La Fondation Beyeler fête ses 25 ans

La Fondation Beyeler pour ses 25 ans montre, la première présentation d’oeuvres de la Collection de la Fondation Beyeler, cette année, qui s’intéresse à l’interaction entre figuration et abstraction dans l’art moderne. Elle se propose d’éclairer et d’illustrer à travers plus de 70 peintures et sculptures significatives de l’impressionnisme, de la modernité classique et de l’art contemporain.

Passages – Paysage, figure et abstraction

Monet

Le passage de la figuration à l’abstraction est notamment illustré par différentes représentations de paysages et de personnages. Ainsi, les éléments abstraits prennent souvent leur source dans des motifs naturels, qui se trouvent soumis à un processus de réduction et de transformation. Mais il arrive également, à l’inverse, que des formes et des structures abstraites donnent naissance à des représentations d’objets. Ainsi, l’abstraction et la figuration peuvent constamment s’entremêler et se revitaliser mutuellement. C’est ce qu’illustre l’exemple de la célèbre série des Nymphéas de Claude Monet, née au début du XXe siècle, et qui, dans les années 1950, inspira des compositions radicalement novatrices aux artistes américains de l’expressionnisme abstrait. Sous l’invocation du « passage », la présentation rassemble ainsi des oeuvres qui permettent de reconstituer les liens entre deux conceptions opposées et en même temps complémentaires de l’image. Mais c’est aussi sur le plan des thèmes traités qu’il est possible d’identifier l’idée de « passage », au sens de la transition et de la traversée.

Gerhard Richter & Agnès Martin

Gerhardt Richter

Parmi les créateurs représentés dans cette exposition, Gerhard Richter (né en 1932) occupe une position éminente. Pour le 90ème anniversaire de l’artiste, la Fondation consacre une salle — réunissant des
pièces de la Collection Beyeler, mais aussi des oeuvres prêtées — à la vaste production de ce grand contemporain, qui illustre d’une manière frappante l’interaction artistique de la figuration et de l’abstraction.

Agnès Martin

Les prêts généreusement consentis par la Collection Daros ont permis de réserver une autre salle à l’artiste américaine Agnes Martin (1912–2004) et aux compositions caractéristiques de sa manière géométrique et abstraite.
L’exposition « Passages – Paysage, figure et abstraction » a été conçue par Raphaël Bouvier, commissaire de la Fondation Beyeler.

Liste des artistes exposés

Lucas Arruda – Francis Bacon – Paul Gauguin – Alberto Giacometti
Claude Monet – Barnett Newman – Balthus -Vincent van Gogh -Pablo Picasso
Constantin Brancusi – Ferdinand Hodler- Jackson Pollock – Georges Braque
Wassily Kandinsky – Gerhard Richter – Alexander Calder – Ellsworth Kelly
Auguste Rodin – Paul Cézanne – Agnes Martin – Mark Rothko – Max Ernst
Sam Francis – Joan Miró- Joan Mitchell – Henri Rousseau

La Fondation Beyeler célèbre ses 25 années d’existence en 2022. Le musée d’art à Riehen près de Bâle est réputé à l’international pour ses expositions de grande qualité, sa collection de premier plan d’art moderne classique et d’art contemporain, ainsi que son ambitieux programme de manifestations. Conçu par Renzo Piano, le bâtiment du musée est situé dans le cadre idyllique du parc avec ses arbres vénérables et ses bassins de nymphéas. La Fondation Beyeler bénéficie d’une situation unique, au coeur d’une zone récréative de proximité avec vue sur des champs, des pâturages et des vignes, proche des contreforts de la Forêt-Noire. La Beyeler-Stiftung prévoit avec l’architecte suisse Peter Zumthor une extension dans le parc adjacent, renforçant ainsi encore l’alliance harmonieuse entre art, architecture et nature.

Programme 2022

En 2022, le programme des expositions de la Fondation Beyeler sera placé sous le signe de son 25ème anniversaire. Il s’ouvre sur la grande rétrospective consacrée à Georgia O’Keeffe, suivie par l’exposition d’été « Mondrian Evolution ». À l’automne, la Fondation Beyeler présentera l’exposition la plus complète à ce jour d’oeuvres de sa collection, accompagnée d’une riche programmation.
Pour plus d’informations : www.fondationbeyeler.ch/fr/25ans

La Fondation Beyeler est ouverte tous les jours de 10.00 à 18.00 h, le mercredi jusqu’à 20.00 h

« Georgia O’Keeffe », une artiste d’exeption, à la Fondation Beyeler

Après avoir été montrée au centre Pompidou de Paris l’exposition est visible à Bâle jusqu’au 22 mai 2022

« Chanter a toujours été pour moi le moyen d’expression parfait. C’est tellement spontané. Comme je ne sais pas chanter, je peins. »

Georgia O’Keeffe

La Fondation Beyeler consacre la première exposition de son année anniversaire à Georgia O’Keeffe (1887–1986), l’une des peintres les plus importantes et figure emblématique de l’art moderne américain.
Réunissant 85 oeuvres de collections publiques et privées, principalement en provenance des États-Unis, « Georgia O’Keeffe » propose un aperçu représentatif de l’oeuvre aussi multiple que surprenant de cette artiste d’exception. La rétrospective offre une rare occasion au public européen de découvrir dans une telle profondeur l’oeuvre de Georgia O’Keeffe, très peu représenté dans des collections hors des États-Unis.

Un langage visuel propre

L’exposition à la Fondation Beyeler met en lumière la manière si singulière de O’Keeffe de contempler son environnement et de traduire ses perceptions en images inédites de la réalité – parfois presque abstraites, parfois proches de leur modèle naturel.

« On prend rarement le temps de voir vraiment une fleur. Je l’ai
peinte assez grande pour que d’autres voient ce que je vois. »

louisiana 014

Cette citation de 1926 peut servir de fil conducteur à l’exploration de l’art et de la vie de l’artiste. O’Keeffe a développé un langage visuel propre, oscillant entre abstraction et figuration, d’une actualité exceptionnelle non démentie à ce jour. La combinaison de son regard particulier et de son approche délicate et respectueuse du monde naturel fait de Georgia O’Keeffe la peintre de paysages et de la nature la plus importante et la plus passionnante du 20ème siècle.

Le soutien de Stieglitz

O’KEEFFE, Georgia_Nueva York con luna, 1925_(CTB.1981.76)

À partir de 1918, Georgia O’Keeffe passe des années décisives de son évolution artistique dans la métropole de New York, au coeur du cercle étroit alors très en vogue et hautement influent réuni autour d’Alfred Stieglitz, photographe, galeriste et promoteur de l’art moderne. Sa galerie opère très tôt comme
lieu de présentation et de discussion de l’avant-garde européenne ; c’est aussi un endroit où la jeune création artistique et photographique américaine trouve stimulation et soutien. O’Keeffe doit sa reconnaissance précoce et la carrière qui s’ensuit au soutien de Stieglitz, son futur époux, et à son association plusieurs décennies durant à la scène artistique new-yorkaise. Cependant, la vie urbaine ne laisse que peu de traces visibles dans sa production artistique.

La nature

O’Keeffe grandit à la ferme laitière de ses parents dans le Wisconsin, dans le Midwest américain. Les étapes décisives de son développement artistique se déroulent à Charlottesville, Virginia, puis à Canyon, Texas, où elle occupe de 1916 à 1918 un poste de professeure d’art. Après son déménagement à New
York, des séjours réguliers dans différents endroits continuent à rythmer sa vie d’artiste. Pendant de nombreuses années, ce sont des séjours l’été dans la résidence secondaire de la famille Stieglitz sur le lac George dans l’État de New York, où elle puise l’inspiration pour une grande partie de son travail de
l’époque. En 1929, O’Keeffe passe pour la première fois plusieurs semaines au Nouveau-Mexique dans le sud-ouest des États-Unis, où elle retourne chaque année, toujours seule, et où elle s’installe définitivement après la mort de Stieglitz.

Le parcours

L’exposition commence par les premiers travaux de O’Keeffe, réalisés en parallèle à son activité d’enseignante en Virginie et au Texas. Des dessins au fusain comme Early Abstraction, 1915, et No. 14 Special, 1916, sont présentés à côté d’une sélection d’aquarelles de petit format d’une grande intensité
chromatique et lumineuse. Red Landscape, 1916/17, avec son ciel nocturne éclairé par une explosion spectaculaire qui baigne les collines arides d’un rouge éclatant, est l’une des rares peintures à l’huile de cette époque.

No. 14 Special, 1916, Early Abstraction, 1915

L’abstraction

Des oeuvres telles Blue and Green Music, 1919/1921, et Series I – From the Plains, 1919, manifestent ensuite le travail de l’artiste sur l’abstraction. C’est cependant la coexistence de la figuration et de l’abstraction qui régit fondamentalement le travail de O’Keeffe. Le monde végétal, en particulier les fleurs, fournit des motifs centraux de son oeuvre. Dans ses peintures florales de grand format comme

2014.35 Georgia O’Keeffe
Jimson Weed/White Flower No. 1, 1932
Oil on canvas
48 × 40 in. (121.9 × 101.6 cm)
Framed: 53 in. × 44 3/4 in. × 2 1/2 in.

Jimson Weed / White Flower No. 1, 1932, l’une des plus célèbres de ce groupe, ou Oriental Poppies, 1927, on discerne l’intérêt de l’artiste pour le courant alors influent de la
« photographie pure (straight photography) ».

Les sources d’inspiration

Les sources d’inspiration principales de O’Keeffe sont la nature et les paysages ; elle peint des oeuvres figuratives et abstraites basées sur des motifs de paysage, d’abord sur le lac George et ensuite au Nouveau-Mexique. Les oeuvres du premier séjour au Nouveau-Mexique, dont Ranchos Church No. 1,
1929, et Gray Cross with Blue, 1929, s’inspirent d’éléments typiques de la région comme l’architecture en adobe ou les croix de pénitents érigées dans le paysage par une confrérie religieuse. C’est l’époque à laquelle elle réalise Mule’s Skull with Pink Poinsettias, 1936,

célèbres toiles figurant un crâne d’animal trouvé dans le désert. Pendant les années de guerre, lorsque O’Keeffe habite au Nouveau-Mexique de manière permanente, le regard qu’elle porte sur ce paysage évolue. Dans ses deux séries Black Place I–IV, 1944, et Black Place I–III, 1945, elle représente le paysage de collines gris-noir dans une palette inhabituellement sombre, en perspective aérienne et toujours plus abstraite. La nature morte It Was a Man and a Pot de 1942, qui donne à voir un crâne humain, suggère qu’au fil des années 1940 la manière dont O’Keeffe perçoit son environnement évolue sous l’effet de la guerre qui fait rage.

C’ÉTAIT UN HOMME ET UN POT, 1942.

Georgia O’Keeffe (américaine, 1887-1986)

Huile sur toile, 16 x 20 po. Crocker Art Museum Achat avec fonds de contrepartie du National Endowment for the Arts, 1973.23.

La dernière salle

Dans la dernière salle de l’exposition, l’oeuvre tardif de O’Keeffe fait face à Black Mobile with Hole, 1954, d’Alexander Calder (1898–1976), dont le travail est depuis longtemps lié à la Fondation Beyeler – tant par la collection du musée que par plusieurs expositions. Contrairement à O’Keeffe, Calder entretient une relation continue avec l’Europe, mais les deux artistes partagent un attachement profond aux vastes étendues et à l’horizon infini de l’Amérique rurale, qui nourrissent et irriguent leurs oeuvres.

Pionnière

De son vivant déjà, Georgia O’Keeffe est considérée aux États-Unis comme représentante majeure et co-initiatrice du nouvel art américain tel qu’il est prôné et se développe à partir de la fin des années 1910 indépendamment et en démarcation de l’avant-garde européenne. En 1943, le Art Institute of Chicago lui consacre sa première rétrospective muséale et en 1946, le Museum of Modern Art, New York, organise une grande exposition, la première d’une artiste femme à se tenir dans cette institution. La plupart des oeuvres de O’Keeffe se trouvent aux États-Unis, dans plus de 100 collections publiques et dans des collections privées. L’Europe, où O’Keeffe elle-même ne se rend pour la première fois qu’en 1953 à l’âge de 65 ans, ne compte au total qu’une douzaine d’oeuvres détenues dans des collections privées et publiques. La première exposition majeure sur le Vieux Continent lui est consacrée en 1993 à la Hayward Gallery de Londres. L’une des rares expositions dans les années qui suivent et la première en Suisse est celle organisée en 2003 par Bice Curiger au Kunsthaus Zürich. Georgia O’Keeffe figure aujourd’hui aussi en Europe parmi les artistes les plus renommé·e·s, même si les originaux de ses oeuvres n’y sont que rarement exposés. C’est une oeuvre d’une sensualité rare et délicate.

Commissaires

L’exposition « Georgia O’Keeffe » est placée sous le commissariat de Theodora Vischer, Chief Curator, et est présentée à la Fondation Beyeler du 23 janvier au 22 mai 2022. L’exposition a été organisée par la Fondation Beyeler, Riehen/Bâle, le Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid, et le Centre Pompidou, Paris, en partenariat avec le Georgia O’Keeffe Museum, Santa Fe.

Le catalogue de l’exposition paraît en allemand au Hatje Cantz Verlag, Berlin. Sur 208 pages, il réunit des articles de Cody Hartley, Anna Hiddleston-Galloni, Didier Ottinger, Marta Ruiz del Árbol, Ariel Plotek et Julia Keller.
Avec un avant-propos de Sam Keller et Theodora Vischer.

Pratique

Horaires d’ouverture de la Fondation Beyeler: tous les jours de 10h00 à 18h00, le mercredi jusqu’à 20h00

Tram n° 2 jusqu’à Messeplatz puis n° 6 arrêt Fondation Beyeler

Camille Pissarro
L’atelier de la modernité

04.09.2021 – 23.01.2022, Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaires : Christophe Duvivier, Josef Helfenstein

« (…) nous sortons peut-être tous de Pissarro. Il a eu la veine de naître aux Antilles, là, il a appris le dessin sans maître. Il m’a raconté tout ça. En 65, déjà il éliminait le noir, le bitume, la terre de Sienne et les ocres. C’est un fait. Ne peins jamais qu’avec les trois couleurs primaires et leurs dérivés immédiats. Me disait-il. C’est lui, oui, le premier impressionniste.»
Paul Cézanne, «Conversations avec Cézanne»

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Camille Pissarro (1830-1903) compte parmi les artistes majeurs dans la France du XIXe siècle. Figure centrale de l’impressionnisme, il marqua ce mouvement de manière décisive.
Camille Pissarro. L’atelier de la modernité au Kunstmuseum Basel est la première rétrospective consacrée à cet artiste en Suisse depuis plus de 60 ans. Elle offre à la fois un vaste aperçu de l’oeuvre de Pissarro et accorde une attention particulière à sa pratique collaborative et à son influence déterminante sur l’art moderne. Elle rend hommage à un artiste parfois relégué au second plan lorsqu’on évoque les grandes figures de l’art du XIXe siècle. Des artistes de différentes générations, hommes et femmes confondus, parmi lesquels plusieurs devinrent des figures de proue de la modernité au tournant des XIXe et XXe siècles, suivirent ses conseils d’ami et de mentor. L’exposition met en lumière les échanges intenses de ces artistes avec Pissarro et situe son oeuvre foisonnante dans le contexte historique à l’aide d’oeuvres de Claude Monet, Paul Cézanne, Paul Gauguin, Georges Seurat, Paul Signac, Mary Cassatt et d’autres. Ainsi, tout en embrassant la naissance de l’art moderne, cette exposition raconte une histoire au-delà du courant dominant de l’histoire de l’art.

                           Pissarro, effet de neige à l’Hermitage
Les expositions consacrées à l’impressionnisme ont une longue tradition au Kunstmuseum Basel. À ce titre, Pissarro revêt une importance particulière pour le musée, sa collection abritant pas moins de huit peintures, dix dessins et aquarelles ainsi que dix travaux d’art graphique. Son oeuvre Un coin de l’Hermitage, Pontoise de 1878 fut le premier tableau impressionniste à entrer dans la Öffentliche Kunstsammlung Basel, la collection publique bâloise.

HxB: 54.6 x 65 cm; Öl auf Leinwand; Inv. 871 Camille Pissarro; Un coin de l’Hermitage, Pontoise; 1878

Acquise en 1912 à l’initiative de trois jeunes artistes, cette peinture posa les fondements de la collection impressionniste. Au printemps de cette année, le Kunstmuseum Basel s’est félicité de la donation de La Maison Rondest, l’Hermitage, Pontoise (1875) de Pissarro par une collection particulière suisse.

Pissarro et la campagne

La posture artistique de Pissarro est plus complexe que celle de ses amis. Son approche se distingue clairement des sujets de Claude Monet, d’Auguste Renoir ou d’Edgar Degas appréciés du public. Ainsi, Pissarro fut le seul impressionniste s’attachant à représenter la vie simple, en particulier celle des gens de la campagne. Ses peintures montrent des paysages cultivés par l’homme, elles sont une plongée dans le monde paysan et agricole, bien loin de l’existence de la bourgeoisie aisée.

Politique, société et marché de l’art

À la différence de Monet ou Renoir, Pissarro était réticent à toute esthétisation. Cela explique sans doute le fait qu’il subit un échec commercial et eut des problèmes financiers jusqu’ à un âge avancé. Pissarro a joué un rôle moteur lors de la création d’une association libre et coopérative qui réunissait des hommes et femmes souhaitant exposer et vendre eux-mêmes leurs oeuvres. Cette Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs entrera plus tard dans l’histoire de l’art sous le nom de groupe des impressionnistes.

Le néo-impressionnisme

Dans les années l’impressionnisme, longtemps sujet à controverse, commence à recueillir davantage l’adhésion du public, à entrer dans les collections particulières et publiques, et à rapporter de l’argent aux artistes. C’est précisément à ce moment-là que Pissarro se consacre à une autre révolution picturale – le néo-impressionnisme – et manifeste de nouveau une volonté ferme en faveur du progrès artistique. L’esthétique radicale et la méthode scientifique du néo-impressionnisme défendues notamment par Georges Seurat, Paul Signac, Louis Hayet et le fils aîné de Pissarro, Lucien, représentent pour l’artiste une évolution logique de l’impressionnisme. Même s’il revient à une touche plus libre dans les années 1890, il reste fidèle à ses convictions : le bon art contient un noyau révolutionnaire et affiche une foi inébranlable en la modernité.


Le peintre ne fait pas mystère de son intérêt pour les écrits anarchistes et de son engagement en faveur des publications anarchistes. Comme nombre de ses contemporains, dont les néo-impressionnistes, Pissarro est convaincu que la répartition inégale des ressources (en particulier dans des grandes villes comme Paris ou Londres) mènera à un renversement sociétal à plus ou moins long terme. À la différence de certains de ses camarades politiques, Pissarro croit cependant en une révolution pacifique et non violente.
La manière dont ses convictions politiques transparaissent dans son art suscite l’intérêt depuis longtemps d’une histoire de l’art socio-historique. Bien que Pissarro ne considérât pas ses tableaux comme des professions de foi politiques, sa technique picturale révolutionnaire, son aspiration à l’autonomie et à la liberté en toute circonstance, de même que sa volonté d’emprunter de nouvelles voies envers et contre tous, associent son art à l’idée centrale de l’anarchisme compris comme une libéralisation de l’individu et de ses aspirations.

Une soif d’expérimentation

Le parcours de Pissarro est marqué par les événements et les dynamiques historiques qui ont jalonné le XIXe siècle. Il incarnait certains des conflits les plus complexes de son temps et considérait qu’il était du devoir des artistes de mener une réflexion critique tant sur l’esprit de l’époque que sur le contexte politique, social et économique. La manière dont il abordait ces réalités en fait aujourd’hui un artiste des plus actuels.


Du fait de ses origines, Pissarro occupait une position marginale parmi les artistes français qu’il fréquenta activement tout au long de sa vie. Né en 1830 de parents juifs sur l’île Saint-Thomas dans les Caraïbes, alors colonie danoise, il est le seul impressionniste à grandir sur deux continents. Trilingue (français, anglais et espagnol), il est sensibilisé à la diversité ethnique et culturelle dès son enfance. Son identité, sa conception de la peinture et sa vision du monde étaient à la fois le fruit d’une culture aux origines complexes, et donc par essence anti-nationaliste, et d’une volonté constante d’échanger avec d’autres créateurs.


Pissarro éprouvait une curiosité singulière pour les expérimentations artistiques et les nouvelles formes de représentation. Dans l’entourage de précurseurs à l’instar de Camille Corot et Gustave Courbet, il recherchera toujours à dialoguer avec ceux qui, comme lui, nourrissaient une vision de l’art indépendant de l’Académie.

Un don pour l’amitié

Comme nul autre, Pissarro était disponible pour entretenir ses amitiés avec les peintres, valoriser leur potentiel et apprendre d’eux en retour. Il possédait ce qu’on pourrait appeler un « don » pour l’amitié. Le respect de la singularité artistique de chaque personnalité en constituait le fondement. Pissarro éprouvait de la méfiance envers les contraintes hiérarchiques et s’opposait par principe à tout dogmatisme. Pour lui, la collaboration artistique n’avait rien à voir avec l’ancienneté, mais reposait sur la base d’un échange sur un pied d’égalité. L’exposition révèle ses différentes relations avec les protagonistes de l’époque et montre ainsi une image bien différente de celle de l’artiste-génie travaillant à l’écart du monde extérieur.

De prestigieux prêts

                               Paul Gauguin

L’exposition Camille Pissarro. L’atelier de la modernité
réunit quelque 180 oeuvres de collections suisses et internationales parmi lesquelles le Museum Folkwang d’Essen, le Musée d’Orsay de Paris, The Museum of Modern Art de New York, The Metropolitan Museum of Art de New York, la National Gallery of Ireland, The National Gallery de Londres, la Kunsthalle Mannheim, le Museo Nacional Thyssen-Bornemisza de Madrid, la Tate Modern de Londres, The British Museum de Londres, le Dallas Museum of Art, la National Gallery of Art de Washington, le Musée du Petit Palais de Genève, le Ashmolean Museum d’Oxford, les Musées de Pontoise, The Art Institute of Chicago, la Staatsgalerie Stuttgart, le Kunstmuseum Bern et le Kunst Museum Winterthur.

Catalogue

L’abondant catalogue de l’exposition avec des contributions de Timothy J. Clark, André Dombrowski, Claire Durand-Ruel, Christophe Duvivier, Sophie Eichner, Colin Harrison, Josef Helfenstein, Jelle Imkampe, David Misteli, Olga Osadtschy, Joachim Pissarro, Esther Rapoport, Valérie Sueur-Hermel et Kerstin Thomas paraît aux éditions Prestel Verlag.

Informations

Kunstmuseum Basel
St. Alban-Graben 8
Postfach, CH-4010 Basel
T +41 61 206 62 62
kunstmuseumbasel.ch

HAUPTBAU & NEUBAU

Lu fermé
Ma 10h00–18h00
Me 10h00–20h00
Je–Di 10h00–18h00

Merci Seppi. Un cadeau merveilleux au Musée Tinguely

Andres Pardey et Josef Imhof dit Seppi

Josef « Seppi » Imhof, assistant de Jean Tinguely de 1971 jusqu’à la mort de l’artiste en 1991, a rassemblé de nombreuses œuvres sur papier tout au long des années où, très régulièrement et de très près, il a accompagné Tinguely
( 22 mai 1925 à Fribourg et mort le 30 août 1991 à Berne).  On trouve là des dessins, des gravures, des collages, des lettres, des croquis de travail, des aquarelles méticuleuses. Ce sont tous de témoignages d’une relation intense entre l’artiste et son assistant. Seppi Imhof a fait don au Musée Tinguely de sa collection d’œuvres sur papier, qui est présentée dans le cadre de l
’exposition Merci Seppi jusqu’au au 13 mars 2022.
Ce sont comme des posts it sommairement
détaillés, mais illustrés par des notifications, que Seppi devait interpréter, comme assistant en chef.

Les histoires sur le travail de Seppi Imhof en tant qu’assistant de Jean Tinguely se bousculent. Que ce soit le recrutement, comme soudeur, au buffet de la gare (avec la question clé de savoir s’il pouvait aussi « taper le carton »), les récits de voyages et les hébergements aventureux ou les visites chez ou avec des artistes comme Alexander Calder ou Keith Haring – Seppi a presque toujours été là et recueilli non seulement des impressions mais aussi de nombreux souvenirs. Et il aime les raconter et les transmettre.

Josef Imhof dit Seppi est né 23 mai 1943 à Berne et passa son enfance à Soleure
Après un apprentissage de serrurier en bâtiment et en construction il travailla entre autres au laminoir de Von Roll à Gerlafingen.
En 1970, il tomba par hasard sur l’annonce suivante dans un journal:
Jean Tinguely cherche pour une durée d’environ 6 mois à partir du 15 juillet serrurier en bâtiment ou serrurier (suisse alémanique), polyvalent et ne souffrant pas de vertige, permis de conduire (connaissances de jass désirées), p.l. construction d’une sculpture monumentale en fer dans les alentours de Paris. Hébergement et nourriture compris. » (jass jeu de cartes suisse)
La décision spontanée de répondre à cette annonce devait déterminer les prochaines 20 années de la vie de Josef Imhof. En tant que soudeur qualifié il devint l’assistant professionnel de Jean Tinguely qui devait – selon les dires de l’artiste – être meilleur soudeur qu’il ne l’était.

Après l’installation de l’exposition “Machines de Tinguely” au CNAC (Centre national d’art contemporain) à Paris au printemps 1971, le véritable travail de Sepp Imhof comme assistant de Tinguely commença pour de vrai: avec Niki, Bernhard Luginbühl, leurs aides et autres artistes, amis de Tinguely, débuta le long travail commencé en 1969 sur la sculpture-installation monumentale La Tête ou Le Cyclop à Milly-la-Forêt, près de Paris.
Sepp Imhof était le garant pour la réalisation matérielle des idées souvent fantastiques de l’artiste.
Pendant plus de 20 ans jusqu’à son inauguration officielle en 1994, 300 tonnes de fer soudé furent nécessaires pour la construction de la sculpture haute de 22,5 m.

Mais, Josef Imhof participa aussi à de nombreux autres projets de Jean Tinguely.
Seppi a collectionné et gardé jusqu’au dernier bout de papier, souvenirs nombreux documentant ses années de travail riches en expériences aux côtés de Jeannot et d’autres artistes. Les spectateurs auront maintenant l’occasion d’en voir un choix au Musée. Parmi ceux-ci se trouvent des lettres-collages hauts en couleurs que Jean Tinguely lui envoyait de tous les coins du monde. Elles révèlent la fantaisie sans borne et la créativité de l’artiste qui avait pour habitude de « bricoler » et donner ainsi forme à ses idées et souhaits à partir d’impressions et d’objets, de choses quotidiennes et de choses jetées. De surcroît, les lettres à son assistant Imhof sont d’importants documents qui nous instruisent sur les étapes éparpillées de la création artistique de Tinguely et nous permettent de gagner un aperçu direct et enrichissant dans sa manière de travailler.

Parmi ces souvenirs, il y a aussi quantité de lettres, affiches, gravures, notes,
« images à avaler », consignes de travail, cartons d’invitation et projets divers que, pour la plupart, Jean Tinguely (et parfois aussi Niki de Saint Phalle) lui a écrits et dédiés. Ce sont des points de repère dans la collaboration avec le patron et ami ; ils évoquent des projets importants des années 1970 et 1980 ainsi que des lieux significatifs : Le Cyclop, Le Crocrodrome de Zig et Puce, Il Giardino die Tarocchi, Chaos No. 1, Klamauk, Pit-Stop, Bâle, Fribourg ou Charlotte.

Après avoir travaillé comme conservateur au Musée Tinguely jusqu’en 2008, Seppi Imhof a fait don à celui-ci de sa collection d’œuvres sur papier. Classés par thèmes, lieux et projets, les plus de 400 pièces sont désormais exposées. Par leur volume, ils illustrent également l’intensité avec laquelle les deux hommes ont travaillé et même souvent vécu ensemble pendant 20 ans, en symbiose presque, mais pourtant dans des domaines et avec des responsabilités bien définis. Cette exposition est donc un hommage, d’une part à Seppi Imhof, le généreux donateur, et d’autre part à l’amitié entre Jean et Seppi qui a rendu tout cela possible.


Informations pratiques Musée Tinguely     :

Titre de l exposition : Merci Seppi. Un cadeau merveilleux Adresse : Musée Tinguely | Paul Sacher – Anlage 1 | 4002 Bâle

Heures d ouverture : mardi  à  dimanche, tous les jours 11h – 18h

Sites Internet : www.tinguely.ch

Réseaux sociaux : @museumtinguely | #museumtinguely | #    tinguely | # merciseppi

Le Musée Tinguely est soumis à l’obligation du certificat Covid. Nous vous demandons donc de présenter votre certificat et votre carte d’identité à l’entrée.

Accès
Gare centrale de Bâle CFF / Gare SNCF :
tram no. 2 jusqu‘au « Wettsteinplatz »,
puis bus no. 31 ou 38 jusqu’à « Tinguely Museum ». 
Gare allemande (Bad. Bahnhof) : bus no. 36.

Sommaire du mois de juillet 2021

Fête de l’été à la Fondation Beyeler

26 juillet 2021 : Elles font l’abstraction
22 juillet 2021 : Museum Tinguely AHOY !
16 juillet 2021 : Centenaire de la naissance d’Ernst Beyeler
14 juillet 2021 : Christian Boltanski
10 juillet 2021 : Frieder Burda, en souvenir
05 juillet 2021 : Circumnavigation jusqu’à Épuisement
01 juillet 2021 : Palais Augmenté

Museum Tinguely AHOY !

Das umgebaute Frachtschiff MS Evolutie auf dem Rhein vor dem Basler Münster© 2021 Museum Tinguely, Basel; Foto: Matthias Willi

Paris – Amsterdam – Bâle

Museum Tinguely AHOY ! Paris – Amsterdam – Bâle

A Paris le 17 juillet – 26 septembre 2021

Départ de Bâle depuis le 27 juin 2021

Le projet

À l’occasion de son 25e anniversaire, le Musée Tinguely entame cet été un grand voyage en bateau intitulé « Museum Tinguely AHOY ! » : à bord d’une péniche reconvertie, le musée fera ainsi découvrir de plus près l’art de Jean Tinguely (1925-1991), l’un des artistes suisses les plus importants et les plus novateurs du xxe siècle.

Le navire amarrera dans différents lieux qui ont marqué l’évolution artistique de Tinguely – de Paris à Bâle, en passant par Anvers et Amsterdam et la région métropolitaine Rhin-Ruhr. Le voyage a  débuté à Paris le 17 juillet, et, après un itinéraire de onze semaines à travers la France, la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne, le bateau reviendra à Bâle le 25 septembre 2021. Il présentera une exposition dans la coque du navire et une spectaculaire sculpture-fontaine sur le pont. Ce voyage anniversaire traversera onze endroits en tout et proposera, en collaboration avec des institutions partenaires locales, un programme varié de chaque fois deux jours – expositions, médiations culturelles et performances d’artistes contemporaines. Le trajet montre combien, dès le milieu des années 1950, l’artiste était inscrit dans un réseau international et quelles relations intenses le musée entretient aujourd’hui avec d’autres institutions. 
Le projet« Museum Tinguely AHOY ! » se déplace à bord d’une péniche reconvertie de 40 mètres de long, la MS Evolutie.

Anniversaire

À l’occasion de son 25e anniversaire, le Musée Tinguely fête
« 25 Years of Moving Art» jusqu’au mois de décembre de cette année.
Comme point fort des festivités, le musée se lance cet été dans une aventure qui mènera l’art par les voies fluviales, tout comme Tinguely lui-même aurait pu le faire. Avec cette expédition, le musée entend aussi afficher l’image qu’il a de lui-même et cultiver les partenariats existants, en susciter de nouveaux, et manifester, en cette année particulière, son souhait d’offrir au public une expérience culturelle tout à fait unique dans différents lieux d’Europe. Pour la fête d’anniversaire, prévue  du  25 au  26 septembre  2021, la péniche effectuera la dernière étape de ce grand voyage et retournera à Bâle, où elle accostera directement devant le Musée Tinguely.


Une exposition

Une exposition documentaire sur l’art de Jean Tinguely est présentée à bord de la péniche, avec des références particulières à chacune des étapes du voyage qui retracent la biographie de Tinguely en tant qu’artiste, voyageur, homme de réseaux et ami. Pour couronner le tout, la sculpture fontaine Schwimmwasserplastik  (1980)  de  Tinguely,  qui se trouve sinon devant le Musée Tinguely, est montée sur le pont de la péniche même.

Le voyage

Le voyage de la péniche MS Evolutie ira de Paris à Bâle en passant par Amsterdam. Ses différentes étapes se feront dans les lieux qui ont marqué la carrière de Jean Tinguely et la réception de son œuvre. La péniche a quitté Bâle le 27 juin et a effectué sa première escale à Paris le 17 juillet. De là, elle poursuit vers Anvers et Amsterdam,  puis remontera le Rhin jusqu’à  Bâle,  où  elle arrivera  pile  pour fêter le fameux anniversaire  pendant tout un week-end.
Le choix des escales correspond à des références historiques et des institutions significatives pour le travail de Tinguely.  Ce  parcours  illustre la  force  du réseau international de l’artiste  à  partir  du  milieu  des  années 1950  et l’importance continue de ce réseau aujourd’hui pour le Musée Tinguely.

« Museum Tinguely AHOY ! » est une occasion unique de découvrir le musée et l’artiste hors de Bâle, dans de nombreuses localités européennes en lien avec la vie de l’artiste. L’accès à la péniche dépend d’un lieu à l’autre de la réglementation sanitaire en vigueur dans le pays concerné.

Les étapes du voyage

Paris, du 17 au 18 juillet, RMN-Grand Palais, La Villette et Centre Pompidou

Paris est à la fois centre et lieu d’inspiration dans la carrière artistique du jeune Tinguely. À partir de 1954 ont lieu de nombreuses expositions en galerie suivies par de grandes rétrospectives muséales.

Anvers, du 28 au 29 juillet, Het Bos et Royal Academy of Fine Arts

À Anvers, Tinguely a participé à deux expositions collectives importantes: en 1957, à la rve Biennale voor Beeldhouwkunst, Middelheimpark, et en 1959 à Vision in Motion Motion in Vision au Hessenhuis.

Maastricht, du 2 au 3 août, Bonnefantenmuseum

Le Bonnefantenmuseum est un partenaire de coopération du Musée Tinguely dans différents projets.

Amsterdam, du 8 au 9 août, Stedelijk Museum Amsterdam

Au Stedelijk Museum d’Amsterdam ont eu lieu de nombreuses expositions novatrices avec des œuvres de Tinguely : Jean Tinguely: Tekeningen (1969), Jean Tinguely (1973), Jean Tinguely (1984), ainsi que l’exposition Bewogen Beweging (1961) et Dylaby: dynamisch labyrint (1962). Et plus récemment, en 2016-2017, la grande rétrospective : Jean Tinguely Machine Spectacle.

Gelsenkirchen, du 16 au 17 août, Kunstmuseum Gelsenkirchen et Musiktheater im Revier

En 1958-1959, à l’invitation d’Yves Klein, Tinguely a participé à la décoration de l’opéra, où il a installé un relief cinétique qui existe encore aujourd’hui.

Duisbourg, du 20 au 21 août, Wilhelm Lehmbruck Museum

En 1976, Tinguely a reçu le prix Wilhelm-Lehmbruck et en 1978, il a organisé la grande exposition Jean Tinguely: Meta-Maschinen. Plusieurs œuvres cinétiques spectaculaires se trouvent aujourd’hui dans la collection du musée.

Krefeld, du 25 au 26 août, Kunstmuseen Krefeld

En 1960, Tinguely présentait sa première exposition monographique au musée Haus Lange. Le premier relief multiple de Tinguely, à savoir le « tableau machine » Haus Lange de 1960, a été créé pour Krefeld.

Düsseldorf, du 28 au 29 août, ZERO Foundation

Tinguely était ami avec les artistes du groupe Zero. Il a participé à des expositions communes et été représenté à plusieurs reprises à la Galerie Schmela. En 1959, il y a mis en scène le lancer de son manifeste Für Statik depuis un avion.

Coblence, du 3 au 4 septembre,  Ludwig Museum Koblenz

Le Ludwig Museum Koblenz abrite dans sa collection des œuvres de Jean Tinguely, Niki de Saint Phalle et Eva Aeppli.

Francfort, du 8 au 9 septembre, Frankfurter Kunstverein

En 1979, le Musée Stadel a présenté l’exposition Tinguely –  Luginbühl.

Mannheim, du 14 au 15 septembre, Kunsthalle Mannheim

L’art de Tinguely constitue ici un point fort de la collection. En 2002-2003, la Kunsthalle a présenté la rétrospective Jean Tinguely Stillstand gibt es nicht.

Bâle, du 25 au 26 septembre, Musée Tinguely


Fondé en 1996, cinq ans après la mort de Tinguely, le Musée Tinguely fête son 25e anniversaire en 2021.

La sculpture-fontaine Schwimmwasserplastik

Le point fort du projet « Museum Tinguely AHOY ! » est la Schwimmwasserplastik (1980) de Jean Tinguely, qui se trouve normalement devant le Musée Tinguely, dans le parc Solitude environnant. Elle est installée pour l’occasion sur le pont de la péniche.

Jean Tinguely, Schwimmwasserplastik (1980) 407 x 214 x 184 cm, ferraille, tuyaux d’arrosage, embouts, moteurs électriques Musée Tinguely, Bâle,
donation Paul Sacher
© 2021 Musée Tinguely, Bâle ; photo : Daniel Spehr

Actionnée par des roues peintes en noir, la sculpture-fontaine projette de l’eau dans toutes les directions à partir de cinq buses différentes ; en fonction du vent, ce spectacle de pulvérisation mécanique peut éclabousser le spectateur. Tinguely voulait que la fontaine déverse de l’eau à profusion et dans toutes les directions, comme un feu d’artifice. L’artiste aimait d’ailleurs particulièrement le caractère ludique de l’eau et a créé ainsi des formes éphémères qui en prolongent le jaillissement. De la même manière, il a augmenté ses sculptures de mouvements ou de sons pour générer des expériences sensorielles complètes

Informations pratiques Musée Tinguely

Itinéraire du navire : départ à Bâle le 27 juin 2021 / ire escale Paris, le 17 juillet 2021
/ Retour à Bâle, le 24 septembre 2021
Titre de l’exposition :
« Et tout ceci est vrai ! Sur les traces de Tinguely entre Paris, Amsterdam et Bâle »
détail àvenir
 présentation : du 17 juillet au 26 septembre 2021 sur la péniche
transformée MS Evolutie, « Museum Tinguely AHOY ! »
2e présentation : du 20 octobre 2021 au 23 janvier 2022 au Musée Tinguely (Journée portes ouvertes: le 19 octobre 2021 de 11h à 20h)
Adresse: Musée Tinguely I Paul Sacher-Anlage 1 l 4002 Bâle
Heures d’ouverture : de 10h à 20 h
Heures d’ouverture du bateau : du mardi au dimanche, de 11h à 18h

Sites Internet : www.tinguely.ch I www.mtahoy.com
Réseaux sociaux : @museumtinguely 1 #museumtinguely 1 #tinguely 1
#museumtinguely251 #museumtinguelyahoy 1 #tinguelyontour

photos Musée Tinguely

© 2021 Museum Tinguely, Basel; photo: Matthias Willi

 

Frieder Burda, en souvenir

Le 14 juillet 2021 , est le deuxième anniversaire de la mort de Frieder Burda.
Il était un collectionneur passionné – et un donateur et sponsor délibéré.
Avec sa fondation et son musée, il s’est tourné très tôt vers l’avenir – et a créé une maison pour sa collection et une scène pour l’art.

 Lui-même s’est plutôt éloigné de la grande scène. La retenue et la générosité dans ses relations avec les artistes, les amis et les employés l’ont façonné. Le besoin de partager – ses connaissances, son expérience, sa passion pour l’art – était ce qui faisait de lui ce qu’il était un être rare.

Le musée souhaite partager avec nous, son souvenir avec un film – que vous pouvez retrouver ICI sur le site internet. A partir de ce samedi 17 juillet, vous pouvez retrouver sur le site Internet une conversation que des proches auront à son sujet.

Frieder Burdanous ne l’oublierons pas, son héritage est devenu notre tâche.

 Elke Burda & sa famille et l’équipe du musée

Biographie

Frieder Burda est né le 29 avril 1936 à Gengenbach dans le Bade-Wurtemberg, dans une famille connue d’entrepreneurs allemands du secteur des médias. Il grandit à Offenbourg entre son frère aîné Franz, décédé avant lui, et son cadet Hubert. Après sa scolarité effectuée notamment en Suisse, il suit un apprentissage des métiers de l’imprimerie et de l’édition, et une formation commerciale dans l’entreprise paternelle. À l’issue de séjours prolongés à l’étranger, en France, en Angleterre et aux États-Unis, il reprendra une imprimerie à Darmstadt et en fera l’une des plus grandes imprimeries de
labeur d’Europe.

À partir de 1973, Frieder Burda occupe divers postes dans la centrale des éditions de presse de ses parents à Offenbourg, où il est responsable des finances, de la gestion et des participations. Mais c’est dans l’art que Frieder Burda trouvera sa véritable vocation. Jeune trentenaire, il achète en 1968 un tableau du peintre Lucio Fontana vu à la documenta de Kassel, et ce sera l’élément fondateur d’une collection prestigieuse comptant aujourd’hui quelque mille pièces, dont de nombreux chefs d’œuvre de Pablo Picasso, Max Beckmann et Ernst-Ludwig Kirchner, Jackson Pollock, Willem de Kooning et Mark Rothko, Gerhard Richter, Georg Baselitz et Sigmar Polke. Cette première acquisition marque le début d’une grande passion mais aussi d’une profonde connaissance de l’art contemporain. Il s’émancipe ainsi sciemment de la collection de son père essentiellement tournée vers l’expressionnisme allemand.

La Fondation

Le Musée Frieder Burda, œuvre d’une vie
La Fondation Frieder Burda est créée en 1998 – après des efforts inaboutis d’installation à Mougins dans le sud de la France- pour abriter la collection et de la rendre visible au public. C’est sur cette base qu’est édifié le musée dessiné par le célèbre architecte Richard Meier, qui accueille depuis 2004 la Collection Frieder Burda à Baden-Baden aux côtés d’autres chefs d’œuvre internationaux : un solitaire d’une blancheur éclatante situé sur l’historique Lichtentaler Allee, le plus souvent désigné sous le terme de « Joyau dans le parc ».

De nombreuses expositions prestigieuses s’y sont tenues depuis, consacrées notamment à Gerhard Richter, Sigmar Polke, Katharina Grosse, William N. Copley, Andreas Gursky et James Turrell.
Il faut y ajouter des expositions thématiques telles que
« Die Bilder tun was mit mir » ou « America ! America ! ».
Ce faisant, Frieder Burda, citoyen d’honneur de la ville de Baden-Baden, eut toujours à cœur de transmettre une connaissance profonde de l’art, donnant à cet objectif une dimension d’engagement social par le biais de l’atelier d’art du musée. Le musée célèbre en 2014 ses dix ans d’existence avec deux grandes expositions rétrospectives intitulées « 40I10 ». Le quinzième anniversaire a donné lieu en 2019 à l’exposition « Ensemble » qui, par le biais du dialogue avec des chefs d’œuvre du Centre Pompidou à Paris célèbre l’amitié franco-allemande. Le début de 2019 avait été marqué par l’énorme succès remporté par l’exposition consacrée à Bansky. Enfin, avec le Salon Berlin dirigé par la belle-fille de Frieder Burda, Patricia Kamp, le musée assure le lien avec l’art contemporain.

Frieder Burda a toujours été ouvert aux impulsions nouvelles générées par l’art contemporain tout comme au débat qu’il suscite. Pour autant il est toujours resté fidèle en sa foi envers le pouvoir d’intégration de l’art. En évoquant l’exposition « Ensemble », ce francophile passionné avait écrit dans le catalogue :

« les deux collections qui se reflètent, le face-à-face d’œuvres de différents artistes allemands et français montrent le pouvoir fédérateur de l’art, son influence positive et son apport au- delà des frontières. Cela me rend heureux et me conforte dans ma conviction que l’art a le pouvoir universel de tisser des liens, d’exister et de perdurer par-delà toutes les crises. »

Frieder Burda s’est éteint à 83 ans entouré des siens à Baden-Baden le 14 juillet 2019, le jour de la Fête nationale en France.

Sa foi dans le pouvoir réconciliateur de l’art resta toujours inébranlable, tout comme sa fascination envers l’enivrante puissance de la couleur : le monde des arts a perdu avec Frieder Burda un grand collectionneur qui veilla sans relâche à partager son amour et sa passion pour l’art avec le plus grand nombre. Il donna toujours aux valeurs humanistes la priorité sur les matérielles, convaincu que posséder des œuvres d’art implique l’obligation de les rendre visibles. Ami des artistes, il fut amené à débattre des origines de l’art et à rechercher le contact direct et stimulant avec les créateurs ; mécène fondateur du musée, il fit preuve d’une grande générosité en gratifiant sa ville natale d’une institution qui ne cesse d’attirer à Baden-Baden des visiteurs venus du monde entier ; à la tête du directoire de la fondation, il fut pour ses collaborateurs un modèle de modestie et d’humanité. En tant que particulier enfin, il sut, aux côtés de sa femme Elke, renouveler sans cesse la manière de fédérer famille et amis sous la bannière des arts.

Informations pratiques

MUSEUM FRIEDER BURDA
Lichtentaler Allee 8B
76530 Baden-Baden
Tel: 07221 398980
Fax: 07221 210226

HORAIRES D’OUVERTURE:
MAR–DIM, 10H–19H
KUNSTWERKSTATT

Transports en commun
• Liaison directe par autobus depuis la gare de Baden-Baden :
• Lignes comportant l’arrêt « Augustaplatz/Museum Frieder Burda » (notamment lignes 201 et 216).

• Depuis l’arrêt Augustaplatz/Museum Frieder Burda, traverser la place à droite pour rejoindre le parc, traverser l’Oos pour arriver directement au musée.

Kara Walker

Jusqu’au 26.09.2021, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaire : Anita Haldemann

A Black Hole Is Everything a Star Longs to Be

À travers la première grande exposition suisse consacrée à l’artiste noire américaine Kara Walker (*1969), le Kunstmuseum Basel présente plus de
600 travaux sur papier provenant de ses archives personnelles jamais exposés auparavant. Ces oeuvres de ces 28 dernières années figurent aux côtés de dessins inédits abordant des sujets contemporains, à l’instar de l’héritage de Barack Obama.
Kara Walker  explore, détourne et dénonce les représentations du racisme et de l’Etranger, des plus insidieuses au plus innommables.
C’est une incroyable interpellation lorsque l’on pénètre dans les salles du musée, qui vous saisit, on est partagé entre l’horreur, la curiosité devant l’imagination créative, mais aussi le rire, car elle manie l’humour avec bonheur. L’ensemble est présenté comme une grande installation que l’artiste veut « désordonnée » mais qui montre sans filtre la pensée et le processus de son travail.

                                            The Right Side, 2018

Sujet d’actualité

Kara Walker compte parmi les artistes de premier plan aux États-Unis. À l’aide de techniques artistiques traditionnelles, elle crée des oeuvres provocatrices d’un raffinement extraordinaire abordant l’histoire, les relations raciales, les rôles de genre, la sexualité et la violence. Walker ne propose pas de se réconcilier avec le passé, mais incite plutôt le spectateur à remettre en question les récits établis et les mythes tenaces. Découpages subtiles, dessins et aquarelles souvent réunis en grandes installations murales garnissent les cimaises du – 1 du Kunsmuseum. Sans aucun ménagement, elle analyse des conflits profondément enracinés et des injustices sociales persistantes. Au regard du mouvement Black Lives Matter qui a également retenu l’attention à la lumière des derniers événements, l’oeuvre de Kara Walker s’inscrit plus que jamais dans l’actualité.

La traite, l'esclavage, le racisme : impossible, pense-t-on, d'en faire des thèmes pour des oeuvres d'art, à moins que celles-ci soient de dénonciation ou de commémoration, les seules tonalités acceptables. Ce sont des sujets trop graves et douloureux pour qu'une autre manière soit seulement possible.

Kara Walker montre qu'il n'en est rien. Que le rire léger ou gras, la facétie poétique ou scabreuse, l'allégorie absurde ou fantastique sont autant de modes acceptables s'ils sont employés avec justesse ; et qu'ils sont aujourd'hui bien plus troublants que la réprobation grandiloquente, devenue la plus banale figure de style du "politically correct", en France autant qu'ailleurs. Philippe Dagen, Le Monde

Sa pratique

Au milieu des années 1990, l’artiste a acquis une renommée grâce à ses silhouettes de papier découpé se déployant sur les murs. À l’hiver 2019/2020, son imposante sculpture Fons Americanus présentée à la Tate Modern de Londres a fait les gros titres. Le dessin sur papier reste cependant au fondement de la pratique artistique de Kara Walker. Pour l’exposition bâloise, l’artiste ouvre pour la première fois ses archives bien gardées et offre un aperçu sans précédent de sa pratique. De petites esquisses, des études, des collages et de grands formats élaborés avec minutie apparaissent aux côtés de notes de journal, de pensées dactylographiées sur des fiches et de dessins de rêves. L’intimité de chaque page individuelle contraste avec l’étonnante diversité des oeuvres : en s’approchant et s’éloignant, le spectateur devient le témoin oculaire de la genèse de l’art de Walker, en observant la manière dont elle transcrit sa pensée sur le papier, invente, adapte et transforme figures et récits.Ses silhouettes découpées dans du papier noir, inspiré d’un Sud mythique d’avant la guerre de Sécession, ne sont pas sans évoquer un autre artiste de la dénonciation du traitement infligé à la population des immigrés, William Kentridge . (présenté en 2019, au Kunstmuseum Basel | Gegenwart)

Yesterdayness in America Today, 2020

Les portraits

À la différence de ses élégants panoramas de silhouettes, ses dessins semblent contenir davantage de spontanéité et d’émotion. Souvent réalisés au pinceau, ils possèdent une dynamique fluide et ouverte. Walker questionne sa propre identité – en tant qu’artiste, noire, femme et mère – tant sur le plan personnel que dans le contexte socio-politique d’événements actuels. Pour l’exposition, elle a ainsi réalisé quatre portraits saisissants de la présidence et de l’héritage de Barack Obama. Kara Walker le montre comme un Saint Antoine martyrisé,
le saint patron des choses perdues, ou en tant que chef tribal africain. En fait elle n’idéalise pas le premier président noir des États-Unis, elle le fantasme, en le présentant comme Othello, le maure, tenant sur ses genoux la tête de Iago : Obama tient dans ses mains la tête blonde sectionnée de son successeur…
Un pastel énigmatique intitulé Allégorie des années Obama montre l’ancien président dans le ciel, brillant et divin, alors que des nuages ​​sombres se rapprochent. Une silhouette pleure en bas, comme si elle assistait à la disparition de l’espoir incarner.
En traquant toutes les incarnations du racisme, elle dessille nos yeux et nos conformismes sur les représentations des Noirs et de l’Etranger.

Également visible, un travail en 38 parties intitulé
The Gross Clinician Presents: Pater Gravidam qui aborde des questions relatives à l’inspiration et à la créativité, ainsi qu’aux traditions du dessin pour lesquelles le Kupferstichkabinett (cabinet des arts graphiques) possède de nombreux exemples.

The Gross Clinician Presents: Pater Gravidam

Eléments biographiques

Née en 1969 à Stockton, en Californie, Kara Walker s’installe à Atlanta, en Georgie, avec sa famille à l’âge de treize ans. Elle étudie au Atlanta College of Art (Bachelor of Fine Arts en 1991) puis à la prestigieuse Rhode Island School of Design (Master of Fine Arts en 1994).
Kara Walker a reçu de nombreuses distinctions pour son oeuvre, dont le John D. and Catherine T. MacArthur Foundation Achievement Award en 1997 et le Eileen Harris Norton Fellowship en 2008. Elle est membre de l’American Academy of Arts and Letters (élue en 2012) et de la American Philosophical Society (élue en 2018). En 2019, elle est nommée Honorary Royal Academician par la Royal Academy of Arts de Londres.
Ses oeuvres sont représentées au sein de musées et de collections publiques de renom aux États-Unis et en Europe, à l’instar du Kupferstichkabinett du Kunstmuseum Basel, du Solomon R. Guggenheim Museum à New York, du Museum of Modern Art à New York, du Metropolitan Museum of Art à New York, de la Tate Gallery à Londres, du Museo Nazionale delle Arti del XXI secolo (MAXXI) à Rome et de la Sammlung der Deutschen Bank à Francfort-sur-le-Main.
L’artiste vit et travaille à New York.

Le catalogue

Dans le cadre de l’exposition, un catalogue abondamment illustré avec des contributions de l’artiste, d’Anita Haldeman, Aria Dean et Maurice Berger a paru chez JPR Editions (ISBN 978-3-03764-558-1).

Horaires

MA 10H00–18H00
ME 10H00–20H00
JE–DI 10H00–18H00

Entrée libre dans la collection et les expositions temporaires:
mar, mer, jeu et ven de 17h, ainsi que le 1er dimanche du mois.
En règle générale, l’entrée libre n’est pas valable pour les grandes expositions temporaires. 

Attention le tram 2 ne s’arrête pas devant le musée, il faut descendre à l’arrêt Bankverein

Bruce Conner – Light out of Darkness

Jusqu’au 28 novembre 2021, au musée Tinguely de Bâle
C’est la lumière des ténèbres, de la pure sidération, devant la beauté de ces images si dévastatrices du monde. Il vous faut prendre votre temps pour regarder les films expérimentaux de Bruce Conner.

L’exposition Light out of Darkness fait référence à un projet d’exposition personnelle et éponyme, destiné à l’origine au University Art Museum de Berkeley dans le milieu des années 1980, mais non réalisé. Une des raisons notoires de cet échec est que Conner refusait tout compromis avec les institutions dictant elles-mêmes leurs règles à l’art et aux artistes.
« La lumière des ténèbres » souligne le caractère expérimental de son œuvre cinématographique qui, dans les premières réalisations notamment, questionne avec fulgurance les possibilités perceptives. En tant que dualité symbolique, la lumière et l’obscurité illustrent la pensée de l’artiste, ses antagonismes, ses métaphores, ses mysticismes.

CROSSROADS (1976)

Bruce Conner (1933-2008) est connu à la fois pour son approche critique, et légendaire, du monde de l’art que comme l’inventeur du clip vidéo. Il est l’un des artistes les plus marquants du XXe siècle, un artiste parmi les artistes. L’exposition «Bruce Conner. Light out of Darkness» présente au Musée Tinguely du 5 mai au 28 novembre montre son travail cinématographique expérimental à travers une sélection représentative de neuf films, dont CROSSROADS (1976) : cette étude de 36 minutes, qui rassemble des séquences des premiers essais nucléaires sous-marins menés par les États-Unis en 1946 près de l’atoll de Bikini, dit l’horreur et la sublimité de cet événement apocalyptique.

Ses œuvres, réalisées avec les médias les plus divers, sont radicales et multiples, d’une beauté envoûtante et d’une noirceur terrifiante, politiques, subversives, toute en force et sensualité, immédiatement saisissantes. Nombre de ses premiers collages, assemblages et installations – conçus à partir de matériaux de fortune comme le nylon, la cire ou des textiles usés – ne sont que très rarement visibles du fait de leur fragilité. La posture de Conner est anarchiste, elle mêle l’ironie mordante et l’engagement sans limite, aussi loin que possible du marché de l’art.

MEA CULPA

MEA CULPA est un chef-d’œuvre d’échantillonnage visuel.

se concentre ici sur le recyclage des animations graphiques historiques des films éducatifs sur la physique. Par-dessus la « basse continue » répétitive des représentations du courant électrique et des effets thermodynamiques, il illustre le rythme pulsé du morceau musical en polarisant le noir et le blanc, les mouvements de propagation à travers des points et des corps en collision ou des assauts visuels stroboscopiques. L’idée d’une coopération est venue de David Byrne, qui était fasciné par les films de Conner depuis l’époque de ses études. Pour l’album My Life in the Bush of Ghosts, né de la collaboration expérimentale entre Byrne et Brian Eno, les deux musiciens ont utilisé exclusivement des échantillons de voix trouvés.


Bien que, pour des raisons de droits d’auteur, les films de Conner aient rarement été diffusés sur MTV, ses techniques cinématographiques – plan sur plan, flash frames, scintillement, montage inversé, coupe rapide, expositions doubles et multiples, utilisation d’images trouvées –, ont façonné le cinéma expérimental de son époque puis, plus tard, la première phase des vidéos musicales de MTV.

« Baker

« Operation Crossroads », tel est le nom donné par l’armée américaine à une série d’essais nucléaires effectués au cours de l’été 1946 sur l’atoll de Bikini, dans le Pacifique. Conner a réussi à obtenir les prises de vues – mises sous scellés aux National Archives – de la seconde explosion dite « Baker ». L’objectif de « Baker » était d’étudier l’impact d’une explosion sous-marine sur des navires à proximité immédiate, ce pour quoi ont été utilisés principalement des navires de guerre japonais capturés. Pour filmer la déflagration sous tous les angles, l’armée américaine a mis en place, sur terre, en mer et dans les airs, des centaines de caméras, dont certaines à haute vitesse.

Bruce Conner, CROSSROADS, 1976 (Filmstill)

Les images de «Baker » illustrent non seulement l’horreur atomique, mais aussi les phénomènes inédits, et hautement esthétiques, d’une puissance physique élémentaire et visualisable : symétrie du nuage atomique en forme de champignon couronné par un écran de vapeur chaude et de matériaux projetés à des kilomètres de hauteur ; axe cylindrique clairement délimité de la colonne d’eau avec la texture poudreuse des éjections horizontales ; anneaux d’énergies cinétiques se propageant horizontalement et verticalement, excentrés, à des vitesses soniques et supersoniques. Dans ces images, Conner puise le sublime et l’exubérance visuelle avec lesquels il peut créer – sans davantage de montage – un film dramatique tout en répétition et juxtaposition. Il trouve là également des représentations iconiques et médiatiques singulières qui marquent aujourd’hui encore l’image des explosions atomiques. Pour la première partie, Patrick Gleeson a enregistré une bande-son atmosphérique mixée pour évoquer une présence indirecte. Terry Riley a composé le son électronique hypnotique de la deuxième partie du film.

A MOVIE

En 1958, avec un budget de production de trois dollars, Conner réalise son premier film à partir d’images reprises de journaux télévisés, films de série B ou amorces de pellicules. Avec cette expérience cinématographique radicale, il déconstruit et reconstruit les techniques de la réalisation et du récit, tout en explorant les limites de la perception rétinienne par des effets de sur-stimulation, d’éblouissement, de fondu et d’images rémanentes. A MOVIE concatène des séquences spectaculaires, exacerbées, en une suite d’actions nouvelle et ouverte, sans début ni fin, et à lecture multiple, qui donne ainsi un
« méta film ». Le compte à rebours – interrompu par l’apparition incongrue d’une femme presque nue retirant son bas – devient partie intégrante de l’action. Le titre A MOVIE revient sans cesse, tout comme « THE END » ou le nom de l’auteur « BRUCE CONNER ».

                         Bruce Conner, A MOVIE, 1958 (Filmstill)
                               16mm, b/w, sound, 12 min.

Les scènes de poursuite avec des cavaliers et des chariots bâchés de western enchaînent pour mener à une gigantesque course d’éléphants, de locomotives à vapeur et de voitures, puis à une série d’accidents et de catastrophes. Par un périscope, le capitaine d’un sous-marin aperçoit une pin-up et lance sur elle une torpille qui déclenche une explosion atomique ; d’énormes vagues font alors chavirer les bateaux et chuter des skieurs nautiques. Le jeu de Conner est à la fois cocasse et tragique. Il montre à quel point la chorégraphie visuelle médiatique peut manipuler les contenus et quel impact la musique a sur la perception. Exemple : l’image des soldats tués sous-tendue par un fortissimo héroïque des Pins de Rome d’Ottorino Respighi.

Pour la toute première fois, A MOVIE peut être vu en projection arrière dans un cube de 3×3 mètres, ce qui répond du reste au souhait, jadis irréalisable, de l’artiste d’obtenir une présence aussi forte que possible. La boucle n’a ni début ni fin. Dans l’imagination de Conner, le film aurait dû être augmenté par des interventions acoustiques alternant sans cesse et donnant à vivre chaque fois une expérience nouvelle. Les œuvres de Conner ont de caractéristique qu’elles peuvent être inlassablement revues et relues.

Informations pratique

Le Musée Tinguely vous accueille aux horaires normaux en appliquant son protocole sanitaire.
Paul Sacher-Anlage 2
Postfach 3255
CH-4002 Basel
Musée: +41 61 681 93 20
Bistro: +41 61 688 94 58

Heures d’ouverture
Du mardi au dimanche 11 – 18h
Fermé le lundi

Horaires Spéciaux / Coronavirus

Georges Senga, photographe congolais

Nom : Senga Assani
Prénom : Georges
Profession : photographe
Signe particulier : pensionnaire de la Villa Médicis 2020/2021

 

                      Photo © Aleksandar Topalovic

Si la Covid-19, croit qu’elle va limiter ma curiosité elle est se trompe, allègrement. Je vais aller au-delà des frontières et faire un périple assez
incroyable pour suivre le photographe Georges Senga (site), de son Congo natal, à travers tous ses ateliers, résidences et expositions, en Allemagne, aux Pays Bas, en Belgique, aux US, jusqu’à sa sélection comme pensionnaire de la Villa Medicis, cuvée 2020/2021. Georges Senga(vidéo) est né en 1983 à Lubumbashi. Le travail de cet artiste oscille entre réalité documentaire, traces post-coloniales, tradition orale et histoire personnelle

Entretien au-delà des frontières

Comment es-tu venu à la photo ?
 Je suis devenue photographe fin 2007, et ma carrière s’est lancée avec  la première édition de la biennale de Lubumbashi, curator par Marie-Françoise Plissart

Tes études ?
Science du langage, langues et affaires à l’Université de Lubumbashi en 2009

Tes parents étaient ils photographe, t’ont-ils encouragé ?
Mes parents n’étaient pas photographe, mais dans notre société quand les parents t’envoient à l’université, c’est pour être un cadre dans une société sur place. Et quand tu te lances dans une carrière d’artistes ce n’est pas  facile

Comment as-tu été sélectionné à la villa Medicis ?
J’ai postulé 3 fois à la villa Medicis avec 3 projets différents, c’est le troisième projet qui a été sélectionné.

En quoi consiste ton travail là-bas :
Le projet  s’intitule
« Comment un petit chasseur noir Païen devient prêtre Catholique »,
projet né à la suite de sa rencontre en 2017 avec la fille d’un prêtre catholique, qui par sa fonction, n’aurait pas dû avoir d’enfants. Au cours de cette rencontre, la fille du prêtre dévoile un sac contenant plusieurs diapositives non datées, appartenant au père décédé en 1989. Le projet que je  retrace est le parcours de ce prêtre catholique du nom de Bonaventure Salumu, depuis son village jusqu’à son séjour en Europe.

Y es-tu seul, en famille ?
Je suis en famille avec ma femme et mon fils


Pour combien de temps ?
Depuis septembre 2020 jusqu’en août 2021

Dois-tu produire un « chef d’œuvre » ?
Je dois produire un livre, alliant texte et photographies

Comment définirais-tu ta pratique?
Je développe mon travail photographique autour de l’histoire et des histoires qui se révèlent dans « la mémoire, l’identité et l’héritage », éclairant nos actes et le présent. Trois de mes projets explorent ainsi la mémoire, à la quête des résonances que les hommes, leurs faits et objets laissent, et la résilience de la mémoire dans son pays.

Fais-tu des essais, avec des modèles, des familiers ?
Je travaille sur des portraits parfois dans ma démarche artistique, dont est fait le récit

Quand travailles-tu ?
 Cela dépend, mais je travaille beaucoup la journée

A quel endroit ? maison, atelier, nature ?
A l’atelier

As-tu des horaires définis ?
Non

Un sujet de prédilection ?
Non

Ta technique, argentique numérique autre ?…
Numérique

L’ambiance, musique, silence, intérieur, extérieur ?
J’aime bien travailler avec la musique, mais cela dépend des jours

Tes maîtres ?
Marie-françoise Plissart, elle s’est intéressée aux rapports qui peuvent s’installer entre un texte et une image. C’est aussi ma démarche.

Tes références photographiques, littéraires ?
Le couple Becher, ce couple de photographes allemands qui depuis les années 50 photographient des bâtiments industriels comme des puits de mine, des châteaux d’eau, des usines ou des silos à grains.

Qu’est  devenu ton travail pendant le confinement ?
Mon travail était aussi affecté, car beaucoup d’expositions ont été annulées et repoussées, mais j’ai travaillé beaucoup sur l’édition des mes projets

Le confinement est-il une source de création et de recherches plastiques ?
Pour moi, non

Que cherches-tu à exprimer dans ton travail, qui ne serait pas possible avec des mots ?
La photographie est un moyen plus personnel de parler de ce que j’estime important à partager avec le monde. Un rappel aux sources sur le plan général

Quand as-tu décidé d’exposer ton travail, cela consistait en quoi ?
En 2008,  à la Biennale de Lubumbashi, puis en 2010, 2013, 2015 et 2019, Les travaux personnels dans des expositions collectives.

D’autres expositions, peux-tu développer ?
Asbl Dialogues en 2013, Biennale de Bamako en 2011, 2015 et 2017,

– « Une vie après la mort » sur Patrice Lumumba a été exposé aux Dialogues de la Galerie d’art contemporain du Musée national de Lubumbashi en 2013, à la Biennale de Kampala, à l’ADDIS PHOTOFEST en 2014, au Centre culturel BRASS à Bruxelles, et à la Biennale de Bamako (où il obtient le Leon African Award en 2015). Cette série traite du passage du temps et de l’intemporalité de ce que Lumumba signifie.

– De septembre 2015 à février 2017 en résidence à la Solitude Academy de Stuttgart en Allemagne, j’ai réalisé une autre nouvelle série

                              photo Georges Senga

« Cette maison n’est pas à vendre et à vendre »
entre Lubumbashi en RD Congo et Sao Paolo au Brésil. Cette série exploite la commune KATUBA à Lubumbashi une ville du sud de la RD Congo. Katuba divisée par quartiers (Katuba 1er, deux et trois) était l’une des municipalités créées grâce à un prêt d’une société FUND ADVANCED à l’époque coloniale dans les années 1945.
– Addis Fotofest en 2014 et 2018, – Kampala Biennale en 2014,
– Cap Town Art Fair en 2018, – Sesci_video Brazil en 2019, – Contour Biennale en 2019, – Kigali PhotoFest en 2019, – Fondation A en 2019, – Wiels centre d’art en 2019, – Galerie Imane Farès en 2019,-  Cargo in Context en 2019, -FOMU en 2019, – centre culturel Jean Cocteau en 2020, Nations Unies, États-Unis en 2020                             

Empreintes perdues
Seule série en noir et blanc datant de 2009, les photographies intitulées Empreintes, tout en retenue, dégagent une émotion palpable. Georges Senga y montre des objets usés, cassés, abandonnés, qui forment autant de traces des humains qui les ont manipulés. Ainsi ce bidon en plastique transformé en masque et frappé d’un Made in China sans équivoque, comme un témoin du passé de l’Afrique et sans doute aussi de son avenir.

Un jour de 2012, le photographe croise des enfants qui paradent en habits militaires de fortune. Equipés d’armes bricolées de fil et de carton, ils rappellent à l’artiste les enfants soldats bien réels, entrés en héros à la Katuba en 1997, à la fin du règne de Mobutu. « Cela faisait peur, un enfant de 12 ans avec une Kalachnikov », se souvient Georges Senga. Souvent traumatisés, ces enfants garderont des séquelles à jamais. L’image rejoint ici les mots, car l’artiste confronte ces images d’enfants soldats factices au récit terrible d’un enfant-guerrier bien réel.

Fais-tu des selfies des autoportraits ?
Parfois, juste sur le plan personnel

Que penses-tu de cette mode des selfies ?
Je pense que c’est un moyen plus tranquille, qui ne crée pas une barrière entre le sujet et l’objet. Car devant une camera, la plupart des personnes ne se sentent pas confortable.

Les artistes doivent-ils être le reflet des sentiments, de la vision de leur époque ?
Je pense que l’artiste est libre d’interpréter les visions de chaque époque, je ne vois pas une limitation dans le temps.

Quelle est ta plus belle rencontre, en photographie, en art ?
La photographie, elle même pour moi est une belle rencontre, car je ne m’échappe pas, mais je sens très confortable de m’exprimer avec la photographie.

Une définition de la bonne photo
Le monde en soit est une photo, nous ne faisons que capter des bouts de ce grand paysage. Quand ce bout exprime quelque chose, qu’il nous est permis de comprendre. Pour moi c’est une bonne photo.

                                       Villa Medicis, photo Georges Senga

                                      
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Exposition des 16 pensionnaires 2021

Du 8 juin au 8 août 2021, la Fondation Louis Roederer, Mécène engagé depuis 10 ans en faveur de la création contemporaine, apporte son soutien à la mission d’accueil des pensionnaires et des résidents de l’Académie de France à Rome.
Elle accompagne ainsi l’exposition collective des 16 pensionnaires 2020-2021 de la Villa Médicis. L’exposition des pensionnaires de l’Académie de France à Rome – Villa Médicis réunit, sous le commissariat de Laura Cherubini, les réalisations des seize artistes et chercheurs résidents. Résolument pluridisciplinaire, l’exposition met en lumière l’articulation entre créations individuelles et projet collectif et tisse des liens inattendus entre les disciplines. Dans un esprit de réflexion sur l’acte de création, cette manifestation reflète tout à la fois les préoccupations contemporaines partagées par les pensionnaires et restitue un moment singulier dans un parcours d’artiste : la résidence comme laboratoire d’expérimentation collective.

photos courtoisie Georges Senga