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du 8/12/2007 au 2/3/08 à Colmar et à Karlsruhe Étrange lacune : bien qu’il figure parmi les chefs-d’oeuvre de la Renaissance, aucune exposition n’avait encore été consacrée au retable d’Issenheim. Ni même, en France, à son auteur. Comment Mathis Gothard Nithard, peintre franconien, actif dans le diocèse de Mayence, que la postérité retiendra sous le nom de Matthias Grünewald (1475/80-1528), a-t-il peint cette oeuvre hallucinante d’expressivité et de force pour les Antonins d’Issenheim ? Dans quels contextes artistique, religieux et social, une telle commande s’inscrit-elle ?
Ce sont des éléments de réponse qu’apportent le musée Unterlinden de Colmar et la Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe. Le premier dispose du chef-d’oeuvre absolu de l’artiste, la seconde de quatre tableaux et un dessin – pour un catalogue raisonné limité à 25 panneaux peints, tous d’inspiration religieuse, et 37 dessins. Il convient d’emblée de lever une équivoque : il ne s’agit en rien d’une rétrospective Grünewald, quoique plusieurs originaux aient été rassemblés – la Kunsthalle réunit 9 peintures et 6 dessins, Colmar ajoute 14 dessins à son retable. Mais pour qui ira de Karlsruhe à Colmar, de Colmar à Karlsruhe, les contours de l’artiste apparaîtront plus précisément. La Kunsthalle s’attache à restituer l’esprit de ce début du XVIe siècle riche d’une nouvelle vision naturaliste de l’art – celle des Dürer, Holbein, Cranach, Altdorfer… -, tandis qu’Unterlinden se concentre sur son retable avec 50 dessins et sculptures.
Concernant ce dernier, Pantxika De Paepe, conservateur en chef d’Unterlinden, et Philippe Lorentz, historien d’art médiéval, commissaires de l’expo colmarienne, bousculent les idées reçues. A commencer par celle de la réalisation non-simultanée des peintures de Grünewald et des sculptures de Nicolas de Haguenau. Il était jusqu’alors admis que le sculpteur strasbourgeois avait travaillé en 1490, soit 20 ans avant que le peintre n’exécute ses panneaux.
« Aucune preuve convaincante n’était avancée. De telles commandes étaient toujours conçues dans leur globalité, en totale interdépendance entre sculpture et peinture », indique Pantxika De Paepe. Qui ne croit pas non plus à la version d’un Grünewald peignant à Issenheim, le regard hanté par les souffrances des malades frappés du terrible mal des ardents dont se nourrirait sa représentation du Christ en croix.
Très romantique, certes, mais il semble plus probable que Grünewald, travaillant de concert avec Nicolas de Haguenau, ait été accueilli dans l’atelier de ce dernier. Les panneaux du retable sont d’ailleurs en tilleul, très prisé des sculpteurs, quand les peintres privilégiaient l’épicéa. Grünewald se serait simplement servi auprès du sculpteur. Le retable serait donc né à Strasbourg avant d’être acheminé à Issenheim.
Avec 160 oeuvres, la Kunsthalle offre le plateau le plus conséquent, et souligne l’exceptionnelle dramaturgie du corps souffrant propre à Grünewald – Cranach ou Dürer, à côté, semblent fades. « C’est lui qui va le plus loin », observe Pantxika De Paepe. Moins tonitruante, l’exposition colmarienne se révèle émouvante : les dessins préparatoires nous font entrer dans le processus de création du peintre.
« On quitte Grünewald à jamais halluciné », écrivait Huysmans. Il n’y a là, depuis, rien à ajouter. Serge Hartmann les DNA Un magnifique catalogue intitulé « Regards sur un chef-d’oeuvre » rédigé par Pantxika De Paepe et Philippe Lorentz a été créé pour l’occasion, j’ai eu le plaisir d’avoir une dédicace très personnelle de la part de l’auteur. curieusement c’est Lucifer l’ange déchu
qui a été choisi pour la 1e de couv,
cela change des madones de la renaissance
quoique celle de Grünewald soient belles
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Commentaires1. Le 10 décembre 2007 à , par lobitahallucinante d’expressivité et de force…
ce sont des paroles qui conviennent parfaitement à l’oeuvre de ton artiste..
.2. Le 11 décembre 2007 à , par elisabeth« Pantxika De Paepe. Qui ne croit pas non plus à la version d’un Grünewald peignant à Issenheim »
Pourtant j’ai vu de mes yeux dans l’ancien couvent des Antonins, l’endroit même, où Grünewald aurait peint le retable, c’est suffisament haut de plafond, pour que l’on puisse y croire
.3. Le 24 février 2008 à , par elisabethwww.latribunedelart.com/E…
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