Manfred Willmann Beau monde, où es-tu ?

Manfred Willmann avec sa compagne et collaboratrice Christine Frisinghelli, cinquante ans de complicité.   Photo Hervé Kielwasser l’Alsace

exposition du sa. 5 avril au dimanche 1er juin
vernissage le 4 avril à 19h
commissariat Christine Frisinghelli, Emmanuelle Walter, Manfred Willmann
A la Galerie de la Filature Scène nationale de Mulhouse avec le soutien du ministère fédéral autrichien des Arts, de la Culture, de la Fonction publique et des Sports, du Land de Styrie, de la Ville de Graz et du Forum Culturel Autrichien Paris.

Réunissant plus de trois cents photographies prises entre 1972 et 2024 dans sa région natale du sud de la Styrie en Autriche, Schöne Welt, wo bist du ? est la première grande exposition monographique du travail de Manfred Willmann en France. L’exposition de La Filature présente, jusqu’au 1er juin 2025, les principales séries qui ont fait la notoriété de l’artiste – Schwarz und Gold , Die Welt ist schön et Das Land qui sont au centre d’un cycle sur la nature entamé il y a plus de quarante ans, au côté de travaux qui comptent parmi les premières œuvres rares conceptuelles en Autriche et qui dessinent les contours d’un profond questionnement de Willmann sur le médium photographique .

photo © Manfred Willmann, sans titre , 1981, série Die Welt ist schön

Schöne Welt, wo bist du? Dans un monde agité, soumis à des bouleversements sociaux, politiques et environnementaux qui le plongent dans une profonde incertitude, quand encore certains cherchent à fermer les frontières et à rétrécir les imaginaires, ce vers du poète allemand Friedrich von Schiller (« Monde riant, où es-tu ? » en français) s’impose comme devoir se substituer au titre de l’une des séries emblématiques de Manfred Willmann, Die schöne Welt (« le monde est beau ») et à sa forme affirmative – non pas tant pour déplorer l’état du monde qui pour nous inciter à reconsidérer notre capacité à restaurer la réconciliation dans le réel de nos vies.

Depuis plus de cinquante ans, Manfred Willmann explore une photographie qui aborde les complexités du monde contemporain et de la culture visuelle à l’ère de la mondialisation. Le photographe enregistre méticuleusement notre existence, notre tentative d’altérité qui se heurte parfois à nos résistances, notre sens tragique de la vie qui se niche dans les plus petites formes de notre réalité. Ses grands ensembles montrent non seulement des détails bruts de la vie quotidienne, mais parlent également du médium photographique et de ses propres possibilités de représenter le monde dans sa beauté, sa laideur et sa fugacité.

MANFRED WILLMANN

Né à Graz en 1952, Manfred Willmann grandit au 36 Volkmarweg, dans le quartier de Straßgang, de parents germanophones ayant fui la Yougoslavie pendant la Seconde Guerre mondiale. Doué pour le dessin et la peinture, il s’inscrit à 14 ans à l’École des Arts et Métiers d’Ortweinplatz où il choisit l’option design décoratif. Otto Brunner, qui dirige les cours en ateliers, incite le jeune étudiant à fréquenter le centre culturel Forum Stadtpark et la Neue Galerie, les deux institutions de la ville de Graz qui présentent des expositions d’art contemporain. Plus tard, Willmann fréquentera également l’arrière-salle du Café Schillerhof, établie comme le lieu de rencontre des artistes, architectes et intellectuels, où une galerie d’art ouvre dès 1969.

À l’issue de ses études, Willmann travaille comme peintre d’enseignes puis trouve un emploi de décorateur de vitrines chez Foto Ehmann à Graz. Il y expose régulièrement des photographies de ses amis ou de ses propres œuvres. En 1974, Willmann ouvre la Galerie photo du Schillerhof dans une salle du célèbre café, où il organise des expositions personnelles de photographes telles que Friedl Kubelka-Bondy, Christian Vogt et la première exposition de Seiichi Furuya en Autriche. En 1975, sur une proposition du programmateur musical du Forum Stadtpark, Willmann prend en charge la section photographique du Forum.

En collaboration avec Christine Frisinghelli, alors secrétaire du Forum, et le photographe Seiichi Furuya, qui s’est installé à Graz deux ans plus tôt, Manfred Willmann transforme progressivement la galerie en un lieu de rencontre et de débats incontournable pour les artistes de la scène autrichienne et internationale. Leur projet, au début principalement axé sur des expositions monographiques (Luigi Ghirri, Rudolf Lichtsteiner…), s’oriente très vite vers de grandes expositions collectives. Dès 1977, ils conçoivent une première exposition de groupe consacré à la photographie contemporaine américaine, qui rassemble des œuvres de Lewis Baltz, Lee Friedlander, Ralph Gibson, Les Krims, Mary Ellen Mark, Duane Michals, Stephen Shore et Neal Slavin. Willmann, Furuya et Frisinghelli imaginent ensuite plusieurs événements dédiés à la photographie contemporaine japonaise. En 1980, le Forum Stadtpark accueille une exposition de Daido Moriyama, suivie d’une rétrospective de l’œuvre de Shomei Tomatsu et, une dizaine d’années plus tard, d’une exposition de Nobuyoshi Araki. Pour chacun de ces photographes influents, il s’agissait de premières expositions personnelles en dehors du Japon.

De 1979 à 1997, parallèlement à leur activité au Forum, Willmann et Frisinghelli conçoivent un cycle de symposiums sur la photographie dans le cadre du festival d’avant-garde Steirischer Herbst, fondé en 1968, en opposition à l’émergence d’une conception conservatrice et nationaliste de la culture. Le festival, qui combine positions esthétiques et réflexion théorique, favorise le dialogue entre les arts visuels, la musique, l’art dans l’espace public, le théâtre, la performance, les nouveaux médias et la littérature. Encouragés par l’effervescence du milieu photographique et particulièrement par le succès du premier symposium de 1979, Willmann, Furuya et Frisinghelli co-fondent en 1980 la revue trimestrielle Camera Austria . La revue est publiée en version bilingue (allemand et anglais) dès 1981. Willmann en est le rédacteur en chef et l’éditeur jusqu’en 2010. Après s’être séparé du Forum Stadtpark en 1997, Camera Austria – Laboratoire de Photographie et de Théorie se structure en association indépendante. Elle a depuis 2003 son siège au sein du centre d’art de Graz, qui abrite une galerie d’expositions temporaires, une bibliothèque d’étude et l’équipe rédactionnelle de la revue.

Photographe, conservateur et éditeur, Manfred Willmann est lauréat du prix culturel de la Société allemande de photographie (DGPh) en 1994 et du grand prix d’État autrichien pour la photographie en 2009. Ses œuvres sont entrées dans de nombreuses collections et ont été largement exposées en Autriche et dans le monde : Museum Albertina (Vienne), Wiener Secession (Vienne), Museum der Moderne (Salzburg), Museum Folkwang (Essen), ZKM (Karlsruhe), Musée de l’Élysée (Lausanne), Stedelijk Museum (Amsterdam), PHotoESPAÑA (Madrid), Tokyo Metropolitan Museum, Centro de la Imagem (Mexique), San Francisco Museum of Modern Art, MoMA (New York).

Informations pratiques

LA FILATURE Scène nationale
20 allée Nathan Katz
68100 Mulhouse
www.lafilature.org

+ club sandwich je. 17 avril 12h30 visite guidée, pique-nique tiré du sac et Food Truck sur le Parvis, sur inscription au 03 89 36 28 28

visites guidées pour les groupes (min. 10 personnes) sur rendez-vous edwige.springer@lafilature.org ou 03 89 36 28 34
Galerie en entrée libre
du ma. au sa. 13h-18h
+ di. 14h-18h
+ soirées de spectacles

Sommaire du mois de mars 2025

L’art est dans la rue

30 mars 2025 : Apocalypse
28 mars 2025 : Medardo Rosso
20 mars 2025 : Tous Léger !
9 mars 2025    : Arno Brignon Marine Lanier PLY
8 mars 2025    : Trente-et-une femmes
6 mars 2025    : Une histoire dessinée de la danse
1 mars 2025     : Soirée rencontre au cinéma Bel Air Robert Cahen & Jean Paul Fargier

Medardo Rosso

L’invention de la sculpture moderne

Au Kunstmuseum Basel | Neubau, jusqu'au 10.8.2025
Commissaires :
Heike Eipeldauer (mumok) et Elena Filipovic (Kunstmuseum Basel Scénographie : Meyer-Grohbruegge
 « Nous ne sommes rien d’autre que la conséquence
des choses qui nous entourent. »
— Medardo Rosso
Medardo Rosso, enfant juif2

Sculpteur, photographe et maître de la mise en scène, concurrent d’Auguste Rodin et modèle pour de nombreux·ses artistes, Medardo Rosso (1858 à Turin, Italie–1928 à Milan, Italie) a révolutionné la sculpture vers 1900. Malgré son influence considérable, l’artiste italo-français n’est guère connu aujourd’hui.

L’exposition Medardo Rosso.
L’invention de la sculpture moderne entend y remédier. Cette rétrospective d’envergure au Kunstmuseum Basel offre une rare occasion de découvrir la production de Rosso à travers quelque 50 œuvres plastiques et près de 250 photographies et dessins. Elle propose d’en apprendre davantage sur son œuvre pionnière qu’il réalisa à Milan et à Paris au tournant du siècle, mais aussi sur la portée contemporaine de son art, et offre en même temps la base pour redécouvrir l’histoire de la sculpture moderne.

Fruit d’une coopération avec le mumok (Museum moderner Kunst Stiftung Ludwig Wien), l’exposition, dont le commissariat est assuré conjointement par Heike Eipeldauer et Elena Filipovic, permet de comprendre les recherches radicales et transmédiales menées par Rosso sur la forme (ou l’absence de forme), la matière et la technique.
L’impact colossal de sa production artistique, toujours perceptible aujourd’hui, se manifeste dans le dialogue avec des œuvres d’art de plus de 60 artistes des cent dernières années, parmi lesquel·les Lynda Benglis, Constantin Brâncuși, Edgar Degas, David Hammons, Eva Hesse, Meret Oppenheim, Auguste Rodin et Alina Szapocznikow.

Medardo Rosso et son œuvre

En 1918, après avoir visité l’atelier de l’artiste, Guillaume Apollinaire écrit dans la revue parisienne L’Europe Nouvelle :
« Medardo Rosso est sans aucun doute le plus grand sculpteur vivant ».
À travers ces mots, l’influent critique d’art et poète rend un hommage
singulier à l’œuvre de Rosso. Né en 1858 à Turin, Medardo Rosso s’établit à Paris à partir de 1889. Il restera trente ans dans la métropole artistique française et ne retournera dans son pays natal, l’Italie, que les dernières années de sa vie. Hormis une année d’étude à l’Accademia di Brera (Académie des beaux-arts) à Milan où il s’inscrit à des cours de dessin à la Scuola di Anatomia (École d’anatomie), Rosso est un artiste autodidacte. Il est, en outre, l’auteur de nombreux écrits véhéments et au langage bien à lui dans le champ de la théorie de l’art.

À Paris, il tisse des liens avec les impressionnistes et fait également la connaissance d’Auguste Rodin (1840–1917), artiste déjà reconnu, avec lequel il travaille désormais à une redéfinition radicale du genre de la sculpture. Pour dépasser les conceptions traditionnelles de la représentation, la production et la perception, Rosso est convaincu de la nécessité de « redonner vie » en profondeur à la sculpture :
« Il n’y a ni peinture, ni sculpture, il n’y a qu’une chose qui vit. »

Les dimensions humaines de la sculpture de Rosso, la mise en scène fragmentée créant une intimité, ainsi que l’aspect imprécis de ses figures se heurtent aux exigences d’une sculpture monumentale héroïque pensée pour l’éternité telle qu’elle était courante autrefois, et, par conséquent, à des longues traditions sculpturales. Une préoccupation semblable obsède également Rosso sur le plan du motif et de la matière : il se consacre davantage aux gens du quotidien qu’aux glorieux récits épiques et crée des œuvres qui tentent de saisir l’essence éphémère d’un moment. 

Le processus créatif de Rosso

Outre le bronze, Rosso recourt pour ses figures à des matières plus modestes et
périssables comme la cire et le plâtre, jusqu’ici utilisées en sculpture pour des étapes préliminaires ou généralement comme outils. En raison de leur souplesse et de leur malléabilité, elles donnent une impression de fugacité – raison pour laquelle ses sculptures furent également célébrées comme une version sculpturale de l’impressionnisme. Il s’agit toutefois d’une appellation qui ne décrit qu’un aspect de l’œuvre pionnière de Rosso, difficile à catégoriser à bien des égards. Au fil du temps, l’artiste se concentre sur un répertoire restreint de motifs qu’il utilise de manière répétée avec différents supports et matières et qu’il décline en variations pour obtenir de multiples effets.

À partir de 1900, Rosso intègre systématiquement la photographie dans son processus créatif. Il photographie ses figures et expose ses prises de vue aux côtés de ses sculptures ainsi que de travaux de ses contemporain·es et de copies d’œuvres d’art d’autres époques sous forme d’ensembles. Par cette mise en scène, l’espace entourant les œuvres devient partie intégrante de l’effet sculptural global. Toutefois, les figures de Rosso ne sont pas uniquement destinées à des expositions, mais aussi – du fait de leurs dimensions intimes – à l’espace privé d’intérieurs bourgeois. Elles sont intrinsèquement
liées avec ceux qui les observent et avec « ce tapis, ce fauteuil » comme Rosso l’a lui-même décrit :

                                            Louise Bourgeois
« Nous ne sommes rien que les conséquences des choses qui nous entourent. Même lorsque nous nous déplaçons, nous sommes toujours liés à d’autres choses. »
Rosso accordait de l’importance à établir une relation, une « conversation » avec son environnement. Il le formula ainsi : saisir le moment particulier où le motif surgit et produit une émotion. À l’époque actuelle où le rapport entre l’individu et la société, entre l’humain et la technique est plus que jamais à l’ordre du jour, l’œuvre de Rosso apparaît comme « étonnamment vivante » selon les mots de l’artiste Phyllida Barlow (1944–2023), qui avouait sa fascination pour le sculpteur et son œuvre.

L’exposition à Bâle

Vingt ans après la première et dernière rétrospective en Suisse, la vaste exposition Medardo Rosso. L’invention de la sculpture moderne met en évidence l’approche expérimentale et trans-médiale de Medardo Rosso. Sa réalisation repose essentiellement sur les travaux de recherche et de préparation menés durant plusieurs années par Heike Eipeldauer (mumok), complétés par le concours d’Elena Filipovic à Bâle. L’exposition
réunit près de 50 sculptures en bronze, plâtre et cire de l’artiste, parmi lesquelles des pièces emblématiques, ainsi que des centaines de photographies et de dessins. Ces dernières décennies, nombre de ces œuvres n’étaient guère visibles hors d’Italie.

                Portrait d’Henri Rouart
(1890) est exposé ici aux côtés du Torse (1878–1879) d’Auguste Rodin et des Cinq
baigneuses (1885 ou 1887) de Paul Cezanne                           

Selon le principe de mise en regard, comme le pratiquait également Rosso, l’exposition présente son œuvre en « conversation » avec plus de 60 photographies, peintures, sculptures et vidéos anciennes et contemporaines. Il en résulte des dialogues transgénérationnels d’artistes de l’époque de Rosso jusqu’à aujourd’hui, parmi lesquel·les Francis Bacon, Phyllida Barlow, Louise Bourgeois, Isa Genzken, Alberto Giacometti, Robert Gober, David Hammons, Hans Josephsohn, Yayoi Kusama, Marisa Merz, Bruce Nauman, Senga Nengudi, Richard Serra, Georges Seurat, Paul Thek, Rosemarie Trockel, Hannah Villiger, Andy Warhol, Francesca Woodman et d’autres (voir liste ci-jointe).

Comparativement à l’exposition viennoise, l’édition bâloise présente, en
outre, des œuvres d’Umberto Boccioni, Miriam Cahn, Mary Cassatt, Marcel Duchamp, Peter Fischli / David Weiss, Felix Gonzalez-Torres, Sidsel Meineche Hansen, Henry Moore, Meret Oppenheim, Simone Fattal, Giuseppe Penone, Odilon Redon, Pamela Rosenkranz, Kaari Upson, Andra Ursuţa et Danh Vō.
L’exposition commence dès la cour intérieure du Hauptbau où Les Bourgeois de Calais de Rodin (1884–1889) est mis en regard avec un travail de Pamela Rosenkranz. Le parcours mène du Hauptbau au Neubau par la liaison souterraine où est installé un ample travail de Kaari Upson. C’est ici, au rez-de-chaussée, que commence l’exposition avec une présentation monographique d’œuvres de Rosso.

L’exposition se poursuit au deuxième étage à travers les mises en regard avec des œuvres d’autres artistes. Ces dialogues s’échelonnent le long d’axes thématiques à l’instar de « Répétition et variation », « Processus et performance », « Toucher, enlacer, modeler », « Mise en scène », « Informe », « Anti-monumentalité » et « Apparaître et disparaître ».


Les œuvres présentées proviennent des fonds des collections du Kunstmuseum Basel et du mumok de Vienne, ainsi que de collections internationales comme l’Albertina Museum, Vienne, la Galleria d’Arte Moderna di Milano, Milan, le Kröller-Müller Museum, Otterlo, le Kunst Museum Winterthur, le Kunsthaus Zürich, le S.M.A.K., Gand, le Städel Museum, Francfort-sur-le-Main, le Stedelijk Museum, Amsterdam, ou des artistes euxmêmes.
L’exposition a vu le jour en collaboration avec le Medardo Rosso Estate. La
scénographie est réalisée par Johanna Meyer-Grohbrügge et son équipe.

Catalogue

L’exposition s’accompagne de la parution d’une publication consacrée à Medardo Rosso, la plus complète à ce jour. Elle réunit des essais de Jo Applin, Heike Eipeldauer, Georges Didi-Huberman, Megan R. Luke, Nina Schallenberg, Francesco Stocchi et Matthew S. Witkovsky.
Ed. par Heike Eipeldauer aux éditions Buchhandlung Walther und Franz König, Cologne,
496 pages, 450 fig., ISBN 978-3-7533-0612-4
En allemand ou en anglais

Informations pratiques


Brochure
Kunstmuseum Basel

St. Alban-Graben 8
Case postale, CH-4010 Basel
T +41 61 206 62 62
kunstmuseumbasel.ch

Horaire d’ouverture
Lu fermé
Ma 10h00–18h00
Me 10h00–20h00
Je–Di 10h00–18h00

Accès
depuis la gare SBB tram n° 2 arrêt Kunstmseum

Arno Brignon Marine Lanier PLY

 (Mathieu Farcy et Perrine Le Querrec)
Exposition en entrée libre à la Galerie de la Filature Scène Nationale
Jusqu'au dimanche
23 mars 2025
Emmanuelle Walter, responsable arts visuels

Ce silence est bruissant de paroles

Le désir de confronter leur regard avec celui d’autres artistes ou celui d’auteur·rices, de travailler aussi avec ceux·celles qui n’ont pas accès à la création ou à la culture et de se rassembler autour d’idées fortes, anime chacun·e des artistes Arno Brignon, Marine Lanier et PLY (Mathieu Farcy et Perrine Le Querrec). Leurs travaux, qu’ils s’inscrivent dans une réflexion sur l’identité, la liberté de circuler, les inégalités sociales ou les relations entre nature et êtres humains, impliquent toujours d’autres participant·es qu’ils·elles considèrent comme agissant sur leurs créations.
S’affranchissant des notions de réel et d’imaginaire, construisant un monde où les connexions du vivant ne cessent de fusionner, ils·elles témoignent de moments de rencontres, d’une idée de l’art qui est aussi une manière de prendre soin de l’autre et de penser ensemble des images dans lesquelles se raconter. Cette exposition qui les réunit et mêle leurs images pour la première fois, construit un récit aussi photographique que littéraire, une narration qui restitue la démarche de chacun·e des artistes autant qu’elle invente une expérience commune.

Arno Brignon

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série
Us

De son voyage effectué de 2018 à 2022 avec sa famille au coeur des États-Unis, dans douze villes portant les mêmes noms que les capitales historiques européennes (Amsterdam, Copenhague, Berlin, Lisbonne, Londres,
Dublin, Bruxelles, Luxembourg, Rome, Athènes, Paris et Madrid), Arno Brignon restitue un road trip symbolique évoquant une société au parfum post-démocratique, au même moment où populisme et technocratie semblent
s’affronter un peu partout en Occident, dans un duel où le peuple ne se retrouve plus. Pour le photographe, regarder ce pays, né des colons venus d’Europe qui en ont chassé les autochtones, c’est nous regarder aussi, tant nos liens sont forts, et tant nos états sont unis pour le pire et le meilleur. Dans cette route, il y a forcément un peu d’une obédience à Robert Frank, Jack London, ou Wim Wenders, mais au-delà de l’initiatique, il y a une volonté de raconter ce pays avec le prisme des réminiscences de son histoire personnelle.

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Au contact

En 2024, Arno Brignon part au point septentrionale de l’Europe, d’abord seul jusqu’à Oslo, puis avec sa compagne et leur fille jusqu’à Nordkaap. Le voyage est autant une métaphore du parcours de l’artiste que de son besoin d’aller se confronter à la limite physique de notre continent. L’incertitude fait partie de la démarche, et Arno Brignon fait sien l’adage populaire selon lequel
« le hasard fait bien les choses ». S’il ne sait pas, au cours du voyage, la forme que prendra son projet, il sait qu’il entremêlera la photographie aux mots, la poésie à la géographie, l’intime à l’aventure.

Ce projet est réalisé avec le soutien du Centre Photographique Rouen
Normandie.

Marine Lanier

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Née en 1981, Marine Lanier vit et travaille à Crest dans la Drôme. Diplômée de l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles en 2007, la photographe développe une recherche qui se situe à la lisière du familier et de l’exotisme, du prosaïque et de l’étrange, du clan et de l’aventure. Des lieux intimes sont le support de fantasmes fictionnels où se rencontrent pays imaginaires, cartes et régions inconnues, climats perdus, civilisations disparues. Son approche relève de la fable documentaire ou du réalisme magique. En 2016, Marine Lanier publie aux éditions Poursuite une monographie, Nos feux nous appartiennent, accompagnée par un texte de l’écrivaine Emmanuelle Salasc-Pagano,
puis, en 2024, Le Jardin d’Hannibal. L’artiste expose son travail en France et à l’étranger (États-Unis, Chine, Canada, Australie, Belgique, Suisse, Angleterre, Allemagne, Luxembourg, Espagne, Portugal, Italie). En 2024, elle est résidente
de la Casa de Velázquez, académie de France à Madrid.

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Les Contrebandiers

Les Contrebandiers est une évocation poétique d’une marginalité discrète et nomade incarnée par les quelques silhouettes humaines qui la peuplent. Ces dernières, quoique repliées sur elles-mêmes ou sur leurs gestes, dialoguent avec des paysages de montagne qu’elles pourraient avoir traversés et des objets de fortune qui pourraient leur appartenir. Les frontières administratives et légales, dont semblent se jouer les hommes et les femmes photographié·es, s’effacent devant des frontières sensibles, voire existentielles, nées de la montagne et de ses contrastes.

série
Le Soleil des loups 2018


Durant des mois, Marine Lanier a parcouru avec deux frères un plateau volcanique du sud de l’Ardèche, monde isolé et impénétrable connu d’eux·elles seul·es.
Ses images de ce pays inventé, sorte d’Eden intemporel témoin d’un temps de l’enfance fait de fugues, de guerres, de solitude et de vie dans les bois, mêlent
récits intimes et mythologies collectives.

série
Le Jardin d’Hannibal

Animée par notre rapport organique à la nature et aux éléments, Marine Lanier observe le comportement des plantes, l’activité des jardinier·ères, des scientifiques et des chercheur·euses au jardin du Lautaret, le plus haut
d’Europe. Abritant les plantes et les essences alpines du monde entier, celui-ci a été créé dans le cadre de l’opération « Alpage volant » qui vise à trouver des solutions d’adaptation face au changement climatique – dans l’optique
d’un réchauffement de 2 à 3 degrés à l’horizon de 2100. La photographe joue avec les lumières, s’affranchissant des notions de réel et d’imaginaire, pour produire des images monochromes et organiques dignes d’un conte mythologique et écologique

PLY collectif Mathieu Farcy et Perrine Le Querrec

Site ci-dessous

Mathieu Farcy, photographe, et Perrine Le Querrec, écrivaine, forment PLY. Ce duo engage leur création commune vers des chroniques poético-documentaires faisant intervenir l’image, le langage et la mémoire.
Il avance avec lenteur, ses réalisations sont autant d’étapes pour déplier le réel et en observer les métamorphoses et les limites. Véritables traversées de la représentation, les deux artistes interrogent en permanence, aussi bien à leur
table de travail que dans la rue, une humanité des interstices, silencieuse et résistante. Leurs pratiques personnelles se rejoignent et forment des légendes, des objets intrépides, des performances activées par les gestes et le regard
du public. Ensemble, ils·elles cherchent à élucider le réel, c’est-à-dire à en exposer les points critiques, les brèches, les désordres, tout en se faisant se court-circuiter et se croiser les différents enjeux de la représentation. Leur complicité créative se façonne pli après pli, et bâtit des lieux de rencontres. C’est ainsi qu’ils·elles envisagent la création, un lieu d’avance, un lieu d’observation, un lieu d’accueil et de possibles.

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Les Amazones n’existent pas

Pour les femmes usant et transportant de la violence : quelles archives visuelles ? Quelle anthologie ? Nulle iconographie sur ce sujet, si ce n’est une iconographie « exotique », exotique comme les cartes postales des femmes des colonies, produites par les colons installés dans les colonies. Une propagande battant pavillon du patriarcat : une femme est une femme (sexy), est une
épouse, est une mère. Des images-stéréotypes conçues par le mâle gaze. Nulle cartographie textuelle ou mémorielle : ce continent interdit a été déserté. Les femmes guerrières, les seigneures, les combattantes, les femmes vivantes et leurs luttes : qui pour les écouter, qui pour aller à leur rencontre, dans les archives et dans notre quotidien ? En créant un atlas visuel et textuel
de la violence des femmes, PLY enclenche la remise en cause d’un « interdit anthropologique » : le quasi-monopole masculin des émeutes et revendications sociétales, des activités criminelles et de l’utilisation des armes, des Révolutions, des métiers d’ordre, des sports dits « violents », des engagements dans les luttes armées, les guérillas, les mutineries… Les Amazones existent.

série
365, Almanach manifeste

Les temps que nous vivons – écologiquement, socialement, politiquement – sont des temps troublés.
L’almanach propose de mettre en lumière les replis du temps, les similitudes, les motifs et les issues. Chaque mois ouvre des portes, propose des actions, déjoue les boucles historiques, permet de se positionner.
L’exposition à La Filature, Scène nationale de Mulhouse présente le mois de mars de cet almanach encore actuellement en création dans le cadre d’une résidence au musée Nicéphore Niépce à Chalon-sur-Saône.

série
Carole
Carole est une fiction qui superpose et interroge mots et photographies : qui domine, prédomine ? De l’image ou du mot, qui donne sens ? Une écriture qui questionne aussi les rapports entre le créateur et son personnage, alchimie imprévisible, superposition d’états, les nerfs et l’émotion, l’inconnu et les décisions.

Informations pratiques

LA FILATURE, SCÈNE NATIONALE DE MULHOUSE
20 allée Nathan Katz 68100 Mulhouse · +33 (0)3 89 36 28 28 · www.lafilature.org
La Filature est membre
de Plan d’Est – Pôle arts visuels Grand Est et de La Régionale (Art contemporain de la région tri-rhénane

galerie d’exposition
du ma. au sa. 13h-18h + di. 14h-18h
+ soirs de spectacles

Soirée rencontre au cinéma Bel Air Robert Cahen & Jean Paul Fargier

Robert Cahen appartient à ces pionniers de l’art vidéo au même titre qu’un Nam Jun Paik ou qu’un Bill Viola.

Dans le livre intitulé « De la trame au drame », Jean-Paul Fargier a rassemblé ses écrits sur l’émergence de l’art vidéo et la place qu’occupe Robert Cahen dans cette histoire.

Un mouvement artistique né dans le sillage de Pierre Schaeffer, où la musique concrète et le son ont commencé à se confronter à l’image électronique, ses machines, ses possibles.

L’exploration de ce nouveau champ de création a permis à Robert Cahen de livrer une œuvre incroyablement riche, pleine de sensibilité, d’inventivité poétique.

Dans l’entretien réalisé pour Mulhouse Art Contemporain, Jean-Paul Fargier retrace cette époque pionnière et la manière dont Robert Cahen y a fondé son art.


Site de Robert Cahen
4° de couverture

Vidéos et signatures
• L’art vidéo et l’oeuvre de Robert Cahen par Jean-Paul Fargier
• Ci-dessous l’entretien entre Jean Paul Fargier et Robert Cahen animé par Dominique Bannwarth président  de Mulhouse Art Contemporain
suite 2

• Philippe Schweyer, éditeur du livre, directeur de Médiapop-éditions

Salle comble au Bel-Air pour la soirée organisée par Mulhouse Art Contemporain à l’occasion de la parution de « Robert Cahen. De la trame au drame » de Jean-Paul Fargier. L’occasion de redécouvrir sur grand écran une sélection de films de Robert Cahen (avec un son parfait), d’écouter les deux amis dialoguer avec Dominique Bannwarth avant de refaire un peu le monde en sirotant quelques canettes entre amis. Carton plein pour le libraire reparti avec un seul exemplaire du livre fraîchement édité par Médiapop et déjà presque épuisé. Prochaine étape ce soir à la Maison de l’image à Strasbourg.
Librairie 47 ° Nord

Année Boulez centenaire

Pierre Boulez est né le 26 mars 1925. Il aurait eu 100 ans cette année. Un centenaire que la Philharmonie de Paris se doit de célébrer, tant est grande sa dette envers l’homme et sa vision fondatrice. Plus qu’un simple hommage, c’est un portrait multifacettes du maître que la programmation de la Philharmonie esquisse.

A voir
Memoriale -2011 – vidéo de Robert Cahen au musée de la Musique de la Philharmonie de Paris
– Reponz 1985

Ecart Prodution
édition d’un DVD

L’art d’être grand père

Question :

A quand une exposition photos ?

Épiphanies par Augustin Frison-Roche

Le Collège des Bernardins accueille à partir du 9 janvier 2025 « Épiphanies », l’exposition du peintre Augustin Frison-Roche. Dix-neuf toiles de toutes tailles se dévoilent sous les yeux des visiteurs plongés dans un univers onirique. La plupart des œuvres ont été créées dans le cadre d’une résidence aux Bernardins. Le monumental oculus « Assomption » sera visible avant son départ pour la cathédrale de Cambrai.

Depuis deux ans, le Collège des Bernardins et Augustin Frison-Roche travaillent à cette exposition dont la majorité des œuvres a été créée pour l’occasion.

Dès l’entrée dans la nef, le visiteur traverse une forêt de colonnes, qui laisse découvrir un paysage aux connotations rimbaldiennes, de la fin de la nuit à la lumière naissante de l’aube (Série “La forêt était devenue une immense basilique« ). Le visiteur est ensuite accueilli par l’Étoile, dressée à l’entrée de l’ancienne sacristie. Comme cette promesse qui attendait les Rois Mages, le visiteur suit un itinéraire qui saura le guider jusqu’à eux, œuvre phare monumentale de l’exposition, après avoir découvert “Les sept jours de la Création” , “L’Esprit” et “Cana”.  

                                               Les Rois Mages
« Augustin Frison-Roche voit au-delà. Il représente ce que nous aimerions contempler et qu’il nous rend sensible : un monde où la grâce ne fait qu’un avec le sauvage, où l’amour est à réinventer. »

Christiane Rancé, romancière et essayiste, préface du catalogue de l’exposition Epiphanies (bientôt en vente)

                                                    Les Noces de Cana
L’exposition répond à une programmation artistique qui s’ancre dans le calendrier liturgique. En février/mars 2024, François-Xavier de Boissoudy était venu exposer aux Bernardins sur le thème de la Croix pour la montée vers Pâques, Augustin Frison-Roche nous accompagne après Noël pour annoncer la Bonne Nouvelle. Titrée au pluriel, Épiphanies, Augustin Frison-Roche s’appuie sur la lettre aux artistes de Jean-Paul II :

« À tous ceux qui, avec un dévouement passionné, cherchent de nouvelles épiphanies de la beauté ».

Ce sont toutes ces épiphanies ou « apparitions » que l’artiste a voulu explorer dans cette exposition, celles qui sont visibles dans l’Histoire Sainte, dans la Création, dans la contemplation de la nature, et qui sont un manifeste pour la création artistique.    

Notez les dates dans vos agendas :

Visites-conférences :

Informations pratiques

Épiphanies par Augustin Frison-Roche : La réservation d’un créneau horaire pour visiter l’exposition est obligatoire. L’entrée est gratuite.

COLLÈGE DES BERNARDINS
01 53 10 74 44

Faire un don
Jours et heures d’ouverture
Du lundi au samedi de 10h à 18h. Fermeture les dimanches et les jours fériés.
‍Visite libre de la nef et de l’ancienne sacristie (sauf pendant les montages et les démontages).

Fermeture exceptionnelle de l’exposition Épiphanies d’Augustin Frison-Roche mercredi 12 février 2025 jusqu’à 14h30. La nef, la libraire La Procure et la Table des Bernardins restent accessibles.

Ouvertures nocturnes exceptionnelles de l’exposition Épiphanies d’Augustin Frison-Roche les 12, 13, 14 et 17, 18, 19 février jusqu’à 22h.

Métro : Maubert-Mutualité ou Cardinal Lemoine (ligne 10), Jussieu (ligne 7)
Bus : lignes 24 et 47, arrêt Maubert Mutualité – lignes 63, 86 et 87, arrêt St Germain – Cardinal Lemoine
Parking Maubert – Collège des Bernardins, 37 boulevard Saint Germain, 75005
ParisParking Lagrange – Maubert, 15 rue Lagrange, 75005 Paris

 

Marina Abramović en Suisse

Le Kunsthaus Zürich présente la première grande rétrospective de l’artiste Marina Abramović en Suisse, jusqu'  au 16 février 2025
L’exposition au Kunsthaus Zürich a été conçue en étroite collaboration avec
l’artiste. Mirjam Varadinis, curator-at-large du Kunsthaus Zürich, en a assuré le
commissariat. La rétrospective est réalisée en coopération avec la Royal Academy
of Arts, de Londres, le Stedelijk Museum d’Amsterdam et le Bank Austria
Kunstforum de Vienne.
 Mirjam Varadinis, la commissaire de l’exposition, “les réactions sont très variées”. 


Marina Abramović (*1946, Belgrade) est l’une des artistes contemporaines les
plus importantes. En plus de 55 ans de carrière, elle a réalisé des
performances légendaires qui sont entrées dans l’histoire (de l’art). 
Cette exposition comprend des oeuvres de toutes les périodes de la carrière de l’artiste et remet en scène live certaines performances historiques. Un nouveau travail est en outre créé spécialement pour le Kunsthaus, et implique directement le public.

Long durational performances

Marina Abramović a fait sa marque de fabrique de ses «long durational
performances»: des prestations inscrites dans la durée, exténuantes, dans
lesquelles l’artiste met à l’épreuve les limites du corps et de l’esprit et invite le
public à partager ces expériences avec elle.

Dans les oeuvres de ses débuts, elle
testait surtout les limites physiques. Dans ce domaine, on se souvient encore de
la série des «Rhythm Performances», dans lesquelles Marina Abramović exposait
son corps à des situations extrêmes, et expérimentait avec diverses formes de
perte de contrôle. Dans ses travaux plus récents, elle s’est plutôt intéressée à la
transformation mentale, au thème de la «guérison», et s’est attachée à proposer
une nouvelle expérience de soi aux visiteurs.

Avec ses «Transitory Objects»,
qu’elle réalise depuis le début des années 1990, Marina Abramović appelle le
public à interagir. Elle conçoit ces objets comme des outils permettant de mieux
se connaître soi-même. Pleine conscience, décélération, et partant, une autre
expérience du temps et de soi, ont toujours joué dans ces oeuvres un rôle central
– bien avant que ces thèmes ne soient en vogue dans la société. Par ailleurs,
l’artiste a développé la «méthode Abramović», un système destiné à approfondir
ces pistes avec le public, et à créer des possibilités pour vivre l’instant présent
plus consciemment et se connecter à ici et maintenant.

DES OEUVRES DE TOUTES LES PÉRIODES DE LA CARRIÈRE DE L’ARTISTE – UN
PUBLIC IMPLIQUÉ DANS LES PERFORMANCES

La vaste rétrospective organisée au Kunsthaus Zürich donne un aperçu du travail aux multiples facettes de cette artiste unique en son genre. On peut y voir des oeuvres de toutes les phases de sa carrière, relevant de différents genres: vidéo, photographie, sculpture et dessin.

Des performances iconiques sont également reproduites en live, comme «Imponderabilia» (1977) et «Luminosity» (1997).


Marina Abramović avait exécuté «Imponderabilia» pour la première fois à Bologne avec Ulay (1943–2020), son compagnon d’alors. Tous deux se tenaient nus à l’entrée du musée, face à face, et les visiteurs devaient se faufiler entre leurs corps. C’était une métaphore du fait que les artistes sont les piliers du musée, et que passer cette porte représente une expérience qui vous fait entrer dans un nouvel univers, celui de l’art. Cette expérience était et reste, à bien des égards, «impondérable», différente d’un individu à l’autre, mais dans tous les cas, elle constitue une rencontre puissante. À Zurich aussi, cette performance est présentée dès le début de l’exposition afin de conduire le public, physiquement et mentalement, dans un autre espace, voire de le mettre dans un autre état. En effet, la rétrospective organisée au Kunsthaus Zürich est bien plus qu’une exposition classique. C’est une expérience qui met en jeu les cinq sens, et invite le public à interagir et à participer directement. Cet accent mis sur les travaux participatifs fait de l’exposition une expérience unique et distingue la
rétrospective zurichoise des présentations qui l’ont précédée. Enfin, avec le

travail «Decompression Chamber», spécialement conçu pour le Kunsthaus
Zürich, Marina Abramović incite le public à faire halte un instant et à «décompresser», c’est-à-dire à se détendre et à adopter un autre état d’esprit, un autre état émotionnel, afin de se découvrir soi-même sous une forme nouvelle –mais aussi de percevoir autrement le monde.

RE-PERFORMANCES

Aujourd’hui, les re-performances ne sont plus réalisées par Marina Abramović
elle-même, mais par des performeurs et des performeuses locales. L’artiste
attache beaucoup d’importance à la transmission de son savoir à une nouvelle
génération. À cet effet, elle a créé le Marina Abramović Institute (MAI), qui
accompagne le processus de casting des performeurs et organise également des
événements avec de jeunes artistes de performance.

Vidéo

AUTOUR DE L’EXPOSITION: PROGRAMME / VISITES GUIDÉES

Les performances live de l’exposition, qui ont lieu tous les jours à intervalles
réguliers, s’accompagnent d’un programme de manifestations varié.
5 février: Marinas Choice: «The Space inbetween – Marina and Brasil»,
introduction de la commissaire Mirjam Varadinis.
Pour plus d’informations sur le programme, consulter
www.kunsthaus.ch/fr/besuch-planen/ausstellungen/marina-abramovic/ et
www.arthouse.ch.
Les visites guidées publiques en allemand ont lieu le dimanche à 11 h et le jeudi
à 18 h 30 (le jeudi 26 décembre: à 15 h).

« Arte Povera »

Emma Lavigne, conservatrice générale et directrice générale de la Collection PinaultCommissariat : Carolyn Christov-Bakargiev, spécialiste internationalement reconnue du mouvement italien.
L’exposition « Arte Povera » à la Bourse de Commerce — Pinault Collection
vise à retracer la naissance italienne, le développement et l’héritage international du mouvement. Jusqu'au 20 janvier 2025




La commissaire Carolyn Christov-Bakargiev réunit dans l’ensemble du musée plus de 250 oeuvres des treize principaux protagonistes de l’Arte Povera — Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Mario Merz, Marisa Merz, Giulio Paolini, Pino Pascali, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto, Emilio Prini et Gilberto Zorio — auxquelles s’ajoutent de nouvelles commandes, confiées à la fois à des artistes de ce groupe historique et à des artistes internationaux issus des générations suivantes, dont la création résonne étroitement avec la pensée et la pratique de l’Arte Povera.

La Bourse de Commerce — Pinault Collection présente une exposition d’envergure dédiée à l’Arte Povera. Le commissariat est confié à
Carolyn Christov-Bakargiev,
Celle-ci s’appuie sur l’important fonds d’Arte Povera de la Collection Pinault, mis en résonnance avec ceux des Castello di Rivoli Museo d’Arte Contemporanea (Turin), Fondazione per l’Arte Moderna e Contemporanea CRT (Turin), Kunstmuseum Liechtenstein — Vaduz, Museo e Real Bosco di Capodimonte (Naples), Galleria d’Arte Moderna (Turin), Centre Pompidou (Paris), Tate (Londres). La commissaire ouvre un dialogue inédit avec des oeuvres anciennes et contemporaines, ancrant l’Arte Povera dans une perspective temporelle élarg

PLUS DE 250 OEUVRES EN DIALOGUE

Outre le noyau d’oeuvres des treize artistes associés à l’Arte Povera, l’exposition comprend des pièces et des documents qui retracent les étapes clés de ce que l’on peut considérer comme les prémices du courant. Ces épisodes trouvent leurs racines dans la culture du bassin méditerranéen — des présocratiques à la pensée lucrétienne — et informent du rapport particulier entre modernité et ruralité qui a caractérisé l’Italie jusqu’à la seconde moitié du 20e siècle, en suivant une trajectoire, d’ascendance franciscaine, qui
traduit une volonté d’appauvrir l’oeuvre. Dans l’exposition, chacun des treize artistes est associé à une personnalité, un mouvement, une époque ou un matériau qu’il estime comme une profonde influence, à l’image de Giorgio De Chirico pour Paolini et une peinture d’icône de Sano di Pietro pour Marisa Merz.

SALON

Dans le Salon, l’artiste Pier Paolo Calzolari expose Senza titolo (Materassi)
(1970), une série de six matelas couverts de tubes réfrigérants. L’artiste transforme les objets les plus simples et les plus quotidiens en éléments de composition d’un tableau vivant.
Chacun pourvu de son propre motif fait de tubes, se couvrant progressivement de givre, les matelas deviennent comme des êtres vivants. La mise en évidence de l’énergie qui les parcourt, la blancheur spectrale, le bruit des moteurs autant que la froideur de l’ensemble font de cette installation une expérience totale, où la vue, l’ouïe et le toucher du spectateur sont sollicités.

ROTONDE

Les treize artistes y sont présents, se faisant écho les uns aux autres, recréant l’intense magma collégial et expérimental des premières années de l’Arte Povera. Le premier arbre sculpté de Giuseppe Penone y côtoie le premier
igloo de Mario Merz,

tandis que la première sculpture réfrigérée de Pier Paolo Calzolari dialogue avec la première Direzione (1967) de Giovanni Anselmo, rendant sensible l’essentielle continuité entre l’humain, le végétal et le monde minéral. L’espace de la Rotonde figure aussi un espace extérieur abolissant l’idée même de musée avec la fontaine fumante d’Alighiero Boetti, Autoritratto (Mi Fuma Il Cervello) (1993-1994).

PASSAGE

Pour cette exposition, les 24 vitrines du Passage réactivent la pensée de
Walter Benjamin et des passages parisiens comme une lecture du 19e siècle se transformant en autant de jalons temporels et contextuels, et rappelant le terreau d’où émerge l’Arte Povera. Y figurent les artistes de l’avant-garde italienne de l’après-guerre, tels que Lucio Fontana, dont les toiles trouées donnent aux artistes l’exemple d’un art qui s’affranchit de
l’espace du tableau, ou Piero Manzoni, par la dimension libre et provocatrice de son usage des matériaux. D’autres vitrines exposent la dimension plus internationale des influences de l’Arte Povera, qu’il s’agisse de l’Internationale situationniste ou du groupe japonais Gutai.

Une constellation de protagonistes y apparaît, des artistes aux galeristes, des critiques aux figures de théâtre, tel que le metteur en scène polonais Jerzy Grotowski qui ont participé à l’élargissement de la définition de l’art, l’ouvrant aux nouveaux médias, à la performance, à l’expérimentation.

GALERIES / FOYER / STUDIO

Dédiant à chaque artiste fondateur de l’Arte Povera un espace spécifique,
l’exposition offre un généreux aperçu de leur oeuvre, en mettant l’accent sur des pièces majeures de l’histoire du courant, issues de la Collection Pinault ou prêtées par des institutions de renommée internationale. En correspondance avec chacun d’eux, la commissaire a associé leur pratique à une influence sous-jacente — un matériau, un artiste, un mouvement ou une époque.

Galerie 2 : Jannis Kounellis / Marisa Merz / Mario Mer

Jannis Kounellis, Marisa Merz et Mario Merz ont fortement contribué à
révolutionner le rapport au matériau. Tous les trois peintres de formation, ils se sont progressivement détachés du cadre de la peinture pour embrasser l’immensité des possibilités permise par le monde contemporain, sans jamais céder aux sirènes du progrès technologique :
Mario Merz « troue » des objets communs par des néons pour célébrer la continuité entre naturel et artificiel tandis que Kounellis

se tourne vers le charbon, la laine et le feu pour revenir à une forme de réalité archaïque. Marisa Merz tisse de manière visionnaire aussi bien des souliers que des formes géométriques au moyen de fils de nylon et de cuivre.

Galerie 3 : Michelangelo Pistoletto

Retraçant les différentes dimensions de la pratique de Pistoletto, l’espace
est ici habité par les « objets en moins » et les « tableaux miroirs » de l’artiste, pour lesquels il insère des figures, humaines, objectales ou architecturales, en papier peint et, plus tard, en sérigraphie, sur des surfaces réfléchissantes. Le miroir englobe le spectateur, permet de créer un tableau infini, où les visiteurs deviennent des éléments de composition. Animé par l’idée d’une forme d’utopie collective, Pistoletto conçoit sa pratique comme un engagement
social total, à l’image de Pace (1962-2007) réalisé lors des manifestations contre la guerre en Irak.

Galerie 4 : Alighierio Boetti

Alighiero Boetti pensait l’art comme une activité participative, un jeu basé
sur l’ordre et le désordre. Son attention s’est portée sur les matériaux les plus simples, « pauvres », au travers de manipulations élémentaires : accumulations, répétitions, mises en relation, actions à la portée de chacun. Souhaitant se défaire de l’imagerie de l’artiste vu comme un génie solitaire, Boetti orchestra sa propre disparition au sein d’un duo fictif,

« Alighiero e Boetti », se tournant également vers des formes de créations collectives, à l’image des Mappa et des techniques de tissage. Les multiples itérations de ses planisphères rendent également compte des évolutions géopolitiques.

Galerie 5 : Giuseppe Penone

Giuseppe Penone crée sa première oeuvre, « Alpi Marittime » (1968-1985),
alors qu’il est encore étudiant. Ces six images de manipulation sur quelques arbres et un ruisseau de son bois familial contient la quasi-totalité de la pratique à venir de l’artiste : une attention portée aux processus de croissance et de fabrication du vivant, au sein desquels Penone va s’insérer, sans chercher pour autant à les dominer. Ses Alberi visent à réattribuer à des poutres la forme des arbres qu’elles furent en suivant les cernes du bois. Chez Penone,
l’action artistique se situe au plus près du rythme du vivant.

Il me faudrait encore citer Galerie 6 : Pier Paolo Calzolari / Giovanni Anselmo,


Galerie 7 : Giulio Paolini / Pino Pascali / Luciano Fabro, Foyer : Gilberto Zorio,
Studio : Emilio Prini

C’est une vaste exposition qui demande quelques visites

Informations pratiques

Bourse de Commerce — Pinault Collection
2, rue de Viarmes
75 001 Paris (France)
Tel +33 (0)1 55 04 60 60
www.boursedecommerce.fr
Ouverture tous les jours (sauf le mardi), de 11h à 19h et en nocturne
le vendredi, jusqu’à 21h

La mémoire des murs

Françoise Saur, La mémoire des murs, texte Luc Maechel, Médiapop Editions, 2024

Publié par fabienribery le 

Bel Air, mémoire des lieux, par Françoise Saur, photographe

Mené en 2021 et 2022 auprès des habitants du quartier Bel Air, à Cernay, le projet La mémoire des murs, de Françoise Saur, est de nature mémorielle.

Il s’agit de documenter la fin d’un monde, les espaces vidés d’habitations promises à la démolition d’immeubles populaires de cette commune proche de Mulhouse.

L’auteure de Femmes du GouraraLes années Combi et Prises de vie, autres livres publiés par Médiapop Editions, s’attache à rendre compte avec beaucoup de grâce, à travers des traces de vie laissées dans les appartements, de l’existence d’habitants ayant été relogés (dernière section de l’ouvrage).

©Françoise Saur

Ce sont d’abord des lés de papiers peints, sortes de découpages involontaires à la Magritte donnant une impression d’abstraction.

Peu à peu, la vie apparaît, des dessins sur le plâtre, des inscriptions, des verres de vin posés sur le sol entourés de fils bleu, blanc, rouge, symboles de la République.

En effet, tout ici est de l’ordre du tissage, de la capacité à construire des liens, à débrouiller les fils pour penser de nouveaux nouages.

Des plafonniers, le carrelage mural d’une salle de bain, un fauteuil fuchsia dans une chambre rose bonbon.

©Françoise Saur

Le temps s’est arrêté, qu’il soit chrétien ou musulman, ici on vit ensemble, la mixité se voit, se partage, comme les difficultés quotidiennes.

Il y a quelquefois de petites mises en scène, des constructions de natures mortes, une façon de se déprendre de la nostalgie tout en la soulignant.

Des enfants ont vécu en ces lieux, y ont rêvé, y ont joué.

©Françoise Saur

Tout était beau et neuf à la fin des années 1960 lorsque furent construites les tours d’habitation, nécessaires pour y accueillir des habitants au sortir de la guerre, les travailleurs venus de Pologne ou d’Italie, puis ceux issus des anciennes colonies, oeuvrant à la prospérité de la France (les usines Peugeot ne sont pas loin).

Dans la deuxième partie de son bel ouvrage triste mais sans pathos, la photographe très sensible à la condition féminine – Françoise Saur est par ailleurs la première femme à avoir reçu le prix Niepce en 1979 – et au sort des moins nantis, fait poser des locataires dans leur ancien lieu de résidence.

Les visages sont graves, les yeux peuvent être mouillés, la vie a passé là, très vite.

©Françoise Saur

Un quartier populaire, c’est un summum de contacts, beaucoup de passages, des travailleurs de toutes sortes, des femmes voilées ou non, des interactions incessantes.

Que sont les habitants expulsés devenus ?

Les voici dans de nouveaux intérieurs, proprets, soignés, décorés de neuf.

Le chat s’est-il habitué à son nouveau environnement ?

Et toi mamie ?

Et vous qui riez et venez probablement des Comores ?

©Françoise Saur

A la télé, ce sont les mêmes programmes, mais sûrement en pire.

Le téléphone portable sonne, c’est l’heure de la prière, des retrouvailles, des nouveaux départs.

En juin 2013, un jeune de dix-huit ans, Nabil, s’est fait poignarder en bas de son immeuble.

Ce livre lui est dédié, on n’oublie pas, mais on avance, entourés de fantômes.

Livre à glisser sous le sapin de Noël

Ce livre est un voyage dans l’histoire d’un quartier populaire sorti de terre en pleine crise du logement dans les années soixante-dix. Le BTP, l’automobile, les filatures sont gourmandes en main-d’œuvre et attirent des populations d’origine maghrébine ou rurale qui quittent les fonds de vallées. Les baraques édifiées dans la hâte de l’après-guerre laissent la place à un grand ensemble en béton. Ainsi commence l’aventure du quartier Bel-Air. extrait …
Luc Maechel

THOSE EYES – THESE EYES – THEY FADE

MUSÉE DES BEAUX-ARTS, Mulhouse, jusqu’au 5 janvier 2025, tous les jours (sauf le mardi et les jours fériés): 13h – 18h30
et pendant le marché de Noël : 13h – 19h
Bénédicte Blondeau -Bernard Plossu –  Nigel Baldacchino – Raymond Meeks -Awoiska van der Molen
Commissaire : Anne Immelé

Dans le cadre de la 6e édition de la BPM, l’exposition those eyes – these eyes – they fade explore les liens souterrains unissant l’humain aux mondes vivants, et ce, depuis la nuit des temps. Offrant un parcours entre des espaces urbains et naturels, elle se veut être une méditation prolongée, une contemplation
active et poétique. Les oeuvres, parfois intimes parfois plus objectives, reflètent la vision personnelle des photographes et invitent à une expérience visuelle et émotionnelle plutôt qu’à une compréhension littérale.

Les installations photographiques encouragent le public à naviguer à travers des environnements aux contrastes marqués, suscitant une diversité de perceptions. Comme des images qui apparaissent à chaque clignement d’oeil, l’exposition propose des visions d’un monde en mouvement, mettant en évidence l’interconnexion entre les humains et les autres êtres vivants, y compris les plantes. Pour Emanuele Coccia, les plantes ont modifié la structure métaphysique du monde. Selon lui, c’est aux plantes qu’il faut demander
ce qu’est le monde car ce sont elles qui « font monde ». Cette connexion de la vie humaine avec celle des plantes, des minéraux, des différents organismes est primordiale dans la conception de mondes – devenus impossibles aujourd’hui – mais possibles demain.
Une première forme de those eyes – these eyes – they fade a été présentée en 2022 à l’espace Valletta Contemporary à Malte.

Quelques vues sur FaceBook

Bénédicte Blondeau

Avec Ondes, Bénédicte Blondeau documente les flux d’énergie qui façonnent nos existences tout en débordant nos capacités de perception. Cette série traite du lien entre notre origine et notre destination ultime. Ce même lien qui nous unit à des époques lointaines, aux premières formes de vie et au cosmos,
dans une vision d’interconnexion et d’interdépendance. Ondes présente une vision du réel qui n’oublie pas que celui-ci renvoie aussi à ce qu’on ne voit pas. C’est une exploration des éléments basée sur le principe que tout est en perpétuelle transformation, que nous soyons capables de le percevoir ou non.

Née à La Louvière, en Belgique, Bénédicte Blondeau a étudié la photographie à Gand et à Lisbonne, obtenant un master en communication appliquée à l’IHECS, à Bruxelles. Elle a participé à diverses expositions et conférences à travers l’Europe et son travail a été publié dans de nombreux magazines à l’international. En 2019, son premier livre photo Ce qu’il reste est paru chez l’éditeur portugais XYZ Books. En 2021, sa première exposition monographique a eu lieu au Photoforum Pasquart en Suisse. Bénédicte Blondeau a également travaillé comme réalisatrice de films documentaires et est actuellement
commissaire d’expositions photographiques pour PEP – photographic exploration project qu’elle a fondé à Berlin en 2019.

Bernard Plossu

La nature prisonnière de Bernard Plossu rassemble des clichés des années 1970, pris en France et aux États-Unis, illustrant la mise en scène artificielle de la nature dans des espaces pleinement bétonnés. Des arbres solitaires, ou presque, fournissent des effusions d’une vie végétale qui tente d’échapper au contrôle
de l’humain dans des environnements conçus par et pour lui. Face à ces images en noir et blanc, Bernard Plossu propose d’y opposer la chaleur de l’exubérante végétation du bassin méditerranéen. Après une vie de voyage, c’est au contact de cette nature côtière et généreuse que le photographe vit désormais, sans
oublier de lui rendre hommage par l’image.

Né en 1945 au Vietnam, Bernard Plossu réalise ses premières photos à treize ans, lors d’un voyage au Sahara avec son père. En 1965, il part au Mexique où il photographie ses amis beatniks avec lesquels il expérimente l’errance et la liberté. Il voyage chez les Indiens mayas, en Californie, en Égypte, en Inde, au Niger. En 1977, Bernard Plossu s’installe au Nouveau-Mexique. Il y perfectionne un style visuel direct caractérisé par une absence totale d’effet. Dans les années 1980, Il revient vivre en Europe et continue de marcher notamment en Espagne, en France, en Turquie ou sur les petites îles italiennes.
Ses images sensuelles et silencieuses évoquent la douceur des corps, de la matière, du mouvement. Il est l’auteur de très nombreux ouvrages ayant fait date, tels que Le Voyage mexicain, The African Desert, Au Nord, Avant l’âge de raison ou L’heure immobile.

Nigel Baldacchino

Dans Pinetu, Nigel Baldacchino capture les arbres du Jubilee Grove, un espace vert urbain à Malte.
Chargé d’histoire pour les habitant·es, ce bosquet charrie avec lui plusieurs strates d’une honte aux accents catholiques. Il s’y déroule une culture de drague masculine active mais secrète alors que le lieu, témoin d’épisodes de violence, sert également de refuge aux sans-abris et de zone de consommation d’héroïne.
Les formes uniques des arbres deviennent des métaphores des divers parcours de vie, bifurquants et entrelacés, tandis que l’espace porte également la mémoire personnelle de l’artiste qui a grandi non loin de celui-ci. Ne représentant que la végétation du parc et non sa population y vivant souvent une double vie, Nigel Baldacchino choisit d’éluder toute représentation explicite et sensationnaliste au profit du trouble de la suggestion.

Né en 1989, Nigel Baldacchino est un artiste et un architecte basé à Malte. Sa pratique artistique s’étend à divers médias, dont la photographie, la production musicale, la vidéo, le texte et la conception d’objets et d’espaces physiques. Son élan vers la photographie dépasse le cadre de thèmes donnés et est souvent alimenté par ses propres réflexions sporadiques sur la façon dont les gens se rapportent au monde qui les entoure, par leur présence dans l’espace et la perception qu’ils en ont.

Raymond Meeks

Réalisées dans le désert californien au début de l’année 2024, les photographies de la série Erasure, after nature s’inscrivent dans les ruines du capitalisme. De la présence humaine il ne reste que des objets laissés au rebut et des vestiges, tels des ruines d’un passé glorieux désormais incompréhensible ou insupportable.
À la manière de la démarche qui caractérisait ses précédents travaux, le photographe a cherché à recenser des motifs et des textures témoignant de la vie itinérante ayant cours dans des espaces marginalisés. Par l’immersion totale dans ces territoires, son observation minutieuse devient une analyse des migrations humaines.

Connu pour ses livres et ses images qui s’attachent aux questions de mémoire et de lieu, Raymond Meeks explore la manière dont le paysage peut façonner l’individu et, de manière plus abstraite, la façon dont un lieu, même absent, peut continuer à exercer un pouvoir de fascination sur l’être humain. Son travail fait partie des collections permanentes de la National Gallery of Art à Washington D.C., de la George Eastman House à Rochester et de la Bibliothèque nationale de France. Ses expositions personnelles ont eu lieu chez Casemore Kirkeby à San Francisco et chez Fotografia Europea en Italie. En 2018,
son livre Halfstory Halflife (Chose Commune) a été sélectionné parmi les finalistes du prix Paris Photo / Aperture.

Awoiska van der Molen

Awoiska van der Molen présente deux séries dont les sujets sont éloignés spatialement mais se rejoignent dans l’impression de silence qui s’en dégage. Urban offre des scènes nocturnes contemplatives de la ville qui nous relient à une mémoire profonde. L’espace urbain s’y trouve comme figé dans un moment suspendu où seules les lumières artificielles rappellent une présence humaine latente. Les photographies du projet The Living Mountain forment quant à elles une plongée dans un univers isolé, préservé et luxuriant. La profondeur de leurs ombres rappelle par moments la lueur argentée des nuits de pleine lune. Deux idées de la densité sont ainsi mises en regard.

Née en 1972, Awoiska van der Molen est une artiste photographe néerlandaise. Elle a étudié l’architecture et le design, puis la photographie à la Minerva Art Academy Groningen et à la Hunter City University de New York. En 2003, elle
obtient une maîtrise en photographie à l’Académie St. Joost de Breda, aux Pays-Bas. Awoiska van der Molen est connue pour ses images analogiques monumentales en noir et blanc qui représentent son expérience de l’espace primordial et psychologique dans le monde qu’elle photographie.
Les oeuvres de la série The Living Mountain ont été prêtées par la Collection d’entreprise Neuflize OB

Informations pratiques

MUSÉE DES BEAUX-ARTS,
4 Place Guillaume Tell, Mulhouse
Ouvert tous les jours
(sauf le mardi et les jours fériés)
de 13 à 18 h 30