QUI NE DIT MOT…(Une victoire sur le silence)


Du 7 au 23 septembre 2023
Vernissage le 7 septembre à partir de 18h
Sous le commissariat de Marie Deparis-Yafil
Galerie Marguerite Milin
11 rue Charles-François Dupuis 75003 Paris

Pour une fois je vais parler/écrire d’une exposition que je n’ai pas vue, d’une part par amitié pour Naji, d’autre part pour la gravité du sujet

Note d’intention

Bien que fléau menaçant tous les enfants du monde, à tous les niveaux des sociétés, et à des degrés divers de barbarie, la violence sexuelle faite sur enfant reste un sujet éminemment tabou, tant sur les plans politique que culturel.
L’art lui-même, à diverses époques, a pu se faire l’écho bienveillant, sinon complice, de pratiques dont on connait pourtant les ravages physiques et psychologiques sur l’adulte que l’enfant abusé sera devenu.
Il est temps, aujourd’hui, que cela cesse, et que l’on puisse aussi entendre et voir la parole des artistes qui, d’une manière ou d’une autre, luttent pour que la parole des victimes soit entendue et reconnue.
Cette exposition collective, une première sur ce sujet, constitue un moyen d’objectiver la question, au travers de propositions artistiques contemporaines fortes, donnant matière – au propre comme au figuré- à réflexion, ambitionnant de contribuer à faire bouger les lignes.

Les artistes

Avec : Jessy Deshais, Naji Kamouche, Sylvie Kaptur-Gintz, Sandra Krasker, Monk, Piet.sO, Anne Plaisance, Virginie Plauchut, Erik Ravelo Suarez, Camille Sart, Maïssa Toulet, Tina Winkhaus.

QUI NE DIT MOT…

se réfère explicitement au proverbe d’origine latine qui tacet consentire
videtur («qui se tait semble consentir»), laissant au lecteur le soin de finir lui même la phrase, et posant ainsi deux questions cruciales, intimement liées: celle du consentement, celle du silence.
La locution populaire fait écho à cette tenace présupposition que celui qui n’objecte pas de refus donne tacitement son accord, préjugé si souvent répété dans les entourages des victimes, depuis «Tu aurais pu dire non» à «Pourquoi n’a-t-il/elle rien dit pendant toutes ces années?» … C’est le «non» qui n’a pas pu être dit, ou n’a pas été entendu, dont la victime devra sans cesse se justifier, c’est le long silence, dont il faudra se justifier encore, face à une ignorance et une suspicion persistantes des raisons profondes qui nourrissent un secret durant parfois des décennies. C’est aussi l’injonction au silence régnant dans les entourages, les familles…toute une mécanique des yeux et des oreilles tacitement fermés, socle parfois inattaquables des structures familiales et sociales…
«Qui ne dit mot…consent», est aussi un principe de droit, à la racine même de principe de prescription, qu’il nous faut aujourd’hui ré examiner et requestionner.

QUI NE DIT MOT… pour prendre à rebours donc, cette croyance que celui qui se tait consent, pour affirmer que le silence d’une victime ne vaut évidemment pas consentement, que rien n’est moins tacite que la domination par le silence.
Mais «Qui ne dit mot…» fait aussi allusion au silence de «ceux qui savent». Aujourd’hui, peut-être plus que jamais, savoir et ne rien dire doit pouvoir être appréhendé comme une forme de consentement au délit ou au crime. Cette parole là aussi doit être libérée. Dans le même temps, on ne peut – encore une fois- voler la parole à la victime, ni extorquer sa vérité. Les enjeux sont
complexes.
Evitant l’écueil de l’angélisme, opposant une image édulcorée de l’enfance à une réalité sordide, comme celui du voyeurisme, refusant toute ambiguité complaisante, cette exposition, premier moment d’un projet d’ampleur, entend ne laisser le moindre doute sur les intentions des artistes et du commissaire.
Au travers d’oeuvres de tous médias – peinture, sculpture, photographie, vidéo, installation…- l’exposition explore différentes approches, entre corps et esprit, réalité et mémoire, traumatisme et résilience, violence et réparation, avec une attention particulière portée à l’histoire : celle des enfances volées, des vies de famille spoliées, des adolescences mortifères, des adultes devenus avec peine, à qui on n’offre le plus souvent ni le droit de souffrir, ni la reconnaissance de cette blessure que rien ne viendra suturer.
Elle parle de manière plus générale, des systèmes et mécanismes de domination à l’oeuvre dans cet asservissement et cette réification du corps de l’autre, de l’emprise et de la manipulation, du silence et du secret, et prétend en ce sens à l’universel.
Elle engage, enfin, sur la voix de la résilience celles et ceux qui croient en le pouvoir cathartique de l’art.
QUI NE DIT MOT… est une victoire sur le silence, et la première exposition rassemblant des artistes contemporains pour dire non.
texte de Marie Deparis-Yafil

Naji Kamouche (France – Algérie)

« Seul » – Fenêtre, néon clignotant, poignées de porte, dimensions variables, 2003 (courtesy Naji Kamouche)
Portes fermées, portes qui se ferment… L’installation « Seul » évoque
avec une force dramaturgique puissante, au travers de ce simple objet familier – la poignée de porte- l’expérience de la victime de violence, de la solitude et de
l’enfermement, notamment dans le secret.
Que se passe-t-il derrière les portes fermées des maisons, des chambres ? Que se passet- il lorsque la porte s’ouvre, et que l’espace domestique, qui devrait
être sécurisant, se fait zone de danger et de peur ? Et le néon qui clignote, comme un appel au secours, derrière la fenêtre, inaudible, rappelle dans son insistance le cri du silence.
Naji Kamouche déploie depuis de nombreuses années un travail d’une sensibilité écorchée, empreinte de poésie et de violence, réfléchissant
tout à la fois l’arrachement, l’exil, la peur et la solitude. Au travers de divers médiums, avec une prédilection pour le volume et l’installation, il
développe une oeuvre sans concession, dans laquelle la fragilité de la résilience s’inscrit sur le fil d’une lutte constante pour vivre et survivre.
Naji Kamouche vit et travaille à Mulhouse. Son travail fait partie de nombreuses collections publiques et privées françaises (ville de Mulhouse, Artothèque de Caen, FRAC Alsace, FMAC / Fonds Municipal d’Art Contemporain de la ville de Paris, Musée des Beaux-arts de Mulhouse…) et il expose régulièrement en
Europe, dans des musées, centre d’art, galeries et foires.
Naji KAMOUCHE – Seul – © Fred

Jessy Deshais (France)

« Les petites culottes » Organdi, eau sucrée, impression
numérique, broderie, épingles, hameçons, dimensions variables,
2011 (courtesy Jessy Deshais)
«Les petites culottes» forment une installation
suspendue, composée de plusieurs éléments de
coton blanc retravaillés, rebrodés. Ces sousvêtements enfantins, symbolisant la simplicité innocente,
racontent chacun une histoire, rappellent chacun l’intouchable.
Sortes de perizonium, ils évoquent la sanctuarisation du corps de l’enfant. «Elles ont le poids d’une plume, la fragilité d’une aile de papillon et les cris sourds de la violence.», en dit Jessy Deshais, évoquant dans le même temps la force de l’enfance face à la violence du monde, et les blessures indélébiles de ce même enfant devenu adulte.
Née à Tours en 1966, Jessy Deshais pratique divers métiers dans les arts graphiques et vivants ( DA, Illustratrice,scénographe, réalisatrice)
après sa formation, qu’elle poursuivra longtemps en parallèle à ses activités personnelles qu’elle montre peu. C’est autour de 2010 qu’elle commence
à faire valoir ce travail. En 2011, l’exposition personnelle « Les petites culottes » à la QSP de Roubaix, fait surgir la violence restée cachée en elle, une longue période d’un travail d’intériorité se met en place.
Elle navigue depuis entre les salons, les galeries et lieux prestigieux comme le Musée de la Chasse et de la Nature en 2014 , le Monastère de Brou en 2015, le Musée de la Piscine à Roubaix et la Villa Yourcenar à Mont noir en 2018 , La Ruche Seydoux à Paris, le château du Rivau à Lémeré en 2021, la Halle st Pierre à Paris en 2022. Elle continue à développer un corpus d’oeuvres diverses :
écriture, dessin, sculpture, vidéo, photo et installation relatant selon les époques l’expression mêlée de son bonheur de vivre comme sa profonde déception face au monde. Elle vit et travaille à Montreuil-sous-Bois.
Jessy DESHAIS -Les petites culottes- © Atelier Find Art

Les oeuvres

Jeudi 21 septembre 2023

PRÉSENTATION EN AVANT-PREMIERE DU DOCUMENTAIRE « Odette et moi », de Anne Lucie Domange Viscardi, en présence d’Anne Lucie Domange Viscardi, Andréa Bescond et Déborah Moreau, à partir de 18h.

« Odette et moi » est un documentaire qui capte la transmission d’un spectacle, mais pas n’importe quel spectacle !
Écrite et interprétée par Andréa Bescond, mise en scène par Eric Métayer,
« Les chatouilles ou la danse de la colère », jouée pour la première fois en 2014, est une oeuvre artistique essentielle qui marque un moment import libération de la parole au sujet de la pédocriminalité. En 2016, forte de son incroyable succès au
regard du sujet abordé et portée par l’énergie d’Andréa Bescond, la pièce remporte le Molière du Seul(e) en Scène. Adaptée en 2018 pour le cinéma, la pièce devenue film remporte à nouveau le succès et deux Césars, celui de la meilleure adaptation pour Andréa Bescond et Eric Métayer, et celui de la meilleure comédienne pour un second rôle pour Karin Viard.
Après l’avoir interprété durant plus de 4 ans, Andréa Bescond décide de transmettre le spectacle pour qu’il continue d’exister tandis qu’elle souhaite vivre d’autres aventures artistiques.


Le documentaire « Odette et moi» raconte l’histoire de cette transmission, de cette passation entre Andréa Bescond et Déborah Moreau, évoquant au passage le contenu même du texte , et son histoire. D’avril 2018 à juin 2019, Anne Lucie Domange Viscardi suit les deux actrices et nous fait témoins du processus de transmission de ce spectacle hors catégorie, des auditions jusqu’à la première représentation à Avignon. Au travers de ce passage de relais, grâce à la puissance du spectacle, émouvant, réaliste et savamment parsemé d’humour, on découvre et comprend la mécanique des agresseur.e.s, le déni de l’entourage, et la capacité des humain.e.s à se relever quoiqu’il arrive.
On assiste également à la naissance d’une comédienne talentueuse, Déborah Moreau, qui relève ce défi artistique avec talent et détermination !

Lecture

Le samedi 9 septembre lors du VERNISSAGE RENCONTRES AVEC LES ARTISTES
il y a eu la PRÉSENTATION ET LECTURE DE « Mon Secret » DE NIKI DE SAINT PHALLE
Visite commentée, rencontres et discussions privilégiées avec les artistes présents, à partir de 14h.
Présentation de la ré-édition du livre « Mon Secret », de Niki de Saint Phalle, par Ariana Saenz Espinoza et Christine Villeneuve, co-édité par les éditions Le rayon blanc et les éditions des femmes-Antoinette Fouque, à partir de 18h30, suivi d’une lecture d’extraits de l’ouvrage.

Informations pratiques

GALERIE MARGUERITE MILIN
11 rue Charles-François Dupuis 75003 Paris
OUVERTE TOUS LES JOURS DU
MARDI AU SAMEDI DE 12h à 19h et sur RDV
www.margueritemilin.com
galeriemargueritemilin@gmail.com
mdeparisyafil@gmail.com

Aglaé Bory, Ici Ailleurs

Mulhouse, 2023 © Aglaé Bory

Dans le cadre de la célébration des 30 ans de La Filature, Scène nationale de Mulhouse, la Galerie expose la photographe Aglaé Bory  
du vendredi 22 septembre, jusqu'au 10 NOV. 2023
Commissaire : Emmanuelle Walter responsable des Arts Visuels
Vernissage  le 30 septembre à 19 h

Jeunes filles, quartier des Coteaux,2023 Aglaé Bory ©

L’exposition

L’exposition Ici Ailleurs d’Aglaé Bory regroupe 70 photographies réalisées dans le cadre d’une résidence de création de l’artiste à Mulhouse au printemps et à l’été 2023.

Entre documentaire et fiction, les œuvres d’Aglaé Bory capturent l’humanité de ses modèles. L’artiste privilégie le portrait, genre qu’elle allie souvent à la photographie de paysage, qu’il soit métaphorique, naturel, humain ou fictif. Portrait et paysage sont intrinsèquement liés dans l’écriture poétique d’Aglaé Bory, ils participent d’un même geste : saisir l’invisible, l’émotion volatile, l’intime qui se niche dans les creux. Ses photographies jouent sur l’absence/présence des figures dans l’environnement, elles interrogent                                                                     ©Aglaé Bory
l’occupation de l’espace par les corps, ceux des individus et celui du groupe. Pour Ici Ailleurs, ce sont les territoires mulhousiens que l’artiste a capturés, dans le cadre d’une commande pour les 30 ans de La Filature. Durant cinq semaines, Aglaé Bory a arpenté la ville, son appareil à la main, à la rencontre des habitant·es. Dans ses images, la photographie se fait art de la conversation entre des figures et des lieux. Son œuvre nous relie aux autres de façon essentielle, dans la beauté du geste et de l’adresse.

                                      Jeunes garçons des Côteaux,  Aglaé Bory 2023

BIOGRAPHIE

Aglaé Bory a étudié l’histoire de l’art à l’université d’Aix-en-Provence et la photographie à l’École Nationale de Photographie d’Arles. Elle vit et travaille depuis vingt ans à Paris où, en marge de son travail personnel, elle collabore régulièrement avec la presse et des agences de communication. Son travail photographique se situe entre documentaire et fiction, autour de la figure humaine à travers le portrait, l’autoportrait et les paysages humains. La photographie donne à voir, montre, fixe. Aglaé Bory cherche à voir ce qui ne se voit pas, à montrer ce qui est caché, à fixer ce qui est volatile.

Jeune femme, stade nautique de l’Illberg, Mulhouse, 2023 © Aglaé Bory

Le travail d’Aglaé Bory a été présenté dans le cadre de plusieurs festivals en France et à l’étranger (Bourse du Talent, Voies Off, Quinzaine Photographique Nantaise), a fait l’objet de différentes expositions individuelles et collectives (Galerie du Château d’Eau, Bibliothèque Nationale de France, Les Nuits Photographiques de Pierrevert). Son travail Corrélations a reçu plusieurs distinctions (KL Photo Awards, Bourse du Talent) et est entré en 2009 dans le fond photographique de la Bibliothèque Nationale de France. Un livre de ce travail est paru aux Éditions Trans Photographic Press en 2011. Sa série Au loin, nos paysages fait partie du corpus de travaux photographiques France(s) Territoire Liquide qui a fait l’objet d’une publication aux Éditions du Seuil en 2014.

Jeune homme, foire kermesse de Printemps de Mulhouse Dornach, 2023 © Aglaé Bory

En 2019, elle fait partie des photographes sélectionné·es pour la commande du CNAP Flux, une société en mouvement avec son projet documentaire Figures mobiles, exposé lors des Photaumnales 2020 au Quadrilatère de Beauvais.

En juin 2020 elle est lauréate du Prix Caritas de la Photo Sociale avec Odyssées, un travail photographique sur l’exil. Un livre éponyme est édité aux éditons Filigranes en novembre 2020.

En 2021 elle est la lauréate de la résidence du festival Photo La Gacilly. Son projet Les Horizons, cartographie des possibles est exposé au festival photo La Gacilly à l’été 2021.

Elle réalise Désordres intérieurs, une carte blanche pour les 15 ans du site Leboncoin.

En mai 2021 elle est accueillie en résidence à La Filature, Scène nationale de Mulhouse pour réaliser un travail de portraits dans la ville, exposé hors les murs durant l’été 2021.

En novembre elle est désignée lauréate du Prix Balzac pour son travail Les Invisibles

Pour accompagner la saison 21/22 du Grand Théâtre de Lorient, elle est invitée à réaliser un travail de portraits en résidence, L’Empreinte.

En 2022, elle fait partie des photographes sélectionnés pour La Grande commande photographique nationale de la BNF / Ministère de la Culture, avec son projet L’Art en Jeu.

 
Informations pratiques

 La Filature, Scène nationale de Mulhouse
La Filature est membre de Plan d’Est – Pôle arts visuels Grand Est et de La Régionale (Art contemporain de la région tri-rhénane)
La Filature, Scène nationale
20 allée Nathan Katz,
68100 Mulhouse · 03 89 36 28 28 ·
lafilature.org
Galerie d’exposition
du ma. au sa. de 13h à 18h
+ di. de 14h à 18h
+ soirs de spectacles

vernissage sa. 30 sept. 19h en présence d’Aglaé Bory
club sandwich je. 5 oct. 12h30
visite guidée de l’expo + pique-nique tiré du sac
+ Food Truck sur le parvis de
La Filature (visite sur inscription au 03 89 36 28 28)
visites guidées sur rendez-vous
auprès de edwige.springer@lafilature.org ou 03 89 36 28 34

Niko Pirosmani

Fête de St George en Bolnisi

Organisée par la Fondation Beyeler et le Louisiana Museum of Modern Art, Denmark, en coopération avec le Musée national géorgien et le Ministère géorgien de la culture, du sport et de la jeunesse, avec le soutien cordial de la Infinitart Foundation.
L’exposition « Niko Pirosmani » est placée sous le commissariat du commissaire invité Daniel Baumann et a été développée avec Sam Keller, directeur de la Fondation Beyeler, et Irakliy Purtskhvanidze, conseiller
de la Fondation Beyeler en Géorgie. La coordination et la direction du projet sont assurées par Regula Moser, Associate Curator à la Fondation Beyeler.
Visible jusqu'au 28 janvier 2024

Niko Pirosmani
Cinq princes banquetant, Huile sur toile cirée, 104 x 195 cm
Collection du Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia,
Musée national géorgien, Tbilissi © Infinitart Foundation

Prologue

En guise de conclusion et de temps fort de l’année, la Fondation Beyeler consacre une exposition au légendaire peintre géorgien Niko Pirosmani (1862–1918), à la fois grand solitaire énigmatique et précurseur influent de l’art moderne. Pirosmani fait l’objet d’une quasi vénération parmi les amateurs·rices d’art et il est célébré comme un héros national dans son pays natal, mais il est encore peu connu du vaste public en Europe occidentale. Réunissant environ 50 oeuvres majeures, il s’agit de la plus importante
exposition internationale jamais consacrée à Pirosmani. Elle est organisée par la Fondation Beyeler en coopération avec le Musée national géorgien de Tbilissi et le Louisiana Museum of Modern Art de Humlebæk. Les artistes contemporains de renom Thea Djordjadze et Andro Wekua ont été invités à
accompagner la présentation des oeuvres de Pirosmani à Bâle de leurs propres propositions.

Niko Pirosmani, la procession

La parole aux images

Les images de Pirosmani transforment le quotidien en merveilleux. Elles sont aussi frontales et immédiates que fascinantes et mystérieuses. La plupart sont peintes à traits de pinceau précis et dynamiques dans des couleurs éclatantes sur toile cirée noire. Pris dans leur ensemble, la technique et le style de Pirosmani de même que sa palette et ses motifs constituent un phénomène unique au sein de l’art moderne.

Pirosmani dépeint la plupart du temps des animaux ou des gens du peuple, souvent des archétypes tels une mère et
ses enfants, un pêcheur, un cuisinier ou un facteur. Parfois il s’agit de portraits de personnes précises, comme dans le cas de l’actrice Marguerite de Sèvres et de l’artiste d’avant-garde Ilia Zdanevitch. Pirosmani a également produit des paysages épiques aux perspectives multiples, représentant de manière simultanée des événements non synchrones comme des beuveries, des chasses et des processions.

Ses natures mortes sont souvent des oeuvres de commande, entre autres pour des tavernes. Certaines images représentent des célébrations et des fêtes qui jouent un rôle particulier dans la culture géorgienne. Avec
tout ce qu’elles donnent à voir de quotidien, nombre des oeuvres de Pirosmani présentent pourtant aussi un caractère presque allégorique de par leur renvoi à des phénomènes fondamentaux et primaires de la vie humaine. Le travail de Pirosmani est empreint de spiritualité, mais il apporte aussi un témoignage
documentaire sur un pays à la croisée de l’est et de l’ouest et sur une ville, Tbilissi, à l’époque considérée comme le « Paris de l’Est ».   

Les icônes

Les figures humaines et animales sont représentées avec tendresse et dignité – et non sans humour. Doté d’une grande sensibilité, Pirosmani crée des images d’une puissance expressive rare, véritables icônes.
Avec sa peinture d’une brillante simplicité et d’une élégante sincérité, il s’avère maître de la réduction à l’essentiel. Souvent, les humains et les animaux regardent le·la spectateur·rice de manière à la fois insistante et détachée. D’une intensité ardente, ils remplissent le cadre de l’image et se détachent sur un
même fond noir avec lequel ils forment cependant un tout.

Dans cet espace d’apparence atemporelle, ils déploient une présence saisissante. Les oeuvres de Pirosmani partagent presque toutes une quiétude harmonieuse qui souligne leur dimension spirituelle. Dans un contexte de modernité marquée par le
mouvement et le changement, Pirosmani a créé des images dans lesquelles ses compatriotes pouvaient reconnaître leur cadre de vie familier, tandis que l’avant-garde y découvrait une peinture radicale.

L’étrange Pirosmani

Malgré de nombreuses recherches et analyses, et maints récits et témoignages qui ont façonné sa légende, on ne sait presque rien des oeuvres de Pirosmani, de leur signification, de leurs sources d’inspiration, de leurs modèles, de leurs commanditaires et acheteurs, ou de leurs dates et lieux de production. Le travail de Pirosmani témoigne d’une existence à l’humanité aussi universelle que surnaturelle, mais ses visions et ses intentions artistiques demeurent d’une inaccessibilité rare chez un artiste reconnu du XXe siècle.

Niko Pirosmani, Train en Kakhétie
Huile sur carton, 70 x 141 cm
Collection du Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia,
Musée national géorgien, Tbilissi © Infinitart Foundation

Si d’innombrables histoires circulent à propos de Niko Pirosmani, on ne dispose que de peu de faits avérés. Fils de paysan, orphelin dès son jeune âge, en 1870 il quitte sa province natale de Kakhétie pour lacapitale Tbilissi, où il vit chez une famille aisée et reçoit une éducation. Il apprend à peindre en autodidacte, se forme au métier de typographe, travaille pour les Chemins de fer transcaucasiens, tient une laiterie et peint des enseignes et des portraits de commande. En 1912, le poète Mikhaïl Le Dentu et les artistes de l’avant-garde Kirill et Ilia Zdanevitch découvrent les images de Pirosmani dans les tavernes de Tbilissi, hauts lieux de la vie culturelle de la ville alors en pleine effervescence.

Enthousiasmés, les frères Zdanevitch se mettent à collectionner les oeuvres du peintre autodidacte et à le soutenir dans son travail.
Le Dentu le qualifie de « Giotto géorgien ». Dès 1913, les tableaux de Pirosmani sont inclus dans l’influente exposition « La Cible » à Moscou aux côtés de ceux de Marc Chagall, Natalia Gontcharova et Kasimir Malevitch. Alors qu’il n’a fréquenté aucune académie des beaux-arts, en 1916 il est invité à adhérer à la
Société des artistes géorgiens, à laquelle il tourne cependant très vite le dos. Il vit en tant que bohémien vagabond dans les tavernes de Tbilissi, incapable ou non désireux de s’intégrer à la société. Niko Pirosmani décède vers 1918 dans le dénuement et la pauvreté. Son lieu d’inhumation précis reste inconnu
à ce jour. Nombre de ses oeuvres se perdent, d’autres passent aux mains de l’État après l’annexion de la Géorgie par l’Union soviétique. Quelques années seulement après sa mort, des artistes et des écrivain·e·s d’avant-garde publient des textes sur lui, entament des recherches biographiques et analysent son travail.


                                   Niko Pirosmani, le médecin

Dans les décennies qui suivent, des expositions, des livres et des films lui sont consacrés. Une exposition de ses oeuvres à Paris est annulée dans la tourmente de la Première Guerre mondiale et le projet ne verra finalement le jour qu’en 1969. En 1972, Pablo Picasso produit une eau-forte pour une publication
consacrée à Pirosmani. Pirosmani est souvent décrit inexactement comme le
« Rousseau de l’Est », parfois célébré de manière contestable comme un
« primitif moderne » ou alors – dans la veine du récit rattaché à van Gogh – dénigré comme un marginal frappé de folie ou glorifié comme un génie méconnu. Aujourd’hui, Pirosmani est l’artiste le plus populaire de Géorgie et il compte de fervents admirateurs et admiratrices dans les milieux artistiques du monde entier, parmi eux Georg Baselitz, Peter Doig et d’autres.

En Suisse

En Suisse, l’oeuvre de Pirosmani a été montré pour la première fois en 1995 au Kunsthaus Zürich dans le cadre de l’exposition « Zeichen & Wunder. Niko Pirosmani und die Gegenwartskunst ». Conçue par la commissaire suisse Bice Curiger, l’exposition présentait le travail de Pirosmani en conjonction avec celui d’artistes contemporain·e·s. En 2019, Curiger a également assuré le commissariat de l’exposition « Niko Pirosmani – Wanderer between Worlds »
à la Fondation Vincent van Gogh Arles, également présentée sous
forme légèrement modifiée à l’Albertina à Vienne.

Niko Pirosmani
Girafe
Huile sur toile cirée , 137,4 x 111,7 cm
Collection du Shalva Amiranashvili Museum of Fine Arts of Georgia,
Musée national géorgien, Tbilissi
© Infinitart Foundation
Un important catalogue

La Fondation Beyeler publie au Hatje Cantz Verlag un important catalogue compilé sous la direction du commissaire invité Daniel Baumann. Il réunit des articles rédigés par les expertes géorgiennes Mariam Dvali, Irine Jorjadze, Nana Kipiani et Ana Shanshiashvili ainsi que des réflexions des artistes géorgiens
Thea Djordjadze et Andro Wekua. Il présente par ailleurs, pour la première fois traduits en allemand, des textes sources historiques des écrivains et artistes géorgiens Grigol Robakidze, Demna Šengelaia et Kirill Zdanevitch. L’exposition et le catalogue ont pour objectif de réunir des images et des faits, et de mettre en lumière l’art de Pirosmani sans interprétations tendant à la spéculation et au mythe. Le contexte historique du travail de Pirosmani dans la capitale caucasienne florissante de Tbilissi vers 1900 sera également mis en avant. En amont de l’exposition, tous les tableaux ont été examinés et préparés pour l’exposition par les restaurateurs·rices de la Fondation Beyeler et leurs collègues géorgien·ne·s.

Informations pratiques

Horaires d’ouverture de la Fondation Beyeler :
tous les jours 10h00 – 18h00,
le mercredi jusqu’à 20h00,
le vendredi jusqu’à 21h00

Fondation Beyeler
depuis la gare SBB tram n° 2 descendre à MessePlatz
puis tram n° 6 jusqu’à l’arrêt Fondation Beyeler

Les lauréats du prix Praemium Imperiale 2023

Olafur Eliasson, Beauty, 1993, vue in situ au Moderna Museet-Stockholm, 2015 © Anders Sune Berg Berlin © Tanya Bonakdar Gallery

Mardi 12 septembre,  sur le site Richelieu de la Bibliothèque nationale de France à Paris, a eu lieu la cérémonie d’annonce des lauréats de la 34e édition du Praemium Imperiale, « Nobel des arts ».
Vija Celmins (États-Unis) a été choisie dans la catégorie Peinture, tandis qu’Olafur Eliasson (Danemark, Islande) s’illustre dans la catégorie Sculpture. Dans la catégorie Musique, Wynton Marsalis (États-Unis) a été sélectionné. Diébédo Francis Kéré (Burkina Faso, Allemagne) brille dans la catégorie Architecture et Robert Wilson (États-Unis) remporte la catégorie Théâtre-Cinéma.
Le Prix d’encouragement pour les jeunes artistes a quant à lui été remis à deux programmes américains, la Harlem School of Arts de New York et au Rural Studio d’Alabama.

2023 Laureates

Un des prix artistiques internationaux les plus prestigieux

Chaque lauréat reçoit la somme de 15 millions de yens (soit environ 96 000 euros), un diplôme et une médaille remis à Tokyo, le 18 octobre prochain, par Son Altesse Impériale le prince Hitachi, oncle de l’empereur Naruhito du Japon et parrain d’honneur de la Japan Art Association, la plus ancienne fondation culturelle du Japon. Le Praemium Imperiale, surnommé le « Nobel des arts », compte parmi les plus prestigieux prix artistiques internationaux. Il a été créé en 1988 par la Japan Art Association et distingue chaque année, grâce au mécénat du groupe media Fujisankei, des artistes ou collectifs dans les domaines de la peinture, la sculpture, l’architecture, la musique, le théâtre et le cinéma.
Six comités internationaux élaborent une liste d’artistes qui est soumise ensuite à un jury japonais qui procède à la sélection finale. Les lauréats sont choisis
« pour leurs réalisations artistiques, leur rayonnement international et parce qu’ils ont contribué, par leur œuvre, à enrichir l’humanité »,
explique le Praemium Imperiale dans un communiqué. En tout, le palmarès compte 170 artistes. On y retrouve Christo, Niki de Saint Phalle, Norman Foster, Frank Gehry, Pierre Soulages, David Hockney, Anish Kapoor, Sebastião Salgado ou encore Ai Weiwei.

Des lauréats sensibles à la fragilité et à la beauté de la Nature

Cette année, plusieurs lauréats font la part belle à la beauté et à la fragilité de la Nature. Composées de nuances infinies de noirs, blancs et gris, les peintures et dessins de Vija Celmins représentent méticuleusement le monde naturel et nous emmènent vers des espaces inconnus. Après avoir commencé dans l’expressionnisme abstrait, l’artiste plasticienne américaine abandonne la couleur pour une palette monochrome. Ses œuvres sont conservées dans de prestigieuses collections comme le Museum of Modern Art (MoMA) à New York et la Tate Modern à Londres et ont été exposées au Centre Pompidou à Paris ou encore au Ludwig Museum à Cologne.

Vija Celmins, lauréate du prix dans la catégorie Peinture, dans son studio de Long Island à New York, mai 2023 ©️ The Japan Art Association ©️ The Sankei Shimbun

Olafur Eliasson exploite quant à lui les éléments naturels (tels que la couleur, la lumière, l’eau et la glace) pour réaliser des œuvres qui invitent à la méditation et qui modifient notre perception pour « éveiller les consciences tout en créant l’émerveillement », précise le Praemium Imperiale. Sculptures, installations, peintures, photographies, vidéos… Bien qu’il prenne différentes formes, le travail de l’artiste peut être éphémère, mais non moins poétique, et prend vie à travers le regard du visiteur. « L’art éphémère a d’autant plus besoin de l’observateur qu’il a très peu de réalité concrète – juste de la lumière, de l’air, du mouvement, ou quelque chose d’intangible, décrit Olafur Eliasson. La présence des spectateurs devient donc plus importante encore : ces derniers complètent l’œuvre en coproduisant l’expérience. » En 2003, il a représenté le Danemark à la Biennale de Venise et a marqué les esprits avec son soleil géant dans le Turbine Hall à la Tate Modern de Londres, qui a connu un succès international et a attiré plus de deux millions de visiteurs.

Olafur Eliasson à Berlin, mai 2023 ©️ The Japan Art Association ©️ The Sankei Shimbun

Une architecture au service de la justice sociale

Diébédo Francis Kéré met quant à lui l’innovation au service d’un projet visant à accroître le bien-être des communautés. L’architecte burkinabé s’engage en faveur de la justice sociale et estime que « même les plus dépourvus ont droit au confort et à la beauté », déclare-t-il au journal « Le Monde ». Il associe savoir-faire artisanal africain et design moderne pour réaliser ses bâtiments. Diébédo Francis Kéré a reçu le Prix Aga Khan d’Architecture en 2004 pour son École primaire de Gando et a été le premier architecte africain à remporter le prix d’architecture Pritzker, en 2022.

Diébédo Francis Kéré au studio Kéré Architecture, Berlin, mai 2023 ©️ The Japan Art Association ©️ The Sankei Shimbun

En plus d’être l’auteur de productions théâtrales les plus marquantes de ces dernières décennies (par leurs décors travaillés, d’étonnants éclairages et des chorégraphies radicales), Robert Wilson travaille également le dessin, la sculpture, le verre ou encore la photographie et crée ainsi des œuvres expérimentales où dialoguent les arts visuels et les arts vivants. Lauréat du Lion d’or de la Biennale de Venise, le metteur en scène et plasticien a déjà été honoré à maintes reprises et est notamment membre de l’Académie américaine des Arts et des Lettres ainsi que de l’Académie des arts de Berlin.

Lu sur connaissance des arts

Matisse, Derain et leurs amis, L’avant-garde parisienne des années 1904–1908

Au Kunstmuseum Basel | Neubau, jusqu'au 21.1.2024,
Commissaires : Arthur Fink, Claudine Grammont, Josef Helfenstein
Le Fauvisme

Le Kunstmuseum Basel | Neubau consacre sa grande exposition temporaire Matisse, Derain et leurs amis au premier courant d’avant-garde du XXe siècle : le fauvisme. À travers quelque 160 oeuvres d’exception, dont plusieurs visibles pour la première fois en Suisse, elle met l’accent sur l’expérimentation de la couleur à laquelle se sont livrés Henri Matisse, André Derain, Georges Braque, Maurice de Vlaminck et d’autres artistes dans les années 1904 à 1908. Elle met en lumière le rôle des critiques et du marché de l’art lors de l’apparition et de l’affirmation de ce courant artistique auquel se rattache directement le cubisme.

Les Fauves

Le fauvisme a marqué les débats picturaux de la modernité et au-delà.
On doit le terme « fauves » au critique d’art Louis Vauxcelles lors de sa visite au Salon d’Automne de 1905. Il pointa l’emploi expressionniste de la couleur et les associations chromatiques inhabituelles qui enfreignaient de manière révolutionnaire les conventions picturales en usage. Les tableaux aux couleurs crues et choquants pour le public de l’époque présentaient en outre des motifs se référant à la peinture naïve française, ainsi que des emprunts formels à l’art non occidental et à des traditions visuelles du Moyen Âge. La qualification de
« fauves » symbolise le discrédit jeté par la haute bourgeoisie parisienne, aux goûts culturels conservateurs, sur la peinture progressiste en général. Le groupe informel d’artistes autour de Matisse et Derain s’approprie immédiatement cette désignation méprisante et tire profit de l’effet de scandale.

L’exposition

L’exposition Matisse, Derain et leurs amis met en évidence la manière dont le fauvisme s’affirme au sein d’un marché de l’art alors très instable. Les peintres ne disposent d’aucun programme esthétique précis défini par des écrits ou des manifestes ; en outre, ils appartiennent à des milieux sociaux et artistiques hétérogènes. Ils partagent toutefois le même intérêt pour la peinture postimpressionniste et néo-impressionniste de Georges Seurat, Vincent van Gogh, Paul Cezanne et Paul Gauguin.

Des couleurs pures, non mélangées

À l’été 1905, Matisse et Derain séjournent ensemble à Collioure, un village de pêcheurs dans le Sud de la France. Ils y développent les stratégies picturales qui aboutiront à la qualification de fauvisme : le refus de restituer à l’identique les couleurs ainsi que le renoncement au clair-obscur. Ils accordent une place centrale à la teneur émotionnelle du sujet qu’ils s’attachent à rendre à travers des couleurs pures, non mélangées.

                                       Derain à Collioure

Les fauves rompent avec les principes de composition traditionnels. Leurs tableaux se caractérisent souvent par l’absence d’un centre bien défini et d’un ordonnancement avec un premier plan, un milieu et un arrière-plan. Ils ne présentent ni fond, ni dessin préparatoire et, pour la première fois dans l’histoire picturale, la peinture est un matériau à part entière : son processus d’application est perceptible, tandis que les coups de pinceau possèdent une qualité haptique. Par ailleurs, les artistes font preuve d’une grande diversité thématique : rues et ports, portraits intimes de famille, scènes de la vie nocturne dissolue, culture de consommation.

                  Matisse Intérieur à Collioure

Après le scandale du Salon d’Automne de 1905, lors duquel les jeunes peintres furent qualifiés non sans retentissement de « bêtes sauvages », des artistes du Havre, en particulier Raoul Dufy, Georges Braque et Othon Friesz, se joignent à eux. Ils élaborent leur style pictural dans une approche critique de l’impressionnisme et ne cessent de se rendre sur les lieux représentés par la génération de peintres précédente, notamment la Normandie ou encore L’Estaque et La Ciotat, des villages du Midi. Pour ce faire, ils disposent des infrastructures touristiques modernes et du réseau ferroviaire en pleine extension.

                                                        Raoul Dufy

Dans le contexte du fauvisme

Le terme « fauves » revêt une connotation virile suggérant la non-inclusion des artistes femmes. L’exposition Matisse, Derain et leurs amis s’attache à rendre visible ces femmes qui ont joué un rôle primordial, mais rarement mis en lumière. Parmi celles-ci, Amélie Parayre-Matisse qui, grâce à ses dessins textiles, fournit une assise financière à la production artistique de son mari, ainsi que la marchande d’art Berthe Weill qui apporte aux fauves un soutien considérable à leurs débuts et qui organise une importante exposition peu après le scandale du Salon d’octobre 1905. En outre, Berthe Weill fut l’une des rares à soutenir les artistes femmes et à exposer très tôt des oeuvres d’Émilie Charmy et de Marie Laurencin,

toutes deux pouvant être également associées au fauvisme. Le Kunstmuseum Basel présente un portrait d’Alice Derain, épouse d’André Derain, réalisé par Marie Laurencin, surnommée aussi « la biche parmi les fauves » ou « la fauvette ». Camarade de Georges Braque et compagne de Guillaume Apollinaire, Marie Laurencin appartient au cercle des artistes d’avant-garde mais apparaît en retrait de ce groupe très masculin.

               Henri Rousseau Marie Laurencin et guillaume Appolinaire
               La muse inspirant le poète 1909

De plus, l’exposition présente le fauvisme dans le contexte de l’époque : les tableaux reflètent des phénomènes propres à la société de consommation, tandis que certains artistes également caricaturistes s’intéressaient à la publicité naissante, aux industries du loisir et du tourisme alors en rapide expansion. D’anciennes photographies représentant des rues apportent des informations sur la vie quotidienne citadine et la mode de la Belle Époque. En collaboration avec l’historienne parisienne Gabrielle Houbre, le Kunstmuseum Basel présente des sources historiques consacrées à la réalité sociale des prostitué.e.s qui posaient comme modèles pour les peintres fauves.

 

Des prêts prestigieux et des oeuvres majeures

Matisse, Derain et leurs amis présente quelque 160 oeuvres de Georges Braque, Charles Camoin, Émilie Charmy, Sonia et Robert Delaunay, André Derain, Kees van Dongen, Raoul Dufy, Othon Friesz, Marie Laurencin, Henri Charles Manguin, Albert Marquet, Henri Matisse, Jean Puy, Maurice de Vlaminck et d’autres artistes proches des fauves provenant de collections internationales publiques et privées, parmi lesquelles le Centre Pompidou de Paris, le Museum of Modern Art et le Metropolitan Museum de New York, le Musée Matisse de Nice, la National Gallery of Art de Washington, le Statens Museum for Kunst de Copenhague, la Staatsgalerie Stuttgart, la Tate Modern de Londres et le Kunsthaus Zürich.

       
L’exposition présente plusieurs oeuvres majeures d’Henri Matisse, dont Luxe, Calme et Volupté (1904), La Gitane (1905), Le Tapis Rouge et La Sieste (toutes deux de 1906). L’important ensemble sculptural exécuté à ses débuts, provenant du Musée Matisse de Nice, constitue également un temps fort de l’exposition. Dans Notes d’un peintre (1908), l’une des sources majeures sur le fauvisme dans le champ de la théorie de l’art, Matisse écrit que la représentation de la figure a toujours été au coeur de ses préoccupations artistiques.

L’exposition réunit également des tableaux d’André Derain, dont la remarquable série des Peintures de Londres ainsi que le monumental La Danse (tous de 1906) considéré comme l’oeuvre emblématique de ses débuts. Nombre des oeuvres visibles dans l’exposition n’ont pas été présentées au public depuis plusieurs décennies.

Publication

Une publication richement illustrée avec des contributions de Elena Degen, Arthur Fink, Claudine Grammont, Josef Helfenstein, Gabrielle Houbre, Béatrice Joyeux-Prunel, Peter Kropmanns, Maureen Murphy et Pascal Rousseau paraît dans le cadre de l’exposition. (Anglais ou Allemand)

Informations pratiques

Kunstmuseum Basel
St. Alban-Graben 8
Case postale, CH-4010 Basel
T +41 61 206 62 62
kunstmuseumbasel.ch

Vous pouvez visiter la collection gratuitement aux horaires suivants :
mar, jeu, ven : 17h00 – 18h00*
mercredi : 17h00 – 20h00 (Kunstmuseum Basel | Présent uniquement ouvert jusqu’à 18h00)
Premier dimanche du mois

*Jours fériés exclus

 

BÂTIMENT PRINCIPAL ET BÂTIMENT NOUVEAU

Fermé le lundi
Mar 10h00 – 18h00
Mercredi 10h00 – 20h00
Jeu-dim 10h-18h

 

Sommaire du mois d’août 2023

Anika YI, artiste américaine, d’origine coréenne,
à la Bourse de commerce de François Pinault

26 août 2023 : Jacobus Vrel, Énigmatique précurseur de Vermeer
24 août 2023 : Robert Gober et le motif du trou d’écoulement
21 août 2023 :  OUT OF THE BOX
20 août 2023 : Tacita Dean
17 août 2023 : Naples à Paris Le Louvre invite le musée de Capodimonte
15 août 2023 : Le 15 août : de l’Assomption de la Vierge à Napoléon
12 août 2023 : RON MUECK
04 août 2023 : Rétrospective de l’oeuvre de Norman Foster

Jacobus Vrel, Énigmatique précurseur de Vermeer

 1-Jacobus Vrel, Femme saluant un enfant à la fenêtre Huile sur bois.
– 45,7 × 39,2 cm
Paris, Fondation Custodia, Collection Frits Lugt, inv. 174

EXPOSITION À LA FONDATION CUSTODIA
Après une étape initiale au Mauritshuis de La Haye, la Fondation Custodia accueille du jusqu' au 17 septembre 2023 l’exposition Jacobus Vrel. Énigmatique précurseur de Vermeer. Cet évènement se tient en parallèle de l’exposition Rein Dool. Les dessins, présentée auparavant au Dordrechts Museum.

Ce dernier se devait d’être présent dans les salles de la « maison de l’art sur papier » ainsi que Ger Luijten, regretté directeur, aimait à décrire la Fondation. En outre, la Fondation Custodia propose une immersion dans le Siècle d’or hollandais afin de mettre en relief l’originalité de Vrel : un choix de tableaux, de dessins et de gravures issus de sa propre collection est complété par de très beaux prêts de la Alte Pinakothek de Munich, du Mauritshuis, du Rijksmuseum et d’autres musées allemands et néerlandais.

Présentation

Cette première présentation monographique consacrée au peintre rassemble ses oeuvres majeures disséminées dans les plus grands musées – Amsterdam, Bruxelles, Détroit, Munich, Vienne… – et dans de prestigieuses collections particulières. On y voit aussi, bien entendu, l’une des scènes de genre les plus connues et surprenantes du peintre qui est conservée à la Fondation Custodia.

L’étape parisienne de l’exposition est très différente de celle du Mauritshuis car la sélection d’oeuvres de Jacobus Vrel a été enrichie de neuf tableaux et de
l’unique dessin connu de l’artiste.

Fondation Custodia  Jacobus Vrel – Scène de rue avec un homme
– pierre noire, encadrement à la plume et encre brune

Ressemblance ?

À première vue, rien ne semble relier Jacobus Vrel au célèbre Johannes Vermeer hormis leurs initiales « JV ». Pourtant, nombre de leurs tableaux partagent un même calme contemplatif, le rôle central joué par des figures féminines et, bien souvent, un certain mystère. Ainsi, beaucoup d’oeuvres de Jacobus Vrel furent longtemps attribuées à Vermeer.
Inconnues du grand public, elles intriguent et fascinent les historiens d’art depuis plus d’un siècle. Qui était donc ce mystérieux peintre du XVIIe siècle hollandais ?

Vrel l’énigmatique

2-Jacobus Vrel Femme à la fenêtre, daté 1654 Huile sur bois. – 66,5 × 47,4 cm
Vienne, Kunsthistorisches Museum, inv. GG 6081 © KHM-Museumsverband

Rien n’est connu de la vie de Jacobus Vrel. Seul un de ses tableaux porte une date : « 1654 », que l’on peut lire dans la partie gauche de la Femme à la fenêtre de
Vienne, juste après le nom « J. Frel » [fig. 2]. Ici, la signature de Vrel ne se détache pas sur le blanc d’un morceau de papier tombé sur le sol de la composition, contrairement à la majorité de ses scènes d’intérieur.
Car Jacobus Vrel a signé ou monogrammé presque toutes ses oeuvres connues. Étrangement – mais tout semble étrange chez Vrel – il orthographie son
patronyme de façons très variées : « J. Frel », comme à Vienne, « Vrel »,
« Vrell », « Vrelle », voire « Veerlle ».
Dans l’intérieur d’église et la Vieille femme lisant
[fig. 6], il donne également son prénom en toutes lettres : « Jacobüs Vreel ».

On ne connaît que quarante-cinq oeuvres de sa main : un unique dessin et quarante-quatre tableaux, tous peints sur panneaux de bois. Le catalogue raisonné établi par l’équipe scientifique internationale qui a porté ce projet les a tous répertoriés dans la monographie consacrée à Jacobus Vrel, publiée au printemps 2021. L’étape parisienne de l’exposition présente le dessin et vingt-deux de ces tableaux, soit plus de la moitié de la production connue de l’artiste.

3 -Jacobus Vrel Paysage avec deux hommes et une femme conversant, avant 1656
Huile sur bois. – 37 × 28 cm Vienne, Kunsthistorisches Museum, inv. GG 580
© KHM-Museumsverband

Un seul document

En dehors de ses oeuvres, on ne dispose que d’un seul document contemporain mentionnant le peintre. Il est d’une grande importance car il nous informe que
trois tableaux de Vrel se trouvaient dans une prestigieuse collection de peintures du XVIIe siècle.
Il s’agit de celle de l’archiduc Leopold Wilhelm, gouverneur des Pays-Bas du Sud (l’équivalent de l’actuelle Belgique) alors sous la tutelle de l’Espagne
des Habsbourg. Lorsque s’achevèrent ses fonctions à Bruxelles, l’archiduc rentra à Vienne et y fit envoyer sa vaste collection. C’est là qu’un inventaire détaillé fut rédigé en 1659 où l’on trouve « Deux pièces de même format à l’huile sur bois, dans l’une une cheminée hollandaise auprès de laquelle est assise une femme malade, et dans l’autre une femme qui regarde par la
fenêtre. […] Originaux de Jacob Frell. » et plus loin « Une huile sur bois, où l’on voit deux paysans et une paysanne. Par Jakob Fröll ». Dans l’inventaire aussi,
le nom du peintre fut donc orthographié de deux manières différentes.

Tableaux identifiés

Les deux premiers tableaux furent facilement identifiés dès la fin du XIXe siècle comme étant celui du Kunsthistorisches Museum de Vienne [fig. 2]
– dont le coeur est justement constitué de la fameuse collection de Leopold Wilhelm – et son pendant vendu par le musée et aujourd’hui dans la Leiden
Collection à New York.
Le troisième tableau avait en revanche été perdu de vue et c’est l’une des nouveautés apportées par le projet de recherches mené pour l’exposition que
d’avoir permis l’identification du seul paysage connu de la main de Jacobus Vrel [fig. 3]. Il est lui aussi conservé au musée de Vienne mais était depuis le XVIIIe siècle attribué à l’artiste Johannes Lingelbach (Francfort 1622 – 1674
Amsterdam). Si l’absence d’information sur le peintre – en dépit de ces trois oeuvres dans la collection de Leopold Wilhelm – n’avait pas suffi à rendre perplexes les historiens de l’art, les tableaux de Jacobus Vrel les ont aussi mis à l’épreuve. Ils sont en effet difficiles à placer au sein de la production picturale hollandaise. Ses vues de rues semblent offrir une plongée dans la vie urbaine des Pays-Bas du XVIIe siècle, mais elles intriguaient par leurs architectures inclassables. Dans la Scène de rue animée acquise récemment par la Alte Pinakothek de Munich, la gamme monochromatique et les accents géométriques paraissent même d’une étonnante
modernité [fig. 4].

                                       4- Jacobus Vrel, Scène de rue animée
Huile sur bois. – 39 × 29,3 cm
Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlungen,
Alte Pinakothek, inv. 16502

De plus, ces représentations n’ont pas d’équivalent dans la peinture de vues de villes, un genre qui se développe surtout dans la seconde moitié du Siècle
d’or. Vrel choisit en effet de dépeindre des ruelles anonymes avec des personnages simples – ni riches, ni pauvres – contrairement à ses confrères [fig. 5].

5- Jacobus Vrel, Scène de rue, femme assise sur un banc
Huile sur bois. – 36 × 27,5 cm Amsterdam, Rijksmuseum, inv. SK-A-1592

Quant aux scènes d’intérieur peintes par Vrel, elles sont également difficiles à ordonner dans l’art hollandais.
Ces pièces vides d’objet – à l’exception du morceau de papier au sol qui porte sa signature, délimitées par des murs tout aussi vides et une fenêtre derrière laquelle on distingue une pâle figure d’enfant émergeant de l’obscurité, sont sans équivalent dans l’art de son siècle [fig. 1 et 6].


6-Jacobus Vrel, Vieille femme à sa lecture, un garçonnet derrière la vitre

Huile sur bois. – 54,5 × 40,7 cm The Orsay Collection

Scènes de genre hollandaises

D’autres intérieurs, plus proches sans doute des scènes de genre hollandaises auxquelles nous sommes accoutumés, s’en distinguent cependant par leurs
figures féminines vues de dos, dont l’expression échappe au spectateur, comme dans les compositions de Vienne [fig. 3], de Bruxelles et de Lille. Dans le très
beau tableau de Détroit [fig. 7], un garçonnet observe par une porte à deux battants un ailleurs qui demeure hors-champ tandis qu’une femme cherche des poux dans la chevelure d’une fillette et se détache sur un grand pan de mur vide d’une audacieuse modernité.

7-Jacobus Vrel, Intérieur, femme peignant une fillette, un garçon près de la porte Huile sur bois. – 55,9 × 40,6 cm
Détroit, The Detroit Institute of Arts, don de The Knoedler Galleries, 1928,
inv. 28.42

La palette restreinte, la sobriété et le silence qui se dégagent de ces scènes ont bien souvent fait comparer Jacobus Vrel au peintre danois Vilhelm Hammershøi (1864 – 1916). C’est certainement le caractère intemporel de ses oeuvres qui attira Jean Clair au début de sa brillante carrière consacrée à l’art du XXe siècle.
Son article de 1968
« Jacobus Vrel, un Vermeer du pauvre » est l’une des analyses les plus fines du travail du peintre « chroniqueur
des petites gens des villes ».
Constatant combien Vrel se distingue de ses confrères hollandais, Jean Clair montre que ses choix formels se rapprochent
de ceux de Vermeer :
aucune perspective plongeant dans les rues environnantes, dans des enfilades et des pièces qui s’emboîtent. Enfin, Jean Clair insiste très justement sur le refus de Vrel de « se laisser enfermer dans un réalisme étroit » permettant
ainsi aux spectateurs d’accéder à une forme de « ravissement intemporel ».

Le projet international de recherche : La Haye – Munich – Paris

C’est pour tenter de percer le mystère de Jacobus Vrel que la Alte Pinakothek de Munich, la Fondation Custodia et le Mauritshuis ont uni leurs forces et entrepris un projet de recherche international dès 2018. L’exploration des
archives confiée à Piet Bakker, l’un des grands spécialistes néerlandais dans ce domaine, n’a hélas livré aucune information sur les lieux de naissance et de
décès ni sur l’activité du peintre. En revanche, les analyses dendrochronologiques mises en oeuvre pour ce projet (c’est-à-dire la datation
des panneaux de bois sur lesquels sont peints les tableaux) ont établi que Vrel avait créé ses premières vues de villes autour de 1635 et ses scènes d’intérieurs
vers 1650. Cela en fait donc, non pas un suiveur comme on l’a longtemps
présumé, mais bien un précurseur de Vermeer. Vrel était généralement placé dans l’école de Delft, mais il convient désormais de l’imaginer actif dans l’est des Pays-Bas. Les historiens de l’urbanisme et de l’architecture
Boudewijn Bakker et Dirk Jan de Vries ont montré que certaines des vues de villes peintes par Vrel – comme le tableau de Hambourg [fig. 8] –présentent
des éléments qui sont tirés de la topographie et des bâtiments de la ville de
Zwolle, charmante cité où naquit le grand peintre Gerard ter Borch (1617 – 1681). C’est peut-être ce dernier qui fut le lien entre Vrel et Vermeer car un document d’archive atteste que Ter Borch et Vermeer se connaissaient.

Jacobus Vrel et le Siècle d’or hollandais

Afin de mieux faire comprendre l’originalité des oeuvres de Jacobus Vrel, la Fondation Custodia consacre trois salles de son exposition aux contemporains hollandais du peintre qui ont traité des sujets similaires : vues de villes et scènes de genre.
Si les représentations urbaines de Vrel n’ont pas d’équivalent dans l’art des Pays-Bas, il est pourtant le premier peintre du Siècle d’or à avoir choisi pour sujet des vues de rues et de bâtiments sans aucun événement historique ou marquant. C’est un type de peintures qui allait connaître un développement important dans la seconde moitié du XVIIe siècle avec des artistes qui se spécialisent dans ce genre comme Jan van der Heyden (1637 – 1712)
ou les frères Gerrit (1638 – 1698) et Job Berckheyde (1630 – 1693). De ce dernier, l’exposition montre un tableau évoquant les canaux bordés d’arbres de la ville de Haarlem prêté par le Mauritshuis. De la fabuleuse collection du musée de La Haye vient aussi la Vue d’un marché par Egbert van der Poel (1621 – 1664), un artiste qui, comme Vrel, se spécialise dans les représentations urbaines et les scènes de genre.

10- Pieter Janssens, dit Elinga (1623 – 1682), Femme à sa lecture, vers 1665-1670 – Huile sur toile. – 75,5 × 63,5 cm
Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlungen, Alte Pinakothek, inv. 284

Les vues de villes furent aussi très prisées des dessinateurs hollandais et plusieurs feuilles remarquables de la Fondation Custodia et du Rijksmuseum mettent leur art en lumière. Le visiteur de l’exposition saisira ainsi combien les ruelles peintes par Jacobus Vrel tiennent une place à part dans la production
néerlandaise.
En revanche, lorsqu’il dépeint des intérieurs, Vrel fait appel à un répertoire
de motifs déjà bien en place dans l’art hollandais. Ses figures de femmes
cuisinant, cousant, au chevet d’une malade ou s’occupant d’enfants ont de nombreux parallèles, comme le montre l’exposition.
Pour évoquer les artistes Esaïas Boursse (1631 – 1672) et Quiringh van
Brekelenkam (après 1622 – après 1669) [fig. 9], les peintures de la Fondation
Custodia sont complétées par les généreux prêts du Rijksmuseum, du musée de Bonn et de la Alte Pinakothek de Munich. Cette dernière envoie également à Paris son magnifique tableau de Pieter Janssens, dit Elinga (1623 – 1682) [fig. 10] dont les intérieurs peuplés de figures féminines invitent à une même rêverie que ceux de Vrel.

11- Gerard ter Borch (1617 – 1681)- La Chasse aux poux, vers 1652-1653
Huile sur bois. – 33,2 × 28,7 cm
La Haye, Mauritshuis, acquis avec le soutien de la Vereniging Rembrandt,
inv. 744

Quant au Mauritshuis, il a accepté de prêter l’un de ses tableaux iconiques de Gerard ter Borch (1617 – 1681) : La Chasse aux poux [fig. 11] normalement exposé dans la salle des Vermeer à La Haye. On y retrouve le thème de l’épouillage maternel de la composition de Vrel conservée à Détroit [fig. 7] mais traité par Ter Borch de façon plus intimiste avec une attention toute particulière accordée aux expressions des visages et à la description des étoffes.

Les arts graphiques ne sont pas en reste pour cet éloge du quotidien que les artistes hollandais du XVIIe siècle ont offert à la postérité.
La Fondation Custodia est riche de dessins de Rembrandt évoquant la vie des
femmes, probablement à l’origine conservés par le maître dans un album consacré à ce thème. On peut admirer le plus beau d’entre
eux – unanimement reconnu comme l’une des feuilles majeures de l’artiste. Rembrandt y représente sa femme, Saskia, alitée, sans doute pendant l’une de ses grossesses [fig. 12]. Le motif de la malade allongée dans un lit

12.-Rembrandt Harmensz van Rijn, dit Rembrandt (1606 – 1669)
Intérieur avec Saskia alitée, vers 1640-1641
Plume et encre brune, lavis brun et gris, corrections à la gouache blanche.
– 142 × 177 mm
Paris, Fondation Custodia, Collection Frits Lugt, inv. 266

Aux côtés des dessins et gravures sélectionnés dans la collection de la Fondation Custodia sont exposés de nombreux prêts du Rijksmuseum, comme la série de la graveuse Geertruydt Roghman (1625 – 1651) qui présente de frappantes similarités avec certaines scènes de Vrel [fig. 13].

13- Geertruydt Roghman (1625 – 1651) Une femme nettoyant des ustensiles de cuisine Gravure au burin. – 213 × 171 mm
Amsterdam, Rijksmuseum, Rijksprentenkabinet,
don de F. G. Waller, Amsterdam, inv. RP-P-1939-571


On peut aussi admirer le dessin dans lequel une femme vue de dos se penche par
l’ouverture d’une porte à deux battants [fig. 14], un motif très prisé par Vrel.
Longtemps attribuée à Rembrandt, cette feuille est aujourd’hui donnée à Nicolaes Maes (1634 – 1693), l’un de ses brillants élèves qui, lui aussi, a bien souvent représenté des femmes dans l’intimité de leur foyer ainsi que l’attestent d’autres dessins exposés de l’artiste.

Renseignements pratiques

Fondation Custodia
 121, rue de Lille – 75007 Paris

www.fondationcustodia.fr

Heures d’ouverture
Durant les périodes d’exposition :
tous les jours sauf le lundi, de 12h à 18h

Le billet d’entrée donne droit à la visite des 2 expositions

Transports
Métro Assemblée Nationale (ligne 12) ou Invalides (lignes 8 et 13, RER C)
Bus 63, 73, 83, 84, 94 : Assemblée Nationale

 Robert Gober et le motif du trou d’écoulement

A la Bourse de Commerce

L’œuvre de Robert Gober décrit des relations complexes entre intérieur et extérieur, caché et révélé. Les corps masculins sont présentés comme des ready-mades modifiés, tronqués, mutants et hybrides.   

Waterfall est une installation qui s’aborde à travers une simple veste, une pièce de costume masculin présentant son dos au regardeur. Elle est placée contre un mur ; de son col, dépasse un liseré blanc de chemise. Dans la partie supérieure du dos se découpe une petite ouverture carrée. Le visiteur est porté à regarder par cette ouverture : ce qu’il voit alors n’est pas, comme on pourrait s’y attendre, l’intérieur d’un corps, mais une paroi rocailleuse, mêlée de branchages et ruisselante d’eaux vives. En combinant la banalité sévère d’un vêtement urbain à une scène agreste, deux éléments du réel ordinaire appartenant à deux modes d’existence différents, Waterfall parvient à synthétiser, plus encore qu’un récit onirique dans la veine surréaliste, une mise en abîme qui renverse l’ordre établi et interchange les limites de l’intérieur et de l’extérieur. Waterfall renvoie aussi à la dernière œuvre de Marcel Duchamp, Étant donnés : 1° la chute d’eau 2° le gaz d’éclairage… (1946-1968), une installation où cohabitent le corps, la pulsion scopique du regardeur et le diorama de cascade et de verdure. Waterfall poursuit l’investigation de Gober sur la perception trouble et les aspects flottants du corps et de l’identité.

Door with Lightbulb 

L’installation Door with Lightbulb de Robert Gober immerge le spectateur dans une histoire silencieuse. Au cœur d’un espace clos et obscur, une porte apparaît encadrée de piles de journaux et aux prises avec deux sources de lumière. Alors qu’une ampoule rouge luit de façon sinistre et alarmante à son sommet, un rai de lumière brillante filtre sous elle. Attaché à la matérialité de l’objet, Gober confectionne à la main tous les éléments de cette installation, comme les journaux dont il a lui-même écrit chaque article.

Opérant une plongée dans un lieu anonyme et inquiétant, Door with Lightbulb exprime pleinement un mélange entre familiarité et étrangeté bien spécifique à l’œuvre de Robert Gober. La porte est un élément récurrent au sein de son œuvre ambiguë, apparaissant dans des environnements éclairés avec soin.

HELP ME 2020-2021

Help me de Robert Gober se compose d’un cadre de fenêtre et d’un ensemble d’objets quotidiens : des rideaux, un pot de graisse, un crayon, tous réalisés à la main par l’artiste. Si l’intérieur est visible, l’ouverture ne donne accès qu’au mur d’accroche, créant ainsi une sensation d’étouffement. La beauté calme du vent s’engouffrant dans les rideaux, le caractère domestique de l’assemblage qui donne l’impression de se retrouver face à un rebord de fenêtre d’une ferme américaine comme le suggère le pot, renforce paradoxalement l’aspect énigmatique, sinon angoissant, sensation réhaussée par le titre
(« Sauvez moi »).

Nombre d’œuvres de Robert Gober font état d’une tension entre l’intérieur et l’extérieur – l’artiste a souvent recours à l’artifice visuel des barreaux – laissant le sentiment que certaines choses restent enfouies, sous le poids des contraintes sociales, de la honte, des injonctions. Help Me, tout en laissant affleurer des questions existentielles et biographiques, arpente aussi l’histoire de l’art : le cadre de la fenêtre agit tout autant comme celui d’un tableau, interrogeant le caractère illusionniste de l’image artistique.

Au Schaulager

Sans titre 1995-1997

Cette œuvre majeure consacrée à la création de répliques de l’environnement ménager, tels que des lavabos, des cheminées, des écoulements ou des reproductions de parties du corps, ainsi que des espaces connotés par une institution ou par la religion, se voit une nouvelle fois présentée au public, dans une collaboration étroite avec l’artiste.

Le motif du trou d’écoulement, auquel il se confronte encore une fois ici, apparaît dès ses premières œuvres : à partir de 1989, Gober installe une série de simples trous d’écoulement (Drains), qu’il réalise un par un et fait mouler directement dans les murs des salles d’exposition. Le trou d’écoulement illustre la frontière entre la lumière et l’obscurité, entre ce qui est visible en surface et ce qui est souterrain, entre l’intérieur et l’extérieur.

Son installation est à lire comme un symbole de transition, elle présente des lieux qui sont invisible en eux-mêmes. Les catégories explicites du dedans et du dehors, du dessus et du dessous, ces éléments qui font notre orientation dans l’espace, disparaissent. En lieu et place, des zones inconnues apparaissent aux délimitations autres et qui ouvrent sur un domaine dont il faut faire l’expérience physique. En même temps, observée avec recul, la sculpture domine l’espace et vacille sans se fixer entre un plateau de tournage et la scène d’un crime.


Split Walls with Drains ne fait pas seulement figure d’apothéose de l’œuvre sculpturale de Gober en raison de ses exceptionnelle qualités plastiques – considérant en particulier les éviers, trous d’écoulement et urinoirs réalisés à la main –, l’œuvre occupe aussi une place à part puisqu’elle fut réalisée pour l’espace spécifique du MGK, sous et au travers duquel coule aussi d’ailleurs un ruisseau. Elle demeure ainsi enracinée dans le bâtiment de manière permanente.

Biographie
 

AMÉRICAIN, NÉ EN 1954, auteur d’une œuvre autobiographique dans laquelle se côtoient lits d’enfants, membres humains et installations à grande échelle, Robert Gober rattache ses souvenirs d’enfance à des objets de prime abord anodins mais à l’apparence troublante. En donnant une forme aux images évocatrices qui hantent son esprit, il livre un œuvre protéiforme qui questionne la sexualité, la religion, les relations humaines et la nature.

L’évocation du souvenir est indissociable chez Robert Gober d’une démarche artisanale. Ses œuvres naissent d’un travail manuel méticuleux qui implique une grande diversité de matériaux tels que cire, plâtre, papier journal, et procédés techniques. Sa grande maîtrise sculpturale lui permet d’exprimer une forme d’aliénation de l’objet au travers d’un réalisme déconcertant.

Les œuvres de Robert Gober, conservées au sein de la Collection Pinault, ont été exposées lors de l’exposition « Sequence 1 » (2007) à Palazzo Grassi, et les expositions « Mapping the Studio » (2009-2011) et « Dancing with Myself » (2018) à Punta della Dogana.

Informations pratiques

A la Bourse de Commerce

2 rue de Viarmes, 75001 Paris

Voir le plan

Ouverture

Du lundi au dimanche de 11h à 19h
Fermeture le mardi et le 1er mai.
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h.
Le premier samedi du mois, nocturne gratuite de 17h à 21h.

Au Schaulager Basel
HORAIRES D’OUVERTURES
 

Mardi-dimanche 10h-18h
Jeudi jusqu’à 20h
Fermé le lundi
Ouvert le 1er août

OUT OF THE BOX

Schaulager est fier de présenter cette année une grande exposition collective et a de bonnes raisons de se réjouir : Schaulager fête ses 20 ans ! La plupart des œuvres exposées ont été acquises ces dernières années pour la collection de la Fondation Emanuel Hoffmann. L'exposition se concentre sur les médias temporels.L’exposition a été conçue par Heidi Naef, Senior Curator, en collaboration avec l’équipe de recherche du Schaulager. Le livre d’artiste consacré à Dieter Roth a été développé et réalisé par le Schaulager, le concept visuel a été conçu par Peter Fischli. Se termine le 19 November 2023

20 ans

2023 est pour le Schaulager une année exceptionnelle : il y a 20 ans, le bâtiment inaugurait un concept innovant dans une institution unique en son genre. Avec OUT OF THE BOX, le Schaulager présente désormais une importante exposition de groupe qui réunit les oeuvres de quelque 25 artistes, dont
David Claerbout, Tacita Dean, Thomas Demand, Gina Fischli, Peter Fischli, Katharina Fritsch, Robert Gober, Rodney Graham, Gary Hill, Martin Honert, Klara Lidén, Dieter Roth, Thomas Ruff, Anri Sala, Jean- Frédéric Schnyder, Dayanita Singh, Monika Sosnowska, Jane & Louise Wilson et autres.
À cette occasion, des oeuvres médiatiques basées sur le temps sont mises en avant ; elles seront visibles dans des espaces de projection dédiés, répartis à travers l’exposition.

OUT OF THE BOX

Le titre de l’exposition correspond au programme du Schaulager depuis 20 ans. En effet, celui-ci a été fondé en 2003 dans l’idée d’associer stockage et visibilité de l’art contemporain : les oeuvres de la Fondation Emanuel Hoffmann sont conservées telles quelles, sans boîte ni caisse, et disposées au Schaulager, lorsqu’elles ne sont pas présentées dans des expositions au Kunstmuseum
Basel ou des musées du monde entier. Ce nouveau type de bâtiment a été développé et réalisé à l’époque dans une collaboration de la Fondation Laurenz avec le bureau d’architectes de renommée internationale
Herzog & de Meuron. Aujourd’hui, le Schaulager a non seulement inspiré de nombreuses autres institutions avec cette idée visionnaire, mais il s’est fait aussi une place solide au niveau international en tant qu’institution de recherche, lieu de dépôt et d’exposition. Le titre de l’exposition OUT OF THE BOX résume donc parfaitement la conception et l’idée d’origine du Schaulager, toutes deux aussi actuelles aujourd’hui qu’il y a 20 ans.

                          Katharina Fritsch, Rattenkönig

OUT OF THE BOX renvoie cependant aussi aux conditions, en constante évolution, de l’art contemporain. « Box » est ici synonyme d’« espace » et pose une notion fondamentale pour la démarche des artistes contemporaines et contemporains. Concernant les oeuvres médiatiques basées sur le temps, l’espace dans lequel elles sont présentées est un élément essentiel, auquel les artistes pensent déjà pendant la genèse de l’oeuvre : sans espace, une oeuvre ne peut pas être montrée ; l’espace marque l’oeuvre de son empreinte, même si ce que les images animées donnent à voir est en soi immatériel et ne prend place que sous forme de fichier sur un support de données. L’espace est inhérent à l’oeuvre, chaque fois que celle-ci est présentée, il est soigneusement défini et ajusté aux circonstances et aux spécifications techniques.

                                          Gary Hill Circular Breathing 1994
Ces espaces rigoureusement adaptés sont par conséquent individuels, un peu comme un vêtement confectionné sur mesure. L’architecture de l’exposition OUT OF THE BOX se compose donc de contenants plus ou moins grands placés dans l’espace. D’autres places et passages s’ouvrent entre les volumes, et
même l’architecture visible du Schaulager – lui-même une boîte géante – est intégrée dans ce paysage varié de formes et d’axes visuels.

                          Robert Gober, Untitled, 1995–1997

L’accent de cette vaste présentation est mis sur des oeuvres médiatiques grand format basées sur le temps et autres dernières acquisitions de la collection de la Fondation Emanuel Hoffmann, dont certaines sont montrées au public pour la première fois dans le contexte institutionnel d’une exposition. Par conséquent,
une multitude d’oeuvres vidéo ou cinématographiques, sculptures, peintures, dessins, et photos s’étend sur les deux grands niveaux d’exposition du Schaulager.

Les oeuvres

Chaque oeuvre est unique et a sa propre histoire au sein de la collection, mais il convient de souligner ici l’installation audio et vidéo complexe Ravel Ravel (2013) de l’artiste albanais Anri Sala, acquise après la première présentation de l’oeuvre à la Biennale de Venise en 2013. Pour OUT OF THE BOX, Sala a choisi de
présenter l’installation dans la version qu’il avait déjà expérimentée en 2017–2018 au Museo Tamayo de Mexico. Ici, il a décidé de ne pas projeter les deux vidéos l’une au-dessus de l’autre comme à Venise, mais sur deux écrans semi-transparents suspendus l’un derrière l’autre, dans un
espace insonorisé conçu par l’artiste.Ravel(vidéo)

Anri sala

S’y déplacer signifie percevoir avec tous ses sens l’intervalle acoustique, visuel et spatial entre les deux projections. L’oeuvre porte sur la composition musicale Concerto pour la main gauche (1921-1931) de Maurice Ravel, écrite par celui-ci à la demande de Paul Wittgenstein qui avait perdu son bras droit pendant la Première Guerre mondiale.

Tacita Dean

De l’artiste britannique Tacita Dean sont présentés le grand dessin à la craie sur panneau mural Inferno (2019), la photographie repeinte Purgatory (Threshold) (2020) et le film 35 mm Paradise (2021). Tacita Dean a été chargée par le Royal Opera House de Londres de concevoir les dessins et les costumes d’un nouveau
ballet intitulé The Dante Project,

dont sont issues les trois oeuvres distinctes présentées dans OUT OF THEBOX. Coproduit avec l’Opéra de Paris, avec une nouvelle musique de Thomas Adès et une chorégraphie de Wayne McGregor, le projet s’inspirait de la Divine Comédie (1307-1321) de Dante Alighieri et marquait les 700 ans de la mort du poète. Le ballet a été créé à Londres en octobre 2021 et a été présenté au Palais Garnier à Paris jusqu’en mai 2023.
Pour The Dante Project, Tacita Dean représente ces trois cercles du parcours de Dante dans une odyssée inspirée, à travers différents médiums et moyens de représentation.


Pour OUT OF THE BOX, les trois oeuvres ont été chorégraphiées de manière cohérente suivant la séquence chronologique du ballet.

David Claerbout

David Claerbout, quant à lui, place le public face à une illusion. On voit là un incendie de forêt d’une ampleur effrayante, malgré le monde virtuel dans lequel se déroule la catastrophe : le spectacle ressemble à s’y méprendre à la réalité, or il relève entièrement d’une construction numérique. En 2017 déjà, le Schaulager avait présenté de David Claerbout la grande projection Olympia (The real time
disintegration into ruins of the Berlin Olympic stadium over the course of a thousand years) (lancement en 2016), une réflexion sur le temps et sur la perception, que Wildfire (meditation on fire) (2019–2020) pousse
encore plus loin, de manière encore plus spectaculaire.David Claerbout

Klara Lidén

Un groupe d’oeuvres de l’artiste suédoise Klara Lidén a tout récemment rejoint la collection de la Fondation Emanuel Hoffmann. L’espace et le positionnement de son propre corps dans l’environnement constituent des thèmes majeurs de son travail : dans une vidéo de l’installation médiatique Closer Now (2022), l’artiste se montre elle-même descendant stoïquement une ruelle étroite en faisant des cabrioles sur l’asphalte dur. L’installation comprend également des boîtes en carton suspendues qui tournent autour de leur propre axe et reprennent ainsi le mouvement de roulement du corps dans la rue.

Dans la vidéo

grimpe en revanche sur un échafaudage qui semble tourner autour d’elle.

Conclusion

Les visiteurs réguliers des expositions passées du Schaulager tomberont sur des oeuvres d’artistes auxquels de grandes expositions monographiques ont été consacrées ici ; par exemple Monika Sosnowska, dont la sculpture d’un cube cabossé Untitled (2006) domine l’espace,

ou encore l’artiste universel Dieter Roth, auquel le Schaulager, pour son inauguration il y a 20 ans, avait consacré une rétrospective. Et pour l’occasion, une nouvelle publication du Schaulager, rend hommage à l’oeuvre
Selbstturm; Löwenturm (1969/1970-1998) de la collection de la Fondation Emanuel Hoffmann, et dont la maquette a été conçue par l’artiste Peter Fischli, paraîtra également en juin.

Dans OUT OF THE BOX, ce dernier montre différentes oeuvres, certaines datant de l’époque du duo d’artistes Fischli/Weiss, mais d’autres aussi, plus récentes, que l’artiste a réalisées seul, dont un groupe de sculptures cinétiques créé en 2023 et exposé pour la première fois.

OUT OF THE BOX invite à envisager l’art de notre époque de manière à la fois agréable et réfléchie, afin de considérer sous un angle nouveau les thèmes qui nous animent aujourd’hui. Les oeuvres médiatiques notamment supposent que l’on prenne davantage de temps. Pour cette raison, le billet d’exposition donne
droit cette année à trois entrées au Schaulager.

Autres artistes
Informations Pratiques

Schaulager
Ruchfeldstrasse 19 CH
-4142 Münchenstein
T +41 61 332 35 35 F +41 61 332 35 30
www.schaulager.org

Horaires
Tue, Wed, Fri 10 a.m. – 6 p.m.
Thu 10 a.m. – 8 p.m.
Sat, Sun 10 a.m. – 6 p.m.
Mon closed
During public holidays and Art Basel,
see www.schaulager.org
Admission Tickets valid for three visits (not transferable)
Regular CHF 18, Reduced CHF 12
Family Ticket CHF 25

 Tacita Dean

La Bourse de Commerce — Pinault Collection invite Tacita Dean à présenter une exposition constituée d’œuvres inédites, conçue en résonance avec la saison « Avant l’orage », qui se déploie dans le musée depuis le 8 février. Il s’agit de sa première exposition d’envergure dans une institution française depuis celle présentée au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris en 2003. L’ensemble des œuvres ont été spécifiquement réalisées pour son exposition
« Geography Biography ». Jusqu’au 25 septembre 2023

« Avant l’orage », une exposition pour nous confronter à la fragilité de la nature

Emma Lavigne commissaire de l’exposition,
l’exposition « Avant l’orage » nous alerte sur l’état de notre planète.
Emma Lavigne, commissaire de l’exposition est l’invitée du 64 minutes

« J’ai fini par penser la géographie à travers ma propre vie » Tacita Dean

L’exposition « Avant l’orage » invite à un cheminement à travers des installations et des œuvres de près d’une vingtaine d’artistes qui métamorphosent tous les espaces du musée.

Sur fond de dérèglement climatique, dans l’urgence du présent comme dans l’œil d’un cyclone, l’obscurité et la lumière, le printemps et l’hiver, la pluie et le soleil, le jour et la nuit, l’humain et le non-humain cohabitent au sein de cet accrochage inédit d’œuvres de la collection. Ces paysages instables, saisis dans une ronde désynchronisée du temps, figurent de nouveaux écosystèmes dans lesquels le visiteur est invité à s’immerger.

Articulée en deux temps, cette saison thématique est réactivée, à la fin du mois de mai, pour l’exposition consacrée à Tacita Dean, dans la Rotonde et la Galerie 2.

                                           photo yomarianablog

« Tout est intempérie sur Terre. C’est ce dont les œuvres rassemblées dans cette exposition veulent témoigner. (…) après tout, on ne sait pas vraiment si l’on est avant ou après l’orage, car le monde entier est devenu un orage. Et l’orage n’est rien d’autre que le chant de la vie. » Emanuele Coccia

Les artistes

LUCAS ARRUDA / HICHAM BERRADA / FRANK BOWLING / JUDY CHICAGO / TACITA DEAN / THU VAN TRAN / ROBERT GOBER / DOMINIQUE GONZALEZ-FOERSTER / PIERRE HUYGHE / BENOIT PIÉRON / DANIEL STEEGMANN MANGRANÉ / ALINA SZAPOCZNIKOW / CY TWOMBLY / DANH VO / ANICKA YI

Tacita Dean podcast

Pour les 20 ans du Schaulager à Basel, Tacita Dean est présentée dans la collection de la Fondation Hoffmann (90 ans)
Tacita Dean, Purgatory (Threshold), 2020

Tacita Dean, Purgatory (Threshold), 2020
Crayon de couleur sur papier Fuji Velvet marouflé sur papier, 372 × 468,5 cm, Fondation Emanuel Hoffmann, prêt permanent à l’Öffentliche Kunstsammlung Basel, photo : Stephen White and Co, Courtesy the artist and Frith Street Galerie © Tacita Dean

Tacita Dean, Inferno, 2019 (détail)

Tacita Dean, Inferno, 2019 (détail)
Craie sur isorel, 242 × 1219 cm, Fondation Emanuel Hoffmann, prêt permanent à l’Öffentliche Kunstsammlung Basel, photo : Stephen White and Co, Courtesy the artist and Frith Street Gallery © Tacita Dean

Information pratique

Respectivement :
A la Bourse de Paris François Pinault
2 rue de Viarmes, 75001 Paris

Voir le plan

Ouverture

Du lundi au dimanche de 11h à 19h
Fermeture le mardi et le 1er mai.
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h.
Le premier samedi du mois, nocturne gratuite de 17h à 21h.

Schaulager,
Ruchfeldstrasse 19,
4142 Münchenstein Suisse (Basel)
T +41 61 335 32 32, F +41 61 335 32 30,
 info@schaulager.org

HORAIRES D’OUVERTURES

Du mardi au dimanche de 10h à 18h
Jeudi à 20h
Fermé le lundi
Ouvert le 1er août