Sommaire d'août 2009

01 août 2009 : Passions partagées
04 août 2009 : Art Basel Unlimited 1
07 août 2009 : De Holbein à Tillmans au Schaulager de Bâle
11 août 2009 : La petite fille au ruban bleu
14 août 2009 : Livia de Poli à Mulhouse
18 août 2009 : Le curieux
21 août 2009 : Zofia Rostad une vie en couleurs
23 août 2009 : Keith Haring à la Kunsthalle Weishaupt d’Ulm
28 août 2009 : L’homme-lion au Weickmannium d’Ulm
30 août 2009 : Météo

Météo

Rassurez-vous, je ne me suis pas transformée en Miss Météo, dont je n’ai ni le talent, ni le look (voir celle de Canal +), mais je souhaite vous entretenir du Festival Météo de ma bonne ville :  Mulhouse. Pas très férue de jazz, j’ai assisté à un concert inédit de musique acoustique.
Cela se passait dans la salle de l’Entrepôt, où  plus souvent on peut voir des comiques se produire. Une première partie, surprenante, tout à fait intéressante où assis en cercle autour de
Jean-Luc Guionnet et Éric de la Casa, nous étions en direct dans  le garage automobile Dillmann, voisin de l’Entrepôt, littéralement truffé de micros. Trente mètres plus loin, les deux musiciens mixent en direct et sans filet ce matériau sonore brut de décoffrage, pour le plaisir d’un auditoire encerclé par huit puissants haut-parleurs.
L’Alsace :
« Ça vrille, ça cogne, ça râle, le chien du patron jappe dans les pattes des clients, la radio FM crachote et le téléphone sonne sans cesse — bref, un garage automobile typique, mais passé à la moulinette de
l’« octophonie ». Planant. »
Le patron du garage mérite une mention spéciale – 😉
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En seconde partie c’est Lionel Marchetti qui interpréta une suite de trois œuvres  de sa composition , de la musique concrète.  Ce sont des sons enregistrés et transformés par manipulation du support de l’enregistrement, (le disque et la bande magnétique à l’origine) C’est ainsi que l’on pu entendre un air de vieux piano désaccordé oublié dans un grenier. Les titres entendus :« Dans la montagne (Ki Ken Taï) Docteur Kramer (you are not you) et Natura Morta
(Distribution en CD via  : Metamkine.com)
Un franc succès, très applaudi par un public averti et conquis. Une découverte pour moi.

L’homme-lion au Weickmannium d’Ulm

homme-lion-ulm2.1251462965.jpgUnique en son genre, cette collection d’objets rares et exotiques, comporte entre autres des objets de culte et des ustensiles d’usage courant venant d’Afrique. Elle fut assemblée au XVIIe s par le marchand Chritoph Wieckmann d’Ulm pour son musée particulier d’art et d’histoire naturelle. Cette collection autrefois célèbre, compte parmi les plus anciennes d’Allemagne. C’est ainsi que j’ai découvert « l’homme-lion » plus de 32 000 ans d’âge avant JC.
Il y a plus de 30 000 ans – au début du paléolithique supérieur – le Jura souabe près d’Ulm faisait partie de l’espace vital des premiers hommes anatomiquement modernes (Homo sapiens sapiens). Ils traversaient en petites groupes les vallées marquées par la période glaciaire sur les traces d’animaux comme le mammouth, le renne et le cheval sauvage. On retrouve les preuves de leur présence dans les grottes environnantes, à savoir des restes des foyers, des outils, des armes et des bijoux en pierres, en os, en bois de rennes et en ivoire.homme-lion-ulm1.1251461977.jpg
Par ailleurs on a découvert dans quatre grottes des petites figurines qui sont pour la plupart entièrement sculptées. Ces figurines, taillées à l’aide d’outils en pierre dans de l’ivoire de mammouths, sont les preuves d’art mobilier les plus anciennes du monde. Elles témoignent des animaux de chasse importants à l’homme mais aussi des individus dangereux tels que l’ours et le lion des cavernes qui furent admirés pour leur force. Cette fascination s’exprime par l’homme- lion, la plus grande et la plus spectaculaire des figurines en ivoire, fouillée dans la grotte du Hohlenstein-Stadel dans la vallée de la Lone.
Cette statuette, magnifiquement sculptée dans une défense de mammouth, unifie des attributs humains et ceux propres à l’animal. L’aspect animal est exprimée par la tête de lion, le corps longitudinal et les bras en forme des pieds de derrière. Le côté humain est mis en évidence par les jambes et les pieds ainsi que par le fait que cet être soit représenté debout. La nature fragmentaire de la statuette ne  permet pas d’en déterminer le sexe.
La créature fantastique de l’homme-lion est un vestige unique qui fait preuve de da spiritualité et la religiosité des hommes de la dernière période glaciaire. Néanmoins nous ne saurons déchiffrer leur vision du monde – certainement complexe – qui se caractérise par un combat quotidien avec la nature.
L’homme-lion fera partie d’une exposition itinérante à travers l’Europe, d’après les renseignements obtenus auprès du musée.
photo 2 de l’auteur

Keith Haring à la Kunsthalle Weishaupt d' Ulm

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Cinq grandes toiles, une sculpture monumentale, ainsi que les travaux de papier issus de la  collection personnelle  de Siegfried Weishaupt, sur un total de 27 travaux exposés, constituent l’exposition Keith Haring  à la Kunsthalle Weishaupt, d’Ulm  dans le Bade Würtemberg
 Outre les œuvres de la collection propre, les prêts de prestigieux clients privés et collections de musée, ainsi que de la Keith Haring Foundation elle-même c’est une vue d’ensemble, de grande qualité des oeuvres de l’artiste new-yorkais  exposées sur  600 m².
La collection de Siegfried Weishaupt, outre les collections de Frieder Burda, Reinhold Würth, Friedrich E. Rentschler (RPC), Josef Froehlich et de la famille Grässlin fait partie des plus importantes dans le Bade-Wurtemberg.
Dans les années 1989 à 1992, sur le site de la société Weishaupt le « Weishaupt Forum » fait construire un bâtiment par l’architecte new-yorkais Richard Meier, auteur du Frieder Burda Museum de Baden Baden. Il sert de centre de formation, d’expositions et de lieu social de l’entreprise de bâtiment, à l’image de ce qu’a réalisé Reinhold Würth à Erstein.
kunsthalle-weishaupt-ulm.1251049566.JPGL’élégant ouvrage « Kunsthalle Weishaupt » en dépit de sa présence dans le centre d’Ulm, réalisé par  Wolfram  Wöhr architecte de Munich, ancien collaborateur de Richard Meier, avec ses 16 mètres de haut, est un véritable spectacle sur la Hans-Sophie-Scholl-Platz. Le hall d’entrée entièrement en verre est en continuité avec la rue. Ce gros cube d’ art semble presque flotter dans l’espace.
C’est en visitant l’atelier new-yorkais de keith Haring, que le couple  Weishaupt fit la connaissance de KH. Il acquit sa première œuvre de l’artiste, grâce à son exposition à la galerie Tony Shafrazi à Soho. Ce fut le début d’ importantes acquisitions par les collectionneurs allemands. KH vint leur rendre visite très peu de temps avant son décès en 1990.
Inspiré par le graffiti, tenant du Bad Painting, et soucieux de toucher un large public, Haring commence à dessiner à la craie blanche sur des panneaux publicitaires noirs du métro de New York. Il grave également des dalles de grès des trottoirs dans l’East Village (elles sont toujours présentes de nos jours). Un photographe, Tseng Kwong Chi, le photographie en permanence, même quand la police l’arrête. Il exécute plusieurs milliers de ces dessins, aux lignes keith-haring.1251049430.jpgénergiques et rythmées. La griffe Haring, c’est la répétition infinie de formes synthétiques soulignées de noir avec des couleurs vives, éclairantes sur différents supports. C’est un récit permanent où l’on retrouve bébés à quatre pattes, dauphins, postes de télévision, chiens qui jappent, serpents, anges, danseurs, silhouettes androgynes, soucoupes volantes, pyramides ou réveils en marche, mais aussi sexualité et pulsion de mort. Il est l’ami de Warhol,  Basquiat et c…
Son œuvre, tel un langage figuré et volubile sur des sujets universels, reste comme l’une des plus importantes de la fin du XXe siècle, comme s’il regardait le monde, derrière ses lunettes, avec des yeux d’enfant, et le présentait ainsi, pour parler aux adultes.
Jusqu’au 1 novembre 2009
photos de l’auteur

Zofia Rostad une vie en couleurs

Zofia Rostad au musée de l’impression sur étoffes de Mulhouse
Cet article est publié avec l’autorisation d’Elisabeth Dufresne.
vue par
Elisabeth Dufresne, professeur d’Arts Plastiques

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On évalue le succès d’un chanteur au nombre de disques vendus, mais qui peut dire combien de personnes en France ou en Europe dorment dans des draps créés par Sofia Rostad ? Il faudrait pourtant faire le calcul et constater alors la vraie popularité de cette petite dame aux cheveux blancs et lunettes rouge vif venue de Pologne en 1959 pour entrer à l’Ecole des Arts décoratifs de Paris.

Le Musée de l’impression sur étoffes de Mulhouse
lui consacre pour la 2e fois une exposition jusqu’ au 25 octobre 2009 (la première a eu lieu en 1983). On y voit les gouaches originales « au raccord », méthode qui permet de multiplier les motifs en créant un module de base suffisamment astucieux pour qu’un œil d’amateur ne puisse pas repérer le début ni la fin de ce motif. Ce sont des grands formats 64 x 64 cm.

Sofia Rostad n’utilise pas d’ordinateur pour ses recherches, elle préfère le plaisir de la gouache finement préparée puis appliquée très soigneusement pour obtenir des surfaces lisses et calmes qui peuvent être ensuite brossées avec une teinte contraste, elle travaille aussi le trait de pinceau comme une calligraphie pour mettre en scène de drôles de chats ou quelques renoncules à longue tige élégante (dessin en noir et blanc). Elle peut faire tout un poème avec un jeu de rayures très simple mais dont les teintes savamment orchestrées font vibrer le tissu et évoque toutes sortes d’ambiances lointaines.
catalogue-zofia-rostad.1250637156.jpgPour un même motif, le Musée montre toutes les variations imaginées par Sofia Rostad de la gamme de couleur à la maquette peinte en grandeur réelle jusqu’à l’impression sur tissu. On peut alors mieux comprendre le rôle d’un tissu de qualité qui va mettre en valeur le motif au lieu de le ternir.
Pour que les tissus exposés conservent leurs couleurs d’origine, l’éclairage est dosé avec prudence, on traverse le Musée dans une pénombre un peu mélancolique. Pour aller un peu plus vers le public qui ne vient pas assez dans ce Musée il faudrait agiter un peu la scénographie des expositions ; des photos, une interview filmée de Sofia Rostad manquent. Dans le catalogue elle est présentée dans son atelier, 2-portrait-z-rostad.1250637719.jpgmais il y a une seule photo alors qu’on aimerait la voir dessiner et peindre, ouvrir les tiroirs et de feuilleter les carnets de croquis, on aimerait aussi savoir à quoi ressemblait cette petite dame ronde à cheveux blancs lorsqu’elle étudiait en Pologne. En tant que professeur d’Arts Plastiques lorsque je visite une exposition avec un groupe d’élèves j’aime bien décrire la personne qui a créé tout ce qui est exposé, raconter sa jeunesse, comment est née sa vocation. C’est peut-être trop « people » mais pourquoi pas si cela permet d’intéresser les plus jeunes. Nos media mettent au pinacle des personnes qui n’ont pas toujours grand intérêt, pourquoi ne pas utiliser les mêmes méthodes de communication et rendre hommage avec plus d’enthousiasme à cette femme qui depuis 50 ans embellit nos intérieurs.
Elle le vaut bien, non ?!

Le curieux

Il est curieux ce personnage à la raie au milieu, dont on aperçoit le bout du nez et le regard derrière le phylactère vierge tenu des deux mains, au-dessus et au-dessous.

Quatorze fois répété sur l’archivolte qui surplombe le tympan de Conques : c’est la perfection Numérique 14 : 2. Avec le huitième qui termine chaque série à l’horizontale, c’est la plénitude. S’agit-il de figures angéliques ? Nul ne le sait en vérité, aussi les a t’on nommé Les « Curieux »

Le tympan polychrome de Conques
est une œuvre unique de la sculpture romane. La matière employée est le calcaire de Lunel. Les couleurs d’origine sont encore là en demi-teinte. La composition est une merveille d’équilibre et de sens spirituel. Le jugement de Conques se tisse comme une immense toile de fond théologique, liturgique, intellectuelle, féodale, morale. Pénétrer dans l’abbatiale de Conques est une démarche particulière, un mélange de spiritualité, de recueillement et d’admiration pour ce lieu extraordinaire. Dans une belle tranquillité nous avons eu la chance de monter jusqu’aux tribunes, afin de contempler les vitraux de Pierre Soulages qui complètent admirablement l’ architecture romane et aussi d’en repérer tous les détails.

photos de l’auteur
Visite virtuelle de l’abbatiale de Conques

autres détails en 7 pages

Livia de Poli à Mulhouse

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Livia de Poli a investi certaines places de la ville, avec ses sculptures colorées.
On se souvient de ses  « Morts Joyeuses » en 2008.
L’oeuvre de Livia de Poli est marquée par une virtuosité technique maîtrisée que l’artiste dépasse afin d’atteindre un art plus contemporain et torturé, non dénué d’humour. Si le corps reste une souce d’inspiration constante pour cette artiste venue d’Italie, le visage sera le fil d’Ariane qui nous conduira jusqu’à ces mystérieuses, Morts Joyeuses, rencontre entre Eros et Thanatos.
Vues l’été 2007, lors de l’exploration de la ligne bleue des Vosges, j’ai revu dans le jardin du musée des Beaux Arts de Mulhouse, ses sculptures, j’ai été intriguée par ce minotaure au féminin, « La Licorne du Fayé », rappelant autant Niki de St Phalle que le thème si cher à Picasso. Je suis ressortie du musée, enchantée, amusée, ravie même je dirai à l’idée de mourir en laissant une image hilarante, aux dents bien blanches et à la bouche cramoisie, couchée aux côtés d’un amant-aimant ….
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Hommage à Courbet
Virtuosité, rondeurs, couleurs (rouge et blanc), cette magicienne nous démontre toutes les facettes de son talent, avec un mélange d’humour, d’érotisme mais aussi d’émotion et un net penchant pour la morbidité, en un portrait contrasté de la Femme.
 
Tremblements Rouges
Les céramiques de Livia, virevoltent entre bouches, êtres hybrides, têtes et autres noeuds, Arcimboldo n’aurait pas renié Vertumne et Primavera.
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photos et vidéo grâce à l’aimable autorisation de l’artiste

La petite fille au ruban bleu

Suite à la projection sur France 5, je remonte mon article de 2009, sur le portrait d’Irène Cahen d’Anvers peint par Renoir en 1880.

J’ai été émue, mais aussi très admirative, de ce portrait croisé à la fondation Bürhle à Zurich. J’ai tenté par mes lectures d’en remonter l’histoire.

Voici ce qu’en disait Henri Michaux :

« Dans le visage de la jeune fille est inscrite la civilisation où elle naquit. Elle s’y juge, satisfaite ou non, avec ses caractères propres. Le pays s’y juge encore plus, et si l’eau y est saine, légère, convenablement minéralisée, ce qu’y valent la lumière, le manger, le mode de vie, le système social…Le visage des filles, c’est l’étoffe de la race même, plus que le visage des garçons…Le visage est leur oeuvre d’art, leur inconsciente et pourtant fidèle traduction d’un monde…visages mystérieux portés par la marée des ancêtres… visage de la jeune fille à qui on n’a pas encore volé son ciel… visage musical qu’une lampe intérieure compose plus que ses traits et dont le visage de madone serait l’heureux aboutissement »

Le portrait de Mademoiselle Irène Cahen d’Anvers, peint par Renoir en 1880, aujourd’hui unanimement reconnu comme un pur chef-d’œuvre. Traduisant avec délicatesse la rêverie mélancolique d’une jeune fille, ses grands yeux ingénus, sa chevelure rousse déployée sur le dos et ses mains sagement posées sur les genoux – « peu d’œuvres ont réussi comme celle-ci à capter tout ce qui nous demeure inaccessible du monde intérieur d’un enfant », écrit à son propos Pierre Assouline –, ce tableau n’eut pourtant pas une vie facile. Dès sa conception, l’œuvre déplaît fortement à la famille Cahen d’Anvers, et plus encore à la jeune Irène, qui déteste ce portrait d’elle-même et le détestera toute sa vie. Le chef-d’œuvre, comble d’infamie, sera relégué dans un placard, avant d’être recueilli, en 1910, par la propre fille d’Irène, Béatrice, offert par sa grand’mère la Comtesse Cahen d’Anvers.
Renoir et les Cahen d’Anvers se séparèrent dans de mauvaises conditions. Mécontents du travail de l’artiste, ils firent accrocher ces 2 tableaux (le pendant étant les 2 sœurs Elisabeth et Alice – Rose et Bleu) dans les communs de leur hôtel. On ne pouvait être plus méprisant, il mirent du retard à régler Renoir, d’autant plus qu’aucun prix n’avait été fixé par avance. Finalement avec mauvaise grâce, ils lui firent remettre 1 500 francs (1880). C’était plus qu’il n’avait jamais touché, mais nettement moins que ce qui se pratiquait ailleurs. D’autant plus que les Cahen d’Anvers étaient parmi les commanditaires présentés les plus riches.
Fort déçu de tant de pingrerie Renoir en eut des accès de mauvaise humeur antisémite que seule put tempérer la présence du portrait d’Irène dans une expositionà la galerie Durand-Ruel deux ans après.
Pour la petite fille au ruban bleu ce fut le début d’une presque légende.
Irène Cahen d’Anvers se laissa épouser par le comte Moïse de Camondo, à 19 ans le 15 octobre 1891. Elle se sépara du comte Moïse de Camondo, se convertit au catholicisme pour épouser celui qui avait entraîné les chevaux des écuries des Camondo, le comte Charles Sampieri.
C’est ainsi que la toile retourna dans la famille Cahen d’Anvers.
Trois décennies plus tard, la guerre s’abat sur les Cahen d’Anvers et les nazis raflent familles et tableaux. Le portrait de Mademoiselle Irène Cahen d’Anvers, dont la valeur, entre-temps, est devenue inestimable, (tombe entre les mains de Goering, qui le cède à un certain Georg Bührle), riche industriel suisse d’origine allemande, pourvoyeur d’armes lourdes pour la Wermacht et gros acheteur de tableaux volés. Léon Reinach époux de Béatrice de Camondo tente en vain de récupérer le tableau.
Mais à la Libération, Irène Cahen d’Anvers, ex-de Camondo et désormais comtesse de Sampieri, découvre dans l’exposition
« Chefs-d’œuvre des collections françaises retrouvés en Allemagne » une liste d’objets d’art pillés, la trace de son Renoir, et entreprend de le récupérer. La spoliation est manifeste, pour un tableau aussi connu et maintes fois exposé, et dont les légitimes propriétaires, Béatrice et Léon Reinach, ont disparu dans les camps. Aussi Irène héritière de sa fille, récupère-t-elle son tableau, mais c’est pour s’apercevoir qu’il lui déplaît toujours autant..
L’ex-épouse de Moise de Camondo, Irène devenue catholique et comtesse de Sampieri, divorcée du compte Sampieri, échappa aux nazis. Elle récupéra la fortune des Camondo par l’héritage Reinach après la guerre, et la dilapida.
Pauvre Renoir ! Rarement œuvre fut plus haïe par son modèle ! En 1949, elle le met en vente dans une galerie parisienne. Un amateur, aussitôt, s’en porte acquéreur. C’est… Georg Bürhle. Le portrait reprend le chemin de la Suisse, en toute légalité cette fois, et c’est ainsi qu’il se trouve aujourd’hui à Zurich, à la Fondation Bührle.
Dans le film que je viens de voir sur France 5, la cession par Goering à Bührle semble moins sûre.

D’après les dernières informations connues, il semblerait que c’est Irène Cahen d’Anvers qui aurait mis elle-même son  portrait en vente. Ce serait à  cette occasion que Monsieur Emil Bührle s’en est porté acquéreur. Il aurait aussi rendu les oeuvres spoliées à leurs propriétaires ou héritiers.

Kunsthaus, la Collection Emil Bührle

En 2021, à l’occasion de l’ouverture de l’extension du Kunsthaus, la Collection Emil Bührle, collection privée de renommée internationale, entrera au Kunsthaus. Le projet prévoit de placer les 166 tableaux et 25 sculptures de cette collection près de la section consacrée à l’art moderne afin d’offrir au public une continuité temporelle dans la présentation, dans un espace d’environ 1000 m2 spécialement conçu pour elles. Le regroupement des collections du Kunsthaus et de la Fondation Bührle dans un seul espace donnera naissance au plus important pôle européen de peinture impressionniste française après Paris.

Pour Zurich et la Société zurichoise des beaux-arts, la participation active d’Emil Bührle aux destinées du Kunsthaus a toujours été précieuse. Des dons comme les monumentaux tableaux de nymphéas de Claude Monet ou la Porte de l’Enfer d’Auguste Rodin sont désormais des incontournables de la collection. En finançant l’aile destinée aux expositions, Emil Georg Bührle a permis dans les années 1950 la naissance d’une plateforme dédiée à des événements originaux, où aujourd’hui encore, le public entre directement en contact avec l’art. Le travail de médiation culturelle auquel cette spectaculaire collection privée donnera lieu abordera bien sûr l’histoire de l’art, mais envisagera également la problématique des recherches de provenance, en replaçant les activités de l’entrepreneur et collectionneur Emil Georg Bührle (1890-1956) dans le contexte de l’histoire suisse.

De Holbein à Tillmans au Schaulager de Bâle

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Depuis le 4 avril, l’exposition «Holbein bis Tillmans» propose, dans le Schaulager de Bâle, 200 œuvres – peintures, sculptures, installations ou vidéos – étalées sur cinq siècles. Ces créations sont la propriété du Kunstmuseum, mais ont dû en sortir en raison de l’exposition que le musée bâlois consacre à Vincent van Gogh
A la frontière avec Bâle-Campagne, le bâtiment Schaulager, «le plus grand coffre au trésor de Bâle», monolithe signé des architectes Herzog & de Meuron, apparaît comme surgi du sol, cerné d’usines et de dépôts. On traverse la ligne de tram pour pénétrer dans une grotte de luxe. C’est ici que la commissaire et directrice des lieux Theodora Vischer a proposé ce déménagement inédit qui rapproche, par exemple, les Accidents et les  Ten-foot Flowers d’Andy Warhol des photographies du jeune allemand Wolfgang Tillmans.
Mais «Holbein bis Tillmans» est d’abord l’essai d’une rencontre entre les époques. La première œuvre, symbole de cette exposition, une photographie de l’artiste Rodney Graham représentant un savant, en selle à l’envers sur un cheval mécanique, lisant l’annuaire téléphonique de Vancouver la ville où il réside,  pour Allegory of Folly (2005), s’amuse du parallèle qui naît avec le portrait d’Erasme signé Hans Holbein (1530), vieux de cinq siècles, suspendu dans la salle contiguë. Parce que «l’art d’autrefois vu avec les yeux d’aujourd’hui peut parfois retrouver son actualité d’origine», explique Theodora Vischer.rodney-graham-allegory-of-folly.1249646830.jpg
C’est l’Etude d’un monument équestre « In the Form of a Wind Vane » L’artiste canadien reprend la pensée d’Erasme et fait allusion à son écrit provocateur, imprimé à Bâle, Das Lob der Torheit (1509) qui fit scandale à son époque. La modernité du sujet est évidente ainsi que le clin d’œil aux portraits présentés
Parmi les portraits peints par Hans Holbein le Jeune, on peut admirer celui de Bonifacius Amerbach, ami d’Erasme et de Holbein, grand collectionneur, qui céda sa collection au Kunstmuseum de Bâle en 1662.hans-holbein-portrait-de-bonifacius-amerbach.1249646913.jpg
La collection du musée des Beaux Arts de Bâle est ainsi la plus ancienne collection publique du monde.
Etrangement c’est une photo de Candida Hofer (1944) de la peinture d’un portrait de l’épouse de Holbein, en compagnie de leur fille Katharina et de leur fils Philippe, (car cette toile comme le  Christ Mort, ne doit jamais quitter le Kunst) est mise en coïncidence avec une toile de Picasso, Homme, Femme, Enfant.
Ce couloir vous conduit à l’installation de Llya Kabalov, « Mutter und Sohn » « das album meiner mutter » (1993) des lampes de poche sont à votre disposition pour découvir, ce que Beila Solodonkirna a rassemblé en souvenir de son fils, des objets usuels dérisoires, suspendus par  des fils, sur des cordes, comme une immense lessive, dans la pénombre, tout au long des murs des photos de famille.
Une autre étrangeté la vidéo «  Annex » de Tacita Deans filmant Mario Merz au visage menaçant.
La vidéo de Bill Viola, « Anthem » montre une jeune asiatique, laissant échapper un cri par moments, marchant dans une civilisation post-industrielle au son d’une étrange complainte,  seule humaine à L.A.
Les photos d’Andreas Gursky , montrant les bourses de Tokyo et de Frankfort  sont d’une technique plus actuelle.
David Claerbouts, dans sa vidéo nous emmène dans un « Happy Moment » où un groupe joue au ballon en toute quiétude.
Des tableaux noirs avec des dates d’On Kawara (1933) entourent une installation de Peter Fischli et David Weiss (1992/93) peter-fischli-david-weiss-tisch-1992-1993-detail.1249647123.jpgSur une immense table où ils ont déposé 750 objets reproduits en polyuréthane  significatifs de leur travaux en atelier.
Merian Maria Sibylla avec sa petite souris et ses fraises, voisine avec le RattenKönig de Katharina Fritsch, joli clin d’œil.
Les vanités et allégories de l’éphémère, se répondent avec le présentoir de Katatharina Fritsch, où une multitude des petits cerveaux (comme la pensée unique – formatée)katarina-fritsch.1249647514.JPG avec la toile de Remy Zaugg, gris sur gris, la vidéo de Gary Hill projetant un arbre minimaliste.
Toutes les associations ne sont pas pertinentes. Certaines toiles gagnent à être vues de loin :  telle Damascus de Frank Stella voisinant avec  Cedra de Donald Judd.
La madone de Robert Gober, transpercée par un énorme tuyau, à travers lequel apparaît un escalier où coûle l’eau purificatrice, trône toujours au-dessus de sa grille, flanquée de 2 coffres tout aussi aquatiques.
Les grands murs bénéficient d’un accrochage à touche-touche, muni d’un guide panoramique vous pouvez découvrir les noms des auteurs des toiles, quelques belles surprises.
Une exposition riche en découvertes, une occasion d’approcher les fonds souvent cachés du Kunstmuseum et de la Fondation Laroche. Il faudrait citer d’autres artistes et leurs oeuvres.
 Exposition visible jusqu’au 4 octobre.

Pas de documentation, ni de catalogue en français, vous  vous guidez seul à l’aide du texte allemand ou anglais. Encore moins de possibilité de photos.
 

Art Basel Unlimited 1

Cette année, l’exposition Art Unlimited, qui est déjà la dixième édition de ce secteur ,a  présenté
59 artistes de 24 pays. La liste des artistes qui participent à cette exposition prestigieuse, généreusement soutenue par UBS, se lit comme un gotha de la scène actuelle de l’art contemporain. De nombreux travaux exposés dans la Halle 1 ont été spécialement réalisés pour cette plate-forme. En plus de l’exposition dans la halle d’Art Unlimited, le secteur Art Statements  révèle cette année 27 expositions individuelles de jeunes artistes. Les sections Artists Books, Artists Records, une vidéothèque, Art Lobby et une librairie complètent le programme.
miss-art-basel.1247416632.jpg La conception de l’exposition de cette année, qui repose sur des propositions des exposants et correspond aux éditions précédentes quant au nombre d’artistes et au niveau qualitatif, a de nouveau bénéficié de la collaboration du Genevois Simon Lamunière, un commissaire d’exposition chevronné.
En plus de la diversité impressionnante des œuvres présentées dans les secteurs principaux de l’exposition, Art Unlimited réserve encore bien d’autres découvertes passionnantes aux visiteurs. Sur 12 000 m2, Art Unlimited offre aux artistes et aux galeries une plate-forme capable d’accueillir des créations qui dépassent les limites usuelles d’un salon d’art traditionnel, notamment des sculptures, projections vidéo, installations, peintures murales, séries de photos et performances qui trouvent ici un cadre à leur mesure.
sigmar-polke.1247415621.JPGAu cours de plus de quarante années de carrière, Sigmar Polke (Michael Werner Gallery, New York) n’a cessé de redéfinir le sens et la nature de la peinture à travers une approche radicalement personnelle des matières et procédés. Tout le parcours de l’artiste est caractérisé par l’exploration des liens qu’il laisse sous-entendre avec des “êtres supérieurs” et d’autres mondes, par le recours à des matériaux insolites comme la poussière de météorites, du graphite magnétique, du violet pur, du cinabre et des oxydes d’argent, pour n’en citer que quelques-uns. Au début des années 1990, il débuta une série monumentale de tableaux, les “Wolkenbilder” (1992), dont les séquences exposées à Art Unlimited représentent l’unique installation du genre de Polke. Ces créations reflètent le mystère et la magie d’un créateur extraordinairement vivant au sommet de son art.
“The Ballad of Sexual Dependency” (1973–1986) est la réalisation maîtresse de l’œuvre nani-goldin.1247415870.jpgde Nan Goldin (Matthew Marks Gallery, New York). Après avoir débuté en 1979 dans une boîte de nuit new-yorkaise pour une performance improvisée d’un soir, “The Ballad of Sexual Dependency” fut amené à sa forme actuelle au début des années 1980, avant d’évoluer au fil des ans vers une présentation de diapositives comprenant plus de 700 tableaux. Le portefeuille initial de tirages de la publication
ayant formé ce chef-d’œuvre n’avait jamais été exposé au public en Europe avant Art 40 Basel.
roni_horn.1247415955.jpeg“a. k. a.“ (2008/09), la dernière installation de photos de Roni Horn (Hauser & Wirth Zurich, Zurich/Londres), prolonge la ligne de travaux de portraits que Horn a définie au fil des ans dans le contexte élargi de son oeuvre. Dans chacune de ses créations, l’observateur est intégré comme un deuxième thème. La composition de paires et le dédoublement sont, depuis de nombreuses années, un leitmotiv de l’oeuvre de Roni Horn, et “a. k. a.“ illustre les dernières expressions de cet intérêt.
Quatre cubes transparents, en noir, blanc, jaune et bleu, sont disposés sous nos yeux comme un jeu d’esprit auquel Mondrian aurait lui aussi aimé jouer s’il avait eu accès à ces matières translucides. L’artiste vénézuélien Jesús Rafael Soto (Galerie Hans Mayer, Düsseldorf) s’est rendu célèbre par ses contributions à l’Op Art, ses sculptures cinétiques ainsi que par les liens qui l’unissaient à Jean Tinguely et Victor Vasarely. Mais il doit avant tout sa renommée à ses sculptures “pénétrables”, interactives, raphael-soto.1247416112.JPGqui se composent d’une succession de carrés réalisés à partir d’un accrochage de tubes étroits. L’oeuvre “Untitled” (1970) est présentée pour la première fois dans le cadre d’Art Unlimited
depuis une exposition en 1970 au Kunstverein de Mannheim.
Dans “Universum” (2008), une nouvelle œuvre complexe majeure, Stephan Balkenhol (Mai 36 Galerie, Zurich; Galerie Löhrl, Mönchengladbach; Stephen Friedman Gallery, Londres: stephan_balkenhol.1247416241.jpegGalerie Thaddaeus Ropac, Paris / Salzbourg) présente cinq immenses reliefs sculpturaux et architectoniques. En rassemblant des niveaux bi et tridimensionnels, l’artiste combine les sculptures sur bois et reliefs de son “homme ordinaire” avec des paysages, des scènes urbaines, la nature et des motifs détaillés.