Max Beckmann – Paysages.

 

Max Beckmann (1884–1950) Meerlandschaft mit Agaven und altem Schloss, 1939

Max Beckmann (Leipzig, 1884 – New York, 1950) est l’un des géants de la modernité, pourtant, il se considérait comme le dernier des grands maîtres classiques. Il n’a fait partie d’aucune des avant-gardes du XXe siècle, mais son oeuvre est marquée par
l’impressionnisme, l’expressionisme, la Nouvelle Objectivité et l’art abstrait.
Pendant longtemps, Beckmann a été considéré comme un artiste typiquement allemand et ce n’est que récemment que des rétrospectives à Paris, Londres et New York ont permis
de reconnaître son importance, à un niveau international.
Contre la tendance de l’art moderne à dissoudre les genres traditionnels, Beckmann s’est  attaché sa vie durant aux genres classiques de la peinture : à la représentation de la figure humaine, sous la forme du portrait, des tableaux mythologiques et des nus, aux natures mortes et aux paysages. Réputé comme peintre de la « condition humaine », il s’est aussi
consacré intensément à la peinture de paysage et l’a renouvelée d’une façon exceptionnelle, comme presque aucun autre artiste du XXe siècle.
L’importante exposition organisée par le Kunstmuseum Basel se focalise sur ses
paysages. Elle présente 70 tableaux, parmi lesquels des chef-d’oeuvres, comme Le
Port de Gênes (St. Louis Art Museum)

Max Beckmann (1884–1950) Der Hafen von Genua, 1927

ou le Bord de Mer (Musée Ludwig, Cologne), mais aussi des oeuvres d’exception, issues de nombreuses collections privées, dont certaines n’ont quasiment jamais été montrées au public. L’évolution artistique de Beckmann se manifeste nettement dans ses paysages. Dotés d’un contenu allégorique moindre, ils donnent immédiatement à voir les magnifiques qualités picturales de ses oeuvres. La vue distanciée que Beckmann porte sur le paysage est remarquable : vues par la fenêtre, rideaux, balustrades, colonnes et points de vue en hauteur jouent souvent un rôle de médiation entre l’espace habité et la nature
illimitée.
Max Beckmann (1884–1950) Winterlandschaft, 1930

Des objets personnels, fragments de nature morte, apparaissent fréquemment au premier plan, laissant deviner la présence de l’artiste. La dramaturgie des regards montre bien que Beckmann associe l’image d’un paysage abstraitement élaboré au souvenir d’une impression paysagère qui est au fondement de chaque tableau. Le regard qu’il porte sur la nature clarifie sa position et le place dans un certain rapport au monde. Comment ce rapport se modifie, c’est ce dont témoignent les paysages peints au cours des différents épisodes de sa vie, tel le tournant de Francfort-sur-le-Main, après la Première Guerre mondiale, ou les années d’exil à Amsterdam.
Max Beckmann (1884–1950) Meeresstrand, 1935

Max Beckmann est né un 12 février 1884 à Leipzig.  Sa famille s’installe à Brunswick en 1894.  De 1900-1903  il étudie à l’École des Beaux-Arts du Grand-Duché de Saxe-Weimar. Après avoir décroché son diplôme, il passe quelques mois à Paris.  De 1904-1914 Beckmann vit à Berlin où il devient membre de la Sécession berlinoise ; il sera plus tard l’un des membres fondateurs de la Sécession libre.
En 1906, Il épouse Minna Tube, puis en 1908 nait  son fils Peter.

De 1914 à 1915, Il est aide-soignant pendant la Première Guerre mondiale.
Suite à une dépression nerveuse, Beckmann s’installe à Francfort-sur-le-Main en 1915.
Ce changement de lieu marque un tournant artistique. Un an  après avoir divorcé de sa première femme, en  1925, il épouse Mathilde von Kaulbach, dite Quappi.

Un première grande rétrospective en 1928 a lieu à la Kunsthalle de Mannheim. Il commence à enseigner au Städelsches Kunstinstitut. Il loue un appartement et un atelier à Paris. Dans l’expostion figurent quelques toiles de son séjour parisien, ainsi que quelques paysages de la côte d’azur notament des paysages de neige. La crise économique mondiale (1932) le contraint à se défaire de son atelier et de son appartement parisiens.

Max Beckmann La Sacré Coeur sous la neige

Le 30 janvier 1933,  les Nationales-Socialistes accèdent au pouvoir. Beckmann est démis de ses fonctions de professeur un peu plus tard. Il déménage à Berlin. Puis il fuit à Amsterdam en 1937.
Les  oeuvres exposées dans les musées allemands sont confisquées. En 1938, Beckmann participe à l’exposition Twentieth Century German Art à Londres
Le 10 mai 1940, lorsque les troupes allemandes entrent aux Pays-Bas, cela l’empêche, pour plusieurs années, de voyager à l’étranger. Le 4 mai 1945 c’est l’ entrée des Alliés à Amsterdam, en tant que citoyen allemand, Beckmann redoute d’être expulsé de Hollande. Ce qui le fait accepter en1947, un poste à la Washington University Art School à Saint Louis.
En 1949,  il est nommé à la Brooklyn Museum Art School à New York.
Max Beckmann meurt le 27 décembre 1950, à New York.
C’est ainsi que l’exposition suit un accrochage chronologique et thématique, montrant la correspondance et les divers catalogues de ses expositions dans des vitrines.

 À l’occasion de cette exposition parait un catalogue richement illustré, Max
Beckmann – Die Landschaften, aux éditions Hatje Cantz. Il comprend des
contributions de Hans Belting, Eva Demski, Nina Peter et Beatrice von Bormann et sera aussi disponible en anglais (Max Beckmann – The Landscapes).
www.shop.kunstmuseumbasel.ch
Deux autres expositions complètent idéalement ce parcours et offrent une occasion
unique d’appréhender l’ensemble de l’oeuvre de Beckmann : « Max Beckmann. Face
à face », au Musée des Beaux-Arts de Leipzig (17 septembre 2011 – 22 janvier 2012)
et « Max Beckmann et l’Amérique », au Städel Museum de Francfort-sur-le-Main (7
octobre 2011 – 8 janvier 2012).
Les commissaires de l’exposition sont  Bernard Mendes Bürgi et Nina Peter
Jusqu’au 22 janvier 2012 au Kunstmuseum de Bâle
images visuels presse courtoisie du Kunstmuseum, sauf la dernière photo de l’auteur
clic sur les images pour les agrandir

Auteur/autrice : elisabeth

Pêle-mêle : l'art sous toutes ses formes, les voyages, mon occupation favorite : la bulle.

Une réflexion sur « Max Beckmann – Paysages. »

  1. lu dans les DNA Serge Hartmann
    Une vieille piscine grise et vide, dans un cadre assez indéterminé, et un parc dont la fontaine sert de terrain de jeux à des enfants : dans ce parcours à travers les paysages de Max Beckmann que propose le Kunstmuseum de Bâle, les deux seuls tableaux illustrant sa période américaine, à la fin de sa vie (1947-1950), provoqueront sans aucun doute l’étonnement du visiteur.
    Maigre final pour un artiste, qui toute sa vie traduisit sur la toile sa fascination pour la mer, ce dont témoignent d’emblée les adorables petites marines « de jeunesse » présentées en ouverture de cette exposition qui réunit 70 œuvres. N’allez pas croire que les commissaires aient bâclé le travail.
    « De ces trois années aux États-Unis, on ne compte pas plus de sept paysages. Notre choix était donc limité. On s’interroge effectivement sur l’absence d’un tel thème au regard d’un nouveau continent qu’il découvrait. Comment Beckmann, qui adorait peindre la mer, a-t-il pu ainsi faire l’impasse sur un sujet comme l’océan ? », observe Nina Peter, qui cosigne avec Bernhard Mendes Bürgi, directeur du Kunstmuseum, cette exposition Beckmann et le paysage.
    De Beckmann, compagnon de route de la Neue Sachlichkeit bientôt relégué par les Nazis au rang « d’artiste dégénéré », on connaît ce théâtre d’un monde grotesque qu’il observait dans des teintes froides, cette Europe hébétée par une première déflagration mondiale, et cependant déjà grosse d’une suivante autrement plus meurtrière, dont il traduisait les égarements ubuesques dans un dessin brutal, surligné de noir.
    Comme le laissait déjà percevoir la très belle rétrospective que lui avait consacré le Centre Pompidou à l’automne 2002, l’artiste n’en fut pas moins très inspiré par le paysage. « On n’en compte pas moins de 250 sur un catalogue raisonné de l’œuvre peint qui tourne autour de 850 numéros », indique encore Nina Peter.
    « Il est étonnant de voir comment le thème du paysage, qui paraissait obsolète au XX e siècle, qu’avaient abandonné des Kandinsky, Mondrian ou Malevitch, est resté toujours présent chez Beckmann », observe de son côté Bernhard Mendes Bürgi qui souligne la capacité du peintre « à en livrer une vision moderne, dans des cadrages inattendus ».
    Une modernité déclinée sur un mode sombre et tragique. Ainsi, cette fameuse lumière de la Méditerranée qui attira tant les peintres, Beckmann s’en détourne souvent, ignorant l’éblouissement solaire pour livrer des interprétations froides d’un théâtre de la nature disloqué ou de paysages urbains (Gênes, Marseille…) réduits à des constructions chaotiques.
    Un pessimisme qui s’offre pourtant une étonnante parenthèse, et assez curieusement au pire moment de sa vie. Durant la guerre, en « exil » à Amsterdam, Beckmann n’a plus la possibilité de montrer sa peinture. Il survit grâce au soutien de quelques amis et collectionneurs. Il réalise alors, d’après photos et en puisant dans sa mémoire, des paysages méditerranéens qui en traduisent une vision plus chaleureuse et colorée. Une énergie et une vitalité qui en font l’une des séquences les plus fortes de cette exposition.
    Serge Hartmann
    DNA

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