Au musée du Louvre, la nature morte est bien vivante

Louise Moillon, coupe de cerises, prunes et melon, huile sur bois  vers 1633 département des Peintures
© RMN – Grand Palais (Musée du Louvre) / Michel Urtado

Jusqu'au 23 janvier, le musée du Louvre met en lumière les chefs-d'œuvre de la nature morte dans son exposition événement « Les Choses » HALL NAPOLÉON
Commissaire :
Laurence Bertrand Dorléac,
historienne de l'art
Une histoire de la nature morte depuis la Préhistoire
( vidéo de la conférence - 1 h 07)
Avec la collaboration de Thibault Boulvin et Dimitri Salmon
Vidéo du scribe accroupi (18 mn)
avec Laurence Bertrand Dorléac

Les Choses

Une histoire de la nature morte

On photographie des choses pour se les chasser de l’esprit

Franz Kafka
Une vision nouvelle

                                                   André Serrano 1984

La nature morte retrouve enfin les honneurs d’une grande exposition parisienne, 70 ans après la dernière rétrospective à l’Orangerie en 1952.
Conçue par Laurence Bertrand Dorléac, cette exposition d’auteure propose une vision nouvelle de ce genre longtemps considéré comme mineur et dont l’intitulé français, né tardivement au XVIIe siècle, n’a jamais satisfait personne. L’expression « nature morte » rend mal compte d’un genre très vivant, qui est, au fond, un agencement de choses en un certain ordre assemblées par l’artiste.

Jean Siméon Chardin, Pipes et vases à boire dit la Tabagie, vers 1737

Carte blanche

Cette carte blanche réunit près de 170 œuvres, prêtées par plus de 70 institutions et collections privées parmi les plus prestigieuses. Dans une promenade en quinze séquences chronologiques et thématiques, les œuvres, représentant tous les médias (de la peinture à la vidéo, en passant par la sculpture, la photographie et le cinéma), dialoguent entre elles, au-delà du temps et de la géographie, jusqu’à l’époque contemporaine. Comme un prélude à l’exposition, l’œuvre monumentale de l’artiste camerounais
Barthélémy Toguo,

Le Pilier des migrants disparus
Barthélémy Toguo, le Pilier des Migrants disparus

se déploie sous la Pyramide. Les grands ballots colorés en tissus africains de Barthélémy Toguo sont magnifiques mais sa longue cordée de bagages improvisés avec des matériaux de fortune nous invite aussi à réfléchir à l’exil. Ils nous rappellent à leur façon ce que devient au quotidien notre histoire contemporaine traversée de tous les déplacements forcés des réfugiés du monde qui tentent le voyage vers un monde habitable au péril de leur vie. Souvenir plus lointain de la traite et de l’esclavage ? Ils sont en tout cas les signes de toutes les trajectoires périlleuses d’hommes, de femmes et d’enfants qui fuient les guerres, la famine, la misère et les catastrophes écologiques.
La représentation des choses, dont on retrouve des témoignages dès la Préhistoire, offre une formidable plongée dans l’histoire. Les artistes ont, en effet, été les premiers à prendre les choses au sérieux. Ils ont reconnu leur présence, les ont rendues vivantes et intéressantes en exaltant leur forme, leur signification, leur pouvoir, leur charme, ont saisi leur faculté à donner forme à nos peurs, à nos croyances, à nos doutes, à nos rêves, à nos désirs, à nos folies.

                                             Arcimboldo, l’automne, 1573

L’exposition entend rétablir un dialogue entre ce genre perçu comme suranné et le public : la nature morte est l’une des évocations artistiques puissantes de la vie sensible. Parce que les êtres humains vivent avec les choses et y sont attachés, parce que les choses occupent une place déterminante dans les vies et les imaginaires, la nature morte dit beaucoup de nous et a beaucoup à nous dire. Elle raconte notre relation avec les biens matériels, qui ne sont pas réductibles à leur matérialité mais qui sont chargés de signification.

Italie, Faenza ou Pesaro, Chauffe-mains en forme de livre fermé, 1490/1510

La nature morte de l’Antiquité au XXe siècle

La dernière grande manifestation autour de la nature morte, La nature morte de l’Antiquité au XXe siècle, fut organisée en 1952 à Paris par Charles Sterling, conservateur au Louvre. La présente exposition rend hommage à ce grand historien de l’art ; il ne s’agit pourtant pas d’un remake, mais de repartir de nos savoirs et de notre mentalité contemporaine. Le point de vue intègre tout ce qui a renouvelé les techniques de représentation et les perspectives, tant en histoire de l’art ancien et contemporain, qu’en littérature, poésie, philosophie, archéologie, anthropologie, science ou écologie.

Esther Ferrer, Europortrait 2002 photographie
L’éternel dialogue entre les artistes du présent et du passé

 Elargissant les frontières chronologiques et géographiques, l’exposition ouvre des fenêtres sur d’autres cultures qui ont représenté les choses en majesté, y compris quand elles n’étaient plus montrées pour elles-mêmes dans l’Occident chrétien – du VIe au XVIe siècle. Elle revisite le genre de la nature morte, dans la perspective de l’éternel dialogue entre les artistes du présent et ceux du passé, dans un renouvellement permanent du regard : des haches préhistoriques au readymade de Duchamp, en passant par les agencements étonnants d’Arcimboldo, de Clara Peeters, Louise Moillon, Zurbarán, Chardin, Anne Vallayer-Coster, Manet, De Chirico, Miró, Nan Goldin, Ron Mueck et bien d’autres.

Ron Mueck

Les choses n’ont pas de signification : elles ont une
existence.

Fernando Pessoa
 Le code et la liberté   

 La représentation des choses par les artistes s’imprègne d’une grande variété de pratiques et d’idées, de croyances et de sentiments, qui inspirent les mouvements de la société autant qu’elles ne s’en font l’écho. À l’intérieur d’un code reconnu voire rebattu, la simplicité des choses invite les artistes à des libertés formelles inouïes.

                                                      Luis Melendez

Défis et Droits

Le genre de la nature morte doit également être reconsidéré à la faveur de l’attachement contemporain aux choses ainsi qu’aux relations nouvelles qui s’établissent entre le vivant et le non-vivant. Cette exposition contient forcément les préoccupations d’aujourd’hui : les défis écologiques, les nouveaux droits des animaux et des choses (des forêts en particulier), tandis que certaines persistances, comme celle du thème de la Vanité, révèlent des vérités anthropologiques profondes.

                                         Andreï Tarkovski, Stalker 1979

La structure

La structure diachronique choisie pour le parcours de l’exposition a l’avantage de mettre en évidence les tournants dans l’histoire des représentations. Elle ménage aussi les rapprochements indispensables entre les œuvres d’époques différentes. Trois périodes sont particulièrement propices à l’abondance des choses représentées : l’Antiquité, les XVIe-XVIIe siècles et les XXe-XXIe siècles.

Mon coup de coeur ci-dessous

Pendant que nous parlons, le temps jaloux s’enfuit.
Cueille le jour, et ne crois pas au lendemain.

Horace

                    Qian Zuan, dans le style des Oeillets 1314, encre sur soie

Informations pratiques

Horaires d’ouverture
de 9 h à 18 h, sauf le mardi.
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h45
Réservation d’un créneau horaire recommandée
en ligne sur louvre.fr
y compris pour les bénéficiaires de la gratuité.
Gratuit pour les moins de 26 ans citoyens de
l’Union européenne.

Accès
Métro 1 ou bus 72 arrêt Louvre Rivoli

DIALOGUE MONET – MITCHELL

A la Fondation Vuitton jusqu’au 27 février 2023

Commissaire générale de l’exposition
Suzanne Pagé, Directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton, Paris
Co-commissaires
Marianne Mathieu, directrice scientifique du Musée Marmottan Monet,
Angeline Scherf, conservatrice à la Fondation Louis Vuitton
assistée de Cordélia de Brosses, chargée de recherches
et Claudia Buizza, assistante de conservation
L’exposition « Monet - Mitchell » est organisée dans le cadre d’un partenariat scientifique avec le Musée Marmottan Monet.
L’exposition « Rétrospective Joan Mitchell » est co-organisée par le San Francisco Museum of Modern Art (SFMOMA) et le Baltimore Museum of Art (BMA) avec la Fondation Louis Vuitton.

C’est un grand privilège de participer à cette nouvelle vision de Claude Monet et de Joan Mitchell, artiste à laquelle la Fondation accorde une importance toute particulière au sein même de sa collection. La puissance et le lyrisme de leur peinture se font écho et soulignent ce qui les rapproche profondément : un lien intime à la nature, porteur d’une réelle force régénératrice.

Bernard Arnault
Président de la Fondation Louis Vuitton
(extrait)

L’exposition « Monet-Mitchell » s’inscrit dans la ligne d’une programmation résolue de la Fondation liant la modernité historique à un engagement contemporain, à travers filiations ou correspondances d’artistes ou de mouvements artistiques.
Aujourd’hui il s’agit d’une stratégie plus sophistiquée et avant tout sensible, de l’ordre de la consonance, dans la mise en regard d’oeuvres de deux grandes figures : Joan Mitchell, inscrite dans la modernité de l’expressionnisme abstrait américain, enfin reconnue comme l’une des grandes voix du XXe siècle et Claude Monet, icône française de l’impressionnisme au moment où, réhabilité à travers ses oeuvres tardives, il est redécouvert et salué comme pionnier de la modernité américaine des années 50.
Suzanne Pagé

Parcours de l’exposition

Deux générations différentes

De générations différentes – Joan Mitchell étant née un an avant la mort de Claude Monet -, leurs peintures furent d’abord rapprochées dans le cadre de l’émergence de l’expressionnisme abstrait américain dans les années 1950. Monet est alors redécouvert comme précurseur de la modernité américaine et son oeuvre tardive réhabilitée après l’accueil critique reçu en France par les Nymphéas de l’Orangerie en 1927. L’association des deux artistes est confortée par l’installation de Mitchell à Vétheuil en 1968, dans une demeure surplombant la maison où vécut Monet de 1878 à 1881.

Prenant appui notamment sur la déclaration de Joan Mitchell au critique américain Irving Sandler en 1957,

« J’aime le Monet de la fin, mais pas celui des débuts »,

Joan Mitchell
En regard
REFLETS ET TRANSPARENCES, « L’HEURE DES BLEUS »

Les reflets constituent une thématique essentielle chez Monet. En témoignent ici les peintures inspirées par le bassin qu’il crée dans son jardin : depuis Nymphéas avec reflets de hautes herbes (1897) jusqu’à Saule pleureur et bassin aux nymphéas (1916-1919) et Agapanthes (1916-1919), études pour les Grandes Décorations (1914-1926). À travers de nouveaux formats et d’innombrables variations où fusionnent les mondes aquatiques, célestes et végétaux, Monet confine ici à une forme d’abstraction. « L’azur aérien captif de l’azur liquide » (Paul Claudel).

                       Claude Monet, Le bassin aux nymphéas, 1917-1919

Élément récurrent dans la peinture de Mitchell, l’eau, par le jeu de ses mémoires croisées, est celle du lac Michigan de son enfance, comme de la Hudson et de la East River de sa maturité à New York et celle de la Seine à Vétheuil. En 1948, elle partage sa fascination avec Barney Rosseta:

Joan Mitchell, Quatuor II for Betsy Jolas, 1976

«Je découvre que l’on peut même trouver une raison de vivre dans les profondeurs, les reflets dans l’eau »

 On les retrouve ainsi dans Sans titre (1955) et Quatuor II for Betsy Jolas (1976), celui-ci inspiré par la musique de cette compositrice et par le paysage que Mitchell voit depuis sa terrasse de Vétheuil à l’« heure des bleus», entre la nuit et le jour.

SENSATION ET FEELING

À partir du jardin que Monet crée comme motif et du paysage élu par Mitchell à Vétheuil, les deux artistes cherchent à fixer une « sensation » ou un « feeling », soit le souvenir de l’émotion provoquée au contact de la nature et transformée par la mémoire. C’est dans leur quête incessante autour de la couleur que les correspondances entre les deux artistes sont les plus fortes.

                                                   Un jardin pour Audrey (1975)

Un jardin pour Audrey (1975) dans un format monumental, un vocabulaire clairement abstrait et une gamme chromatique où dominent les verts, jaunes et orange sur fond blanc, fait écho aux Hémérocalles (1914-1917) et aux Coins du bassin (1917-1919) de Monet.

                             Claude Monet Les Hémérocalles, 1914-1917

Beauvais (1986), réalisé à l’occasion de la visite de l’artiste à l’exposition des Matisse venus de Russie,

                                                Joan Mitchell, Beauvais1986
rejoint la liberté de touche des Iris Jaunes de Monet (1914-1917).

                                        Iris Jaunes de Monet (1914-1917)  
                                                           Joan Mitchell, Row Row (1982)
La gamme des bleus, verts et mauves de Row Row (1982) dialogue avec celle des Nymphéas avec rameaux de saule (1916-1919) et des Nymphéas (1916-1919)

                                       Claude Monet, Nymphéas (1916-1919)

dont la sérialité conduit progressivement à l’effacement du motif au service d’une planéité à la limite de l’abstraction.
Contrastant avec une composante de mauves et de violets, les jaunes dominent dans Two Pianos (1980),

                                      Joan Mitchell Two Pianos, 1980
dont la dynamique des touches renvoie à une composition musicale éponyme de Gisèle Barreau. Dans une gamme comparable de rouge et de jaune, La Maison de l’artiste vue du jardin aux roses (1922-1924) de Monet atteste de la liberté expressive de la couleur et du geste. Une même dissolution du sujet est notable dans une série de tableaux de chevalet : Le Pont japonais (1918-1924) et Le Jardin à Giverny (1922-1926).

Claude Monet les saules pleureurs

PRÉSENCE DE LA POÉSIE

La poésie accompagne en permanence Joan Mitchell. Fille de la poète Marion Strobel, elle est proche d’écrivains et de poètes américains : James Schuyler, Frank O’Hara, John Ashbery… et, en France, de Samuel Beckett et Jacques Dupin. Sans titre, peint vers 1970, faisait partie de la collection de ce dernier, dont quatre poèmes ont inspiré les compositions au pastel réalisées par Joan Mitchell aux alentours de 1975 et présentées dans cette salle.

                                     Joan Mitchell, Sans titre, peint vers 1970
Claude Monet côtoie les écrivains de son temps, comme Zola, Maupassant, Mallarmé et Valéry. Les poètes sont d’ailleurs parmi les premiers, et longtemps les seuls, à célébrer l’oeuvre tardive de Monet, à laquelle appartient Iris (1924-1925).

                                                                 Claude Monet, 1924/25
En fin de section, Mon Paysage (1967), à travers la synthèse et l’économie de son titre, résume à lui seul l’engagement fondamental de Mitchell :

« Je peins à partir de paysages mémorisés que j’emporte avec moi – et de sensations mémorisées… ».

« UNE ONDE SANS HORIZON ET SANS RIVAGE » (MONET)

L’espace laissé en réserve domine dans les Nymphéas de Monet (1917-1919) et River de Mitchell (1989), mis en dialogue : le blanc en apprêt ou en rajouts s’associe à une gamme de vert, bleu, jaune et mauve, éclairant les compositions dans l’ouverture et l’extension de l’espace.

                                                         Joan Mitchell, River, 1989
Monet retranscrit la fluidité de l’eau par des touches courtes proches d’une écriture calligraphique que l’on retrouve avec une autre intensité dans la gestualité expressive du diptyque de Mitchell.

                                                    Claude Monet Nymphéas, 1917-1919

Le parcours se clôt sur deux grands ensembles : d’une part,


 L’Agapanthe de Monet (1915-1926), triptyque monumental qui a joué un rôle décisif pour la reconnaissance de l’artiste aux États-Unis, exposé ici pour la première fois dans son intégralité à Paris ; d’autre part, dix tableaux issus du cycle de La Grande Vallée de Joan Mitchell (1983-1984). Tous deux correspondent à des environnements où la dissolution du sujet dans la couleur et l’affranchissement des limites spatiales créent un espace immersif pour le spectateur.

                                     Joan Mitchell, la Grande vallée
La gamme colorée privilégie les mauves, violets, bleus, verts et jaunes ; chez Monet l’application de frottis monochromes en atténue l’éclat, induisant une certaine contemplation. Chez Mitchell, les couleurs sont fortes et les touches énergiques, faisant de cette oeuvre, à l’origine endeuillée, un éclatant hymne à la vie.

Informations pratiques

Réservations
Sur le site : www.fondationlouisvuitton.fr
Horaires d’ouverture
(hors vacances scolaires)
Lundi, mercredi et jeudi de 11h à 20h
Vendredi de 11h à 21h
Nocturne le 1er vendredi du mois jusqu’à 23h
Samedi et dimanche de 10h à 20h
Fermeture le mardi
Horaires d’ouverture
(vacances scolaires)
Vacances de la Toussaint : Tous les jours de 10h à 20h
Vacances de Noël : Tous les jours de 10h à 20h
Vacances de Février : Tous les jours de 10h à 20h
Accès
Adresse : 8, avenue du Mahatma Gandhi,
Bois de Boulogne, 75116 Paris.
Métro : ligne 1, station Les Sablons,
sortie Fondation Louis Vuitton.
Navette de la Fondation : départ toutes les
20 minutes de la place Charles-de-Gaulle – Etoile, 44 avenue de Friedland 75008 Paris (Service réservé aux personnes munies d’un billet Fondation et d’un titre de transport – billet aller-retour de 2€ en vente sur www.fondationlouisvuitton.fr ou à bord)

Tapisseries de la Dame à la licorne

Le Moyen Âge est une époque aussi fascinante que méconnue. La littérature, le cinéma et les séries télévisées notamment ont contribué depuis quelques décennies à diffuser les clichés et idées reçues qui l’accompagnent dans l’inconscient populaire.

La nature est omniprésente dans l’art du Moyen Âge, comme elle l’est dans la vie des hommes et des femmes de cette époque, où une forte majorité  de la population vit à la campagne et où les villes abritent des jardins et même des portions de vignes et de champs. Pièces luxueuses ou plus modestes, objets religieux ou profanes, éléments du décor ou objets de la vie quotidienne, témoignent tous de l’art du Moyen Age.
C’est au musée de Cluny à Paris que je vous convie aujourd’hui.
Ce musée renferme des œuvres incontournables  dont je parlerai dans un autre billet.

Les chefs d’œuvre

En quelque sorte c’est la Joconde de ce musée, les Tapisseries à la Licorne

Avouons-le tout de suite, les licornes sont des animaux fantastiques. Mais au Moyen Âge, on croit dur comme fer à leur existence !

Comment en douter puisque des voyageurs, comme Marco Polo, racontent en avoir rencontré.
Et certains marchands ramènent même du Nord de l’Europe des cornes de licorne ! L’une d’elles, provenant du trésor de l’abbaye de Saint-Denis, est d’ailleurs conservée au musée de Cluny. En réalité, il s’agit d’une dent de narval, mais chut !

Elles sont au nombre de six

Le Toucher, le Goût, l’Odorat, l’Ouïe et la Vue… et une sixième pièce, avec une tente bleue et l’inscription mon seul désir : immédiatement reconnaissables, les tapisseries qui forment la tenture de la Dame à la licorne sont parmi les œuvres les plus célèbres des collections du musée de Cluny.

Ce sont des femmes sur des îles
une grande solitude féminine
une solitude qui a l’air enchanté

Yannick Haenel, A mon seul désir 2005

La composition

Le fond rouge et un même schéma de composition unissent les six tapisseries.

Sur un grand ovale bleu, la Dame, élégante, parée de bijoux et souvent assistée d’une demoiselle, se tient solennellement, entre un lion et une licorne porteurs de bannières, de capes ou d’écus à trois croissants. Ce groupe est encadré par des arbres de quatre essences : des chênes, des orangers, des pins et des houx. Le sol des six « îles » est planté de fleurs, et les fonds rouges sont parsemés de plantes à fleurs et d’animaux : lapins blancs, renardeaux, un lionceau, des agneaux, des oiseaux… mais aussi des singes ou une panthère.

Les armoiries


Les armoiries, de gueules (rouge) à la bande d’azur (bleu) chargée de trois croissants d’argent (blanc) ont permis d’identifier la famille qui a fait tisser ces pièces : les Le Viste, originaires de Lyon, mais possédant des terres en Bourgogne et des résidences parisiennes. L’identité du commanditaire reste l’objet de débats : ce serait soit Jean IV Le Viste, mort en 1500, soit son neveu Antoine, mort en 1532, deux personnages de l’époque des rois de France Charles VIII et Louis XII, pourvus de charges dans la haute administration du temps.


Les femmes et les animaux

Les modèles des femmes et des animaux à grande échelle ont été dessinés par le peintre Jean d’Ypres. Actif à Paris de 1489 à 1508, il est connu comme enlumineur au service de la reine Anne de Bretagne et comme auteur de modèles pour des vitraux ou pour des gravures illustrant des livres imprimés. Les plantes et les animaux ont pu être tissés à partir de modèles détenus dans les ateliers des liciers.
mais elles pourraient tout autant être l’œuvre des liciers parisiens. Le tissage est très soigné, voire virtuose, mais le lieu de production des tapisseries n’est pas connu. Elles peuvent provenir des métiers à tisser implantés aux Pays-Bas méridionaux, dans des villes comme Bruxelles ou Tournai, 
mais elles pourraient tout autant être l’œuvre des liciers parisiens.

Général

Un sentiment de paix et d’harmonie se dégage des six tapisseries. On y voit peu d’objets et d’accessoires, tandis que les vêtements et les bijoux sont décrits avec attention. Les végétaux et les animaux sont partout représentés, tantôt stylisés, tantôt inspirés par l’observation directe.

La tenture a été comprise de diverses manières, en particulier en fonction de l’interprétation que l’on peut faire de la sixième pièce. Comment comprendre l’inscription, comportant deux initiales, A et I encadrant l’expression mon seul désir ? Peut-être les prénoms d’Antoine Le Viste et de son épouse Jacqueline ? La Dame prend-elle ou remet-elle un collier dans le coffret tendu par la demoiselle ? Est-ce une allégorie des sens et d’un sixième sens, proche de l’âme et du cœur ? Peut-on faire une lecture courtoise de ces tapisseries, puisque la Dame est dans un jardin où nombre de plantes et d’animaux font allusion à la quête amoureuse ? Mon seul désir est-il une devise ? Quel sens donner au mot désir, dans un monde encore profondément chrétien, mais au seuil de la Renaissance ?

Et Parlerey des six sens,
Cinq dehors et ung dedans
qui est le cuer

Jean Gerson, 1402

Vidéo du musée de Cluny (20 mn)

Informations pratiques

MUSÉE DE CLUNY, MUSÉE NATIONAL DU MOYEN ÂGE
Entrée du musée par le 28 rue Du Sommerard, 75005 Paris

JOURS ET HEURES D’OUVERTURE
Le musée est ouvert tous les jours sauf le lundi
de 9h30 à 18h15.
Fermeture de la billetterie à 17h30.
Début de l’évacuation des salles à 17h45.

 

ST-ART 2022, 26e édition

Foire européenne d’art contemporain et de design

Parc des expositions, Strasbourg 

Du 25 au 27 novembre 2022

Un nouvel écrin pour ST-ART

Le 24 novembre 2022, ST-ART a  soufflé sa 26ème bougie. Après avoir fêté son quart de siècle, elle profite du plus beau des cadeaux : une implantation dans le
tout nouveau Parc des expositions de Strasbourg, au pied des rives de l’Aar. Une oeuvre en soi signée Kengo Kuma l’architecte japonais, gagnant du prestigieux
Global Award for Sustainable Architecture.

Les exposants ont unanimement apprécié ce nouvel écrin
« lumineux et aéré, aux espaces de circulation plus spacieux« .

BILAN
  • 55 exposants dont
  • 46 galeries
  • 14 galeries étrangères
  • 15 exposants du territoire alsacien
  • 25 exposants qui revenaient
  • 30 nouveaux exposants
  • Près de 250 artistes présentés
  • Plus de 600 oeuvres exposées
Des retours enthousiastes

Les exposants ont salué « une très bonne édition » et se sont montrés satisfaits de leur participation.

Une foire tremplin

ST-ART est synonyme de démarrage, de tremplin et c’est ce qui lui a valu sa réputation : c’est à Strasbourg que tout peut commencer, pour une galerie, un artiste ou une collection.

  • Le secteur First Call rassemblait cette année 30 nouvelles galeries, soit plus de la moitié des exposants. Une façon d’affirmer plus que jamais sa mission de foire précurseur.
    Une galerie nomade Yannick Kraemer, collectionneur presque compulsif,qui met en vente une partie de sa collection, dont une toile signée Combas affichée à 280 000 €.  La coiffure peut mener à la peinture, Yannick Kraemer a monté une chaîne de salons de coiffure à succès.

                                                     photo Robert Cahen

  • Le soutien et l’adhésion de la Ville de Strasbourg à ST-ART ont permis également d’appuyer cette position de foire tremplin en mettant en scène cette année des artistes récemment diplômés de la HEAR – Haute Ecole des Arts du Rhin de Strasbourg, et la Gedok Haus de Stuttgart, dont les structures célèbraient 70 ans de collaboration

                                Martina Geiger-Gerlach    photo elisabeth itti

  • L’édition 2022 initiait une collaboration inédite avec l’école CAMONDO et dévoilait son regard totalement innovant autour de l’Intelligence Artificielle.

Les événements de cette 26e édition

Une exploration des liens entre cinéma et photographie

ST-ART a souhaité, pour sa 26ème édition, croiser les pratiques artistiques et explorer les liens entre cinéma et photographie. Cette thématique a été portée par :

• l’association inédite avec « Strasbourg art photography » ou Mois de la photographie, qui avait lieu pour la 1ère fois au mois de novembre (et non au printemps) et dont la foire était la clôture.

                                                 Ryo Tomo – la séparation 2021 photo EI

• la présentation, au coeur de la foire, d’un projet d’exposition intitulée
« Cinéma et photographie, un lien si sensible » porté par Ryo Tomo, directeur du festival Strasbourg art photography.

                                                          Photo EI
Installation La Belle captive  – coup de coeur
Sur une proposition de Ryo Tomo, le couple d’artistes strasbourgeois Dool présente son installation

Conçue et réalisée par Dool (Diane Ottawa et Olivier Lelong), l’installation
« La belle captive » s’inspire de l’oeuvre de Magritte et du film d’Alain Robbe-Grillet. Il s’agit ici d’une installation à média mixtes, principalement composé de photographies numériques et de vidéo.

                                                            photo EI
La belle captive chez Magritte représente une mise en abîme dans laquelle il est possible de plonger, et nous donne à penser les liens qui existent entre différents niveaux de représentations dans la peinture, le roman, le cinéma et la photographie.

• une exposition vidéo avec l’invitation de Patricia Houg à l’artiste
Tim White-Sobieski.
Le projet, qui rend hommage à l’oeuvre En attendant Godot de Samuel Beckett, comprend une installation vidéo synchronisée à 4 canaux avec trame sonore
et musique de Henry Purcell et Giovanni Battista Pergolesi.
L’intrigue de la pièce implique deux personnages qui attendent quelqu’un qui ne vient jamais.

                                                                     photo EI
Waiting for Godot est une pièce absurde qui explore les thèmes de la philosophie existentialiste. Le vide et le caractère aléatoire de l’intrigue amènent le public à se demander si quelque chose va se produire et s’il y
a un sens quelconque dans la pièce – ou dans la vie.
Le film Waiting for the God transcende les frontières géographiques et ethniques et est de nature cosmopolite. Elle interpelle les coeurs et les esprits de tous parce qu’elle soulève les questions fondamentales de l’esprit humain :
Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? D’où venons-nous ?

• la création d’un secteur dédié aux galeries présentant des photographes contemporains ou historiques.

Hommage à Jean Greset

Jean, l’art brut et l’art singulier
Jean Greset, un fidèle acteur de ST-ART nous a quitté au mois d’avril 2022.
Sur une initiative de la Direction du salon et de son comité de sélection, porté par Georges- Michel Kahn et Rémy Bucciali, un hommage lui est rendu par la foire. C’était une référence majeure sur le territoire français en la matière.

Une oeuvre monumentale pour la Nef

 Une oeuvre monumentale, de l’artiste Angela Glajcar, vous accueillait dans la Nef du Parc des Expositions. Artiste exposée par la galerie Stream Art Gallery

                     – Stream Art Galery – Angela Glajcar  – Photo: lfdd

Une performance

Une performance de Simon Berger a été présentée par la Galerie Mazel le soir du vernissage. Au cours de cette performance, l’artiste a réalisé une oeuvre de 150 x 150 cm sur du verre. Briser du verre est généralement considéré comme une mauvaise action, plus souvent
comme un acte de vandalisme. Mais que diriez-vous si cette destruction pouvait en
fait se révéler d’une beauté éclatante ?
Cet artiste suisse nous montre comment nous pouvons briser le verre et trouver de nouvelles façons de percevoir des matériaux du quotidien.
Après trois ans de recherche et de tentatives, Simon Berger a découvert le moyen de fissurer le verre sans le briser, transformant ainsi des vitres ordinaires de ce matériau fragile en de remarquables portraits.

Les galeries exposant à ST-ART sont sélectionnées par un comité de sélection,
composé pour cette édition de :

REMY BUCCIALI

Officier des Arts et des Lettres.
Né en 1952 à Rueil-Malmaison, il étudie la photographie et
les arts plastiques à Paris et entre en 1972 à l’atelier RIGAL
à Fontenay aux Roses. Nommé taille-doucier en 1975, il
travaille jusqu’en 1976 sous la direction du Maître Gaston
Gerbault.
En 1977 il ouvre son propre atelier à Paris avant d’ouvrir
en 1983 un atelier à Colmar. Depuis lors, de nombreux
artistes internationaux sont édités dans son atelier. Editeur de gravures contemporaines depuis 1989 sous le label «
Editions Rémy Bucciali », il collabore avec de nombreuses galeries françaises et étrangères : Paris, Barcelone, Berlin, Copenhague, Cologne, Rotterdam, Stockholm, Düsseldorf.
Il participe également à de nombreuses foires internationales, telles que Art Paris, Art Elysées, ST-ART, Düsseldorf, Francfort, ART Karlsruhe, London Print Art Fair et AAF Bruxelles.

GEORGES-MICHEL KAHN

Après 20 ans dans une entreprise de prêt porter, et déjà collectionneur de l’abstraction des années 50/60 française et européenne, Georges-Michel Kahn a ouvert en 1997 une galerie à Strasbourg sur la place du Musée d’Art Moderne
et Contemporain. Après 7 ans à Strasbourg, il a ensuite ouvert un show room à Paris et depuis 2006 s’est installé à l’île de Ré.
La galerie édite tous les ans des multiples d’artistes et participe à l’édition de livres d’artistes.

Les 2 galeristes ont présenté ST’Art 2022 en l’absence de Patricia Houg, à la presse. ( les 2 photos Robert Cahen)

La SAAMS

La Société des Amis des Arts et des Musées de Strasbourg a fait éditer un livre pour marquer les 190 ans de la société.
Le 28 e prix Théophile Schuler a été remis par la main de son président Bertrand Alain Gillig à Hélène Thiennot à la foire ce samedi.
L’artiste est diplômée de l’Ecole Supérieure d’Art de Lorraine de Metz. Photographe et dessinatrice elle montre « Souches » dessin à l’encre noire,
des troncs d’arbres coupés, sa manière de montrer l’impact de l’homme sur la nature. La dotation est de 3000 €

Galeries alsaciennes

Valérie Cardi revient cette année avec une diversité d’artistes, aux médium différents, dont sur la photo, Bernard Latuner et Yves Bingert

 

                                                             photo EI

Withoutart Galerie, Marc Sun met l’accent sur les oeuvres de deux artistes taiwanais, Pan Hsinhua et Wu Ichien.
L’un et l’autre, à travers leurs peintures, touchent à la question de la mémoire collective et à la transmission entre les générations.

En parallèle à cela, WITHoutARTgalerie propose une vue d’ensemble des artistes de la galerie :

photo EI
La calligraphie contemporaine à travers les oeuvres de André Kneib, artiste ayant participé au renouveau de l’art de la calligraphie en Chine.

AEdaen propose Francesca Gariti

Photo EI

Jean Pierre Ritsch-Fisch

Le galeriste a passé la main à Richard Solti qui présente toujours  de l’art brut

                                                          Stéphane Spach photo EI

                                                                      photo EI

Beaucoup de galeries présentent des artistes venant d’Asie.
Le discours des artistes nous rappelle la pandémie qui leur a permis de se concentrer à leur domicile pour créer des oeuvres, tout en dénonçant la société de consommation.
Rendez-vous à l’année prochaine. Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez consulter l’excellent blog de la Fleur du dimanche

Raymond Stoppele, le vénitien

Nom : Stoppele
Prénom : Raymond
Profession : artiste peintre
spécialité : peinture, dessin, gravure
signe particulier : enseigne la lithographie à la Bottega del Tintoretto à
« la Serenissima », Venise
signe particulier 2 : porte le catogan

Dans le podcast ci-dessous en écoutant l’entretien de Raymond Stoppele avec Michel Forne. – Esquisse et dialogue autour d’une oeuvre.
Vous ferez plus ample connaissance avec Raymond et son drôle de travail ! écouter « le dit ne va pas sans dire »

Notre entretien

Comment es-tu venu à l’art ?


Je crois bien que depuis tout petit j’aimais dessiner. Ensuite, au collège, le cours d’Arts Plastiques était mon cours préféré et mon professeur de l’époque, Monsieur Olivier, m’avait parlé de l’École des Beaux-Arts et m’avait déjà fortement encouragé à y poursuivre de futures études.

Montagne sacrée

Depuis quand dessines-tu ?

Certainement comme la plupart des enfants, à partir du moment où j’ai pu tenir un crayon dans la main.

Tes parents ?

Des parents qui n’étaient pas du tout dans la culture dite artistique, mais qui m’ont toujours encouragé et surtout permis alors qu’ils n’avaient que très peu de moyens financiers, d’entrer en école d’art, alors que mes camarades entraient soit en apprentissage ou poursuivaient des études qui étaient souvent considérées comme plus sûres.

Pourquoi peins-tu ?

La peinture, comme le dessin sont pour moi indispensables pour ainsi dire quotidiennement. Je pense, sans toutefois en être sûr, que cette pratique me permet d’évacuer différents stress liés à notre vie, à notre entourage, à l’actualité… C’est une sorte de « méditation violente ». Des choses doivent sortir, ces moments (de peinture) ne sont jamais des moments paisibles, mais très intenses et donc ne peuvent jamais durer trop longtemps. Lorsque je travaille à une peinture, je dois souvent faire des pauses.


La gravure ?

En quatrième et cinquième année, aux Beaux-Arts, j’ai fréquenté l’atelier dit de gravure avec comme finalité, le Diplôme National des Beaux-Arts que j’ai obtenu en 1976.
Dans cet atelier j’ai pratiqué les différentes techniques de gravure. Les techniques de taille douce, le bois, la sérigraphie et surtout la lithographie qui est la technique que je pratique toujours et qui me convient le plus pour la liberté du geste qu’elle m’offre.


Comment définirais-tu ta peinture, gravure ?

Ni figurative, ni abstraite, certainement expressionniste.

Fais-tu des dessins/essais préparatoires ?

Cela m’arrive, mais je ne m’y tiens jamais. Je démarre avec une idée et ensuite je laisse aller…

Quand travailles-tu ?

Ayant l’atelier chez moi, je travaille quand le besoin s’en fait ressentir, sans horaires précis.

Un rite pour te mettre au travail ?

jamais sans ma cafetière préférée

Non, juste le besoin.

Ta technique huile etc …

J’aime depuis toujours le papier, tous les papiers. C’est donc mon principal support. Toutes mes peintures sont réalisées à la peinture acrylique. Avec ma façon de travailler, j’ai besoin d’une peinture qui sèche vite, donc surtout pas de peinture à l’huile.


Pour les dessins j’utilise le fusain accompagné parfois de pastels.


                               en avant fusain

L’ambiance, musique, silence, intérieur, extérieur ?

Quasiment toujours de la musique, de genres très variés selon l’humeur et toujours en intérieur.

Tes maîtres ?

Il y en a énormément, de toutes les époques depuis la grotte Chauvet jusqu’à nos jours. Trop nombreux pour les citer.

Références littéraires ?

J’en citerai un parmi beaucoup d’autres, « le livre de l’intranquillité » de Fernando Pessoa.

Qu’est devenu ton travail pendant le confinement ?

Étant habitué à passer beaucoup de temps chez moi dans l’atelier, j’ai continué à travailler sans beaucoup de changements et de façon régulière.

Que cherches-tu à exprimer dans ton travail, qui ne serait pas possible avec des mots ?

Justement, j’ai toujours eu du mal à exprimer mes ressentis avec des mots et donc, mes mots sont ces formes, ces couleurs, ces gestes qui recouvrent mes feuilles et que quiconque peut ensuite ou non, interpréter selon ses propres visions.

Quand as-tu décidé d’exposer votre travail ?

J’ai commencé à montrer mon travail alors que j’étais encore étudiant en école d’Art. Il y a eu ensuite une période assez longue, presque vingt ans, pendant laquelle tout en continuant à pratiquer, je n’ai plus rien montré. Je n’en éprouvais pas la nécessité.

Depuis 2010, je montre à nouveau mon travail de façon assez régulière, mais quand même pas suffisamment car, sans vouloir paraître prétentieux, je reste difficile quant aux lieux d’exposition de mes travaux.

Indices égarés

Peins-tu des autoportraits ?

Non

Cette pandémie a-t-elle agit sur ton travail ?

Très certainement comme tous les évènements que nous subissons tous, mais je ne saurais être plus précis.

Les artistes doivent-ils être le reflet des sentiments, de la vision de leur époque ?

Je ne pense pas qu’ils le doivent, mais peut-être le sont-ils, même si ce n’est pas toujours prémédité.

                                      ainsi vont lithographie 2 couleurs


Quelle est ta plus belle rencontre en art ?

Les rencontres…

Une devise ?

Soyez vous-même sans chercher à suivre les modes.

Une définition de l’art

Souvent inexplicable, mais indispensable.

Et venons-en à Venise…

J’ai l’immense chance depuis de nombreuses années de me rendre dans cette ville que l’on appelle « laSerenissima », Venise. Cela a commencé en 1978. J’ai été durant cinq années, l’assistant de mon maître d’atelier, Robert Simon qui enseignait la lithographie à la Scuola Internazionale di Grafica di Venezia durant les cours d’été. C’était à chaque fois, trois semaines de travail et d’échanges intenses avec de nombreux stagiaires qui venaient aussi bien d’Europe, comme des États-Unis, du Brésil, du Japon.

En 1986, un des membres de cette école a ouvert un autre atelier. La Bottega del Tintoretto, atelier collé à la maison du Tintoret, d’où son nom. C’est un espace que Tintoretto a très certainement utilisé. Il était collé à sa maison avec une entrée depuis son jardin et avec des dimensions tant en surface qu’en hauteur importantes.

                                             Lithographie 3 couleurs


Dans cet atelier, les pratiques sont essentiellement tournées vers les domaines de l’impression. Que ce soient les diverses techniques de gravure, mais aussi la typographie, la lithographie, la reliure et depuis peu, l’édition. Y sont aussi donnés des cours de dessin classique et d’aquarelle.

Depuis 2012, j’y enseigne la lithographie. D’abord pendant des stages intensifs d’été, mais maintenant aussi à d’autres moments de l’année en fonction des demandes et aussi pour mes propres réalisations. J’y retourne donc très souvent et cet endroit est devenu mon deuxième chez moi.

Son site

www.raymondstoppele.odexpo.com

La nef des Fous

                                       bibliothèque Grand Rue

Gérard Garouste – rétrospective

Jusqu’au 2 janvier 2023 dans la Galerie 2, au niveau 6 du Centre Pompidou
Commissariat
Sophie Duplaix, conservatrice en cheffe des collections contemporaines,
Musée national d’art moderne

Gérard Garouste nous emmène dans son univers de contes, légendes et mythes religieux. Il nous parle de sa peinture, de grands thèmes qui la traversent, ainsi que des figures qui lui tiennent à cœur, depuis le Classique et l’Indien avec lesquels nous commençons le parcours, jusqu’au Clown blanc et l’Auguste avec qui nous finirons.

Portrait de Gérard Garouste,
2019
Photo Bernard Huet
Tutti Images

Podcast Les visites du Centre Pompidou : « Gérard Garouste »

Le podcast qui accompagne l’exposition propose une immersion dans la peinture de Gérard Garouste, à l’écoute des mots de l’artiste. Il s’interroge sur sa propre peinture comme une énigme, un objet indéchiffrable peuplé
de figures mythologiques, bibliques ou romanesques, prétextes à la réflexion,
le songe et l’évasion.
Durée: 30 min. env.

La peinture de Gérard Garouste ne se veut pas séduisante […]. C’est une peinture qui questionne sans relâche, bouscule les certitudes : une peinture qui dérange.

L’exposition

Le Centre Pompidou consacre une rétrospective d’envergure à Gérard Garouste, l’un des plus importants peintres contemporains français, adepte d’une figuration sans concession. Aux côtés de 120 tableaux majeurs, souvent de très grand format, l’exposition donne une place aux installations, sculptures et
oeuvres graphiques de l’artiste. Elle permet de saisir toute la richesse du parcours inclassable de Gérard Garouste, « l’intranquille », dont la vie, sous le signe de l’étude mais aussi de la folie, et l’oeuvre énigmatique, se nourrissent l’une l’autre en un dialogue saisissant. La vaste rétrospective offre l’occasion
de plonger dans une oeuvre phare où la peinture, toujours en question, se double d’une quête métaphysique.

Le Classique et l’Indien

Gérard Garouste : ça vient d’un rêve que j’ai fait. Un matin, je me réveille et je me souviens de mon rêve : il y avait une voix off qui me dit :
« tu sais, dans la vie, il y a deux sortes d’individus : les classiques et les indiens ».
Je me demande ce que cela veut dire ; je vois des classiques et des modernes, des indiens et des cowboys mais des classiques et des indiens… je ne vois pas le rapport.
En parlant avec mon ami
Jean Michel Ribes, il me dit « tu as fait un jeu de mots entre classique et cacique ». Un cacique c’est un chef indien, mais aussi, si on prend la définition dans un dictionnaire, c’est une bête à concours, c’est un type qui porte une cravate, un type droit dans ses bottes. C’est le contraire de l’Indien, personnage un peu bizarre ; à une époque on appelait ça des apaches. Ces deux modèles opposés et complémentaires,
fréquents dans son oeuvre et qui représentent l’apollinien et le dionysiaque présents, selon lui, en chaque individu.

                                                                             Le Classique, années 1970

La Bourgogne et les mythes

Le goût pour les légendes, les mythes.
Cette région dans l’enfance de Garouste, le doux lieu de séjours chez la tante Eleonore  et l’oncle Casso. Garouste revient sur sur la violence de son rapport au père. La peinture  Caved évoque une des nombreuses disputes avec ce dernier.

Chez Dante et Virgile

Après la commande d’un vitrail sur Sainte Thérèse d’Avila par le Comité national d’art sacré et d’un plafond pour le Palais de l’Elysée, Gérard Garouste se replonge en 1986 dans les textes de Dante, La Divine Comédie et L’Enfer. Une série de toiles « conduit Garouste à une distorsion et une dilution des figures humaines et des paysages qui le portent vers une forme inédite d’abstraction », commente Jean-Marc Quittard dans sa très bonne biographie qui termine le catalogue de l’exposition du Centre Pompidou.

La Dive Bacbuc 1998

Rabelais et Cervantès : deux auteurs relus à l’aune du judaïsme
En 1998, Garouste présente La Dive Bacbuc. Installation drolatique sur la lecture de Rabelais. Elle en transmet la trivialité Influencé par les conférences de Marc-Alain Ouaknin, l’artiste réalise 150 gouaches et 126 lettrines ornées pour
l’illustration d’un Don Quichotte qui paraît en 1998 aux éditions Diane de Selliers.

Don Quichotte
continuera d’inspirer Garouste pour des peintures sur ce thème.
Fin 1999 est inaugurée Théâtre, toile peinte par l’artiste pour le plafond du foyer du Théâtre royal de Namur.
Garouste réalise en 2000 une fresque de 26 m de long pour la salle des mariages de la ville de Mons sur le thème de la fête locale, la ducasse.

Isaïe D’Issenheim

Garouste propose sa relecture du Retable d’Issenheim, où il en appelle à notre vigilance, quant à l’interprétation des textes et de l’iconographie qui en résulte.

Le Banquet 2021

Oeuvre majeure de la série Correspondance, renvoie à de multiples clés de lecture : la fête de Pourim, la récolte de la manne (Tintoret) le personnage de Kafka.

Clown blanc et l’Auguste

Centre Pompidou
Paris
métro 1 arrêt Hôtel de ville

FÜSSLI,
ENTRE RÊVE ET FANTASTIQUE

Le cauchemar, 1810 collection particulière

Jusqu’au 23 janvier 2023 au Musée Jacquemart Andre

 

Commissaires :
Christopher Baker, Directeur des départements d’art européen et écossais et des portraits aux National Galleries d’Écosse
Andreas Beyer, titulaire de la chaire d’Histoire de l’art des débuts de la
période moderne à l’Université de Bâle.
Pierre Curie, Conservateur général du patrimoine.
Scénographie
Hubert le Gall, designer français, créateur et sculpteur d’art contemporain.

Jubilation. C’est indéniablement la sensation qui envahit le visiteur au sortir de l’exposition « Füssli, entre rêve et fantastique »
Le Musée Jacquemart-André présente, à l’automne 2022, l’oeuvre du peintre britannique d’origine suisse, Johann Heinrich Füssli (1741-1825). À travers une soixantaine d’oeuvres issues de collections publiques et privées.
Le parcours illustre les thèmes les plus emblématiques de l’oeuvre de Füssli, artiste de l’imaginaire et du sublime. Des sujets shakespeariens aux représentations du rêve, du cauchemar et des apparitions, en passant par les illustrations mythologiques et bibliques, Füssli développe une nouvelle esthétique qui oscille entre rêve et fantastique.

PARCOURS DE L’EXPOSITION

INTRODUCTION

Peintre de l’étrange, Johann Heinrich Füssli, d’origine suisse mais londonien d’adoption, laisse derrière lui une oeuvre saisissante conjuguant le sublime, le mystère et le fantastique.
Initialement destiné à être pasteur, Füssli rêve pourtant d’une carrière littéraire ou artistique. Encouragé par Joshua Reynolds, président de la Royal Academy, il décide rapidement de s’orienter vers le dessin et la peinture. Füssli puise son inspiration dans des sources littéraires variées, qu’il interprète avec sa propre imagination. Personnalité complexe et fascinante, il se forme en autodidacte et développe une esthétique très atypique pour l’époque.
Bien qu’il ait été élu académicien, puis professeur de peinture de la Royal Academy, Füssli s’éloigne des règles académiques et introduit dans son oeuvre un imaginaire onirique très personnel.

Peuplée de créatures hybrides, de personnages terrifiants et mystérieux, sa peinture, qui marque une rupture entre le classicisme et le romantisme, est aussi spectaculaire qu’inquiétante.
Füssli crée des tableaux en clair-obscur avec un goût prononcé pour le drame. Amateur de théâtre, il s’inspire des jeux d’acteur et des mises en scène de l’époque, et réussit à donner à son oeuvre une dimension dramatique et une intensité émotionnelle inégalées.

Portrait de Füssli par James Northcote

Les portraits de lui peints par ses contemporains font apparaître une personnalité contrastée et énergique. Son Autoportrait, au regard profond et pénétrant, révèle aussi bien le génie créateur que l’inventivité du personnage. Artiste érudit et éclectique, il cherche aussi à intégrer à sa peinture l’idée du sublime, tel que développé par le philosophe Edmund Burke
(1729-1797), pour qui terreur et horreur peuvent être aussi sources de délices. Tantôt décriée, tantôt admirée, l’oeuvre de Füssli dit aussi bien sa folie que son génie et exercera une influence décisive sur toute une génération d’artistes.

FASCINATION ET APPROPRIATION DES TRAGÉDIES SHAKESPEARIENNES

Füssli s’intéresse dès son plus jeune âge à la dramaturgie anglaise, et en particulier à certains auteurs comme Shakespeare et Marlowe. Dès son arrivée à Londres en 1764, il fréquente assidûment les théâtres, non seulement pour perfectionner sa diction anglaise, mais aussi par intérêt pour l’expression des passions. Les nouveaux effets de la scène théâtrale britannique de l’époque l’inspirent, tant par les jeux de lumière, les costumes que par les mises en scène elles-mêmes. À cette époque, Shakespeare, dont les oeuvres ne sont pas censurées par le Licensing Act de 1737, est très régulièrement joué sur la scène londonienne. Füssli, qui sera considéré comme l’interprète de Shakespeare en peinture, emprunte au dramaturge la puissance expressive de ses textes pour construire des images à la forte Romeo et Juliette 1809 CP
singularité et en faire un genre théâtral en soi.

MACBETH

Dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, Macbeth devient l’une des pièces de Shakespeare les plus populaires et les plus représentées en Angleterre. Füssli, qui s’était familiarisé très tôt avec les textes du dramaturge, avait même entrepris une traduction de Macbeth en allemand
lorsqu’il vivait encore en Suisse, mais celle-ci ne fut cependant jamais publiée. Cette pièce illustre la fulgurante ascension d’un régicide : après que trois sorcières prédisent à Macbeth qu’il deviendra roi d’Écosse, celui-ci, encouragé par son épouse Lady Macbeth, élabore un plan diabolique pour s’emparer du trône. Leur sentiment de culpabilité et
Füssli
les 3 sorcières
la paranoïa plongeront alors les deux protagonistes dans la folie.
Füssli s’intéresse à différentes scènes de la pièce. Travaillant de manière sérielle, il exécute plusieurs représentations de ses thèmes, comme pour Lady Macbeth saisissant les poignards, dont il réalise différentes compositions à quelques décennies d’intervalle.

RÊVES, VISIONS ET APPARITIONS

Les domaines de la superstition, du rêve et du surnaturel exercent un profond attrait sur Füssli. À une époque où les Hommes cherchent à expliquer toute expérience et tout phénomène, le monde du sommeil et des rêves fascine par son insondable complexité. L’exploration de l’inconscient par Füssli a suscité l’engouement des surréalistes au début du XXe siècle pour son oeuvre.
Le rêve chez Füssli provoque l’apparition d’êtres surnaturels et féériques, comme dans Le rêve de la reine Catherine, où il est synonyme de bonheur et de béatitude. Les fairies, bientôt à la mode, plaisent au public de Füssli qui a été l’un des premiers à les évoquer. On retrouve ici l’inspiration des récits shakespeariens avec notamment la présence des fées
dans Le songe d’une nuit d’été. Dans Le songe du berger, l’oeuvre la plus importante de la Milton Gallery, Füssli dépeint une
ronde de personnages surnaturels.

INFORMATIONS PRATIQUES

Podcast de France Culture


ADRESSE
Musée Jacquemart-André, Propriété de l’Institut de France
158, boulevard Haussmann – 75008 Paris
Téléphone : + 33 (0) 1 45 62 11 59
www.musee-jacquemart-andre.com
ACCÈS
Le musée se situe à 400m de la place Charles de Gaulle-Étoile.
Métro : lignes 9 et 13 (Saint-Augustin, Miromesnil ou Saint-Philippe du Roule).
RER : RER A (Charles de Gaulle-Étoile).
Bus : 22, 43, 52, 54, 28, 80, 83, 84, 93.
Parc de stationnement : Haussmann-Berri, au pied du musée, ouvert 24h/24.
HORAIRES
Ouvert tous les jours de 10h à 18h.
Nocturnes les lundis jusqu’à 20h30 en période d’exposition.

Sommaire du mois de mai 2022

Brice Marden Inner Space

Jusqu’au 28.8.2022, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaire : Josef Helfenstein

Brice Marden (*1938, Bronxville, New York) est l’un des peintres majeurs de notre temps. Dans le cadre de l’exposition Inner Space présentée dans le Neubau, le Kunstmuseum Basel rassemble quelque 90 oeuvres de cet artiste américain réalisées entre 1972 et 2019. Parmi celles-ci, des séries de dessins et des tableaux provenant de la collection de l’artiste, dont certaines exposées pour la toute première fois.

L’art minimal

Brice Marden établit sa réputation dans les années 1960 avec ses peintures monochromes et ses dessins empreints d’émotion. Son oeuvre réunit deux approches fondamentales de la tradition picturale moderne : d’une part le geste caractéristique de l’expressionnisme abstrait, de l’autre une tendance à la réduction à l’essentiel qui rapproche son oeuvre de l’art minimal, du moins extérieurement. L’exposition Inner Space donne à voir une oeuvre en écho avec les temps forts de la collection d’art américain après 1960 figurant au sein de la Öffentliche Kunstsammlung Basel.

Sa pratique picturale

Jusque dans les années 1970, Marden crée des panneaux monochromes qui, quelques années plus tard, prennent la forme de diptyques et de tableaux de grandes dimensions composés de plusieurs parties, qui donnent lieu à des confrontations complexes avec la surface et la couleur et se lisent comme des paysages ou des architectures. Son intérêt pour la ligne, le geste et l’emploi de moyens et de matériaux simples (« there’s no electricity involved ») figure au coeur de sa pratique picturale et dessinatoire.

En outre, il revendique bientôt une reconnaissance à part entière de ses dessins généralement subordonnés aux peintures dans la hiérarchie des médiums artistiques. Dans un texte de 1979, Brice Marden demande que ceux-ci soient considérés « comme des espaces ». Pour lui, le dessin est un médium qui, outre le fait d’exister en plus de deux dimensions, est également en mesure de refléter l’esprit et l’expérience d’un lieu précis.

Le concours

L’exposition Inner Space propose une mise en regard de séries de dessins et de peintures qui souligne l’importance du processus dans le travail de Marden. Une période de son oeuvre trouvant son origine à Bâle en constitue le point de départ : Marden se consacra à cette ville pendant sept ans. En 1978, il remporta un concours pour concevoir les nouveaux vitraux du choeur de la cathédrale de Bâle. Ses esquisses restèrent toutefois sans suite.


L’exposition présente une sélection des travaux préparatoires de ce projet conservés au sein de la collection du Kunstmuseum Basel, ainsi que plusieurs Window Paintings exécutés à cette occasion qu’il est rare de voir exposés.

Son évolution artistique

Malgré l’échec du projet bâlois, ces années marquèrent une rupture décisive dans l’oeuvre de Brice Marden et établirent les fondements de son évolution artistique à venir. Au début des années 1980, enthousiasmé par la visite d’une exposition à New York, il entame une exploration de la calligraphie et de la poésie asiatiques et effectue ses premiers voyages en Thaïlande. Durant ses séjours en Asie et sur l’île grecque d’Hydra, il réalise des dessins inspirés de caractères extrême-orientaux, qui continuent toutefois à résulter d’observations de la nature. Ce faisant, Marden commence à se détourner de la peinture monochrome.

Cold Mountain

Au milieu des années 1980, Brice Marden initie la série Cold Mountain. Celle-ci se réfère aux écrits du célèbre poète Han Shan, connu sous le nom de
« Cold Mountain », qui vécut en Chine sous la dynastie Tang (618–907). Les aplats de son oeuvre de jeunesse s’y dissipent en lignes et en signes suggérant le mouvement. Désormais, des grilles colorées dynamiques et des traits entrelacés dominent les toiles de Marden. Dans les années suivantes, les tracés s’agrègent et renouent avec la couleur. The Muses (1991–1993),
 peinture monumentale conservée au sein de la collection Daros à Hurden, en constitue un exemple éloquent : la structure calligraphique à la base du tableau se déploie en une chorégraphie souple de lignes fluides dans des tons de vert, jaune, gris et bleu.

À travers 80 dessins et 10 peintures provenant du Kunstmuseum Basel ainsi que de prêts suisses et internationaux, l’exposition Inner Space retrace cette évolution artistique jusqu’aux oeuvres d’aujourd’hui.
Brice Marden. Inner Space est une version élargie de l’exposition Think of Them as Spaces. Brice Marden’s Drawings curatée par Kelly Montana qui s’est déroulée à la Menil Collection de Houston (21.2.–14.6.2020).

Variation in Print La gravure américaine

Blatt: 63.3 x 90.4 cm; Farblithographie von 4 Steinen in Schwarz, Dunkelrot, Ultramarinblau und Grün

– Jusqu’au 28.8.2022, au  Kunstmuseum Basel | Hauptbau
Commissaire : Judith Rauser
Parallèlement à l’exposition Inner Space, une sélection de gravures américaines de Barnett Newman, Sam Francis, Jasper Johns, Donald Judd, Sol LeWitt, Frank Stella et Brice Marden est à voir dans le Hauptbau. Cette présentation est consacrée au « Graphic Boom » survenu à partir des années 1960, lorsque des artistes américains majeurs s’enthousiasment pour les possibilités et les défis de l’impression. Cette exposition présente de nombreuses oeuvres de l’art graphique américain, pour certaines rarement exposées.

Kunstmuseum Basel
St. Alban-Graben 8
Postfach, CH-4010 Basel
T +41 61 206 62 62
kunstmuseumbasel.ch

Party for Öyvind. Öyvind Fahlström & Friends

Fahlstrom The Cold War 1965

Au musée Tinguely jusqu’au 1er mai 2022
Les commissaires de l’exposition sont Barbro Schultz-Lundestam et Gunnar Lundestam.

Avec Party for Öyvind, le Musée Tinguely consacre une grande exposition à Öyvind Fahlström, artiste aux multiples talents. Fahlström (1928-1976) a créé, au cours de sa brève carrière artistique, à tous points de vue « explosive ». À partir du début des années 1950, il a su établir un réseau international d’artistes, présent dans l’exposition,  avec plus de 80 noms des arts plastiques, de la poésie, du théâtre, de la littérature, de la musique, de la danse et du cinéma. Cette exposition permet de refléter la grande diversité d’expressions
 des artistes qui ont inspiré le Suédois ou ont été inspirés par lui.
Les liens, discours et développements créatifs, les relations personnelles et inspirations réciproques sont à revivre dans cette exposition
exceptionnelle jusqu’au 1er mai 2022. Le travail de Fahlström a été marqué
par une atmosphère de renouveau où une jeune génération explore de nouvelles voies, en politique, dans la société et les rapports personnels, s’opposant à la politique coloniale et patriarcale de la génération avant elle. Fahlström et ses ami.e.s ont fait d’une avant-garde, dont la recherche de ce monde nouveau
était au coeur de leurs réflexions, de leurs actions et de leurs créations artistiques.

Le titre de l’exposition

Le titre de l’exposition reprend le carton d’invitation envoyé par Patty et
Claes Oldenbourg, pour une fête organisée à l’occasion de l’anniversaire de
Öyvind Fahlström
et de sa première exposition personnelle à la légendaire Sidney Janis Gallery de New York en 1967.
Cette fête immense réunit alors
plusieurs centaines d’invités,
dont plusieurs sont également
représentés dans l’exposition.

Biographie

UNSPECIFIED – CIRCA 1900: Swedish Visual Artist. He Made « Peintures Variables ». The Components Evolve On Magnetic Base Or Float On Water. They Can Be Interpreted In Many Ways By The Public.\\Rapho Agency Has Not Obtained Authorization From The Rightful Owners/Beneficiaries And E (Photo by Jean-Philippe CHARBONNIER/Gamma-Rapho/Getty Images)

Fahlström est né en 1928 à São Paulo, au Brésil, de parents scandinaves. En juillet 1939, à l’âge de 10 ans, il part pour Stockholm où il rend visite à sa famille pendant six mois. Le début de la Seconde Guerre mondiale, l’empêche de repartir, si bien que Fahlström  passera le reste de son enfance et de son adolescence chez une tante à Stockholm. Après la guerre, il étudie l’histoire de l’art et de l’archéologie à Stockholm et à Rome, où il vit à partir de 1952. Il s’immerge rapidement dans le milieu artistique , crée ses premières oeuvres   et se lie d’amitié avec des artistes comme le peintre Giuseppe Capogrossi, dont l’utilisation des signes et des symboles, est pour le jeune suédois, une source d’inspiration majeure.
Correspondant de journaux suédois, Fahlström écrit des articles sur Rome, notamment sur Cy Twombly et Robert Matta.

Dès le début, Fahlström entretient avec le Moderna Museet (inauguré en 1959) une relation étroite qui débouchera sur de nombreux projets pluri-
disciplinaires et fera de lui plus tard, l’un des ambassadeurs des musées des
Etats – Unis. Suivent ses premières expositions internationales, notamment en 1958 à la galerie Daniel Cordier à Paris, où Fahlström noue des liens avec Jean – Jacques Lebel et Alain Jouffroy, les organisateurs d’Anti – Procès (1,1960)
mouvement d’artistes contre la politique française en Algérie et contre l’Apartheid en Afrique du Sud, dont Fahlström signe lui aussi le manifeste.

Les Etats Unis

En 1961, titulaire d’une bourse, Fahlström se rend pour un an aux États-Unis avec sa partenaire Barbro Östlihn, qu’il a épousée en 1960 et avec laquelle il collabore intensément.

Öyvind Fahlström, Section of World Map – A Puzzle, 1973

Billy Klüver, ingénieur suédois au service des Bell Laboratories et fondateur de l’E.A.T. (Experiments in Art and Technology, institution soutenant de nombreux artistes dans la réalisation technique de leurs œuvres), introduit les nouveaux arrivants dans le milieu artistique new-yorkais. Leurs premiers amis sont alors Patty et Claes Oldenburg. Fahlström peut reprendre l’atelier de Robert Rauschenberg et devient ainsi le voisin de Jasper Johns.
Il se retrouve au cœur d’une fulgurante évolution américaine, et assiste à la montée du pop art et du happening. Une fois l’année de bourse écoulée, Barbro et Öyvind restent à NewYork, où ils feront partie de la scène artistique locale jusqu’à la mort de l’artiste en 1976.

HON

Même vivant à New York, les contacts avec la Suède ne se sont jamais interrompus. En 1966, Fahlström représente son pays à la Biennale de Venise, raison sans doute pour laquelle il n’a pas pu participer à HON, l’immense sculpture féminine que Niki de Saint Phalle a installée en 1966 au Moderna Museet avec Jean Tinguely et Per Olof Ultvedt.
Fahlström et Tinguely s’étaient connus en 1955 à Stockholm lors de sa première exposition en Suède. Öyvind et Niki se sont rencontrés à Stockholm en mai 1961 dans le cadre de l’exposition Rörelse i Konsten, et un an plus tard tous les trois se retrouvent ensemble lors de leur participation commune à la mise en scène de The Construction of Boston par Kenneth Koch. Également poète, Fahlström publie le tout premier Manifeste pour la poésie concrète en 1953. Il écrit des pièces de théâtre, prend part à des performances et des happenings ainsi qu’à des réalisations théâtrales, et il crée, en étroite collaboration avec sa
femme, une œuvre artistique faite de peintures, d’innombrables dessins et d’imposantes installations, à mi-chemin entre la peinture et la bande dessinée, et dans laquelle il aborde les questions politiques, sociales et sociétales de son époque.

Öyvind Fahlström, Analogies du Capricorne : grottes, échelles, cloches,
1960

Party for Öyvind est le reflet d’une époque marquée par les défis de l’après-guerre, mais proposant également des possibilités et ouvertures à la fois uniques, inédites et ludiques : toute une jeune génération tente alors d’en finir avec l’ancien, de trouver son propre mode de vie et de mettre au centre la joie de vivre et l’espoir en l’avenir, le droit à sa propre identité, la sexualité et l’expression artistique, la musique, la littérature et la poésie.

Les artistes

Wiveka Wachtmeister, The Druds, 2020L’exposition réunit de nombreux artistes parmi les plus influents des années 1950-1970:
Alexander Calder, Andy Warhol, Barbro Östlihn, Carl Johan De Geer, Christer
Strömholm, Claes Oldenburg, Cy Twombly, Dennis Hopper, Ernest Cole, Faith Ringgold, Gunilla Palmstierna-Weiss, Jean Tinguely, John Cage, Kiki Kogelnik, Lee Bontecou, Lena Svedberg, Marie-Louise Ekman, Marisol, Merce Cunningham, Mimi Gross, Niki de Saint Phalle, Patty Oldenburg, Peter Weiss, Robert Rauschenberg et Roy Lichtenstein.
Et, bien sûr, Fahlström lui-même. Au total, à peu près autant de femmes que d’hommes.
Après une première étape au Sven-Harrys konstmuseum de Stockholm, elle a été élargie pour Bâle, où elle est montée par Andres Pardey et Tabea Panizzi. Elle sera présentée au Kunstverein de Hambourg à l’été 2022.

                                                Wiveka Wachtmeister, The Druds, 2020

Informations pratiques Musée Tinguely :

Titre de l’exposition : Party for Öyvind. Öyvind Fahlström & Friends
Adresse : Musée Tinguely | Paul Sacher-Anlage 1 | 4002 Bâle
Opening Day : Mardi 15 février 2022 de 11h à 20h
Durée : 16 février – 1er mai 2022
Heures d’ouverture : mardi – dimanche, tous les jours 11h-18h
Sites Internet : www.tinguely.ch
Réseaux sociaux : @museumtinguely | #museumtinguely | #partyforoeyvind | #oeyvindfahlstroem

Accès
Gare centrale de Bâle CFF / Gare SNCF :
tram no. 2 jusqu‘au « Wettsteinplatz »,
puis bus no. 31 ou 38 jusqu’à « Tinguely Museum ». 
Gare allemande (Bad. Bahnhof) : bus no. 36.
Autoroute: sortie « Basel Wettstein/ Ost ».