Le Musée historique de Bâle est l’hôte du Kunstmuseum Basel jusqu’au – 19 janvier 2020, Kunstmuseum Basel | Neubau
Erzbischöfliches Diözesanmuseum Paderborn,
Inventar-Nr.: Diözesanmuseum Heinrich Kunigunde SK 110+111 ;
Foto: Ansgar Hoffmann,www.hoffmannfoto.de
Einmalige Veröffentlichung in: Gold & Ruhm. Geschenke für die Ewigkeit
Katalog der gleichnamigen Sonderausstellung des Historischen Museums Basel
11. Oktober 2019 – 19. Januar 2020
La grande exposition présente l’époque glorieuse d’Henri II, dernier empereur ottonien (règne 1002–1024). Elle réunit des prêts exceptionnels d’Europe et des États-Unis à l’occasion du millénaire de la consécration de la cathédrale de Bâle. Des pièces d’orfèvrerie, des textiles, des enluminures et des ivoires précieux composent un panorama unique de la civilisation médiévale.
Le devant d’autel en or, cadeau impérial offert à la cathédrale en 1019, en constitue le point d’orgue. Vendu à l’étranger au XIXe siècle, il retourne temporairement à Bâle après avoir passé de nombreuses décennies à Paris. Des prêts de Cleveland, Munich, Cologne, Berlin, Rome et New York permettent de réinscrire pour la première fois le présent d’Henri II dans son contexte.
Associés à d’autres pièces prestigieuses, ils dévoilent aussi le mécénat des souverains ottoniens, qui commandaient des reliures de manuscrits somptueuses et s’assuraient une gloire éternelle grâce à leurs dons. Les présents en or d’Henri II et de sa femme Cunégonde ont donné lieu à un culte du couple impérial et ont marqué Bâle de maintes manières. le plus ancien grand crucifix en bronze conservé à ce jour Une précieuse curiosité : un Christ avec une tête de femme antique
Croix d’Herriman (archevêque de Cologne) et de sa soeur Ida (abbesse de Werden). La tête du Christ est un réemploi d’un camée romain (époque julio-claudienne) en lapis-lazuli, peut-être l’impératrice Livia
Un catalogue scientifique et richement illustré paraît en allemand à l’occasion de l’exposition : Gold & Ruhm – Kunst und Macht unter Kaiser Heinrich II., Hirmer Verlag, Munich.
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Afin de célébrer le retour des tableaux de la Collection Staechelin à Bâle et de les rendre accessibles à tous, la Fondation Beyeler propose tout ce week-end (31.8.–1.9.19) un accès gratuit au musée.
Vincent van Gogh Le jardin de Daubigny, 1890 Huile sur toile, 56.0 x 101.5 cm Rudolf Staechelin Collection Photo : Robert Bayer
Jusqu’au 29 octobre 2019 Au terme de quatre années d’absence, les tableaux de la célèbre collection de Rudolf Staechelin (1881–1946) font leur retour à Bâle. Après des expositions remarquées au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía à Madrid et à la Phillips Collection de Washington, D. C., toutes deux conjointement avec la Collection Im Obersteg, 19 oeuvres de l’impressionnisme, du post-impressionnisme et de l’art moderne classique seront présentées à la Fondation Beyeler à Riehen près de Bâle à partir du 31 août 2019 Paul Gauguin Paysage au toit rouge, 1885 Huile sur toile, 81.5 x 66.0 cm, Rudolf Staechelin Collection Photo : Robert Bayer
Une exposition concentrée y donnera à voir jusqu’au 29 octobre 2019 de remarquables tableaux de Paul Cézanne, Edgar Degas, Paul Gauguin, Vincent van Gogh, Ferdinand Hodler, Édouard Manet, Claude Monet, Pablo Picasso, Camille Pissarro et Auguste Renoir. Ils seront ensuite intégrés aux présentations régulièrement remaniées des collections de la Fondation Beyeler. Ces oeuvres deviennent ainsi à nouveau accessibles au public à Bâle, inaugurant un nouveau chapitre de l’histoire mouvementée de la Collection Rudolf Staechelin.
Ferdinand Hodler Le Grammont après la pluie, 1917 Huile sur toile, 60.5 x 80.0cm Rudolf Staechelin Collection Photo : Robert Bayer
Le Rudolf Staechelin Family Trust (New York) a conclu avec la Fondation Beyeler un contrat de prêt de longue durée pour une période de dix ans. Pendant cette période, aucune des oeuvres ne peut être vendue. Les coûts liés au prêt tels les frais d’assurance, d’encadrement et de restauration sont assumés par le Rudolf Staechelin Family Trust. La Fondation Beyeler exposera régulièrement les oeuvres qui lui sont ainsi confiées et les prêtera également à d’autres musées suisses et internationaux. La Collection Beyeler se trouve grandement enrichie de ces oeuvres majeures de l’histoire de l’art – auxquelles le public et les chercheurs auront à nouveau accès – car les tableaux de la Collection Staechelin complètent la collection du musée et l’étoffent de nouveaux accents.
L’Arlequin au loup (1918) de Pablo Picasso, la nature morte Verre et pommes (1882) de Paul Cézanne et le paysage Temps calme, Fécamp (1881) de Claude Monet renforcent le coeur de la Collection Beyeler. Cela vaut également pour les autres oeuvres de Cézanne, Degas, Monet et van Gogh, dont Le jardin de Daubigny (1890) fait par exemple écho au Champ aux meules de blé (1890) déjà présent dans la Collection Beyeler. Les deux tableaux ont été peints à Auvers-sur-Oise et font partie d’un groupe de 13 oeuvres au format oblong (double carré), format de prédilection du peintre pendant les derniers mois de sa vie à partir de mi-juin 1890. Des analyses de la structure de la toile réalisées par le Van Gogh Museum à Amsterdam ont révélé que l’artiste avait découpé tous ses doubles carrés dans le même ballot de toile. Les toiles du Jardin de Daubigny de la Collection Rudolf Staechelin et du Champ aux meules de blé de la Collection Beyeler sont ainsi à nouveau réunies dans cette exposition.
Édouard Manet Tête de femme, 1870 Huile sur toile, 56.5 x 46.5 cm Rudolf Staechelin Collection Photo : Robert Bayer
Quant à Édouard Manet, Paul Gauguin, Auguste Renoir et Camille Pissarro, étroitement liés au développement de l’art moderne, ils avaient déjà fait l’objet d’expositions à la Fondation Beyeler mais n’étaient jusqu’à présent pas représentés dans la collection du musée. Aujourd’hui, la Collection Beyeler se voit enrichie des oeuvres suivantes: Tête de femme (1870) de Manet, Gabrielle (1910) de Renoir, Paysageau toit rouge (1885) de Gauguin, ainsi que La Carrière, Pontoise (vers 1874) et Le Sentier du village (1875) de Pissarro, ami proche de Cézanne. Parmi les oeuvres maîtresses de la Collection Rudolf Staechelin, on trouve des tableaux tardifs de Ferdinand Hodler, auquel la Fondation Beyeler avait consacré une exposition en 2013. Parmi eux se trouvent La malade (1914 et 1914/15),
Ferdinand Hodler La morte, 1915 Huile sur toile, 65.0 x 81.0 cm Rudolf Staechelin Collection Photo : Robert Bayer
portraits bouleversants de sa compagne Valentine Godé-Darel, La morte (1915), oeuvre hautement appréciée des connaisseurs de Hodler, ainsi que trois paysages exceptionnels, Paysage de Montana (1915), Le Grammont après la pluie (1917) et Le Mont-Blanc aux nuages roses (1918).
Jusqu’au 29 octobre 2019, les prêts de la Collection Rudolf Staechelin, accompagnés de certaines oeuvres apparentées de la Collection Beyeler, seront présentés de manière concentrée dans deux salles du musée. Ils seront ensuite intégrés à la prochaine présentation de la Collection Beyeler dans un contexte historique plus large (du 2 novembre 2019 au 5 janvier 2020). Le public est invité à venir (re)découvrir la Collection Rudolf Staechelin dans sa nouvelle demeure.
Ouvert tous les jours. Du lundi au dimanche de 10h à 18h et le mercredi de 10h à 20h
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Leonor Antunes a seam, a surface, a hinge, or a knot
L’exposition d’automne de laFondation Beyelerréunit cinq artistes contemporaines : Leonor Antunes, Silvia Bächli, Toba Khedoori, Susan Philipsz et Rachel Whiteread, jusqu’26.1.2020 Vidéo
Ces artistes de renommée internationale exposent pour la première fois ensemble. Plutôt que de présenter une vaste exposition de groupe, l’accent est mis sur des oeuvres exemplaires qui livrent chacune une expérience spécifique de l’espace par des moyens d’expression très divers – à travers des installations sonores, des sculptures, des dessins. Elles évoquent des espaces qui oscillent entre l’identifiable et l’éphémère. Elles créent des lieux de contemplation et de repos, dans lesquels la faculté de réminiscence se libère et où les images et les souvenirs prennent vie.
Longtemps, l’espace en tant que tel n’était pas considéré comme une thématique artistique. Depuis les années 1960, de nouvelles formes d’expression telles que les performances, les installations, les images filmées ont également trouvé leur place dans l’art, faisant ainsi de l’espace un aspect important de la création artistique et érigeant ce dernier au rang d’expérience créative moderne et contemporaine. Le titre de l’exposition s’appuie sur la signification des deux termes anglais resonating et resonance. L’exposition en elle-même, cependant, ne s’intéresse pas à une approche thématique de l’espace ; elle vise plutôt, par le biais des cinq positions, à illustrer des contenus ou situations qui, bien que présents et concrets dans les oeuvres des artistes, sont généralement imperceptibles.
Sons : Susan Philipsz L’artiste écossaise Susan Philipsz (née en 1965) explore les propriétés plastiques du son – principalement en l’intégrant dans un espace ou un environnement concret. Des enregistrements vocaux aussi bien qu’instrumentaux servent de point de départ à ses installations sonores. Susan Philipsz s’inspire de morceaux de musique déjà existants, tels que des chansons pop, des chants folkloriques et des cantiques modernes, qu’elle interprète elle-même de sa voix non travaillée et sans accompagnement. Depuis quelques années, des oeuvres instrumentales constituent également une part importante de son travail artistique ; elle utilise, pour ses créations, des signaux radio, des verres chantants ou des instruments à vent endommagés pendant la guerre. Sur la base d’un travail de recherche intensif, l’artiste noue des liens avec des circonstances historiques ou littéraires spécifiques du lieu d’origine respectif. Par le biais de sons surprenants, en accord avec le lieu, l’attention du visiteur se dirige vers son environnement immédiat, afin que l’expérience soit vécue d’une nouvelle manière.
Traces : Toba Khedoori Toba Khedoori (née en 1964) réalise des dessins de grands formats – et de petits formats depuis quelques années, ainsi que des oeuvres sur toile.
Traces : Toba Khedoori
Depuis le milieu des années 1990, l’artiste australienne – qui vit et travaille à Los Angeles – dessine minutieusement des structures architecturales qu’elle dépeint comme des objets individuels ou en série sans contexte donné. Le grand format des bandes de papier recouvertes de cire contraste avec la minutie des dessins. Récemment, cependant, Khedoori a changé d’orientation en ne capturant plus ses objets picturaux de loin, mais de très près. Au-delà des motifs liés à la nature tels que les brindilles, les montagnes ou les nuages, le principe du gros plan s’intensifie dans certaines de ses oeuvres à tel point que les représentations frôlent l’abstraction. Ce que les oeuvres de Khedoori ont en commun, ce sont diverses traces qui pointent vers une réalité extérieure aux images : poussière, cheveux et petites particules de saleté dans la couche de cire, reflets de lumière et ombres insolites, chaque élément assume la fonction de subtiles références au monde extérieur au-delà des associations forgées par Khedoori.
Souvenirs : Rachel Whiteread
Depuis le début des années 1990, l’artiste britannique Rachel Whiteread (née en 1963) donne le jour à une production plastique extraordinaire. Ses sculptures sont réalisées à partir d’empreintes et de moulages d’objets familiers, de structures architecturales ou de corps creux ; leur apparence semble généralement étrange en raison de leur matérialité réduite. Rachel Whiteread donne forme aux espaces négatifs des objets par exemple une bouillotte, une armoire ou une bibliothèque afin de créer des sculptures indépendantes. Les objets individuels font partie intégrante de son travail mais également des moulages impressionnants d’espaces de vie entiers. Ses œuvres se réfèrent toujours à l’absence d’objets originaux et donc à des intérieurs, des espaces et des environnements qui passent généralement inaperçus dans la vie quotidienne. L’œuvre de Susan Whiteread devient ainsi un point de référence pour ses propres souvenirs.
Susan Whiteread
Vides : Silvia Bächli L’œuvre de Silvia Bächli (née en 1956) comprend une variété de dessins, petits et grands formats. Ses premières œuvres, créées au début des années 1980, se caractérisent par des représentations figuratives et abstraites en petit format. Depuis une bonne dizaine d’années, l’artiste suisse se tourne également vers des œuvres plus grandes sur papier, qui s’éloignent de plus en plus des références aux motifs figuratifs. L’accent se situe désormais sur quelques structures linéaires et des coups de pinceau minimalistes, dont la force puise ses racines dans l’équilibre constant entre la surface du papier et le dessin. Dès le début, Bächli présentait ses œuvres comme des groupes transformables sous forme d’installations, couvrant souvent un mur tout entier. L’interaction entre le dessin, le bord de l’image, le support en papier et les murs blancs des salles d’exposition est d’une importance capitale. Au travers de ces vides, se déploie un espace qui implique également le spectateur
sans titre
Métamorphose : Leonor Antunes Dans ses vastes installations, l’artiste portugaiseLeonor Antunes (née en 1972) explore la mutabilité de la sculpture et du langage formel moderne. Depuis la fin des années 1990, l’artiste crée des œuvres in situ dont les formes géométriques et la diversité des matériaux, entre autres le cuir, le nylon et le laiton, sont également caractéristiques de ses œuvres actuelles. Parallèlement à l’exploration de la matérialité et de l’interaction entre la sculpture et l’architecture, Leonor Antunes explore les contextes historiques et sociaux de personnalités issues de l’architecture, du design et de l’art au-delà du canon habituel. Elle reproduit à l’échelle des motifs et des éléments empruntés à des meubles, des textiles et des gravures et les détache de leur fonction originelle.
Leonor Antunes
Perception spatiale et espace sensoriel Les cinq artistes présentées sont singulières à bien des égards : elles vivent non seulement dans des lieux différents à travers le monde, mais également leurs moyens d’expression et leurs approches artistiques, leur centre d’intérêt et leurs contextes de travail se distinguent les uns des autres. Cependant, leurs œuvres ont un point commun puissant : elles illustrent de façon exemplaire un sens de l’espace autour duquel s’articule l’exposition. Les installations, les sculptures et les dessins semblent à première vue discrets, réservés, mais c’est précisément là que réside leur force ; c’est cette distance qui nous permet, pour ainsi dire, de prendre conscience de l’espace
Programmation associée à l’exposition «Resonating
Spaces»
Dimanche 20 octobre 10h00-18h00 Journée familiale «Resonating Spaces»
Mercredi 30 octobre 18h00-19h30
Dimanche 15 décembre 16h00-17h30
Parcours performatif à travers l’exposition
Jeudi 7 novembre 18h30 Lecture d’extraits de lettres de Wislawa Szymborska L’événement est organisé dans le cadre du festival culturel Culturescapes (culturescapes.ch).
Au Musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg (MAMCS) jusqu’au 12 janvier 2020 Commissariat : Hannelore Fischer, directrice du Kollwitz Museum Köln et Alexandra von dem Knesebeck, historienne de l’art et spécialiste de Käthe Kollwitz, auteure du catalogue raisonné des gravures. Käthe Kollwitz « Je veux agir dans ce temps » 1867 Königsberg (aujourd’hui Kaliningrad) – 1945 Moritzburg
Témoin des crises politiques et sociales de son temps et auteure d’une oeuvre engagée, Käthe Kollwitz est ici montrée comme une artiste complète (graveuse, dessinatrice et sculptrice) dont le réalisme expressif influencera son époque et au-delà. Se présentant elle-même comme une artiste engagée, Käthe Kollwitz aura retenu comme sujets de prédilection les grands drames qui traversent son époque, n’hésitant pas à inclure des éléments personnels dans son art. Reconnue et estimée de son vivant en son pays et considérée comme un modèle pour nombre de jeunes artistes, Käthe Kollwitz sera menacée par l’arrivée d’Hitler au pouvoir, mais ne renoncera pas à poursuivre son oeuvre malgré l’interdiction d’exposer et les menaces qui pèsent sur elle. Cofondatrice de l’ « Organisation des femmes artistes », elle fut aussi la première femme à être admise comme membre de l’Académie et à placer la figure féminine, y compris dans la réalité la plus sombre de sa condition, au coeur d’une oeuvre expressionniste atypique, sans doute plus proche du roman réaliste que du paysage artistique de son temps. Käthe Kollwitz est considérée comme une artiste de premier plan en Allemagne où deux musées lui sont consacrés à Berlin et à Cologne. Le site Internet du musée en langue française, présente le Käthe Kollwitz Museum à Cologne et son artiste éponyme.
Parcours Conçu de façon chronologique, le parcours de l’exposition met en présence parmi les oeuvres les plus emblématiques de Käthe Kollwitz, dessins, gravures et sculptures, mêlant la collection du Käthe Kollwitz Museum Köln, celle du MAMCS (dont une grande partie des oeuvres a rejoint le fonds du musée grâce à la générosité des AMAMCS) ainsi que plusieurs oeuvres issues de collections privées.
Bien que présente dans de nombreuses collections publiques internationales et reconnue mondialement, Käthe Kollwitz n’a été encore que peu montrée dans les institutions françaises. Le MAMCS est actuellement la seule collection publique française à conserver des témoignages de son oeuvre réunissant un ensemble d’une trentaine de pièces, certaines d’entre elles ayant été acquises du vivant de l’artiste. Cette vaste rétrospective (600 m2 environ, 167 oeuvres) vient porter à la connaissance du public une oeuvre qui passe de l’autobiographie à l’universel en traitant de thèmes tels que l’amour maternel, les conflits sociaux, la Grande Guerre, la mort ou le deuil.
OEuvres de jeunesse La Marguerite du Faust de Goethe lui inspire une représentation de la misère qui guette les jeunes célibataires enceintes.
Réunissant ses cycles gravés les plus connus (Une Révolte des Tisserands, La Guerre des Paysans), des dessins et des oeuvres graphiques ainsi que de nombreux autoportraits, l’exposition met en lumière le trait expressif, parfois poignant, si particulier de Käthe Kollwitz. Elle permet non seulement de donner à voir l’ampleur de son oeuvre graphique maîtrisé de façon magistrale mais aussi de positionner le MAMCS comme le lieu de référence en France pour sa connaissance.
Une Révolte des tisserands (Ein Weberaustand) En 1897, Käthe Kollwitz s’est inspirée de la pièce de théâtre éponyme écrite par Gerhard Hauptmann en 1893 qui relate les émeutes liées à la famine de 1844 en Silésie, tout en adaptant le récit à son époque, en témoignent les vêtements portés par les personnages. L’artiste synthétise l’événement en six estampes saisissantes. La Misère avec la mère pleurant son enfant, La Mort ravissant une mère à sa famille, La Conspiration annonçant la révolte, La Marche (Weberzug) vers la maison de l’exploiteur, L’Émeute puis La Fin (Ende) représentant la dramatique répression.
Révolte des tisserands
La Sécession berlinoise et Paris Elle devient rapidement la principale association d’artistes allemands, Käthe Hollwitz devient le cinquième membre féminin. Cette appartenance lui ouvre de nombreuses portes, et notamment la possibilité d’exposer en Allemagne et à l’étranger. A Paris, Chez le célèbre galeriste Ambroise Vollard, elle fait l’acquisition d’un pastel du jeune Picasso. En 1904, Käthe Kollwitz étudie la sculpture à l’Académie Julian et jette ainsi les bases de sa future oeuvre sculptée. La Carmagnole, une gravure réalisée en 1901, est directement inspirée du roman de Charles Dickens. Cette gravure devient sa « carte de visite »
La Guerre des paysans et la critique sociale Second cycle consacré également au thème de l’insurrection. La Guerre des paysans fait référence aux soulèvements qui interviennent en Allemagne entre 1524 et 1526. Dans ce cycle, rien ne semble linéaire, le destin tournoie, de la soumission à la mort en passant par l’insurrection, du champ de labour au champ de bataille, de la terre à la terre. À travers des motifs saisissants, Kollwitz met, encore une fois, sa technique au service de son art et de son propos.
Käthe Kollwitz La Guerre des paysans
Nus, amants, enfants et mort On connaît une centaine de dessins de nus de Käthe Kollwitz. Certains remontent à sa période de formation. Il s’agit surtout d’études préparatoires pour des sculptures. La statue Ensemble amoureux (Liesbesgruppe) est plus connue. Elle lie Eros, le dieu de l’amour, à Thanatos, le dieu de la mort. La sculpture rappelle une série d’oeuvres graphiques qui représentent tantôt une mère avec son enfant mort sur les genoux, tantôt la mort personnifiée tenant une jeune fille.
Käthe KollwitzLiesbesgruppe
Käthe Kollwitz , mère et enfant
Première Guerre mondiale et pacifisme Peter, le fils cadet de Käthe Kollwitz, engagé volontaire, est tué en Belgique au début de la Grande Guerre. Sa mort marque une rupture profonde dans la vie et l’oeuvre de l’artiste. En 1918, deux semaines avant la signature de l’Armistice, elle s’élève avec courage contre l’appel du poète Richard Dehmel à une dernière mobilisation de la jeunesse. Sa réponse ouverte est publiée dans deux journaux, l’un journal social-démocrate et l’autre libéral. Elle conclut sa lettre par cette citation de Goethe tirée des Années d’apprentissage de Wilhelm Meister :
« Les graines de semence ne doivent pas être moulues ! »
La République de Weimar Elle est la première femme admise à l’académie prussienne des arts et se voit en même temps décerner le titre de professeure. Elle s’engage à plusieurs reprises en faveur du pacifisme, notamment avec sa plus célèbre affiche « Plus jamais la guerre » (« Nie wieder Krieg »). Elle milite pour ne plus enseigner la guerre aux enfants, l’une de ses priorités, et soutient ainsi la Ligue internationale des Mères et des Éducatrices pour la Paix fondée en France en 1928.
National-socialisme Après la prise de pouvoir des nationaux-socialistes, Käthe Kollwitz et son mari, comme en 1932, soutiennent un appel urgent à l’union des partis de gauche pour les dernières élections libres du 5 mars 1933. Elle est contrainte de démissionner de l’Académie prussienne des arts. Käthe Kollwitz n’a plus le droit d’exposer en Allemagne. Le trépas survient de différentes manières, ravissement brutal, mort soudaine et surprenante, solitaire, mais aussi rédemptrice et espérée, comme dans le dernier feuillet Appel de la mort, sur lequel l’artiste s’est elle-même représentée.
Musée d’Art moderne et contemporain (MAMCS) 1 place Hans-Jean-Arp, Strasbourg Tél. : +33 (0)3 68 98 50 00 Horaires : tous les jours – sauf le lundi – de 10h00 à 18h00
Joseph Mallord William Turner, Ein Festtag in Zürich, Aquarell und
Gouache über Bleistift auf Papier, mit Auskratzung, aufgezogen, 29 x 47.8
cm, Kunsthaus Zürich, Grafische Sammlung
Sparks (Étincelles) et Kopiec Bonawentura à la galerie de la Filature de Mulhouse pour l’ouverture de la saison 2019/2020, exposition visible
jusqu’au dimanche 27 oct. 2019
Le titre de la série photographique de Wiktoria Wojciechowska, Sparks (Étincelles), consiste en 72 portraits de quelque 60 personnes
différentes, inspirée de la tradition des portraits militaires.
L’usage est de faire un portrait d’un militaire avant qu’il parte,
le premier et peut-être le dernier…
Ces photographies évoquent les débris brûlants de missiles
transperçant les murs des habitations mais aussi les éclats lumineux
des explosions se reflétant sur les visages ou encore les flashes de
mémoire et réminiscences douloureuses qui habitent l’esprit des victimes.
Surtout, ce titre fait directement allusion à la forme choisie par Wiktoria Wojciechowska pour raconter la guerre en Ukraine, une forme dispersée constituée de différents matériaux collectés :
photographies, films et paroles, éclatés tels des fragments de bombes.
La série Sparks se veut ainsi le portrait multidimensionnel d’une guerre dont on ne parle plus ou peu. Entre 2014 et 2016, elle a travaillé sur la série Sparks, un portrait de la guerre contemporaine s’appuyant sur les histoires personnelles d’individus vivant au milieu du conflit en Ukraine.
The squad of nine killed and eight wounded (Le bataillon de neuf tués et huit blessés)
qui présente un groupe de soldats, dont neuf sur l’image
sont recouverts d’une feuille d’or
Au coeur de la série s’imposent des portraits de jeunes soldats dont Wiktoria Wojciechowska a voulu mettre en lumière le manque d’expérience, la fragilité et la transformation par la guerre.
Non-professionnels, ces soldats, guidés par leur seule conviction, ont quitté leur situation sociale antérieure pour devenir simples humains face à
la peur, face à des sentiments complexes et à des dangers auxquels ils n’étaient pas préparés.
Elle représente dans la vidéo la corde, son demi-frère, adolescent
mais aussi dans un collage, sorte de journal intime, qu’elle voudrait
préserver, protéger.
« Je vis tout près de la frontière de l’Ukraine à Lublin, cette guerre se déroule presque sous nos yeux et elle n’intéresse personne… »
Loin d’une héroïsation de ces jeunes hommes, la photographe révèle à travers ses clichés sensibles leurs failles et leurs doutes.
Elle a proposé à ces jeunes gens tous volontaires pour aller combattre, de raconter leur engagement, dire ce qu’ils ont vécu et ressenti. Au cours d’entretiens individuels d’une heure environ, elle a conversé avec eux tout en les filmant et en déclenchant parfois une prise de vue.
De véritables images caravagesques, qui reflètent tout le tragique de
la situation.
D’autres images de la série montrent les ruines laissées par les combats, stigmates d’une guerre menée avec des armes modernes : ponts détruits,
tranchée creusée dans un paysage désolé, façades criblées… Chaque photographie de la série témoigne du positionnement choisi par Wiktoria Wojciechowska pour rendre compte du conflit ukrainien : un angle qui ne soit pas celui du photojournalisme mais qui privilégie plutôt un
regard oblique sur la guerre.
Née en 1991 à Lublin en Pologne, Wiktoria Wojciechowska vit et travaille
à Paris et Lublin.
Diplômée de l’Académie des beaux-arts de Varsovie, Wiktoria Wojciechowska a obtenu en 2015 l’Oskar Barnack Leica
Newcomer Award. www.wiktoriawojciechowska.com
Le projet Kopiec Bonawentura puise son origine dans une citation
d’Alfred Jarry tirée d’Ubu Roi :
« Quant à l’action, elle se passe en Pologne, c’est-à-dire nulle part ».
Et si la Pologne existait en plusieurs lieux à la fois ?
Lucas Olivet propose une réponse imaginaire et transnationale qu’il
situe en Pologne et dans les terres d’exil de sa diaspora, communément
appelées Polonia. Cette diversité de lieux dessine une cartographie mentale où les détails vivants et intimes du quotidien peuvent croiser la route du
surnaturel.
Pour cela, Lucas Olivet s’est laissé guider par une légende polonaise, celle d’Andrzej Tadeusz Bonawentura Kosciuszko.
Les historiens l’appellent
« le dernier chevalier» ou « le premier citoyen du monde ».
Son destin héroïque illustre la cause commune des nations sujettes aux déplacements de leurs frontières. Le titre de l’exposition, Kopiec Bonawentura, est emprunté au nom du tertre
construit en sa mémoire sur les hauteurs de Cracovie.
Né en 1985, Lucas Olivet vit et travaille à Genève.
Diplômé de l’école de Photographie de Vevey, sa démarche explore les thèmes de la mémoire, de la perte et du désir à travers sa vie, mais aussi
dans un contexte historique et culturel plus vaste.
Représenté par le galeriste Jörg Brockmann, son travail a été publié et exposé internationalement, plus récemment aux Rencontres d’Arles,
Paris Photo et Unseen Amsterdam. Lauréat d’un Swiss Pho¬to
Award en 2014 et 2016, du prix Fotofilmic (CA) 2014 entre autres récompenses, ses photographies appartiennent à différentes collections privées et publiques dont la Lambert Art Collection (LAC). Kopiec Bonawentura est sa première monographie parue chez Kerber Verlag en 2018.
Photo de Tadeusz Kantor que vous pouvez retrouver au musée Tinguely
à partir du 9 octobre 2019
Cette série a été finaliste du Prix Dorothea Lange-Paul Taylor du
Center for Documentary Studies de la Duke University
en 2017. Medicine Tree est un projet inédit exposé pour la première fois cet automne à la Biennale de la Photographie à Genève.
l u c a s o l i v e t www.lucasolivet.ch
ho r a i r e s d ’ouv e r t u r e d e l a G a l e r i e ( e n t r é e l i b r e )
du mardi au samedi 11h-18h30 + dimanche 14h-18h (excepté en sept.) + les soirs de spectacles
L a F i l a t u r e , S c è ne n a t i on a l e – Mu l hou s e
20 allée Nathan Katz 68100 Mulhouse / 03 89 36 28 28 / www.lafilature.org
Judith Albert Träumender See, 2017 ; Installation vidéo, 12’30’’, couleur, sans son
A la Kunsthalle de Mulhouse jusqu’au 10 novembre 2019 Judith Albert (CH), Dana Claxton (CA), Nik Forrest (CA), Katrin Freisager (CH), Capucine Vandebrouck (FR) une proposition de Chantal Molleur (CH), Aaron Pollard (Ca) et Sandrine Wymann (FR),
Capucine Vandebrouck, Katrin Freisager
LaKunsthalle Mulhouse présente en partenariat avec White Frame, Bâle et OBORO, Montréal « Où sommes-nous« , l’exposition explore les thèmes de l’invisible, du passage et de la mémoire. Où sommes-nous, une affirmation, un état, et non une interrogation. L’absence intentionnelle du point d’interrogation, désigne ainsi comme point de départ à la fois l’endroit que nous occupons physiquement dans l’espace d’exposition et les croisements plus abstraits que nous percevons entre cet espace, les dispositifs de présentation et les propositions artistiques. Elle englobe 22 oeuvres présentées à travers une scénographie offrant une multitude d’approches pour explorer des questions fondamentales associées au cadre, à la narration, à l’image fixe et animée. Où sommes-nous trouve à Mulhouse sa deuxième variation.
Capucine Vandebrouck
Capucine Vandebrouck, née à Tourcoing , vit et travaille à Strasbourg, travaille à partir de matériaux fragiles, premiers. Ils fondent, s’évaporent, se consument. Ils nous renvoient à la fugacité des situations et affichent avec beaucoup de poésie la complexité des choses. Ses oeuvres ne s’installent pas entre deux certitudes, elles intègrent le doute et composent avec l’éphémère. Placée devant le mur de telle sorte à projeter l’image qui lui fait face, la loupe, à la manière d’une caméra obscura renverse le paysage et donne à voir le monde à l’envers.
En cela, elles s’affranchissent aussi du point d’interrogation préférant jouer délibérément de leur nature insaisissable et des espaces qu’elles occupent. Les photographies de Katrin Freisager, zurichoise, sont denses et enveloppantes. Katrin Freisager, née à Zurich, vit et travaille à Zurich et Bâle, présente pour cette exposition un papier peint mural de 3 mètres sur 3. (photo 1) Cette image a été mise en scène par l’artiste dans la nature en forêt. La construction sculpturale composée de bas de nylon et de branches s’intègre dans son environnement naturel et devient par l’intermédiaire de la photographie un élément en soi. L’intervention de l’artiste mêle Land Art et photographie.
Dans sa série Liquid Landscape, Katrin Freisager crée des paysages imaginaires et archaïques. Les photographies sont très énigmatiques. Par un processus qui lui est propre, l’artiste mélange à une grande quantité d’eau, encres, pigments, huiles et autres substances. L’objectif pour elle est de développer des images qui se rapprochent le plus possible de son imaginaire bien que n’ayant pas le contrôle de tout le processus. Ses expériences se déroulent en studio photo et sont entièrement mises en scène. En créant des gros plans sur les pigments et des amalgames obtenus, l’artiste saisit des nuances et des détails étonnants. Comme un alchimiste, Katrin Freisager crée pour nous des paysages qui semblent échapper à toute référence précise, tout en ayant la capacité d’évoquer des lieux et des situations, qui n’ont jamais existé.
Nik Forest, née à Edinburgh et basée à Montréal, travaille à l’aide de différents médiums dont la vidéo, le son, le dessin et l’installation. Ses vidéos expérimentales ont été deiffusées dans des nombreux festivals, galeries et musées en Amérique du Nord et en Europe. Ses oeuvres figurent dans des collections du Musée des Beaux-Arts du Canada, du Conseil des arts de Saskatchewan et de l’Université Concordia. Sa pratique explore et défie la normativité, se tournant souvent vers des stratégies plus abstraites, des procédés analogiques et des silences, par lesquels de simples gestes qui pourraient passer inaperçus acquièrent une réelle signification.
Judith Albert est née à Sarnen (CH), vit et travaille à Zurich. Elle a vécu deux ans à Paris et étudié les Beaux-Arts au Collège d’Art et de Design de Zurich. Depuis 1997, elle expose régulièrement en Europe et à travers le monde. Sa pratique englobe plusieurs formes d’expression incluant le langage, l’intervention artistique, la vidéo, la photographie et la performance. Depuis 2006, elle crée des oeuvres dans l’espace public en collaboration avec Gery Hofer.
Cette installation vidéo à 2 canaux traite du mot, du langage et leurs diverses possibilités d’interprétation. Elle éclaire avec délicatesse et une grande liberté de composition les thèmes de la résolution, de la transition, du changement, du chaos et de l’imagination. L’installation déploie un large éventail de questions sur le début de notre histoire et le pouvoir de la narration.
Dans une courte séquence onirique, une tache imprévisible se transforme à l’horizon en un nuage sombre. Elle finit par absorber son propre créateur et l’éloigner ainsi du précipice.
Artiste pluridisciplinaire, née à Yorkton (USA), vit à travaille à Vancouver Dana Claxton travaille dans le domaine du cinéma, de la vidéo, de la performance et de la photographie.
Ses oeuvres ont été récompensées maintes fois et ont été présentées et collectionnées à travers le monde. Dana est professeure associée au Département d’histoire de l’art, d’art visuel et de théorie de l’Université de la Colombie-Britannique. Dans son travail, elle s’intéresse à la beauté, à l’esprit et aux politiques socioculturelles autochtones. La Première Nation de Wood Mountain Lakota est sa réserve familiale.
Cette vidéo rend hommage à Johnny Cash tout en le critiquant. Elle a réintroduit une voix Lakota dans l’histoire de Wounded Knee telle qu’elle est racontée dans la chanson populaire Big Foot, enregistrée en 1972 dans l’album America, qui commémore 200 ans de l’histoire des États-Unis.
Rendez-vous autour de l’exposition :
ATELIER « BRODER LA MACHINE Du mercredi 25 septembre au dimanche 6 octobre Rendez-vous au TILVIST Coff’tea shop 23, rue de la Moselle – Mulhouse Renseignements et horaires sur kunsthallemulhouse.com Entrée libre RENDEZ-VOUS FAMILLE Dimanche 29 septembre → 15:00 – 17:00 Visite/atelier pour les enfants à partir de 6 ans et leurs parents Gratuit, sur inscription VISITES GUIDÉES Dimanche 29 septembre → 16:00 Dimanche 27 octobre → 16:00 Entrée libre KunstapÉro Jeudi 3 octobre → 18:30 Jeudi 7 novembre → 18:30 En partenariat avec Mulhouse Art Contemporain et la Fédération Culturelle des Vins de France Sur réservation, 5€ / personne KUNSTDÎNER Jeudi 10 octobre → 19:00 – 23:00 En partenariat avec Mulhouse Art Contemporain et la Fédération Culturelle des Vins de France et ÉPICES Sur réservation, participation de 50€ / personne
AuCentre Pompidou jusqu’au 20 janvier 2020 commissaire de l’exposition : Didier Ottinger, Directeur adjoint du Musée national d’art moderne Scénographe : Laurence Fontaine
Francis Bacon, Selfportrait (1971) Huile sur toile 35,5 × 30,5 cm Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, Paris Donation Louise et Michel Leiris, 1984
Il était très discret. Il estimait que la peinture était un lieu de mystère et que chacun pouvait y apporter sa part de soi, que ce n’était donc pas à lui de livrer quoi que ce soit. (Franck Maubert)
« Comment imaginer la vie sans la littérature ? Sans les livres ? C’est une source fabuleuse, un puits pour l’imaginaire » Francis Bacon
L’exposition « Bacon en toutes lettres » du Centre Pompidou s’attache aux oeuvres réalisées par Bacon (1909 – 1992), le maître irlandais, peintre de la tragédie et de la condition humaine, durant les deux dernières décennies de son oeuvre. L’exposition explore de façon inédite l’influence de la littérature sur la peinture de Francis Bacon. Elle comporte soixante tableaux (incluant 12 triptyques, ainsi qu’une série de portraits et d’autoportraits), issus des plus importantes collections privées et publiques. De 1971 à 1992, (date du décès du peintre), la peinture est stylistiquement marquée par sa simplification, par son intensification. Ses couleurs acquièrent une profondeur nouvelle, il use d’un registre chromatique inédit, de jaune, de rose, d’orange saturé. Des corps ramassés, recroquevillés, qui se tordent sur eux-mêmes, se pâment, s’abîment dans des excès de volupté, des convulsions de la chair. Peintre du « cri plutôt que de l’horreur », répétant à l’envi que « l’odeur du sang humain lui souriait »
In Memory of George Dyer, 1971 Huile et letraset sur toile, triptyque, 198 x 147.50 cm Fondation Beyeler – Beyeler Museum, Bâle
L’année 1971 est pour Bacon une date charnière. L’exposition présentée au Grand Palais le consacre internationalement. La mort tragique de son compagnon, quelques jours avant le vernissage, ouvre une période marquée par une culpabilité qui prend la forme symbolique et mythologique des Erinyes (les Furies) appelées à proliférer dans sa peinture. Les trois triptyques dit « noirs » peints en souvenir de son ami défunt ( In Memory of George Dyer, 1971, Triptych–August 1972 et Triptych, May–June 1973, tous présents dans l’exposition), commémorent cette disparition.
Axée en partie sur les liens entre le peintre et la littérature, l’exposition se place aux antipodes de toute narration ou de toute conception illustrative de la peinture. Des penseurs comme Georges Bataille ou Nietzsche, des écrivains comme Michel Leiris (auteur notamment d’une monographie sur le peintre, Francis Bacon : Face et profil) sont ainsi lus par de grandes voix dans les six « chambres d’écoute » qui jalonnent le parcours muséographique.
Francis Bacon, portrait of Michel Leiris
Michel Leiris occupe une place à part. Traducteur de la version française de ses entretiens avec David Sylvester, l’auteur de L’Âge d’homme devient le préfacier de ses expositions parisiennes. L’écrivain et le peintre se rencontrent à Londres, en 1965. Leiris adresse à Bacon la réédition récente de son Miroir de la tauromachie (publié en 1938) dans lequel il développe un parallèle entre l’art du poète et celui du matador. Une année après sa lecture de l’ouvrage, Bacon peint son premier taureau. Outre la poétique, Bacon transpose plastiquement chez Leiris, comme chez T.S. Eliot la forme fragmentaire de leurs œuvres, leur esthétique du « collage », qu’il rend parfois explicite, introduisant dans ses compositions des pages de journaux.
En outre, on retrouve dans les toiles de Bacon cet attrait pour la littérature sous des formes diverses et détournées, comme l’Orestie, qui donne son titre à certaines œuvres, mais aussi le corps comme viande, image si chère à Bacon, en écho à un texte de Georges Bataille sur l’abattoir ; le poème de T.S. Eliot, La terre vaine (The Waste Land), titre d’une des toiles, ou encore la réflexion nietzschéenne sur la tragédie, un motif obsessionnel chez le peintre.
Capter le mouvement de la vie est ce dont ont été capables les images modernes qui fascinaient Bacon. Ce que s’employaient à faire les images « chronophotographiques » de Muybridge, ce qu’accomplissait le cinéma. Le « vitalisme » dont Bacon s’applique à doter ses images était bien conforme à l’esthétique que lui inspirait la philosophie de Nietzsche. Pour être totalement accordée aux thèses de La Naissance de la tragédie, cette exaltation de la vie se devait de s’ouvrir à son négatif, à la puissance délétère de la mort. D’où les malentendus, la fixation d’une critique sensationnaliste sur la dimension morbide d’un art qui dit ne considérer la mort qu’à proportion de sa passion pour la vie. « Plus on est obsédé par la vie, plus on est obsédé par la mort », confie Bacon à l’un de ses interviewers.
Parmi les toiles de grand format qui ne sont cependant pas prises dans un triptyque, ce sera Study for the Human Body –Bacon ne cherchait pas des titres originaux et étranges –, de 1991
.Study for the Human Body
Il y a aussi des tableaux presque paysagers : une rue avec une voiture qui s’échappe et ce tableau incroyable qui s’intitule Jet of Water [Jet d’eau], 1979, la toile est presque vierge à peine une toute petite zone peinte, un robinet qui laisse échapper de l’eau, un tourbillon à la manière dont les corps à certains moments chez Bacon vont se liquéfier et quitter le cadre.
Eau coulant d’un robinet. Bacon l’a réalisée deux ans plus tôt. « C’est sans doute un de mes plus beaux tableaux. […] parce que je le trouve ‹ immaculé › […] c’est une invention où j’ai eu le sentiment pendant un moment que ma peinture fonctionnait. » d’après le commissaire Didier Ottinger
Jet of Water [Jet d’eau], 1979, Huile et caractères transfert sur toile 198 × 147,5 cm Collection particulière
« C’est un double personnage, il est insaisissable, irrationnel, comme sa peinture. Je n’avais accès qu’à une face de Bacon, même s’il m’entraînait dans sa nuit, presque pour parfaire sa légende…« (Franck Maubert)
Bacon donne une forme visuelle à l’angoisse et cette forme, comme l’angoisse elle-même, revient régulièrement. Bacon est magistral, la puissance de ses tableaux est presque obsédante. Son art n’est en rien « illustratif ». Les textes auxquels il se réfère lui inspirent des images, déconnectées de tous récits.
Dernier tryptique, des monstres qui hurlent dans Trois étudesde figure au pied d’une crucifixion, premier et décisif triptyque de Bacon de 1944, dont la seconde version, de 1988, est au bout de l’exposition, en un final terrible.
Second Version of Triptych 1944 [Seconde version du triptyque de 1944], 1988 Huile et peinture aérosol sur toile Chaque panneau : 198 × 147,5 cm Tate Gallery, Londres Presented by the artist, 1991
Un film sur la vie de Bacon conclue l’exposition
Les podcasts du Centre Pompidou Cette aide à la visite est proposée pour l’exposition « Bacon en toutes lettres » et permet de se laisser guider parmi les sources d’inspiration littéraires de l’univers de Francis Bacon très peu de cartels.
De Reynolds à Turner – Chefs-d’oeuvre de la Tate Britain Jusqu’au 16 février 2020 au Musée du Luxembourg 19, rue Vaugirard, 75006 Paris commissariat : Martin Myrone, conservateur en chef, Tate Britain Cécile Maisonneuve, conseiller scientifique, Réunion des musées nationaux -Grand Palais scénographie : Jean-Paul Camargo – Saluc
Ce sont 68 oeuvres exposées, presque à touche touche. Les années 1760, au début du règne de George III, ont marqué un tournant pour l’art britannique, avec l’ascension triomphante de Joshua Reynolds (1723-1792) et de Thomas Gainsborough (1727-1788), ainsi que la fondation de la Royal Academy of Arts dont Reynolds fut le premier président. Reconnus comme les maîtres du portrait, Reynolds et Gainsborough ont rivalisé pour élever le genre à des niveaux d’innovation visuelle et intellectuelle inédits. Ils ont su faire honneur aux grands maîtres, tout en faisant preuve d’une grande perspicacité psychologique et d’une maîtrise de la peinture sans cesse réinventée.
Joshua Reynolds L’Honorable Miss Monckton 1777-1778 Huile sur toile 240 × 147,3 cm Légué par Sir Edward Stern en 1933 Londres, Tate, N04694
L’exposition L’Âge d’or de la peinture anglaise s’ouvre par la confrontation des deux peintres, à travers des portraits en pied et des études intimistes, à la ressemblance frappante, de notables, de membres de la famille royale ou de personnalités. Les ambitions intellectuelles et références historiques de Reynolds contrastent alors avec l’instantanéité et l’aisance picturale de Gainsborough. À eux deux, ils ont redéfini l’art britannique et ont hissé la nouvelle génération vers de nouveaux sommets. Leur influence durable est ensuite explorée à travers une sélection de portraits majeurs réalisés par leurs concurrents directs ou par leurs disciples, attirés pour la plupart par la nouvelle Royal Academy, notamment John Hopper, William Beechey et Thomas Lawrence. Soutenue par le roi, mais aussi et surtout par les acteurs du commerce et de l’industrie, la peinture britannique s’épanouissait dans une diversité de styles, qui fut alors perçue par les contemporains comme le signe d’un âge d’or artistique.
Joshua Reynolds Master Crewe, en Henry VIII George Romney Mr et Mrs William Lindow Joshua Reynolds Miss Crewe
Sont ensuite abordés des thèmes alors en vogue comme celui de la lignée, de la famille et du foyer dans les portraits et la peinture de genre. L’époque a vu naître un nouveau regard sur l’enfance, caractérisé par des accents intimes et une apologie de la décontraction. Les représentations de la famille et de l’innocence enfantine illustrent alors une nouvelle compréhension de la nature et de l’émotion. La section suivante développe ce thème en s’intéressant aux peintures représentant la vie de tous les jours, en particulier la vie rurale.
George Stubbs Un Hunter gris avec un palefrenier et un lévrier à Creswell Crags Vers 1762-1764 Huile sur toile
D’importants travaux de Gainsborough (dans son rôle préféré de peintre paysagiste), de George Stubbs et de George Morland montrent la nouvelle attention portée au pittoresque, alors que l’extraordinaire portrait de Reynolds, The Archers (Les Archers), met le concept de nature sauvage au service d’une nouvelle image héroïque de la classe dirigeante britannique.
Reynolds, The Archers (Les Archers)
Une section plus resserrée illustre ensuite la présence de la Grande-Bretagne en Inde et dans les Antilles, rappelant que le progrès artistique et culturel du pays était, essentiellement, fondé sur l’exploitation politique et commerciale de territoires outre-mer. Une sélection d’oeuvres sur papier montre parallèlement l’essor formidable en Angleterre d’une autre forme d’expression picturale : l’aquarelle, qui permet à de nombreux d’artistes de se faire remarquer, tout en répondant au besoin d’une nouvelle société d’amateurs.
Alexander Cozens (1717-1786) Une tache : composition de paysage Vers 1770-1780 Aquarelle et mine de plomb sur papier
Reynolds, en tant que Président de la Royal Academy, définit de nouvelles ambitions pour l’art britannique, centrées sur la peinture d’histoire, seul genre permettant à un artiste de s’accomplir pleinement, même s’il constatait lui-même que les mécènes étaient rarement enclins à soutenir ce genre si noble. Les portraits, les paysages et les scènes de la vie quotidienne prospéraient en revanche, et la variété même de l’art britannique dans ces domaines semblait relever d’un génie propre au pays, affranchi des règles et des conventions. La peinture d’histoire se développa toutefois en Grande Bretagne et subit au cours de cette période une transformation radicale.
Henry Fuseli Le Rêve du berger, inspiré du « Paradis perdu » de Milton 1786 Huile sur toile
La dernière partie de l’exposition montre comment les artistes britanniques ont fait évoluer la figuration narrative pour l’emmener vers le sublime. Les travaux d’Henri Fuseli, de John Martin et de P.J. De Loutherbourg, ainsi que l’oeuvre de J.M.W. Turner,(exposition à Lucerne) ont ouvert la voie à une nouvelle conception de l’art comme support de l’imaginaire.
Joseph Mallord William Turner La Tamise près de Walton Bridge 1805 Huile sur placage d’acajou
Longs cartels explicatifs, contrairement à la sobriété de l’exposition Bacon au centre Pompidou, où les textes accompagnant les oeuvres sont lus dans des petites salles par des artistes. (billet en cours)
Musée du Luxembourg 19, rue Vaugirard, 75006 Paris
horaires d’ouverture: tous les jours de 10h30 à 19h, nocturne jusqu’à 22h le lundi.
accès : M° St Sulpice ou Mabillon Rer B Luxembourg Bus : 58 ; 84 ; 89 ; arrêt Musée du Luxembourg / Sénat
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Silences , exposition dont la commissaire est Lada Umstätter Scénographie : atelier oï, La Neuveville Collaboration scientifique / Musée d’art et d’histoire (MAH)
Marguerite Burnat Provins Autoportrait le doigt sur la bouche vers 1900, huile sur toile Musée du Valais
L’art est-il silencieux ? cette exposition lève le voile sur les différentes formes de silence exprimées par l’art, de la fin du XVe siècle à aujourd’hui. L’idée que les musées sont les nouveaux lieux de culte où règne le silence de la contemplation n’est pas nouvelle. Lieux de silence ? Pas vraiment avec tous les audios guides quelquefois parasites et leurs utilisateurs malentendants … Cette exposition réunit les grands noms de l’art européen et des artistes plus confidentiels (Barraud, Bruegel, Burnat-Provins, Corot, Courbet, Dürer, Fantin-Latour, Hammershøi, Hodler, Liotard, Morandi, Mušič, Rembrandt, Vallotton, Woog), ainsi que de l’art actuel (Collishaw, Huber, Marclay, Turell…)
Le parcours inclut quelque cent-trente peintures, sculptures, oeuvres graphiques, vidéos et installations, dont près d’un tiers proviennent des collections du MAH. Pour la majeure partie de la sélection, Silences bénéficie du généreux concours des prêteurs institutionnels et privés (Suisse, France, Italie et Allemagne). Mêlant les genres, les motifs et les époques, cette exposition est centrée sur le silence envisagé non seulement comme l’absence de bruit, de son ou de parole, mais aussi comme un état, une présence au monde, dont certaines oeuvres d’art nous offrent une forme condensée
Parcours de l’exposition
Une première partie, organisée autour de la figure humaine, met en avant les mises en scène du quotidien silencieux, des Hollandais du Siècle d’or à Corot et Fantin-Latour en passant par Liotard. En contrepoint à ces représentations idéalisées, s’ajoutent celles du non-dit, comme chez Vallotton. Une place de choix est donnée au genre silencieux par excellence, celui de la nature morte, sous ses deux versants complémentaires : la vie silencieuse (still life) et la vanité, invitation à la méditation sur la finitude de la vie (Brueghel, Collishaw, Neu, Stoskopff). S’ensuit l’espace du silence religieux, avec des oeuvres conçues pour susciter la dévotion et pour refléter la grande variété des réactions à la manifestation du sacré, de l’extase à la stupeur en passant par l’angoisse de la mort (Baugin, Rembrandt, Ribera). Une autre forme de cette inquiétude est la mélancolie, source d’intrigantes représentations symboliques (Carrière, Dürer, Mark Lewis) et de saisissants autoportraits (de Liotard à François Barraud), mais aussi d’un réinvestissement de genres traditionnels, poussés jusqu’à une forme de pure poésie du silence (Hammershøi, Morandi, Mušič).
Luigi Guglielmi
La mélancolie et la rêverie ouvrent le champ plus large de l’espace du silence, aussi bien concret sous la forme du paysage (Calame, Clot, Hodler, Huck), que mental ou abstrait avec tous les degrés intermédiaires des espaces symboliques (Gertsch, Rossi) ou conceptuels (Edmondson, Huber, Joly, Serra, Turell). Enfin, l’expérience du silence s’enrichit avec des oeuvres situées dans une zone intermédiaire et fertile entre musique et artsplastiques (Appia, Cage, Marclay).
Non-dit Cette section se concentre sur les modes silencieux de communication. Félix Vallotton fut le chantre de ces non-dits exprimant une palette infinie d’émotions : l’amour, la haine, la culpabilité, le pardon, etc. Sa célèbre série Intimités, illustrant dix moments de la vie amoureuse de la Parisienne Misia Sert, Felix Vallotton (1865-1925)
Silence sacré Dans l’art chrétien, maintes oeuvres ont pour fonction de susciter la piété et de favoriser la proximité et le dialogue intérieur avec Dieu. L’image de dévotion se fait le support d’un art de la méditation, en mettant le spectateur en présence même de l’événement religieux représenté, dont il devient ce faisant contemporain. Lubin Baugin (vers 1610-1663)
Vanité Memento mori : souviens-toi que tu vas mourir ! Mat Collishaw (1966) Chacune des oeuvres de la série Last Meals on Death Row de l’artiste anglais Mat Collishaw présente des mets correspondant au menu choisi par un condamné à mort pour son dernier repas. Elles sont mises en scène dans des compositions et des conditions d’éclairage directement inspirées de l’esthétique des natures mortes hollandaise du XVIIe siècle. Si la banalité de la vaisselle et des aliments présentés – le plus souvent des mets extrêmement simples ou de la junk food – tranche avec la richesse de ceux de ses modèles anciens, l’artiste ne les met pas moins en valeur par des éclairages somptueux, dans un contraste qui, ajouté à leur contexte tragique, en fait d’authentiques et poignantes vanités contemporaines. Le choix du menu de leur dernier repas, ultime choix de la vie des détenus, pourrait laisser attendre un choix personnel révélateur. Or, il est le plus souvent que le reflet d’habitudes de consommation d’une déroutante banalité.
Cette oeuvre de Mat Collishaw peut être considérée comme une méditation sur notre relation au monde à travers des images où les représentations de la beauté et de la cruauté se mêlent inextricablement.
Mélancolies La célèbre gravure de Dürer – dont on reconnaît le château de Chillon sur les bords du Léman en Suisse dans le paysage à l’arrière-plan – donne son nom à cette section qui réunit des instants méditatifs chargés de mystère, un sujet prisé notamment par les artistes symbolistes du tournant du XXe siècle. Plusieurs autoportraits (Barraud, Liotard, Music, Woog) viennent illustrer ces moments de réflexion et d’introspection.
Poésie du silence Dès l’Antiquité, la peinture a été désignée comme une « poésie muette ». Célèbre pour ses scènes d’intérieur dénuées de toute présence humaine et pour ses personnages parfaitement cois, le peintre danois Vilhelm Hammershøi donne à cette expression toute sa saveur. De leurs côtés, l’Italien Giorgio Morandi et le Slovène Zoran Mušič ont réduit la nature morte et le paysage à l’essentiel, en tendant vers l’abstraction, pour en faire émaner sa plus pure expression poétique.
Paysages silencieux La peinture de paysage invite à la contemplation et par là-même à une réponse silencieuse. D’abord considérée comme un genre mineur et décoratif, elle conquiert son autonomie en se nourrissant d’une étude attentive et topographique de la nature, de la fin du XVe au XVIIIe siècle. Solidaire du rapport changeant de l’homme à son environnement, cet art de délectation peut également se faire support de projection ou de méditation sur les relations de l’homme à la nature : menaçante ou domestiquée, préservée ou aujourd’hui à son tour menacée.
Un autre défi de la peinture a toujours été de traduire l’espace et de représenter des espaces silencieux. Cela participe souvent d’une recherche de l’absolu. Ce silence peut être exprimé sous la forme concrète d’un paysage où domine le calme apparent de la nature à l’état brut ou au travers d’une peinture métaphysique et chargée de symboles comme chez Edmonson et Huber. À force d’abstraction, certaines représentations d’espaces concrets tendent aussi à construire un espace mental silencieux. L’art abstrait rejoint aussi souvent une forme de silence, qu’il oppose parfois aux troubles du monde.
Partitions du silence
Quand John Cage signe sa partition de 4 minutes et 33 secondes de silence, le compositeur transforme une feuille de musique en oeuvre plastique. Dans sa série intitulée Espace rythmique de décors pour Émile Jaques-Dalcroze, Adolphe Appia imagine des espaces d’un dépouillement extrême que pourront occuper le geste, le son et le rythme. Dans cette section soulignant les interpénétrations entre musique et arts plastiques, l’art contemporain est particulièrement fertile avec notamment les oeuvres de Christian Marclay. .
D’entrée le ton est donné, la scénographie sobre est remarquable. La semi-obscurité incite à chuchoter, l’intimité avec les toiles exposées s’installe. La couleur noire des murs, pour la peinture ancienne, le vert pale pour les toiles contemporaines, sont un écrin flatteur pour l’ensemble. Les salles communiquent par un sas lumineux que l’on franchit avec gourmandise. Chaque salle est ponctuée par un texte d’introduction, la brochure explicative et les cartels sont un peu difficile à lire dans la pénombre, l’éclairage bien conçu, cependant permet de se poser sur un banc, pour lire. Certaines oeuvres sont interdites à la photo, chose qui n’est plus très courante actuellement. Je me suis fait reprendre par le gardien, prise dans ma frénésie de photos, ce n’est évident de bien voir les cartels.
Catalogue Silences, sous direction de Lada Umstätter, avec les contributions de Jan Blanc, Sylviane Dupuis, Alix Fiasson, Elisa de Halleux, Gabriel Umstätter. Coédition Musée d’art et d’histoire, Genève, et Editions Favre, Lausanne, 2019.
MUSÉE RATH, GENEVE Place Neuve accès bus 3 depuis la gare CFF