets ou paysages entiers, elle crée des sites picturaux multidimensionnels grâce à la technique de projection de la couleur par pistolet-pulvérisateur qui est devenue sa signature. La couleur est au coeur de son travail et fait le lien entre toutes ses oeuvres. La question de l’échelle, ou encore de la fusion peinture / architecture / sculpture est omniprésente, comme ici dans le projet conçu en dialogue étroit avec le bâtiment de Frank Gehry.

Au départ de Splinter, l’artiste crée un élément hétérogène dynamique, composé de formes triangulaires, à partir duquel la couleur se propulse dans un grand élan. Composé d’une vingtaine de triangles en contreplaqué emboîtés sur une structure autoportante, ce dispositif occupe une partie du mur de droite de la Galerie 10 et fonctionne comme un « déclencheur » visuel reliant sol et plafond. Une fois la structure installée dans l’espace, la seconde étape consiste à la peindre, ainsi que tout ce qui l’environne. Grâce à un pochoir, Katharina Grosse crée un vide au centre, comme si la lumière, en s’engouffrant par le skylight était venue « brûler » la peinture. Selon les mots de l’artiste « une peinture peut atterrir n’importe où, et s’attarder partout (…). La peinture n’est pas reliée à un endroit donné. Elle met à l’épreuve – et condense spectaculairement – les caractéristiques du réel. »

Informations pratiques

Réservations

Sur le site : www.fondationlouisvuitton.fr

Horaires d’ouverture

Lundi : 11h – 20h Mardi : fermeture Mercredi : 11h – 20h Jeudi : 11h – 20h

Vendredi : 11h 21h (sauf les premiers vendredis du mois, fermeture à 23h) Samedi et dimanche : 10h – 20h

Accès

Adresse : 8, avenue du Mahatma Gandhi, Bois de Boulogne, 75116 Paris.

Métro : ligne 1, station Les Sablons, sortie Fondation Louis Vuitton.

Navette de la Fondation : départ toutes les 20 minutes de la place Charles-de-Gaulle – Etoile, en haut de l’avenue de Friedland.(Service réservé aux personnes munies d’un billet Fondation et d’un titre de transport – billet aller-retour de 2€ en vente sur www.fondationlouisvuitton.fr ou à bord)

Brice Marden Inner Space

Jusqu’au 28.8.2022, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaire : Josef Helfenstein

Brice Marden (*1938, Bronxville, New York) est l’un des peintres majeurs de notre temps. Dans le cadre de l’exposition Inner Space présentée dans le Neubau, le Kunstmuseum Basel rassemble quelque 90 oeuvres de cet artiste américain réalisées entre 1972 et 2019. Parmi celles-ci, des séries de dessins et des tableaux provenant de la collection de l’artiste, dont certaines exposées pour la toute première fois.

L’art minimal

Brice Marden établit sa réputation dans les années 1960 avec ses peintures monochromes et ses dessins empreints d’émotion. Son oeuvre réunit deux approches fondamentales de la tradition picturale moderne : d’une part le geste caractéristique de l’expressionnisme abstrait, de l’autre une tendance à la réduction à l’essentiel qui rapproche son oeuvre de l’art minimal, du moins extérieurement. L’exposition Inner Space donne à voir une oeuvre en écho avec les temps forts de la collection d’art américain après 1960 figurant au sein de la Öffentliche Kunstsammlung Basel.

Sa pratique picturale

Jusque dans les années 1970, Marden crée des panneaux monochromes qui, quelques années plus tard, prennent la forme de diptyques et de tableaux de grandes dimensions composés de plusieurs parties, qui donnent lieu à des confrontations complexes avec la surface et la couleur et se lisent comme des paysages ou des architectures. Son intérêt pour la ligne, le geste et l’emploi de moyens et de matériaux simples (« there’s no electricity involved ») figure au coeur de sa pratique picturale et dessinatoire.

En outre, il revendique bientôt une reconnaissance à part entière de ses dessins généralement subordonnés aux peintures dans la hiérarchie des médiums artistiques. Dans un texte de 1979, Brice Marden demande que ceux-ci soient considérés « comme des espaces ». Pour lui, le dessin est un médium qui, outre le fait d’exister en plus de deux dimensions, est également en mesure de refléter l’esprit et l’expérience d’un lieu précis.

Le concours

L’exposition Inner Space propose une mise en regard de séries de dessins et de peintures qui souligne l’importance du processus dans le travail de Marden. Une période de son oeuvre trouvant son origine à Bâle en constitue le point de départ : Marden se consacra à cette ville pendant sept ans. En 1978, il remporta un concours pour concevoir les nouveaux vitraux du choeur de la cathédrale de Bâle. Ses esquisses restèrent toutefois sans suite.


L’exposition présente une sélection des travaux préparatoires de ce projet conservés au sein de la collection du Kunstmuseum Basel, ainsi que plusieurs Window Paintings exécutés à cette occasion qu’il est rare de voir exposés.

Son évolution artistique

Malgré l’échec du projet bâlois, ces années marquèrent une rupture décisive dans l’oeuvre de Brice Marden et établirent les fondements de son évolution artistique à venir. Au début des années 1980, enthousiasmé par la visite d’une exposition à New York, il entame une exploration de la calligraphie et de la poésie asiatiques et effectue ses premiers voyages en Thaïlande. Durant ses séjours en Asie et sur l’île grecque d’Hydra, il réalise des dessins inspirés de caractères extrême-orientaux, qui continuent toutefois à résulter d’observations de la nature. Ce faisant, Marden commence à se détourner de la peinture monochrome.

Cold Mountain

Au milieu des années 1980, Brice Marden initie la série Cold Mountain. Celle-ci se réfère aux écrits du célèbre poète Han Shan, connu sous le nom de
« Cold Mountain », qui vécut en Chine sous la dynastie Tang (618–907). Les aplats de son oeuvre de jeunesse s’y dissipent en lignes et en signes suggérant le mouvement. Désormais, des grilles colorées dynamiques et des traits entrelacés dominent les toiles de Marden. Dans les années suivantes, les tracés s’agrègent et renouent avec la couleur. The Muses (1991–1993),
 peinture monumentale conservée au sein de la collection Daros à Hurden, en constitue un exemple éloquent : la structure calligraphique à la base du tableau se déploie en une chorégraphie souple de lignes fluides dans des tons de vert, jaune, gris et bleu.

À travers 80 dessins et 10 peintures provenant du Kunstmuseum Basel ainsi que de prêts suisses et internationaux, l’exposition Inner Space retrace cette évolution artistique jusqu’aux oeuvres d’aujourd’hui.
Brice Marden. Inner Space est une version élargie de l’exposition Think of Them as Spaces. Brice Marden’s Drawings curatée par Kelly Montana qui s’est déroulée à la Menil Collection de Houston (21.2.–14.6.2020).

Variation in Print La gravure américaine

Blatt: 63.3 x 90.4 cm; Farblithographie von 4 Steinen in Schwarz, Dunkelrot, Ultramarinblau und Grün

– Jusqu’au 28.8.2022, au  Kunstmuseum Basel | Hauptbau
Commissaire : Judith Rauser
Parallèlement à l’exposition Inner Space, une sélection de gravures américaines de Barnett Newman, Sam Francis, Jasper Johns, Donald Judd, Sol LeWitt, Frank Stella et Brice Marden est à voir dans le Hauptbau. Cette présentation est consacrée au « Graphic Boom » survenu à partir des années 1960, lorsque des artistes américains majeurs s’enthousiasment pour les possibilités et les défis de l’impression. Cette exposition présente de nombreuses oeuvres de l’art graphique américain, pour certaines rarement exposées.

Kunstmuseum Basel
St. Alban-Graben 8
Postfach, CH-4010 Basel
T +41 61 206 62 62
kunstmuseumbasel.ch

Wang Keping  à l’œuvre au musée Rodin

Le musée Rodin invite Wang Keping à investir le jardin de sculptures pour en faire son atelier pendant tout le mois de mai (du mardi 3 mai au dimanche 5 juin 2022).

Proche de la nature comme Rodin le fut, l’artiste peut travailler en direct sous les yeux du public sur quatre sculptures monumentales en cours d’élaboration, dans le vaste espace du sous-bois. Wang Keping travaille, en taille directe, des troncs d’arbres entiers dont il sait faire surgir des formes sensuelles, pleines d’émotion et de poésie.
Cette invitation, une première pour le musée Rodin, est une occasion unique
pour le public de découvrir l’artiste au travail et de voir l’oeuvre en cours de création.

Biographie

Né en 1949 près de Pékin dans une famille de lettrés, Wang Keping a connu les
bouleversements de la révolution culturelle. Ouvrier, soldat, comédien, écrivain, il devient sculpteur comme il aime à le raconter, après avoir vu des oeuvres de Rodin. Autodidacte, et sans formation académique, il dit avoir inventé sa technique si particulière. Profondément chinois d’influence et de culture, il ne pratique pourtant pas ce qu’il appelle un « art chinois».
En 1979, il participe en Chine à la création du groupe d’artistes dissidents des
« Etoiles » et affronte alors la censure politique et les privations de liberté, avant de s’exiler en France en 1984.

Son oeuvre

Le bois, matériau privilégié de l’artiste, est au coeur de son oeuvre. Wang Keping parcourt les paysages et les scieries à la recherche de troncs d’essences différentes. Une fois écorcé, le bloc suggère les formes que prendra la sculpture. A l’aide de sa tronçonneuse puis d’outils de plus en plus fins, l’artiste fait parler le bois. Il le ponce et le reponce, jusqu’à ce que la forme juste se dégage et révèle l’âme que la matière impose : des formes féminines arrondies,
douces, sensuelles, lisses comme de la peau.

A propos des femmes de Rodin, Wang Keping dit :
« Des corps nus de femme sculptés par Rodin se dégagent une lumière brillante d’amour… et en même temps, un vibrant appel à la liberté. […] La célébration des femmes dans l’oeuvre de Rodin a laissé une empreinte profonde dans mon parcours créatif, guidant ma tête et mes mains, passant de la conception à la réalisation, de 1978 jusqu’à aujourd’hui, des images imprimées à Pékin jusqu’au musée Rodin à Paris »

                                                            Maternité
Quatre sculptures en cours d’achèvement
sont installées dans l’atelier à ciel ouvert du jardin. Une sculpture achevée L’Amour des Forêts (chêne vert), H 172 x 150 x 122 cm est également présentée dans le hall de l’hôtel Biron pendant tout le mois de mai.
L’artiste est présent dans son atelier à ciel ouvert, les mardis, jeudis, samedis et dimanches après-midi, sous réserve des conditions météorologiques.
Tous les détails sur musee-rodin.fr.

Renseignements

MUSÉE RODIN
77, RUE DE VARENNE 75 007 PARIS
T. +33 (0)1 44 18 61 10
M° VARENNE
OUVERT DU MARDI AU DIMANCHE
DE 10 H À 18 H

BILLETTERIE ET PROGRAMME
MUSEE-RODIN.FR

EN PARTENARIAT AVEC LA
GALERIE NATHALIE OBADIA
PARIS/BRUXELLES

Sommaire du mois d’avril 2022

27 avril 2022 : Alerte 1,1°C – Exposition collective au Séchoir
17 avril 2022 : Jean-Jacques Lebel «La Chose» de Tinguely, quelques philosophes et «Les Avatars de Vénus»
01 avril 2022 : La Collection Morozov. Icônes de l’art moderne