QUI NE DIT MOT…(Une victoire sur le silence)


Du 7 au 23 septembre 2023
Vernissage le 7 septembre à partir de 18h
Sous le commissariat de Marie Deparis-Yafil
Galerie Marguerite Milin
11 rue Charles-François Dupuis 75003 Paris

Pour une fois je vais parler/écrire d’une exposition que je n’ai pas vue, d’une part par amitié pour Naji, d’autre part pour la gravité du sujet

Note d’intention

Bien que fléau menaçant tous les enfants du monde, à tous les niveaux des sociétés, et à des degrés divers de barbarie, la violence sexuelle faite sur enfant reste un sujet éminemment tabou, tant sur les plans politique que culturel.
L’art lui-même, à diverses époques, a pu se faire l’écho bienveillant, sinon complice, de pratiques dont on connait pourtant les ravages physiques et psychologiques sur l’adulte que l’enfant abusé sera devenu.
Il est temps, aujourd’hui, que cela cesse, et que l’on puisse aussi entendre et voir la parole des artistes qui, d’une manière ou d’une autre, luttent pour que la parole des victimes soit entendue et reconnue.
Cette exposition collective, une première sur ce sujet, constitue un moyen d’objectiver la question, au travers de propositions artistiques contemporaines fortes, donnant matière – au propre comme au figuré- à réflexion, ambitionnant de contribuer à faire bouger les lignes.

Les artistes

Avec : Jessy Deshais, Naji Kamouche, Sylvie Kaptur-Gintz, Sandra Krasker, Monk, Piet.sO, Anne Plaisance, Virginie Plauchut, Erik Ravelo Suarez, Camille Sart, Maïssa Toulet, Tina Winkhaus.

QUI NE DIT MOT…

se réfère explicitement au proverbe d’origine latine qui tacet consentire
videtur («qui se tait semble consentir»), laissant au lecteur le soin de finir lui même la phrase, et posant ainsi deux questions cruciales, intimement liées: celle du consentement, celle du silence.
La locution populaire fait écho à cette tenace présupposition que celui qui n’objecte pas de refus donne tacitement son accord, préjugé si souvent répété dans les entourages des victimes, depuis «Tu aurais pu dire non» à «Pourquoi n’a-t-il/elle rien dit pendant toutes ces années?» … C’est le «non» qui n’a pas pu être dit, ou n’a pas été entendu, dont la victime devra sans cesse se justifier, c’est le long silence, dont il faudra se justifier encore, face à une ignorance et une suspicion persistantes des raisons profondes qui nourrissent un secret durant parfois des décennies. C’est aussi l’injonction au silence régnant dans les entourages, les familles…toute une mécanique des yeux et des oreilles tacitement fermés, socle parfois inattaquables des structures familiales et sociales…
«Qui ne dit mot…consent», est aussi un principe de droit, à la racine même de principe de prescription, qu’il nous faut aujourd’hui ré examiner et requestionner.

QUI NE DIT MOT… pour prendre à rebours donc, cette croyance que celui qui se tait consent, pour affirmer que le silence d’une victime ne vaut évidemment pas consentement, que rien n’est moins tacite que la domination par le silence.
Mais «Qui ne dit mot…» fait aussi allusion au silence de «ceux qui savent». Aujourd’hui, peut-être plus que jamais, savoir et ne rien dire doit pouvoir être appréhendé comme une forme de consentement au délit ou au crime. Cette parole là aussi doit être libérée. Dans le même temps, on ne peut – encore une fois- voler la parole à la victime, ni extorquer sa vérité. Les enjeux sont
complexes.
Evitant l’écueil de l’angélisme, opposant une image édulcorée de l’enfance à une réalité sordide, comme celui du voyeurisme, refusant toute ambiguité complaisante, cette exposition, premier moment d’un projet d’ampleur, entend ne laisser le moindre doute sur les intentions des artistes et du commissaire.
Au travers d’oeuvres de tous médias – peinture, sculpture, photographie, vidéo, installation…- l’exposition explore différentes approches, entre corps et esprit, réalité et mémoire, traumatisme et résilience, violence et réparation, avec une attention particulière portée à l’histoire : celle des enfances volées, des vies de famille spoliées, des adolescences mortifères, des adultes devenus avec peine, à qui on n’offre le plus souvent ni le droit de souffrir, ni la reconnaissance de cette blessure que rien ne viendra suturer.
Elle parle de manière plus générale, des systèmes et mécanismes de domination à l’oeuvre dans cet asservissement et cette réification du corps de l’autre, de l’emprise et de la manipulation, du silence et du secret, et prétend en ce sens à l’universel.
Elle engage, enfin, sur la voix de la résilience celles et ceux qui croient en le pouvoir cathartique de l’art.
QUI NE DIT MOT… est une victoire sur le silence, et la première exposition rassemblant des artistes contemporains pour dire non.
texte de Marie Deparis-Yafil

Naji Kamouche (France – Algérie)

« Seul » – Fenêtre, néon clignotant, poignées de porte, dimensions variables, 2003 (courtesy Naji Kamouche)
Portes fermées, portes qui se ferment… L’installation « Seul » évoque
avec une force dramaturgique puissante, au travers de ce simple objet familier – la poignée de porte- l’expérience de la victime de violence, de la solitude et de
l’enfermement, notamment dans le secret.
Que se passe-t-il derrière les portes fermées des maisons, des chambres ? Que se passet- il lorsque la porte s’ouvre, et que l’espace domestique, qui devrait
être sécurisant, se fait zone de danger et de peur ? Et le néon qui clignote, comme un appel au secours, derrière la fenêtre, inaudible, rappelle dans son insistance le cri du silence.
Naji Kamouche déploie depuis de nombreuses années un travail d’une sensibilité écorchée, empreinte de poésie et de violence, réfléchissant
tout à la fois l’arrachement, l’exil, la peur et la solitude. Au travers de divers médiums, avec une prédilection pour le volume et l’installation, il
développe une oeuvre sans concession, dans laquelle la fragilité de la résilience s’inscrit sur le fil d’une lutte constante pour vivre et survivre.
Naji Kamouche vit et travaille à Mulhouse. Son travail fait partie de nombreuses collections publiques et privées françaises (ville de Mulhouse, Artothèque de Caen, FRAC Alsace, FMAC / Fonds Municipal d’Art Contemporain de la ville de Paris, Musée des Beaux-arts de Mulhouse…) et il expose régulièrement en
Europe, dans des musées, centre d’art, galeries et foires.
Naji KAMOUCHE – Seul – © Fred

Jessy Deshais (France)

« Les petites culottes » Organdi, eau sucrée, impression
numérique, broderie, épingles, hameçons, dimensions variables,
2011 (courtesy Jessy Deshais)
«Les petites culottes» forment une installation
suspendue, composée de plusieurs éléments de
coton blanc retravaillés, rebrodés. Ces sousvêtements enfantins, symbolisant la simplicité innocente,
racontent chacun une histoire, rappellent chacun l’intouchable.
Sortes de perizonium, ils évoquent la sanctuarisation du corps de l’enfant. «Elles ont le poids d’une plume, la fragilité d’une aile de papillon et les cris sourds de la violence.», en dit Jessy Deshais, évoquant dans le même temps la force de l’enfance face à la violence du monde, et les blessures indélébiles de ce même enfant devenu adulte.
Née à Tours en 1966, Jessy Deshais pratique divers métiers dans les arts graphiques et vivants ( DA, Illustratrice,scénographe, réalisatrice)
après sa formation, qu’elle poursuivra longtemps en parallèle à ses activités personnelles qu’elle montre peu. C’est autour de 2010 qu’elle commence
à faire valoir ce travail. En 2011, l’exposition personnelle « Les petites culottes » à la QSP de Roubaix, fait surgir la violence restée cachée en elle, une longue période d’un travail d’intériorité se met en place.
Elle navigue depuis entre les salons, les galeries et lieux prestigieux comme le Musée de la Chasse et de la Nature en 2014 , le Monastère de Brou en 2015, le Musée de la Piscine à Roubaix et la Villa Yourcenar à Mont noir en 2018 , La Ruche Seydoux à Paris, le château du Rivau à Lémeré en 2021, la Halle st Pierre à Paris en 2022. Elle continue à développer un corpus d’oeuvres diverses :
écriture, dessin, sculpture, vidéo, photo et installation relatant selon les époques l’expression mêlée de son bonheur de vivre comme sa profonde déception face au monde. Elle vit et travaille à Montreuil-sous-Bois.
Jessy DESHAIS -Les petites culottes- © Atelier Find Art

Les oeuvres

Jeudi 21 septembre 2023

PRÉSENTATION EN AVANT-PREMIERE DU DOCUMENTAIRE « Odette et moi », de Anne Lucie Domange Viscardi, en présence d’Anne Lucie Domange Viscardi, Andréa Bescond et Déborah Moreau, à partir de 18h.

« Odette et moi » est un documentaire qui capte la transmission d’un spectacle, mais pas n’importe quel spectacle !
Écrite et interprétée par Andréa Bescond, mise en scène par Eric Métayer,
« Les chatouilles ou la danse de la colère », jouée pour la première fois en 2014, est une oeuvre artistique essentielle qui marque un moment import libération de la parole au sujet de la pédocriminalité. En 2016, forte de son incroyable succès au
regard du sujet abordé et portée par l’énergie d’Andréa Bescond, la pièce remporte le Molière du Seul(e) en Scène. Adaptée en 2018 pour le cinéma, la pièce devenue film remporte à nouveau le succès et deux Césars, celui de la meilleure adaptation pour Andréa Bescond et Eric Métayer, et celui de la meilleure comédienne pour un second rôle pour Karin Viard.
Après l’avoir interprété durant plus de 4 ans, Andréa Bescond décide de transmettre le spectacle pour qu’il continue d’exister tandis qu’elle souhaite vivre d’autres aventures artistiques.


Le documentaire « Odette et moi» raconte l’histoire de cette transmission, de cette passation entre Andréa Bescond et Déborah Moreau, évoquant au passage le contenu même du texte , et son histoire. D’avril 2018 à juin 2019, Anne Lucie Domange Viscardi suit les deux actrices et nous fait témoins du processus de transmission de ce spectacle hors catégorie, des auditions jusqu’à la première représentation à Avignon. Au travers de ce passage de relais, grâce à la puissance du spectacle, émouvant, réaliste et savamment parsemé d’humour, on découvre et comprend la mécanique des agresseur.e.s, le déni de l’entourage, et la capacité des humain.e.s à se relever quoiqu’il arrive.
On assiste également à la naissance d’une comédienne talentueuse, Déborah Moreau, qui relève ce défi artistique avec talent et détermination !

Lecture

Le samedi 9 septembre lors du VERNISSAGE RENCONTRES AVEC LES ARTISTES
il y a eu la PRÉSENTATION ET LECTURE DE « Mon Secret » DE NIKI DE SAINT PHALLE
Visite commentée, rencontres et discussions privilégiées avec les artistes présents, à partir de 14h.
Présentation de la ré-édition du livre « Mon Secret », de Niki de Saint Phalle, par Ariana Saenz Espinoza et Christine Villeneuve, co-édité par les éditions Le rayon blanc et les éditions des femmes-Antoinette Fouque, à partir de 18h30, suivi d’une lecture d’extraits de l’ouvrage.

Informations pratiques

GALERIE MARGUERITE MILIN
11 rue Charles-François Dupuis 75003 Paris
OUVERTE TOUS LES JOURS DU
MARDI AU SAMEDI DE 12h à 19h et sur RDV
www.margueritemilin.com
galeriemargueritemilin@gmail.com
mdeparisyafil@gmail.com

Soirée des 30 ans de La Filature, Scène nationale de Mulhouse

samedi 30 septembre 2023

EN PRÉSENCE DE

Josiane Chevalier Préfète de la Région Grand Est
Franck Leroy Président de la Région Grand Est
Frédéric Bierry Président de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA)
Michèle Lutz Maire de Mulhouse
Bertrand Jacoberger Président de La Filature, Scène nationale de Mulhouse
Benoît André Directeur de La Filature, Scène nationale de Mulhouse

AU PROGRAMME

17h30 Lancement officiel
18h Les Voyages
Compagnie XY
création in situ aux abords du Théâtre · cirque (voir p.5)
19h Ici Ailleurs
Aglaé Bory
vernissage de l’exposition (voir p.9)
20h Le Tartuffe ou l’Hypocrite
Molière · Ivo van Hove · Comédie-Française
portrait Ivo van Hove · théâtre (voir p.4)
+ exposition d’affiches de saison La Filature, Scène nationale de Mulhouse
Colorée, vibrante, parfois surprenante, l’identité visuelle de La Filature a évolué au fil des années. Les affiches présentées
dans le cadre de cette exposition sont le reflet de 30 années de programmation ! À découvrir dans le hall.

Feuilletez ici le programme

Sommaire du mois d’août 2023

Anika YI, artiste américaine, d’origine coréenne,
à la Bourse de commerce de François Pinault

26 août 2023 : Jacobus Vrel, Énigmatique précurseur de Vermeer
24 août 2023 : Robert Gober et le motif du trou d’écoulement
21 août 2023 :  OUT OF THE BOX
20 août 2023 : Tacita Dean
17 août 2023 : Naples à Paris Le Louvre invite le musée de Capodimonte
15 août 2023 : Le 15 août : de l’Assomption de la Vierge à Napoléon
12 août 2023 : RON MUECK
04 août 2023 : Rétrospective de l’oeuvre de Norman Foster

Jacobus Vrel, Énigmatique précurseur de Vermeer

 1-Jacobus Vrel, Femme saluant un enfant à la fenêtre Huile sur bois.
– 45,7 × 39,2 cm
Paris, Fondation Custodia, Collection Frits Lugt, inv. 174

EXPOSITION À LA FONDATION CUSTODIA
Après une étape initiale au Mauritshuis de La Haye, la Fondation Custodia accueille du jusqu' au 17 septembre 2023 l’exposition Jacobus Vrel. Énigmatique précurseur de Vermeer. Cet évènement se tient en parallèle de l’exposition Rein Dool. Les dessins, présentée auparavant au Dordrechts Museum.

Ce dernier se devait d’être présent dans les salles de la « maison de l’art sur papier » ainsi que Ger Luijten, regretté directeur, aimait à décrire la Fondation. En outre, la Fondation Custodia propose une immersion dans le Siècle d’or hollandais afin de mettre en relief l’originalité de Vrel : un choix de tableaux, de dessins et de gravures issus de sa propre collection est complété par de très beaux prêts de la Alte Pinakothek de Munich, du Mauritshuis, du Rijksmuseum et d’autres musées allemands et néerlandais.

Présentation

Cette première présentation monographique consacrée au peintre rassemble ses oeuvres majeures disséminées dans les plus grands musées – Amsterdam, Bruxelles, Détroit, Munich, Vienne… – et dans de prestigieuses collections particulières. On y voit aussi, bien entendu, l’une des scènes de genre les plus connues et surprenantes du peintre qui est conservée à la Fondation Custodia.

L’étape parisienne de l’exposition est très différente de celle du Mauritshuis car la sélection d’oeuvres de Jacobus Vrel a été enrichie de neuf tableaux et de
l’unique dessin connu de l’artiste.

Fondation Custodia  Jacobus Vrel – Scène de rue avec un homme
– pierre noire, encadrement à la plume et encre brune

Ressemblance ?

À première vue, rien ne semble relier Jacobus Vrel au célèbre Johannes Vermeer hormis leurs initiales « JV ». Pourtant, nombre de leurs tableaux partagent un même calme contemplatif, le rôle central joué par des figures féminines et, bien souvent, un certain mystère. Ainsi, beaucoup d’oeuvres de Jacobus Vrel furent longtemps attribuées à Vermeer.
Inconnues du grand public, elles intriguent et fascinent les historiens d’art depuis plus d’un siècle. Qui était donc ce mystérieux peintre du XVIIe siècle hollandais ?

Vrel l’énigmatique

2-Jacobus Vrel Femme à la fenêtre, daté 1654 Huile sur bois. – 66,5 × 47,4 cm
Vienne, Kunsthistorisches Museum, inv. GG 6081 © KHM-Museumsverband

Rien n’est connu de la vie de Jacobus Vrel. Seul un de ses tableaux porte une date : « 1654 », que l’on peut lire dans la partie gauche de la Femme à la fenêtre de
Vienne, juste après le nom « J. Frel » [fig. 2]. Ici, la signature de Vrel ne se détache pas sur le blanc d’un morceau de papier tombé sur le sol de la composition, contrairement à la majorité de ses scènes d’intérieur.
Car Jacobus Vrel a signé ou monogrammé presque toutes ses oeuvres connues. Étrangement – mais tout semble étrange chez Vrel – il orthographie son
patronyme de façons très variées : « J. Frel », comme à Vienne, « Vrel »,
« Vrell », « Vrelle », voire « Veerlle ».
Dans l’intérieur d’église et la Vieille femme lisant
[fig. 6], il donne également son prénom en toutes lettres : « Jacobüs Vreel ».

On ne connaît que quarante-cinq oeuvres de sa main : un unique dessin et quarante-quatre tableaux, tous peints sur panneaux de bois. Le catalogue raisonné établi par l’équipe scientifique internationale qui a porté ce projet les a tous répertoriés dans la monographie consacrée à Jacobus Vrel, publiée au printemps 2021. L’étape parisienne de l’exposition présente le dessin et vingt-deux de ces tableaux, soit plus de la moitié de la production connue de l’artiste.

3 -Jacobus Vrel Paysage avec deux hommes et une femme conversant, avant 1656
Huile sur bois. – 37 × 28 cm Vienne, Kunsthistorisches Museum, inv. GG 580
© KHM-Museumsverband

Un seul document

En dehors de ses oeuvres, on ne dispose que d’un seul document contemporain mentionnant le peintre. Il est d’une grande importance car il nous informe que
trois tableaux de Vrel se trouvaient dans une prestigieuse collection de peintures du XVIIe siècle.
Il s’agit de celle de l’archiduc Leopold Wilhelm, gouverneur des Pays-Bas du Sud (l’équivalent de l’actuelle Belgique) alors sous la tutelle de l’Espagne
des Habsbourg. Lorsque s’achevèrent ses fonctions à Bruxelles, l’archiduc rentra à Vienne et y fit envoyer sa vaste collection. C’est là qu’un inventaire détaillé fut rédigé en 1659 où l’on trouve « Deux pièces de même format à l’huile sur bois, dans l’une une cheminée hollandaise auprès de laquelle est assise une femme malade, et dans l’autre une femme qui regarde par la
fenêtre. […] Originaux de Jacob Frell. » et plus loin « Une huile sur bois, où l’on voit deux paysans et une paysanne. Par Jakob Fröll ». Dans l’inventaire aussi,
le nom du peintre fut donc orthographié de deux manières différentes.

Tableaux identifiés

Les deux premiers tableaux furent facilement identifiés dès la fin du XIXe siècle comme étant celui du Kunsthistorisches Museum de Vienne [fig. 2]
– dont le coeur est justement constitué de la fameuse collection de Leopold Wilhelm – et son pendant vendu par le musée et aujourd’hui dans la Leiden
Collection à New York.
Le troisième tableau avait en revanche été perdu de vue et c’est l’une des nouveautés apportées par le projet de recherches mené pour l’exposition que
d’avoir permis l’identification du seul paysage connu de la main de Jacobus Vrel [fig. 3]. Il est lui aussi conservé au musée de Vienne mais était depuis le XVIIIe siècle attribué à l’artiste Johannes Lingelbach (Francfort 1622 – 1674
Amsterdam). Si l’absence d’information sur le peintre – en dépit de ces trois oeuvres dans la collection de Leopold Wilhelm – n’avait pas suffi à rendre perplexes les historiens de l’art, les tableaux de Jacobus Vrel les ont aussi mis à l’épreuve. Ils sont en effet difficiles à placer au sein de la production picturale hollandaise. Ses vues de rues semblent offrir une plongée dans la vie urbaine des Pays-Bas du XVIIe siècle, mais elles intriguaient par leurs architectures inclassables. Dans la Scène de rue animée acquise récemment par la Alte Pinakothek de Munich, la gamme monochromatique et les accents géométriques paraissent même d’une étonnante
modernité [fig. 4].

                                       4- Jacobus Vrel, Scène de rue animée
Huile sur bois. – 39 × 29,3 cm
Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlungen,
Alte Pinakothek, inv. 16502

De plus, ces représentations n’ont pas d’équivalent dans la peinture de vues de villes, un genre qui se développe surtout dans la seconde moitié du Siècle
d’or. Vrel choisit en effet de dépeindre des ruelles anonymes avec des personnages simples – ni riches, ni pauvres – contrairement à ses confrères [fig. 5].

5- Jacobus Vrel, Scène de rue, femme assise sur un banc
Huile sur bois. – 36 × 27,5 cm Amsterdam, Rijksmuseum, inv. SK-A-1592

Quant aux scènes d’intérieur peintes par Vrel, elles sont également difficiles à ordonner dans l’art hollandais.
Ces pièces vides d’objet – à l’exception du morceau de papier au sol qui porte sa signature, délimitées par des murs tout aussi vides et une fenêtre derrière laquelle on distingue une pâle figure d’enfant émergeant de l’obscurité, sont sans équivalent dans l’art de son siècle [fig. 1 et 6].


6-Jacobus Vrel, Vieille femme à sa lecture, un garçonnet derrière la vitre

Huile sur bois. – 54,5 × 40,7 cm The Orsay Collection

Scènes de genre hollandaises

D’autres intérieurs, plus proches sans doute des scènes de genre hollandaises auxquelles nous sommes accoutumés, s’en distinguent cependant par leurs
figures féminines vues de dos, dont l’expression échappe au spectateur, comme dans les compositions de Vienne [fig. 3], de Bruxelles et de Lille. Dans le très
beau tableau de Détroit [fig. 7], un garçonnet observe par une porte à deux battants un ailleurs qui demeure hors-champ tandis qu’une femme cherche des poux dans la chevelure d’une fillette et se détache sur un grand pan de mur vide d’une audacieuse modernité.

7-Jacobus Vrel, Intérieur, femme peignant une fillette, un garçon près de la porte Huile sur bois. – 55,9 × 40,6 cm
Détroit, The Detroit Institute of Arts, don de The Knoedler Galleries, 1928,
inv. 28.42

La palette restreinte, la sobriété et le silence qui se dégagent de ces scènes ont bien souvent fait comparer Jacobus Vrel au peintre danois Vilhelm Hammershøi (1864 – 1916). C’est certainement le caractère intemporel de ses oeuvres qui attira Jean Clair au début de sa brillante carrière consacrée à l’art du XXe siècle.
Son article de 1968
« Jacobus Vrel, un Vermeer du pauvre » est l’une des analyses les plus fines du travail du peintre « chroniqueur
des petites gens des villes ».
Constatant combien Vrel se distingue de ses confrères hollandais, Jean Clair montre que ses choix formels se rapprochent
de ceux de Vermeer :
aucune perspective plongeant dans les rues environnantes, dans des enfilades et des pièces qui s’emboîtent. Enfin, Jean Clair insiste très justement sur le refus de Vrel de « se laisser enfermer dans un réalisme étroit » permettant
ainsi aux spectateurs d’accéder à une forme de « ravissement intemporel ».

Le projet international de recherche : La Haye – Munich – Paris

C’est pour tenter de percer le mystère de Jacobus Vrel que la Alte Pinakothek de Munich, la Fondation Custodia et le Mauritshuis ont uni leurs forces et entrepris un projet de recherche international dès 2018. L’exploration des
archives confiée à Piet Bakker, l’un des grands spécialistes néerlandais dans ce domaine, n’a hélas livré aucune information sur les lieux de naissance et de
décès ni sur l’activité du peintre. En revanche, les analyses dendrochronologiques mises en oeuvre pour ce projet (c’est-à-dire la datation
des panneaux de bois sur lesquels sont peints les tableaux) ont établi que Vrel avait créé ses premières vues de villes autour de 1635 et ses scènes d’intérieurs
vers 1650. Cela en fait donc, non pas un suiveur comme on l’a longtemps
présumé, mais bien un précurseur de Vermeer. Vrel était généralement placé dans l’école de Delft, mais il convient désormais de l’imaginer actif dans l’est des Pays-Bas. Les historiens de l’urbanisme et de l’architecture
Boudewijn Bakker et Dirk Jan de Vries ont montré que certaines des vues de villes peintes par Vrel – comme le tableau de Hambourg [fig. 8] –présentent
des éléments qui sont tirés de la topographie et des bâtiments de la ville de
Zwolle, charmante cité où naquit le grand peintre Gerard ter Borch (1617 – 1681). C’est peut-être ce dernier qui fut le lien entre Vrel et Vermeer car un document d’archive atteste que Ter Borch et Vermeer se connaissaient.

Jacobus Vrel et le Siècle d’or hollandais

Afin de mieux faire comprendre l’originalité des oeuvres de Jacobus Vrel, la Fondation Custodia consacre trois salles de son exposition aux contemporains hollandais du peintre qui ont traité des sujets similaires : vues de villes et scènes de genre.
Si les représentations urbaines de Vrel n’ont pas d’équivalent dans l’art des Pays-Bas, il est pourtant le premier peintre du Siècle d’or à avoir choisi pour sujet des vues de rues et de bâtiments sans aucun événement historique ou marquant. C’est un type de peintures qui allait connaître un développement important dans la seconde moitié du XVIIe siècle avec des artistes qui se spécialisent dans ce genre comme Jan van der Heyden (1637 – 1712)
ou les frères Gerrit (1638 – 1698) et Job Berckheyde (1630 – 1693). De ce dernier, l’exposition montre un tableau évoquant les canaux bordés d’arbres de la ville de Haarlem prêté par le Mauritshuis. De la fabuleuse collection du musée de La Haye vient aussi la Vue d’un marché par Egbert van der Poel (1621 – 1664), un artiste qui, comme Vrel, se spécialise dans les représentations urbaines et les scènes de genre.

10- Pieter Janssens, dit Elinga (1623 – 1682), Femme à sa lecture, vers 1665-1670 – Huile sur toile. – 75,5 × 63,5 cm
Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlungen, Alte Pinakothek, inv. 284

Les vues de villes furent aussi très prisées des dessinateurs hollandais et plusieurs feuilles remarquables de la Fondation Custodia et du Rijksmuseum mettent leur art en lumière. Le visiteur de l’exposition saisira ainsi combien les ruelles peintes par Jacobus Vrel tiennent une place à part dans la production
néerlandaise.
En revanche, lorsqu’il dépeint des intérieurs, Vrel fait appel à un répertoire
de motifs déjà bien en place dans l’art hollandais. Ses figures de femmes
cuisinant, cousant, au chevet d’une malade ou s’occupant d’enfants ont de nombreux parallèles, comme le montre l’exposition.
Pour évoquer les artistes Esaïas Boursse (1631 – 1672) et Quiringh van
Brekelenkam (après 1622 – après 1669) [fig. 9], les peintures de la Fondation
Custodia sont complétées par les généreux prêts du Rijksmuseum, du musée de Bonn et de la Alte Pinakothek de Munich. Cette dernière envoie également à Paris son magnifique tableau de Pieter Janssens, dit Elinga (1623 – 1682) [fig. 10] dont les intérieurs peuplés de figures féminines invitent à une même rêverie que ceux de Vrel.

11- Gerard ter Borch (1617 – 1681)- La Chasse aux poux, vers 1652-1653
Huile sur bois. – 33,2 × 28,7 cm
La Haye, Mauritshuis, acquis avec le soutien de la Vereniging Rembrandt,
inv. 744

Quant au Mauritshuis, il a accepté de prêter l’un de ses tableaux iconiques de Gerard ter Borch (1617 – 1681) : La Chasse aux poux [fig. 11] normalement exposé dans la salle des Vermeer à La Haye. On y retrouve le thème de l’épouillage maternel de la composition de Vrel conservée à Détroit [fig. 7] mais traité par Ter Borch de façon plus intimiste avec une attention toute particulière accordée aux expressions des visages et à la description des étoffes.

Les arts graphiques ne sont pas en reste pour cet éloge du quotidien que les artistes hollandais du XVIIe siècle ont offert à la postérité.
La Fondation Custodia est riche de dessins de Rembrandt évoquant la vie des
femmes, probablement à l’origine conservés par le maître dans un album consacré à ce thème. On peut admirer le plus beau d’entre
eux – unanimement reconnu comme l’une des feuilles majeures de l’artiste. Rembrandt y représente sa femme, Saskia, alitée, sans doute pendant l’une de ses grossesses [fig. 12]. Le motif de la malade allongée dans un lit

12.-Rembrandt Harmensz van Rijn, dit Rembrandt (1606 – 1669)
Intérieur avec Saskia alitée, vers 1640-1641
Plume et encre brune, lavis brun et gris, corrections à la gouache blanche.
– 142 × 177 mm
Paris, Fondation Custodia, Collection Frits Lugt, inv. 266

Aux côtés des dessins et gravures sélectionnés dans la collection de la Fondation Custodia sont exposés de nombreux prêts du Rijksmuseum, comme la série de la graveuse Geertruydt Roghman (1625 – 1651) qui présente de frappantes similarités avec certaines scènes de Vrel [fig. 13].

13- Geertruydt Roghman (1625 – 1651) Une femme nettoyant des ustensiles de cuisine Gravure au burin. – 213 × 171 mm
Amsterdam, Rijksmuseum, Rijksprentenkabinet,
don de F. G. Waller, Amsterdam, inv. RP-P-1939-571


On peut aussi admirer le dessin dans lequel une femme vue de dos se penche par
l’ouverture d’une porte à deux battants [fig. 14], un motif très prisé par Vrel.
Longtemps attribuée à Rembrandt, cette feuille est aujourd’hui donnée à Nicolaes Maes (1634 – 1693), l’un de ses brillants élèves qui, lui aussi, a bien souvent représenté des femmes dans l’intimité de leur foyer ainsi que l’attestent d’autres dessins exposés de l’artiste.

Renseignements pratiques

Fondation Custodia
 121, rue de Lille – 75007 Paris

www.fondationcustodia.fr

Heures d’ouverture
Durant les périodes d’exposition :
tous les jours sauf le lundi, de 12h à 18h

Le billet d’entrée donne droit à la visite des 2 expositions

Transports
Métro Assemblée Nationale (ligne 12) ou Invalides (lignes 8 et 13, RER C)
Bus 63, 73, 83, 84, 94 : Assemblée Nationale

 Robert Gober et le motif du trou d’écoulement

A la Bourse de Commerce

L’œuvre de Robert Gober décrit des relations complexes entre intérieur et extérieur, caché et révélé. Les corps masculins sont présentés comme des ready-mades modifiés, tronqués, mutants et hybrides.   

Waterfall est une installation qui s’aborde à travers une simple veste, une pièce de costume masculin présentant son dos au regardeur. Elle est placée contre un mur ; de son col, dépasse un liseré blanc de chemise. Dans la partie supérieure du dos se découpe une petite ouverture carrée. Le visiteur est porté à regarder par cette ouverture : ce qu’il voit alors n’est pas, comme on pourrait s’y attendre, l’intérieur d’un corps, mais une paroi rocailleuse, mêlée de branchages et ruisselante d’eaux vives. En combinant la banalité sévère d’un vêtement urbain à une scène agreste, deux éléments du réel ordinaire appartenant à deux modes d’existence différents, Waterfall parvient à synthétiser, plus encore qu’un récit onirique dans la veine surréaliste, une mise en abîme qui renverse l’ordre établi et interchange les limites de l’intérieur et de l’extérieur. Waterfall renvoie aussi à la dernière œuvre de Marcel Duchamp, Étant donnés : 1° la chute d’eau 2° le gaz d’éclairage… (1946-1968), une installation où cohabitent le corps, la pulsion scopique du regardeur et le diorama de cascade et de verdure. Waterfall poursuit l’investigation de Gober sur la perception trouble et les aspects flottants du corps et de l’identité.

Door with Lightbulb 

L’installation Door with Lightbulb de Robert Gober immerge le spectateur dans une histoire silencieuse. Au cœur d’un espace clos et obscur, une porte apparaît encadrée de piles de journaux et aux prises avec deux sources de lumière. Alors qu’une ampoule rouge luit de façon sinistre et alarmante à son sommet, un rai de lumière brillante filtre sous elle. Attaché à la matérialité de l’objet, Gober confectionne à la main tous les éléments de cette installation, comme les journaux dont il a lui-même écrit chaque article.

Opérant une plongée dans un lieu anonyme et inquiétant, Door with Lightbulb exprime pleinement un mélange entre familiarité et étrangeté bien spécifique à l’œuvre de Robert Gober. La porte est un élément récurrent au sein de son œuvre ambiguë, apparaissant dans des environnements éclairés avec soin.

HELP ME 2020-2021

Help me de Robert Gober se compose d’un cadre de fenêtre et d’un ensemble d’objets quotidiens : des rideaux, un pot de graisse, un crayon, tous réalisés à la main par l’artiste. Si l’intérieur est visible, l’ouverture ne donne accès qu’au mur d’accroche, créant ainsi une sensation d’étouffement. La beauté calme du vent s’engouffrant dans les rideaux, le caractère domestique de l’assemblage qui donne l’impression de se retrouver face à un rebord de fenêtre d’une ferme américaine comme le suggère le pot, renforce paradoxalement l’aspect énigmatique, sinon angoissant, sensation réhaussée par le titre
(« Sauvez moi »).

Nombre d’œuvres de Robert Gober font état d’une tension entre l’intérieur et l’extérieur – l’artiste a souvent recours à l’artifice visuel des barreaux – laissant le sentiment que certaines choses restent enfouies, sous le poids des contraintes sociales, de la honte, des injonctions. Help Me, tout en laissant affleurer des questions existentielles et biographiques, arpente aussi l’histoire de l’art : le cadre de la fenêtre agit tout autant comme celui d’un tableau, interrogeant le caractère illusionniste de l’image artistique.

Au Schaulager

Sans titre 1995-1997

Cette œuvre majeure consacrée à la création de répliques de l’environnement ménager, tels que des lavabos, des cheminées, des écoulements ou des reproductions de parties du corps, ainsi que des espaces connotés par une institution ou par la religion, se voit une nouvelle fois présentée au public, dans une collaboration étroite avec l’artiste.

Le motif du trou d’écoulement, auquel il se confronte encore une fois ici, apparaît dès ses premières œuvres : à partir de 1989, Gober installe une série de simples trous d’écoulement (Drains), qu’il réalise un par un et fait mouler directement dans les murs des salles d’exposition. Le trou d’écoulement illustre la frontière entre la lumière et l’obscurité, entre ce qui est visible en surface et ce qui est souterrain, entre l’intérieur et l’extérieur.

Son installation est à lire comme un symbole de transition, elle présente des lieux qui sont invisible en eux-mêmes. Les catégories explicites du dedans et du dehors, du dessus et du dessous, ces éléments qui font notre orientation dans l’espace, disparaissent. En lieu et place, des zones inconnues apparaissent aux délimitations autres et qui ouvrent sur un domaine dont il faut faire l’expérience physique. En même temps, observée avec recul, la sculpture domine l’espace et vacille sans se fixer entre un plateau de tournage et la scène d’un crime.


Split Walls with Drains ne fait pas seulement figure d’apothéose de l’œuvre sculpturale de Gober en raison de ses exceptionnelle qualités plastiques – considérant en particulier les éviers, trous d’écoulement et urinoirs réalisés à la main –, l’œuvre occupe aussi une place à part puisqu’elle fut réalisée pour l’espace spécifique du MGK, sous et au travers duquel coule aussi d’ailleurs un ruisseau. Elle demeure ainsi enracinée dans le bâtiment de manière permanente.

Biographie
 

AMÉRICAIN, NÉ EN 1954, auteur d’une œuvre autobiographique dans laquelle se côtoient lits d’enfants, membres humains et installations à grande échelle, Robert Gober rattache ses souvenirs d’enfance à des objets de prime abord anodins mais à l’apparence troublante. En donnant une forme aux images évocatrices qui hantent son esprit, il livre un œuvre protéiforme qui questionne la sexualité, la religion, les relations humaines et la nature.

L’évocation du souvenir est indissociable chez Robert Gober d’une démarche artisanale. Ses œuvres naissent d’un travail manuel méticuleux qui implique une grande diversité de matériaux tels que cire, plâtre, papier journal, et procédés techniques. Sa grande maîtrise sculpturale lui permet d’exprimer une forme d’aliénation de l’objet au travers d’un réalisme déconcertant.

Les œuvres de Robert Gober, conservées au sein de la Collection Pinault, ont été exposées lors de l’exposition « Sequence 1 » (2007) à Palazzo Grassi, et les expositions « Mapping the Studio » (2009-2011) et « Dancing with Myself » (2018) à Punta della Dogana.

Informations pratiques

A la Bourse de Commerce

2 rue de Viarmes, 75001 Paris

Voir le plan

Ouverture

Du lundi au dimanche de 11h à 19h
Fermeture le mardi et le 1er mai.
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h.
Le premier samedi du mois, nocturne gratuite de 17h à 21h.

Au Schaulager Basel
HORAIRES D’OUVERTURES
 

Mardi-dimanche 10h-18h
Jeudi jusqu’à 20h
Fermé le lundi
Ouvert le 1er août

 Tacita Dean

La Bourse de Commerce — Pinault Collection invite Tacita Dean à présenter une exposition constituée d’œuvres inédites, conçue en résonance avec la saison « Avant l’orage », qui se déploie dans le musée depuis le 8 février. Il s’agit de sa première exposition d’envergure dans une institution française depuis celle présentée au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris en 2003. L’ensemble des œuvres ont été spécifiquement réalisées pour son exposition
« Geography Biography ». Jusqu’au 25 septembre 2023

« Avant l’orage », une exposition pour nous confronter à la fragilité de la nature

Emma Lavigne commissaire de l’exposition,
l’exposition « Avant l’orage » nous alerte sur l’état de notre planète.
Emma Lavigne, commissaire de l’exposition est l’invitée du 64 minutes

« J’ai fini par penser la géographie à travers ma propre vie » Tacita Dean

L’exposition « Avant l’orage » invite à un cheminement à travers des installations et des œuvres de près d’une vingtaine d’artistes qui métamorphosent tous les espaces du musée.

Sur fond de dérèglement climatique, dans l’urgence du présent comme dans l’œil d’un cyclone, l’obscurité et la lumière, le printemps et l’hiver, la pluie et le soleil, le jour et la nuit, l’humain et le non-humain cohabitent au sein de cet accrochage inédit d’œuvres de la collection. Ces paysages instables, saisis dans une ronde désynchronisée du temps, figurent de nouveaux écosystèmes dans lesquels le visiteur est invité à s’immerger.

Articulée en deux temps, cette saison thématique est réactivée, à la fin du mois de mai, pour l’exposition consacrée à Tacita Dean, dans la Rotonde et la Galerie 2.

                                           photo yomarianablog

« Tout est intempérie sur Terre. C’est ce dont les œuvres rassemblées dans cette exposition veulent témoigner. (…) après tout, on ne sait pas vraiment si l’on est avant ou après l’orage, car le monde entier est devenu un orage. Et l’orage n’est rien d’autre que le chant de la vie. » Emanuele Coccia

Les artistes

LUCAS ARRUDA / HICHAM BERRADA / FRANK BOWLING / JUDY CHICAGO / TACITA DEAN / THU VAN TRAN / ROBERT GOBER / DOMINIQUE GONZALEZ-FOERSTER / PIERRE HUYGHE / BENOIT PIÉRON / DANIEL STEEGMANN MANGRANÉ / ALINA SZAPOCZNIKOW / CY TWOMBLY / DANH VO / ANICKA YI

Tacita Dean podcast

Pour les 20 ans du Schaulager à Basel, Tacita Dean est présentée dans la collection de la Fondation Hoffmann (90 ans)
Tacita Dean, Purgatory (Threshold), 2020

Tacita Dean, Purgatory (Threshold), 2020
Crayon de couleur sur papier Fuji Velvet marouflé sur papier, 372 × 468,5 cm, Fondation Emanuel Hoffmann, prêt permanent à l’Öffentliche Kunstsammlung Basel, photo : Stephen White and Co, Courtesy the artist and Frith Street Galerie © Tacita Dean

Tacita Dean, Inferno, 2019 (détail)

Tacita Dean, Inferno, 2019 (détail)
Craie sur isorel, 242 × 1219 cm, Fondation Emanuel Hoffmann, prêt permanent à l’Öffentliche Kunstsammlung Basel, photo : Stephen White and Co, Courtesy the artist and Frith Street Gallery © Tacita Dean

Information pratique

Respectivement :
A la Bourse de Paris François Pinault
2 rue de Viarmes, 75001 Paris

Voir le plan

Ouverture

Du lundi au dimanche de 11h à 19h
Fermeture le mardi et le 1er mai.
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h.
Le premier samedi du mois, nocturne gratuite de 17h à 21h.

Schaulager,
Ruchfeldstrasse 19,
4142 Münchenstein Suisse (Basel)
T +41 61 335 32 32, F +41 61 335 32 30,
 info@schaulager.org

HORAIRES D’OUVERTURES

Du mardi au dimanche de 10h à 18h
Jeudi à 20h
Fermé le lundi
Ouvert le 1er août

 

Naples à Paris Le Louvre invite le musée de Capodimonte

A disputa do Santíssimo Sacramento, de Rafael

Jusqu'au 8 janvier 2024, Le Louvre invite le musée de Capodimonte, de Naples
Plus de soixante-dix des plus grands chefs-d’oeuvre du musée napolitain sont exposés dans trois lieux différents du Louvre
Commissariat général : Sébastien Allard, directeur du département des Peintures du musée du Louvre et Sylvain Bellenger, directeur du musée de Capodimonte.
Commissariat scientifique : Charlotte Chastel-Rousseau, conservatrice en chef au département des Peintures, Dominique Cordellier, conservateur général au département des Arts graphiques, musée du Louvre et Patrizia Piscitello, conservatrice de la collection Farnèse et des collections de peintures et de sculptures du XVIe siècle, Allessandra Rullo, directrice du département des Collections, conservatrice des peintures et des sculptures des XIIIe-XVe siècles, Carmine Romano, conservateur, responsable de la numérisation et du catalogue numérique des oeuvres, Museo e Real Bosco di Capodimonte. 

Jusqu'au 8 janvier 2024, Le Louvre invite le musée de Capodimonte, de Naples
Plus de soixante-dix des plus grands chefs-d’oeuvre du musée napolitain sont exposés dans trois lieux différents du Louvre
Commissariat général : Sébastien Allard, directeur du département des Peintures du musée du Louvre et Sylvain Bellenger, directeur du musée de Capodimonte.
Commissariat scientifique : Charlotte Chastel-Rousseau, conservatrice en chef au département des Peintures, Dominique Cordellier, conservateur général au département des Arts graphiques, musée du Louvre et Patrizia Piscitello, conservatrice de la collection Farnèse et des collections de peintures et de sculptures du XVIe siècle, Allessandra Rullo, directrice du département des Collections, conservatrice des peintures et des sculptures des XIIIe-XVe siècles, Carmine Romano, conservateur, responsable de la numérisation et du catalogue numérique des oeuvres, Museo e Real Bosco di Capodimonte. 

Présentation

Réaffirmant l’importance des collaborations entre les institutions muséales européennes, le musée du Louvre a noué pour l’année 2023 un partenariat d’une envergure inédite avecle musée de Capodimonte.

Chefs d’oeuvre

Ancienne résidence de chasse des souverains Bourbon, le palais (la Reggia en italien) abrite aujourd’hui l’un des plus grands musées d’Italie et l’une des plus importantes pinacothèques d’Europe, tant par le nombre que par la qualité exceptionnelle des oeuvres conservées. Capodimonte est l’un des seuls musées de la péninsule dont les collections permettent de présenter l’ensemble des écoles de la peinture italienne. Il abrite également le deuxième cabinet de dessins d’Italie après celui des Offices ainsi qu’un ensemble remarquable de porcelaines.

Une ambitieuse programmation culturelle donne à cette invitation, au-delà des salles du musée, les dimensions d’une véritable saison napolitaine à Paris.

« En 2023, les plus beaux chefs-d’oeuvre du musée de Capodimonte dialogueront avec ceux du Louvre, au sein même du musée, dans le cadre d’un dispositif inédit. Une programmation musicale et cinématographique foisonnante viendra enrichir cette invitation pour définitivement installer Naples à Paris pendant près de six mois. Palais royaux transformés en musées, riches de collections héritées des plus grands souverains, symboles des liens historiques entre la France et l’Italie, le Louvre et Capodimonte ont beaucoup à partager et à dire. Je veux sincèrement remercier Sylvain Bellenger, Directeur du musée de Capodimonte, qui en confiance et amitié nous fait le grand honneur d’accepter notre invitation. Cette collaboration exceptionnelle et exclusive, illustre parfaitement l’élan européen et international que je souhaite pour le Louvre. », déclare Laurence des Cars

UN DISPOSITIF EXCEPTIONNEL

Salon Carré, Grande Galerie et salle Rosa (Aile Denon, 1er étage)

La volonté des deux musées est de voir les insignes chefs-d’oeuvre de Naples se mêler à ceux du Louvre, dans une présentation véritablement exceptionnelle : la réunion des deux collections offre pendant six mois aux visiteurs un aperçu unique de la peinture italienne du XVe au XVIIsiècle, permettant également une vision nouvelle tant de la collection du Louvre que de celle de Capodimonte.

Trente-et-un tableaux de Capodimonte, parmi les plus grands de la peinture italienne,  dialoguent avec les collections du Louvre (oeuvres de Titien, Caravage, Carrache, Guido Reni pour n’en citer que quelques-uns), soit les compléter en permettant la présentation d’écoles peu ou pas représentées – notamment bien sûr, la singulière école napolitaine, avec des artistes à la puissance dramatiques et expressives tels que Jusepe de Ribera, Francesco Guarino ou Mattia Preti.

Sébastien Allard,
« l’une des premières tentatives de l’histoire de l’art pour rendre la vision perspective da sotto in sù ».


Cela est aussi l’occasion de découvrir la bouleversante Crucifixion de Masaccio, artiste majeur de la Renaissance florentine mais absent des collections du Louvre, un grand tableau d’histoire de Giovanni Bellini, La Transfiguration,

dont le Louvre ne possède pas d’équivalent ou encore trois des plus magnifiques tableaux de Parmigianino, dont la célèbre et énigmatique Antea. La confrontation de ces oeuvres avec les Corrège du Louvre promet assurément d’être l’un des moments forts de cette réunion.

PRESENTATION DU MUSEE DE CAPODIMONTE
Par Sylvain Bellenger

L’exposition Naples à Paris, Le Louvre invite le Musée de Capodimonte est une première dans l’histoire des expositions. Le sujet de l’exposition n’est ni un artiste ni un mouvement, ni même un pays, mais un musée. Le musée, on le sait depuis longtemps, et chaque jour d’avantage, n’est pas un simple contenant mais bien un acteur de l’histoire. Ses collections constituent un grand récit, avec l’exposition ce récit se transforme en dialogue, des oeuvres se rencontrent et racontent le Musée, les deux musées.

La rencontre est d’autant plus forte que l’invitation faite à Capodimonte, pendant la fermeture de ses galeries pour de grands travaux, est de s’exposer non pas isolé, mais en compagnie des collections italiennes du Louvre, dans la Grande Galerie, le Salon Carré, la salle Salvator Rosa et la salle de la Chapelle, les lieux les plus historiques et les plus illustres du musée, ainsi que dans la salle de l’Horloge. Le choix des oeuvres a été fait pour solliciter cette rencontre qui porte un éclairage nouveau sur les oeuvres mais aussi sur la collection, son esprit, son histoire.


Des histoires qui se ressemblent

L’histoire de Capodimonte est indissociable de l’histoire du royaume de Naples comme l’histoire du musée du Louvre est indissociable de la Révolution française. La création du premier est liée à la création du royaume qui occupa toute la botte italienne comme la création du second résulte de la Révolution Française. Comme le Louvre, la Reggia di Capodimonte est un des rares palais royaux à être transformé en musée.

Mais Capodimonte a la particularité d’avoir été construit pour abriter des collections, celles de la famille Farnèse qu’Élisabeth Farnèse (1692-1766), reine consort d’Espagne par son mariage en 1714 avec Philippe V d’Espagne, le petit fils de Louis XIV, donne à son cinquième fils, Charles de Bourbon (1716-1788), duc de Parme et de Plaisance quand il devient roi de Naples en 1734.

Le royaume de Naples, antique Vice-Royaume espagnol et plus récemment Vice-Royaume autrichien fut l’enjeu de toutes les convoitises des grandes puissances européennes – l’Espagne, l’Autriche et la France – pendant les guerres de succession d’Espagne (1701-1714), puis celle de Pologne (1733-1738). Il devient, grâce à l’habileté diplomatique d’Élisabeth Farnèse un royaume indépendant gouverné jusqu’á l’Unité de l’Italie par les Bourbons de Naples, une branche cadette des Bourbons d’Espagne.
Élisabeth, la dernière des Farnèse, grande famille de collectionneurs, qui depuis la Renaissance, avec le Cardinal Alexandre Farnèse, sous le Pontificat de Paul III Farnèse, avait constitué une des plus grandes collections d’antiques et d’oeuvres des grandes écoles italiennes (Venise, Bologne, Florence, Rome), commandités, hérités ou conquises, qui étaient abritées dans les grands palais familiaux, le palais Farnèse, la villa de Caprarola ou le palais de la Pilotta à Parme.

L’ensemble de cette fabuleuse collection familiale fut transporté à Naples, qui s’enrichit subitement d’une collection d’oeuvres d’art comparable à celle des grandes capitales européennes. Naples sous le règne de Charles de Bourbon devient une Capitale des Lumières que les découvertes des villes romaines d’Herculanum et de Pompéi activement promues par le nouveau pouvoir, met sur la carte du monde.

La traditionnelle vitalité de la vie musicale de la ville se développe avec la création du théâtre San Carlo, le premier théâtre d’opéra d’Europe et la création à Capodimonte d’une manufacture de porcelaine, un enjeu technologique d’avant-garde pour toute l’Europe du XVIIIe siècle qui fait de la capitale du nouveau royaume une des destinations principales du Grand Tour. Naples est alors, après Londres et Paris, la troisième ville d’Europe. La collection Farnèse est alors hébergée dans l’aile sud-ouest de la Reggia de Capodimonte, majestueuse construction située sur une des collines de la Ville, où est planté un énorme parc pour la chasse, passe-temps favori de tous les Bourbons. La collection devient une collection dynastique et Charles de Bourbon la laisse à Naples, à son fils Ferdinand IV, quand la mort de son demi-frère Ferdinand VI, en 1759, le fait monter, vingt-cinq ans après son intronisation napolitaine, sur le trône d’Espagne.

La collection Farnèse enrichie par tous les régimes politiques qui, de Joachim Murat, roi de Naples de 1808-1815, à la Maison de Savoie jusqu’à la République unitaire, dote Capodimonte d’une collection qui illustre bien au-delà de l’école napolitaine pratiquement toutes les écoles de la péninsules représentés au plus haut niveau.

En 1957, après la Seconde Guerre mondiale, Capodimonte restauré devient le Musée National de Capodimonte. La grande pinacothèque du Sud promeut de grandes expositions sur la civilisation napolitaine. En 2014, la réforme du ministre Franceschini rend le musée autonome de la Surintendance de Campanie et lui adjoint le parc royal, un jardin historique planté au XVIIIe et au XIXe siècle avec des essences qui sont souvent des cadeaux diplomatiques offerts au roi de Naples. Ce parc, le Bosco de Capodimonte, est le plus grand parc urbain d’Italie : outre la Reggia, il contient une vingtaine d’édifices qui sont placés sous la direction unique du nouveau site « Museo e Real Bosco di Capodimonte ».

Tous ces édifices font depuis 2017 partie d’un MasterPlan, qui leur attribue une destination, culturelle, éducative, sportive ou culinaire et qui entoure la grande pinacothèque d’un véritable campus culturel pluridisciplinaire : une Foresteria et Centre de recherche sur l’art et l’architecture des grandes cité portuaires, dans l’ancienne Capraia, une école de jardiniers dans l’Ermitage des Capucins, un musée de l’Arte Povera dans la Palazzina dei Principi, une école de digitalisation des biens culturels et des paysages, une Maison de la photographie, un centre de la santé et du bien-être, trois résidences d’artistes, une chapelle récemment dotée d’un décor de porcelaine réalisé par Santiago Calatrava dans les locaux même de la Manufacture Royale de porcelaine, aujourd’hui une école des métiers de la porcelaine,…
L’entrée du parc est gratuite et sa récente restauration en fait un des lieux favoris des Napolitains.

Informations Pratiques

BIENVENUE AU LOUVRE

Il y a toujours une bonne raison de venir au Louvre. Les œuvres du palais vous étonnent, vous invitent à rêver, à imaginer. Il est temps de préparer votre visite. Besoin d’inspiration ? Parcours et visites guidées vous font découvrir les lieux emblématiques. Et au cœur de Paris, les jardins vous accueillent.
Métro ligne 1 arrêt Palais Royal musée du Louvre
Bus 63

RON MUECK

Three Dogs 2023 Ron Mueck

Jusqu'au 5 novembre 2023, la Fondation Cartier pour l’art contemporain invite le sculpteur australien Ron Mueck à exposer un ensemble d’oeuvres jamais montrées en France aux côtés d’oeuvres emblématiques de sa carrière.
Commissaire d’exposition : Hervé Chandès
Commissaire associé : Charlie Clarke
Chargée du projet d’exposition : Aby Gaye
Présentation

Né en 1958 à Melbourne et vivant au Royaume-Uni depuis 1986, Ron Mueck développe une oeuvre qui touche à l’universel et renouvelle profondément
la sculpture figurative contemporaine. Il crée des oeuvres aux dimensions surprenantes et empreintes d’une inquiétante étrangeté. De nombreux mois,
et parfois plusieurs années, lui sont nécessaires pour créer chacune de ses sculptures. Ron Mueck a réalisé en un peu plus de 25 ans un corpus de quarante-huit oeuvres, dont les dernières sont achevées au printemps 2023 pour l’ouverture de l’exposition.

L’exploration d’un nouveau processus de création

                                                    Mass 2017

Par son échelle et sa facture, l’installation monumentale Mass marque un nouveau jalon dans la carrière de Ron Mueck. Cette oeuvre commandée par
la National Gallery of Victoria (Melbourne, Australie) en 2017, est la plus grande qu’il ait jamais réalisée.
Composée de cent gigantesques crânes humains, Mass est reconfigurée par l’artiste en fonction de l’espace pour chaque présentation. Elle offre une expérience physique et psychique fascinante qui nous amène à contempler les notions fondamentales de l’existence humaine. Son titre donne à lui seul une idée de la polysémie de l’oeuvre. Le mot anglais « mass », signifiant à la fois un amas, un tas, une foule mais aussi une messe, est une source d’interprétations propres à chaque visiteur. L’iconographie du crâne, elle-même, est ambigüe. Si l’histoire de l’art l’associe à la brièveté de la vie humaine, elle est aussi omniprésente dans la culture populaire.

Pour l’artiste, « le crâne humain est un objet complexe, une icône puissante, graphique, que l’on identifie immédiatement. Familier et étrange à la fois, il rebute autant qu’il intrigue. Il est impossible à ignorer, accaparant inconsciemment notre attention ».

Les crânes se présentent comme un groupe, une somme d’individus qui s’impose au visiteur. En cela, Mass se distingue des précédentes oeuvres de Ron Mueck qui avait, jusqu’alors, toujours représenté l’être humain dans son individualité.

Également exposé pour la première fois en France, Dead Weight (2021), un crâne en fonte de près de deux tonnes, contraste avec ses oeuvres
habituellement naturalistes. Les traces du moulage de cette sculpture demeurent, l’artiste ayant volontairement laissé les marques de sa fabrication et la nature brute du matériau parler d’elles-mêmes.

Le film

Ce nouveau procédé lui permet également de raconter de nouvelles histoires, de traiter des sujets différents, tels que des personnages en groupes et même en action. En les libérant d’une abondance de détails réalistes, Ron Mueck traduit d’une manière plus directe la dynamique qui les anime.
Un court film réalisé par le photographe français Gautier Deblonde dans l’atelier de l’artiste documente la création de ses deux oeuvres les plus récentes et est diffusé sur les plateformes digitales de la Fondation Cartier.

Trois oeuvres emblématiques des années 2000

Pour Baby (2000), minuscule sculpture d’un petit garçon qui vient de naître, Ron Mueck a pris pour modèle une image trouvée dans un manuel de médecine
montrant un bébé tenu en l’air par les pieds quelques minutes seulement après l’accouchement. Aux antipodes de l’installation Mass, évocation du corps post-mortem, cette minutieuse représentation des premiers instants
de la vie attire tout aussi intensément l’attention.
En inversant l’image originale et en accrochant la sculpture au mur à la manière d’un crucifix, l’artiste présente tout d’abord son oeuvre telle une icône
religieuse. Mais en l’observant de plus près, le visiteur est transpercé par le regard presque insolent du bébé.

Man in a boat (2002)

Man in a boat (2002) représente une scène particulièrement mystérieuse. Un homme dont les bras cachent la nudité est assis à la proue d’une longue barque et se penche en avant, le regard interrogatif ou scrutateur. Comme souvent chez
Ron Mueck, ce personnage semble « se retirer ou dériver dans des états intérieurs qui nous sont à peu près inaccessibles », selon les mots du critique d’art Justin Paton.

Man in a boat 2002

A Girl (2006),

Avec A Girl (2006), le visiteur se retrouve face à un gigantesque nouveau-né, qui porte son premier regard sur le monde. Maculé de traces de sang, le cordon
ombilical toujours présent, son corps est encore marqué par l’expérience de l’accouchement. L’artiste joue sur une impressionnante distorsion d’échelle pour évoquer à la fois le miracle et l’épreuve de la naissance, instant
oublié et pourtant fondamental pour chacun d’entre nous.

Girl 2006

Les oeuvres de Ron Mueck, à la fois profondément mystérieuses et réalistes à l’extrême, font surgir le rêve dans le réel et nous invitent à nous confronter à notre rapport au corps et à l’existence.

Three Dogs 2023

L’exposition dévoile également une spectaculaire sculpture représentant un groupe de chiens menaçants, créée spécialement pour l’occasion, dont Ron Mueck nourrissait déjà le projet lorsqu’il préparait son exposition monographique à la Fondation Cartier en 2013.

La forme et le mouvement

Mass marque également un tournant dans la carrière de Ron Mueck, l’expression de son ouverture à de nouvelles manières de sculpter. Depuis la création de celle-ci, l’artiste s’éloigne de sa pratique antérieure qui
s’attachait à reproduire sur ses sculptures le grain de la peau, l’implantation des cheveux, les détails des vêtements, agençant les matériaux pour obtenir
un effet de réel saisissant. En se focalisant désormais sur la forme, la composition et le mouvement, Ron Mueck souhaite amener le visiteur au plus près de ses intentions et de l’essence de son travail.

Informations Pratiques
Mimetisme

Fondation Cartier pour l’art contemporain
261 boulevard Raspail
75014 Paris

Se rendre à la Fondation Cartier

Horaires d’ouverture

Tous les jours de 11h à 20h, sauf le lundi.
Nocturne le mardi, jusqu’à 22h.
La fermeture des salles débute à 19h45 (21h45 les mardis).

Contact

Tél. +33 1 42 18 56 50

moc.reitrac.noitadnof@noitavreser.ofni

Trouver le bon interlocuteur

Rétrospective de l’oeuvre de Norman Foster

Viaduc de Millau 1993-2004 photo Daniel Jamme Eiffage

Au Centre Pompidou de Paris jusqu'au 7 août 2027
commissaire de l’exposition : Frédéric Migayrou
podcast du commissaire qui vous accompagne durant l'exposition
Livret d'aide à la visite de l'exposition
Présentation

                                                  Norman Foster

Frédéric Migayrou, commissaire nous présente cette figure majeure qui a marqué l’histoire de l’architecture mondiale, par son approche systémique et globale de la nature et de la technologie. Des extraits d’un entretien réalisé avec Norman Foster nous éclairent sur la pensée de cet architecte visionnaire et sur plusieurs projets emblématiques.
L’exposition « Norman Foster » au Centre Pompidou, sur 2200 mètres carrés, est la plus grande exposition consacrée à un architecte vivant. Elle présente son travail, son oeuvre, déroulée sur près d’une soixantaine d’années, au travers 130 projets qui touchent différentes thématiques. La scénographie est entièrement conçue par cet architecte et permet, à partir d’un cabinet de dessin, de découvrir l’ensemble de son oeuvre.

Le cabinet de dessins

L’exposition de Norman Foster commence par un grand cabinet de dessins où l’on mélange à la fois des carnets de croquis et les dessins historiques qui, depuis les années 1960, ont accompagné son oeuvre.

À la tête d’une agence de 1 500 personnes, le dessin aura, toute sa vie, été un
élément de communication, de médiation pour présenter ses projets et  de son oeuvre.

Nature et urbanité

Dès les années 1960, Norman Foster se préoccupe de la question environnementale, de l’intégration de ses bâtiments dans des contextes naturels ou urbains. La question écologique est centrale. Elle est conçue comme écologie positive, c’est-à-dire entre l’industrie, la technologie et la nature. Nombre de ses projets sont absolument innovants tout au long de sa carrière.
L’Apple Park est l’accomplissement de l’idée d’intégration des constructions dans les domaines naturels. C’est un grand bâtiment circulaire qui s’étend sur un parc de 71 hectares et qui accueille près de 12 000 employés. Les toits sont entièrement couverts de panneaux photovoltaïques qui assurent une autonomie en énergie alors que des auvents filtrent la lumière naturelle.


Les frontières entre intérieur et extérieur sont totalement brouillées. On est plongé dans la nature et l’ensemble constitue un manifeste de l’intégration paysagère des constructions architecturales.

Enveloppes et structures

Norman Foster a toujours été fasciné par la technologie – les avions et les
automobiles notamment – et pour lui l’objet architectural correspond à une espèce de structure.

Il la définit au travers de la notion de « skin and bones », la peau et les os, c’est-à-dire la structure antérieure qui permet de construire une enveloppe. Tous ses bâtiments sont conçus de cette manière.
La Hong Kong et Shanghai Bank est le premier grand concours gagné par Norman Foster. Il révolutionne complètement la typologie des grandes tours. Cette construction de 179 mètres est évidée de l’intérieur et permet, au travers un grand hall, de distribuer l’ensemble des espaces de bureaux.
La construction est élaborée selon trois tours parallèles, articulées autour d’un grand exosquelette, à savoir une structure reléguée à l’extérieur qui soutient l’ensemble du bâtiment. Pour la première fois, la climatisation est assurée par une pompe qui permet de prendre de l’eau dans le bassin du port.
C’est le premier manifeste qui révolutionne la notion de tours de grande hauteur, tours qui vont accompagner les grands projets de Norman Foster tout au long de sa vie.

Vous regardez ce bâtiment qui célèbre ses services et vous pouvez voir de l’extérieur les éléments qui chauffent et refroidissent ce bâtiment et la structure. Si vous regardez le Sainsbury Centre de cette époque, vous aviez la structure et tous les services sont intégrés dans celle-ci.
Elle est conçue pour la performance environnementale ainsi que pour la performance structurelle, mais également l’apparence et le bâtiment qui respire, qui devient ainsi un bâtiment sain.

Norman Foster

La ville verticale


Toutes les tours de Norman Foster sont construites comme des morceaux de ville. Les étages sont assemblés par groupes, séparés par des grands espaces collectifs. Cette idée amène à une compréhension de ville verticale, sachant que toute la base des bâtiments est ouverte sur la cité et accessible par le public.

La tour St. Mary Axe est un bâtiment emblématique de la ville de Londres qui est
surnommé « le cornichon » pour sa forme profilée qui correspond au fuselage d’avion.

C’est le premier bâtiment écologique construit dans la ville.

Il fait suite aux recherches du Commerzbank de Francfort ou du Climatroffice conçu avec Richard Buckminster Fuller. Sa structure en exosquelette permet de libérer totalement les espaces, et d’ouvrir à la lumière alors que l’ensemble de la construction est entièrement soumis à une ventilation naturelle.

Par exemple, la structure serait conçue non seulement pour soutenir le bâtiment, mais aussi pour contenir des vides et pour que vous puissiez distribuer les services du bâtiment à travers ces vides. C’est le contraire d’une façon traditionnelle de penser, où vous pensez la structure et ensuite vous vous suspendez en-dessous. Cela ne fonctionne pas. Donc cela produit quelque chose qui est plus performant, qui a plus de joie.
Norman Foster

Histoire et tradition

Bien que son architecture soit de très haute technologie, considérée comme high-tech, Norman Foster a toujours porté une attention très particulière au contexte historique, à l’histoire, aux bâtiments et aussi aux technologies. Son architecture réactive ces contextes, leur redonne vie et met en valeur des matériaux et des techniques souvent oubliés.


Avec le Carré d’Art de Nîmes, Norman Foster s’attaque pour la première fois à un centre historique en relation avec la Maison carrée, un temple romain du 1er siècle.
L’architecte décide de dégager l’ensemble de l’espace central autour de ce bâtiment pour en faire un morceau de ville.
La nouvelle médiathèque, à l’image de celle du Centre Pompidou, s’incarne comme un pendant du bâtiment historique et revivifie ainsi le coeur historique de la ville.
De la même manière, le British Museum, construit par Robert Smirke au 19ème siècle, ainsi que la grande rotonde, la salle de lecture construite par son frère, est recouvert d’un gigantesque toit de 6 000 mètres carrés qui rassemble l’ensemble des bâtiments.
À l’image du Crystal Palace de Robert Paxton, ce treillis de triangles transparents qui pèse près de 800 tonnes, donne une unité à ce complexe, et l’intègre dans la ville, mariant de façon très élégante, l’ancien et le moderne.

Si vous voulez regarder loin devant vous, vous regardez d’abord loin en arrière.
Vous pouvez voir dans cette approche l’empreinte de l’histoire dans des projets comme celui du British Museum. Vous remontez dans le temps et vous constatez que le coeur de ce bâtiment d’origine était une cour qui avait été perdue au fil du temps, sans rien de précieux entre la bibliothèque centrale d’origine et les façades de la cour.
Norman Foster

Sites et planification

Norman Foster est architecte, mais c’est aussi un grand urbaniste. Il s’est attaché à la reconstruction de grands plans urbains pour de nombreuses métropoles. Il s’attache aux flux, aux lieux et aux espaces publics, afin de redonner une identité à nombre de cités.
En 2011, la Communauté urbaine de Marseille veut restructurer le Vieux-Port et
demande au paysagiste Michel Desvigne ce réaménagement. Il s’associe à
Norman Foster, qui va recomposer l’ensemble des voiries et proposer, face au port, la construction d’une grande ombrière.
Cette énorme surface de 46 mètres par 22 fait effet de miroir et rassemble le public. Au final, le bâtiment actualise la conscience de l’espace public pour toutes les personnes présentes dans la cité.

L’infrastructure des espaces publics est vraiment le ciment qui lie les bâtiments individuels. Cette infrastructure détermine l’ADN d’une ville, l’identité de la ville, les identités séparées de New York, Marseille ou Londres.
Si je prends la transformation de Trafalgar Square par exemple, la fermeture d’un côté transforme non seulement cet espace, mais toute la zone, tout le quartier de la ville.
Vous pouvez quantifier après coup les avantages : moins d’accidents, c’est plus sûr, c’est plus agréable, la qualité de l’air est meilleure, c’est plus silencieux.
En outre, vous pouvez utiliser la conception anticipative, la syntaxe spatiale. Vous pouvez simuler les mouvements des piétons et explorer cela avant que la décision ne soit prise.
Norman Foster

Réseaux et mobilités

                                                       Reichstag
Norman Foster est un architecte et un ingénieur qui s’est toujours attaché à la notion de mobilité, de déplacements, de la liaison entre les territoires. Il a construit de très nombreux aéroports, des gares, des terminaux portuaires et des véhicules. Cette notion de communication, de liens entre les différentes localités, les villes et les pays l’ont amené à être un architecte de dimension planétaire.

Le viaduc de Millau

Le viaduc de Millau est un magnifique ouvrage d’art. Il s’agit d’un pont haubané qui relie les rives du Tarn et qui est conçu avec l’ingénieur Michel Virlogeux. Il participe au désenclavement de toute la région en créant un lien entre Paris et la Méditerranée.
Le pont est conçu autour de sept piles de béton d’une hauteur de 75 à 245 mètres, soit presque la hauteur de la tour Eiffel. Il est surmonté de pylônes et de haubans qui sont tendus en éventail et peints en blanc. Le viaduc trace une ligne très élégante sur l’ensemble du paysage et reconfigure tout le territoire.

Viaduc de Millau

Ces réseaux sont physiques. Il y a les réseaux invisibles dans le ciel, mais à un moment, ils se résument tous à la physicalité d’un élément construit. Dans ce monde numérique, avec ces réseaux invisibles qui nous connectent numériquement, il est extrêmement tentant d’entrer dans une architecture qui est une expérience numérique et de s’appuyer sur l’orientation par les chiffres, par les lettres de l’alphabet.
Je vois que le défi est d’en faire une expérience analogique, plutôt qu’une ère numérique. Donc, qu’il s’agisse d’un aéroport ou d’un système de métro, l’architecture devrait mener.
Norman Foster

Perspectives futures

Norman Foster a toujours été considéré comme un architecte extrêmement prospectif, envisageant le futur de nos sociétés avec des projets attachés au développement durable, à l’environnement.
Il développe avec sa fondation des projets en Afrique et en Inde mais aussi en
imaginant le développement de technologies qui permettraient des projets
extraterrestres visionnaires sur la Lune ou sur Mars.
Avec Lunar Habitat, Norman Foster s’attaque à l’idée de la construction d’un habitat sur la Lune, en coopération avec l’Agence spatiale européenne.
Foster imagine des systèmes d’habitation extrêmement simples, bien qu’étant
technologiquement extrêmement complexes. Il conçoit des gonflables qui seraient recouverts de régolithes grâce à des impressions 3D, le régolithe étant ce matériau que l’on trouve sur la Lune. On retrouve à la fois l’idée d’un habitat vernaculaire à l’image des architectures de terre en Afrique, et puis ces constructions de hautes technologies qui permettraient de développer l’idée d’une implantation lunaire.

Je suggèrerais une approche holistique pour atteindre un équilibre dans la nature.
L’énergie doit être au coeur même de cette question, parce qu’elle concerne tous les aspects du réchauffement climatique, de la pollution.
La quête d’une énergie propre n’est pas seulement pour anticiper la croissance démographique, mais également ce qu’elle implique. Si nous regardons statistiquement la forme d’énergie qui peut laisser la plus petite empreinte sur la planète, pas de pollution et le record absolu le plus sûr par-dessus tout, c’est le nucléaire et les nouvelles générations de nucléaires qui ont la promesse d’autonomie que je trouve très excitante.
Norman Foster

                                      Terrasse d’observation du Château Lacoste

Informations Pratiques

Centre Pompidou
www.centrepompidou.fr
www.centrepompidou.fr/fr/visite/accessibilite
Application Centre Pompidou accessibilité
www.centrepompidou.fr/fr/visite/accessibilite/appli-centre-pompidou-accessibilite
Livrets d’aide à la visite
www.centrepompidou.fr/fr/visite/accessibilite/livrets-daide-en-falc

Sommaire du mois de juillet 2023

La villa des Roches Brunes à Dinard

30 juillet 2023 : Art is Magic Jeremy Deller
28 juillet 2023 : « FOREVER SIXTIES » Au Couvent des Jacobins de Rennes
27 juillet 2023 : Attention ARNAQUE
24 juillet 2023 : Irving Penn, Portraits d’artistes à la Villa Les Roches Brunes, Dinard
23 juillet 2023 : « Traînard : collectionneur, amateur et curieux »
22 juillet 2023 : A la rencontre de Vincent Gicquel via François Pinault
19 juillet 2023 : Week-end Membership Bretagne
10 juillet 2023 : Abdelkader Benchamma – Géologie des déluges
03 juillet 2023 : David Zuccolo
01 juillet 2023 : Charmion von Wiegand