Au Petit Palais de Paris jusqu’au 24 juillet 2022
Commissariat :
Servane Dargnies-de Vitry, conservatrice des peintures du XIXe siècle au Petit Palais
Barbara Guidi, directrice des musées de la ville de Bassano del Grappa
Parcours de l’exposition
Prologue
Reconnu comme l’un des grands portraitistes de son temps, Giovanni Boldini
capture la vitalité et l’effervescence de toute une époque, avec une extraordinaire virtuosité technique. Qu’il représente la Toscane des années 1860, le Paris de la Troisième République ou le milieu mondain et frivole de la Belle Époque, il est le peintre d’une période foisonnante. À l’instar de Marcel Proust en littérature, il se mêle à la société qu’il peint et livre ainsi un ample témoignage sur ses personnages, ses goûts, ses moeurs et ses plaisirs.Mais Boldini fut victime de son succès. Trop exubérant pour les uns, trop
mondain pour l’avant-garde, trop facile ou trop chic pour les autres : on lui a
reproché de répéter la même formule et d’en tirer des avantages personnels et
économiques, loin de l’image d’Épinal de l’artiste bohème. En réalité, Boldini ne se conforme à aucune règle.
Innovateur infatigable, il a su se montrer sensible aux maîtres du passé tout en restituant la frénésie de la modernité, grâce à son coup de pinceau virevoltant. Par ce choix d’un art individuel et indépendant, il a conservé tout au long de sa carrière une originalité absolue.
Grâce à l’engagement exceptionnel du Museo Boldini de Ferrare, le Petit Palais
présente l’artiste italien sous toutes ses facettes, de ses débuts à Florence à sa
longue carrière parisienne, de ses tableaux de genre à ses portraits mondains,
en passant par toute une production plus intime, jalousement gardée dans son
atelier de son vivant. L’exposition rend hommage au peintre des élégances,
mais invite aussi à découvrir un artiste plus secret.
Section 1 – Boldini avant Boldini (1864-1871)
En 1864, Boldini s’installe à Florence, qui est alors le centre de la vie culturelle et artistique en Italie. Deux peintres, Michele Gordigiani et Cristiano Banti, le prennent rapidement sous leur aile, l’introduisant dans les cercles artistiques et auprès d’une société mondaine qui lui procure des commandes. Pendant un temps, Boldini fréquente aussi les Macchiaioli, groupe d’initiateurs de la peinture moderne italienne. Il réalise plusieurs portraits des membres de ce groupe. Sa manière innovante de traiter les arrière-plans, en représentant les
murs de son atelier plutôt que de faire ressortir ses figures sur des fonds neutres, frappe ses contemporains. Boldini commence à être remarqué par la critique. Une richissime anglaise, Isabella Robinson Falconer, convaincue de son talent exceptionnel, le présente aux grandes familles italiennes et étrangères qui vivent à Florence ou qui résident l’hiver sur la Côte d’Azur. Cette familiarité avec la bourgeoisie et l’aristocratie lui vaut un succès toujours grandissant et davantage de commandes.
Section 2 – Les débuts parisiens de Boldini (1871-1880)
Le 23 octobre 1871, Boldini arrive à Paris pour un bref séjour. La capitale
française vient tout juste de retrouver l’apaisement après la guerre francoprussienne et la Commune. Alors qu’il a prévu de retourner à Londres où
il s’est installé depuis le mois de mai, le peintre se laisse happer par la
promesse d’une vie parisienne palpitante et d’une grande carrière artistique.
Ainsi commence l’aventure française de Boldini, qui durera près de soixante
ans.
Par stratégie commerciale, il se rapproche notamment du marchand Adolphe
Goupil et met de côté sa vocation de portraitiste pour se consacrer « à l’art
à la mode », à la manière d’Ernest Meissonier et de Mariano Fortuny. Ce
style se caractérise par des peintures de genre de petites dimensions, avec
des personnages en costume du XVIIIe siècle, aptes à séduire la nouvelle
bourgeoisie entrepreneuriale. La jeune compagne et muse de Boldini,
Berthe, avec son visage doux et son innocence mêlée de sensualité, devient
la protagoniste de dizaines de scènes. Dans ses paysages, Boldini se
montre particulièrement attiré par les lieux que fréquente la haute société,
tels qu’Étretat, qui allait bientôt devenir une ville balnéaire à la mode. Si
l’exécution en plein air lui permet de capturer des impressions visuelles
fugitives, il retravaille néanmoins longuement ses peintures en atelier pour
parvenir à la composition idéale.
Le succès ne se fait pas attendre : Boldini est très vite reconnu en tant que paysagiste et peintre de genre, en France comme à l’étranger. Ses tableaux nourrissent, dans l’imaginaire collectif, l’image d’une société française
pacifiée, heureuse et harmonieuse, loin des souvenirs de la Commune.
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