C’est la découverte, au marché aux puces de Strasbourg, du journal d’une jeune apprentie couturière de Neudorf qui fait entrer en 1973 son auteur, Lydia Jacob, dans la vie deRaymond-Émile Waydelich ! Elle ne le quittera plus et depuis plus de quarante ans, c’est à elle que l’artiste a voué son œuvre en une exploration quasi-archéologique de la vie de cette jeune Neudorfoise du siècle passé. Les boîtes-reliquaires qu’il lui dédie contiennent des fragments d’objets, des photos jaunies par le temps, des lettres soigneusement calligraphiées, des plumes, des objets divers comme autant de pièces d’un puzzle, témoins fragiles d’un passé disparu.
Fasciné par l’archéologue Heinrich Schliemann, le célèbre découvreur de l’antique ville de Troie, Raymond Waydelich est aussi l’auteur, depuis plus d’une vingtaine d’années, une œuvre inspirée en une vision très personnelle et poétique par une « archéologie du futur ». Il est ainsi devenu le créateur d’une série de « sites archéologiques » dont l’exploration développe une vaste réflexion sur notre monde d’aujourd’hui et ses errements :
1978 : première expédition archéologique et découverte de l’Homme de Frédehof en 2000 avant J.-C.
Cette œuvre, qui représentait cette année-là la France à la Biennale de Venise, est le premier jalon d’un vaste travail de mémoire où se mêlent présent et avenir, à travers le regard porté par l’artiste sur les traces de notre civilisation mises au jour par nos lointains descendants en 2000 après J.-C.
1983 : deuxième expédition et découverte du site de Grubierf en 3500 après J.-C.
Avec l’« Environnement Tiefgarage » dans le cadre de la construction d’un parking souterrain au cœur de la ville de Fribourg-en-Brisgau (Allemagne) a fourni quelques années plus tard à Raymond Waydelich l’opportunité de recréer cette fois-ci un véritable site, celui de Grubierf, fossilisant un garage souterrain contemporain et les véhicules qui y sont garés sous l’épaisse poussière des siècles et… de nouer une première collaboration avec le Musée Archéologique. Notre monde vu dans la perspective d’un observateur d’un lointain futur a permis à l’artiste de continuer à développer un propos original sur le devenir de notre civilisation détruite dans un grand cataclysme. Si la démarche est teintée d’un certain pessimisme, elle livre aussi un charme poétique, non dénué d’humour.
1994 : L’Ile d’Orsi, 3720 après J.-C. correspond à la troisième expédition. Les découvertes ont été présentées au Centre d’Art plastique de Vllefranche-sur-Saône.
1995 : Mutarotnegra, 3790 après J.-C. Pour la quatrième expédition, c’est l’emblématique cathédrale de Strasbourg enfoui sous les sables d’un vaste désert qui est mise en scène avec la découverte du site de Mutarotnegra, tiré du nom antique de la ville de Strasbourg/Argentorate en lecture inversée. Un cataclysme a détruit la cité qui dort ensevelie sous les sables et qui n’est plus localisée que par une flèche en grès rose finement sculptée qui émerge des dunes environnantes. Là encore, les objets mis au jour par les archéologues du futur qui explorent la cité engloutie en 3790 après J.-C. ont été intégrés dans un large parcours à travers les collections du Musée Archéologique.
En parallèle à l’exposition « Mutarotnegra » et pour prolonger sa démarche, l’archéologue Raymond Waydelich décide aussi de faire un superbe cadeau aux archéologues du futur ! L’idée d’un « Caveau pour le Futur « est lancée et c’est ainsi qu’il réalise, en septembre 1995, avec la complicité de la Ville de Strasbourg et d’un vaste réseau d’amis, un nouveau « site », localisé cette fois-ci au cœur de la ville. Ont été enterrés, place du Château à deux pas de la cathédrale et en face du Palais Rohan où était présenté les découvertes « archéologiques » de Mutarotnegra, de nombreux objets, documents et messages constituant la mémoire de notre civilisation et destinés aux archéologues de l’an 3790 après J.-C. Une plaque en fonte, incrustée dans le sol de la place du Château, commémore l’événement et rappelle la présence de ce « caveau pour le futur », auquel s’est largement associée la population par des messages destinés aux archéologues du futur. Le caveau ne doit en effet être ouvert sous aucun prétexte avant 3790 après J.-C. Un second caveau, baptisé « Lessak », a été réalisé avec le même succès, en collaboration avec le Sepulkralkultur Museum et la Ville de Kassel (Allemagne) en 1997.
2009-2010 : Alsace-Kreta : le nouveau « site archéologique » a été « mis au jour » en 3790 après J.-C. lors des toutes récentes fouilles menées sur une île proche du site de l’antique Mutarotnegra… Ce site spectaculaire a livré de nombreux « vestiges » qui sont présentés dans le cadre de cette exposition…
Musée Archéologique
L’exposition « ALSACE-KRETA/ Fouilles récentes de Mutarotnegra – 3790 après J.-C. », initiée par l’association « Alsace-Crète » et soutenue par la Direction régionale des Affaires Culturelles d’Alsace, est née d’une active collaboration entre la ville de Réthymnon, située au nord de l’île de Crète, et la Ville de Strasbourg, mais aussi entre les Régions d’Alsace et de Crète. Elle s’inscrit dans le cadre de la coopération culturelle existant depuis de longues années entre le programme européen d’échanges artistiques « Apollonia » et le Musée d’Art contemporain de Crète.
Après sa présentation à Réthymnon dans l’espace dédié de la Fortezza de Réthymnon entre mai et juillet 2010, l’exposition « Alsace-Kreta » conçue et réalisée par l’artiste alsacien Raymond-É. Waydelich dans le cadre d’une résidence artistique croisée, est accueillie en 2011 dans les salles du Musée Archéologique de la Ville de Strasbourg, où elle dialogue avec les collections permanentes du musée.
Cette sélection d’une quarantaine d’œuvres est composée en majorité de céramiques et de sculptures en terre cuite et en bronze inspirées par le riche passé archéologique de la Crète et par son vaste bestiaire mythologique. Ces créations ont été réalisées par Raymond-É. Waydelich selon les techniques traditionnelles des céramistes crétois de Margarites au cours de ses nombreux séjours dans l’île et, plus particulièrement, à l’occasion d’une récente résidence d’artiste en 2008-2009. Sur des formes séculaires, l’artiste alsacien a développé un décor fait de formes peintes et plastiques largement inspirées de sa propre vision de l’histoire et de la mythologie crétoises.
L’accueil de l’exposition à Strasbourg permet ainsi de renforcer davantage encore les liens entre Réthymnon et la Ville de Strasbourg et plus largement les échanges culturels entre l’Alsace et la Crète.
texte musée de Strasbourg
Photos de l’auteur
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Les 19 et 20 mars 2011 dans le cadre de l’opération nationale « Week-end Musées Télérama » Chaque année au printemps, le « Week-end de l’art contemporain vous propose de (re)découvrir les structures du réseau TRANS RHEIN ART. Expositions et rencontres avec les artistes, concerts, vidéo et performances, ateliers pour le jeune public et événements singuliers rythment la vie culturelle alsacienne durant tout un week-end !
Les structures du réseau TRANS RHEIN ART s’associent cette année pour la première fois autour d’un fil rouge artistique :
le chorégraphe Fabrice Lambert épellera entre Strasbourg et Altkirch six extraits de son oeuvre « Abécédaire »… A découvrir !
Circuits gratuits en bus Dimanche 20 mars, deux itinéraires en bus parcourront l’Alsace au fil du réseau TRANS RHEIN ART, au départ à la fois du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Durant les trajets seront diffusées vidéos d’artistes et/ou présentations des actions et projets des membres
de TRANS RHEIN ART.
Inscrivez-vous dès début mars au 03 88 58 87 55 ou à info@artenalsac e.org pour une découverte privilégiée des propositions artistiques !
Zoom sur Extraits de « Abécédaire » : 6 propositions chorégraphiques courtes de FabriceLambert
« Abécédaire est une série de 26 propositions courtes d’environ 15 min qui ouvrent sur le questionnement du corps et de son
environnement, le statut de son dispositif (relation, rencontre), mis en scène par un propos organisant les modes de perceptions. » Fabrice Lambert
09h00 : « K comme Kaos » chez Stimultania – Strasbourg
10h30 : « T comme Territoires du temps »
au Musée Würth France – Erstein
11h45 : « C comme Corps » au Frac Alsace – Sélestat
14h30 : « M comme Mouvement » à La Kunsthalle – Mulhouse
15h30 : « A comme Abstraction » à La Filature – Mulhouse
17h00 : « L comme lumière » au CRAC Alsace – Altkirch Possibilité de découvrir les performances librement dans les lieux ci-dessus au fil du réseau TRANS RHEIN ART le dimanche 20 mars ou de voyager avec le bus à la journée au départ de Strasbourg.
Chargée de coordination et de projets
pour le réseau TRANS RHEIN ART
Mail : info@artenalsace.org
Site Internet : www.artenalsace.org
Frac Alsace / Agence culturelle d’Alsace
1 espace Gilbert Estève – route de marckolsheim
BP 90025 – F- 67601 Sélestat Cedex
Tél : 00 33 (0)3 88 58 87 55 – fax : 00 33 (0)3 88 58 87 56 Les membres du réseau TRANS RHEIN ART :
> Site verrier : Halle Verrière et Centre International d’Art Verrier – CIAV /
MEISENTHAL
> Les géants du Nideck / OBERHASLACH
> Accélérateur de particules / STRASBOURG
> Apollonia – Échanges Artistiques Européens / STRASBOURG
> CEAAC – Centre Européen d’Actions Artistiques Contemporaines /
STRASBOURG
> La Chambre / STRASBOURG
> La Chaufferie – Galerie de l’École supérieure des Arts décoratifs /
STRASBOURG
> Musée d’Art Moderne et Contemporain – MAMCS / STRASBOURG
> Polart / STRASBOURG
> La Société pour la Diffusion de l’Utile Ignorance / STRASBOURG
> Stimultania / STRASBOURG
> Syndicat Potentiel / STRASBOURG
> Musée Würth France / ERSTEIN
> Frac Alsace – Fonds régional d’art contemporain Alsace / SÉLESTAT
> Espace d’Art Contemporain André Malraux – EACAM / COLMAR
> Espace LÉZARD / COLMAR
> Institut Européen des Arts Céramiques – IEAC / GUEBWILLER
> La Filature, Scène nationale / MULHOUSE
> La Kunsthalle / MULHOUSE
> Ateliers Pédagogiques d’Arts Plastiques / MULHOUSE
> Le Quai – École supérieure d’art / MULHOUSE
> CRAC Alsace / ALTKIRCH
> Espace d’art contemporain Fernet Branca / SAINT-LOUIS
> FABRIKculture / HÉGENHEIM
> Les ateliers ouverts / TOUTE LA RÉGION ALSACE
> La Fête de l’eau / WATTWILLER
> Mulhouse 00 / MULHOUSE
> Sélest’art / SÉLESTAT
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Une oeuvre écrite, un texte qui fait oeuvre ?
L’écriture comme forme ou comme objet ? Études, reportages, histoires, recherches graphiques, livres, sont autant de genres qui convoquent
l’écrit et constituent tout un pan de l’art contemporain.
clic
L’intention de cette exposition ne réside pas dans l’exhaustivité de leur énumération mais vise plutôt à réfléchir à leurs diversités de formes et à ce qui les caractérise. Toutes suscitent les mêmes constantes : une nécessaire relation physique à l’oeuvre (toucher, autant que faire se peut, les oeuvres), un état de concentration accentué (lire) et une invitation à prendre son temps (le temps
de lire). Cette exposition attend le lecteur, la pause lui est offerte, les conditions de bien-être lui sont propices.
Quand bien même il n’entre pas pour tout lire, il peut s’il le souhaite y passer l’après-midi. Il peut s’intéresser à des approches diverses, picorer des écrits et cela dans des conditions voulues idéales : il est invité à s’asseoir, à se sentir bien puis à se plonger dans une lecture.
Le temps de l’exposition les V8 designers ont transformé la Kunsthalle en un appartement de six salons et un bar, lieu où les performances et
les rencontres donneront vie à l’écriture.
S‘agit-il d’une démarche pensée et qui ne peut trouver sa justesse que sous la forme de l’écriture, ou bien est-ce plutôt un travail en chemin inverse, où l’écrit est le moyen naturel d’exprimer ce qu’il y a à dire, où le concept est la forme écrite (ainsi des calligrammes d’un Apollinaire, qui de poésies sont réappropriés par le champ plastique…). Les réponses sont aussi nombreuses que les formes, les sujets abordés ou les procédés envisagés.
Quelle peut être par exemple la place du livre-objet ? Comment appréhender ces oeuvres qui reprennent les caractéristiques
physiques du livre mais qui sont conçues par les artistes comme des objets sculpturaux ? Les contempler, c’est en négliger le sens.
Études, reportages, histoires, recherches graphiques, livres, autant de genres qui constituent tout un pan de l’art contemporain et qui suscitent une approche particulière et singulière.
Le documentaire comme travail d’enquête est une autre approche que les artistes associés à des projets d’ordre sociétal (par le biais d’une commande) ou menant une enquête à titre indépendant (économique ou politique) abordent par l’écrit. Ces oeuvres, fouillées et souvent à caractère informatif, sont données à lire à travers des reportages, des journaux ou des fiches détaillées.
L’intention de cette exposition n’est pas d’être exhaustive dans les formes que l’écrit peut revêtir en tant qu’oeuvre, mais vise plutôt à réfléchir à une diversité de formes qui toutes suscitent les mêmes constantes : une nécessaire relation physique à l’oeuvre (toucher, autant que faire se peut, les oeuvres), un état de concentration accentué (lire) et une invitation à prendre son temps (le temps de lire). Appréhender une oeuvre écrite exige une certaine disposition d’esprit de la part du spectateur / lecteur et cette dimension est centrale dans les salons de lecture. « Si l’on exige d’un éditeur de littérature ou d’un écrivain qu’ils aient du talent, on doit aussi en exiger du lecteur. Parce qu’il ne faut pas se leurrer, ce voyage qu’est la lecture passe très souvent par des terrains difficiles qui exigent une aptitude à s’émouvoir intelligemment, le désir de comprendre autrui et d’approcher un langage différent de celui de nos tyrannies quotidiennes » écrit Enrique Vila-Matas dans
Dublinesca. Cette exposition attend le lecteur, la pause lui est offerte, les conditions de bien-être lui sont propices. Quand
bien même il n’entre pas pour tout lire, il peut s’il le souhaite y passer l’après-midi. Il peut s’intéresser à des approches diverses, picorer des écrits et cela dans des conditions voulues idéales : il est invité à s’asseoir, à se sentir bien puis à se plonger dans une lecture.
Salons de lecture est construite autour d’une répartition par genre. Loin d’être absolue, cette catégorisation est plutôt un moyen de constater selon quels schémas l’écrit peut être exploité. Nullement exclusive cette répartition avoue son caractère subjectif et revendique des frontières poreuses.
Commissaire d’exposition : Sandrine Wymann
les artistes : Edouard Boyer, Bureau d’études, Philippe Cazal, Anne-James Chaton, Daniel Gustav Cramer,
Marcelline Delbecq, Martine Derain, Krassimira Drenska, documentation céline duval,
Ilse Ermen, Jean-Baptiste Farkas, Jochen Gerner, Hoio, Martin Le Chevallier,
Jan Mancuska, Claire Morel, Plonk et Replonk, Julien Prévieux, Ricardo Rendon,
Pedro Reyes, Yann Sérandour, Taroop et Glabel, Saliou Traoré, V8 jusqu’au 3 avril 2011 Les rendez-vous Kunstapéro jeudi 03.03 J 18:00
Visiter l’exposition puis en discuter autour d’un verre, en partenariat avec l’association
Mulhouse Art Contemporain et la Fédération Culturelle des Vins de France.
5 euros/personne Inscription au 03 69 77 66 47 Kunstdéjeuner vendredi 11.03 J 12:15 entrée libre
Conversation autour d’une oeuvre suivie d’un déjeuner, repas tiré du sac, en partenariat avec l’Université Populaire.
Inscription au 03 69 77 66 47 Dialogues N°3 dimanche 06.03 15:00 J 17:00
Regards croisés entre le Musée des Beaux-Arts et la Kunsthalle
Entrée libre, renseignements au 03 69 77 66 47 + 03 69 77 78 10
RDV au Musée des Beaux-arts Kunstprojection jeudi 10.03 J 18:30 entrée libre
En partenariat avec l’espace Multimédia Gantner de Bourogne, sélection de films expérimentaux, d’oeuvres d’art numérique issus de la collection de l’espace Multimédia Gantner en écho à l’exposition. Performance Mardi 15.03 à 20:00 entrée libre Locus Métropole,
performance de John Giorno , Jürgen O.Olbrich
et Michel Collet en partenariat avec Cold Mountain WEEK-END DE L’ART CONTEMPORAIN SAMEDI 19.03+ DIMANCHE 20.03
Visite guidée apéritive : dimanche 20 mars à 11:00 Entrée libre Performance Dimanche 20.03 J 14:30
Entrée libre M comme Mouvement, extrait de l’Abécédaire de Fabrice Lambert
projet du réseau Trans Rhein Art Samedi 19.03 + dimanc he 20.03
14:00 J 17:00
Ateliers artistiques « Parents/Enfants » autour de l’exposition Salons de lecture
Départ toutes les heures En partenariat avec les Ateliers Pédagogiques d’Arts Plastiques Entrée libre, inscription obligatoire au 03 69 77 77 38
Circuits gratuits en bus sur différents lieux d’art contemporain en Alsace Départ de Mulhouse et Strasbourg à 9:00 Dimanche 20.03 Renseignements et inscription : Julie.morgen@culture-alsace.org PERFORMANCES
le journaliste – transfer Anne-James Chaton voix ¦ electroniques
Andy Moor guitare ¦ electroniques
Label : Unsounds ¦ Al Dante PERFORMANCES
MAILLE-MASALA
L’EPICE DE LA « MISSION KAKI » UNE INTERVE NTION OLFACTIVE
BAR SUISSE A l’occasion des Salons de lecture, la Kunsthalle ouvrira temporairement un bar dans l’espace d’exposition. Lieu de performances, de rencontres, de détente, d’activation de certaines oeuvres et de discussion, il permettra au public de se retrouver autour d’un verre ou d’un café et de partager le fruit de ses lectures. A chaque événement le bar sera tenu et animé par l’équipe de la Table de la Fonderie qui proposera boissons et restauration.
Menu complet servi le soir du vernissage. Petite restauration pour les autres rendez-vous. La Table de la Fonderie à Mulhouse, un restaurant
où bien manger rime avec solidarité. 21 rue du Manège 68100 Mulhouse Tél : 03 89 46 22 74 contact@table-fonderie.fr
texte Kunsthalle
photos et vidéo de l’auteur
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au musée des Beaux Arts de Strasbourg, Palais des Rohan
Tous deux membres du FRAME, les musées d’Hartford et de Strasbourg possèdent chacun un élément d’une paire de pendants, c’est-à-dire conçus pour être vus ensemble. Si Ève est conservée à Strasbourg depuis 1936, c’est récemment qu’Hartford s’est enrichi d’Adam. Après une réunion à Hartford dans le cadre de l’exposition Reunited Masterpieces (14 février au 30 mai 2010), c’est au tour de Strasbourg de présenter ces chefs-d’œuvre du maniérisme nordique. Goltzius a représenté Ève juste avant qu’elle ne mange le fruit interdit présent dans sa main droite. Cette œuvre formait sans doute une paire avec une représentation d’Adam. Un panneau sur ce sujet, de mêmes dimensions et montrant également au verso les deux lettres « NN » incisées, apparu le 28 mai 2003 dans une vente aux enchères à Lorient, a été acquis par le Wadsworth Atheneum de Hartford à la fin de l’année 2004. Didier Rykner est le premier à avoir publié ensemble les deux tableaux en 2005 et d’en avoir suggéré une interprétation. Adam et Ève représentés en buste, occupent toute la surface du tableau. Ce cadrage insolite trahit un artiste qui s’est tout particulièrement distingué en tant que graveur et illustrateur. L’Adam de Hartford porte contre son cœur une branche d’aubépine (ou une rose des champs ?). Ses épines et fruits rouges font allusion à la passion du Christ qui est interprété comme le nouvel Adam. L’aubépine, symbole de la Rédemption est confronté à la pomme, symbole du pêché originel. Quelques branches de l’arbre de la connaissance relient les deux pendants à la partie supérieure.
Goltzius se forma à la gravure auprès de Dirck Volckertsz. Coornhert (1522-1590), célèbre artiste et humaniste. Il acquit, dès son installation à Haarlem en 1577, une grande réputation en tant que virtuose du dessin et de la gravure. C’est seulement vers 1600 qu’il commença à peindre des sujets religieux et mythologiques dans un style puissant et monumental, inspiré par la sculpture antique et préfigurant le classicisme de la peinture hollandaise. Goltzius semble aussi s’être inspiré de l’art de la cour de Prague et notamment de Bartholomeus Spranger, en simplifiant toutefois les poses compliquées de ce dernier et en adoucissant ses couleurs acidulées. Goltzius a abordé la figure humaine comme les artistes de la Renaissance, envers lesquels il manifestait une grande admiration. Il fut plus tard également sensible au style clair et vigoureux de Rubens, établi à Anvers après son retour d’Italie en 1608. Dans un premier temps, Goltzius travaille d’après nature, dessinant des nus très audacieux ou encore des paysages réalistes, puis il idéalise et simplifie ses personnages, bien que leurs visages et leurs expressions trahissent toujours cette fidélité au réel.
Goltzius traita à plusieurs reprises le sujet d’Adam et Ève. S’inspirant de la célèbre gravure d’Albrecht Dürer, il réalisa un grand tableau sur ce thème monogrammé et daté de 1608 (aujourd’hui au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg). Cette œuvre offre dans le traitement des visages d’Adam et Ève des similitudes frappantes avec les tableaux de Hartford et de Strasbourg. Citons également un Adam et Ève, signé et daté de 1616, et acquis par la National Gallery de Washington en 1996.
Notice issue de : David Mandrella in Collection du musée des Beaux-Arts. Peinture flamande et hollandaise XVe-XVIIe siècle, Strasbourg, 2009, n°136 (page 204).
Les gravures de Goltzius
Bien avant de se consacrer à la peinture, Hendrick Goltzius s’était spécialisé dans les arts graphiques et tout particulièrement la gravure. Le Cabinet des Estampes et des Dessins de Strasbourg conserve un bel ensemble de ses réalisations, représentatif des différents cycles exécutés par l’artiste au cours de sa carrière, aux Pays-Bas ou durant son séjour en Italie. Cet ensemble est présenté en regard aux deux peintures exceptionnellement réunies à Strasbourg.
Caractéristique de son travail à Haarlem, il faut tout d’abord signaler l’ensemble complet des quatre disgraciés, dits les « culbuteurs », figurant de manière audacieuse quatre personnages précipités dans le vide pour avoir osé défier les dieux (Tantale, Icare, Phaéton et Ixion). Cette série fut réalisée autour de 1588 d’après des peintures de son collaborateur Cornelis van Haarlem (1562-1638). Le traitement hypertrophié des corps nus des malheureux constitue un des traits distinctifs du Maniérisme européen. La profondeur du modelé imprimé aux corps par Goltzius est un véritable tour de force, et cette série participera à l’établissement de la fortune critique de l’artiste.
L’année suivante, et dans une veine toujours aussi dynamique, il réalise un massif et impressionnant Hercule dans son combat contre le fleuve Achéloos. Sous les traits d’un taureau, celui-ci est terrassé par le demi-dieu, et la corne qu’il perd dans sa lutte deviendra selon certaines sources la fameuse corne d’abondance.
Le Cabinet des Estampes et des Dessins compte également deux belles gravures polychromes sur bois ou camaïeux, réalisées entre 1588 et 1590 : Pluton, debout devant son royaume, et Démogorgon, être symbolique créateur du ciel et de la terre, personnifié comme un vieil homme.
Le voyage en Italie à partir de l’automne 1590 est l’occasion pour Goltzius de se confronter aux chefs-d’œuvre de l’Antiquité. La représentation de la sculpture canonique de l’Apollon du Belvédère témoigne ainsi du respect de l’artiste pour l’art de la Rome antique. Deux œuvres illustrent par ailleurs l’importance que le Néerlandais accordait aux artistes de la Renaissance italienne. Goltzius représente ainsi Saint Jérôme en 1596, d’après un tableau du vénitien Jacopo Palma le Vieux (v. 1480-1528).
Enfin, une belle épreuve gravée de La Sainte Famille avec saint Jean-Baptiste est visible dans les collections strasbourgeoises. Cette gravure imitant son contemporain italien Federico Barocci (1533-1612) appartient au cycle dit des « Chefs-d’œuvre », entrepris au retour d’Italie. Ces œuvres pastichent la manière de graveurs tels que Dürer ou Lucas de Leyde avec une telle virtuosité qu’ils ont été pris pour des originaux, et constituent selon tous les spécialistes la quintessence de l’art de Goltzius.
Contrepoint : Adam et Ève au Cabinet des Estampes et des Dessins
Le Cabinet des Estampes et des Dessins, en parallèle à la présentation des deux pendants au Musée des Beaux-Arts, propose dans ses locaux, 5 place du Château, une sélection d’environ vingt œuvres traitant d’Adam et d’Ève selon trois axes, notamment la naissance d’Ève, la tentation et l’expulsion du Paradis (Genèse, chapitres 2 et 3).
Dans les diverses représentations de la naissance d’Ève, la première femme formée à partir d’une côte d’Adam reflète par sa taille la place que lui accorde l’artiste au sein du couple : miniaturisée chez Hans Brosamer (1506 ? – vers 1554), à égalité chez Cranach le Jeune (1515 – 1586) et Étienne Delaune (ca. 1518 – 1583), ou imposante chez Jost Amman (1539 – 1591). Dieu le père, en revanche, est signifié d’autant plus proche de la femme que celle-ci, petite et fragile, appelle la protection du Créateur, tandis que l’homme est plongé dans un profond sommeil, mettant ainsi en évidence la tendre complicité existant entre Dieu et sa créature.
De la magistrale interprétation du couple Adam et Ève que donne Albrecht Dürer en 1504, la collection d’art graphique conserve une belle copie datée de 1566 et due à Johann Wiericx, actif dans la deuxième moitié du XVIe siècle.
Les figures d’Adam et Ève de Dürer, d’autorité, s’imposent comme un homme et une femme dans l’expression la plus parfaite de la beauté humaine. La nudité élégamment assumée, la maîtrise des proportions qui renvoient à l’art classique, d’abord révélé au maître par les gravures d’Andrea Mantegna (ca. 1431 – 1506) et d’Antonio Pollaiuolo (1431/1433 – 1498), puis lors du premier voyage en Italie (automne 1494 –printemps 1495), offrent l’éblouissant résultat de la quête du Nurembergeois à recréer les formes plastiques idéales de l’homme et de la femme. Dürer, contrairement à ses prédécesseurs ou contemporains tels Hans Baldung Grien (1484/85 – 1545), Lucas Cranach… illustre moins « la Chute de l’Homme », dans le registre traditionnel du péché originel, de la tentation charnelle, que deux êtres de liberté qui au seuil de la transgression de l’interdit, se sentent irréversiblement immortels et loin d’une éventuelle altération physique.
Cette proposition époustouflante instaure immédiatement un « avant » et un « après » Dürer. De manière inattendue, deux autres œuvres du maître, La Chute de l’Homme et L’Expulsion du Paradis, issues de la Petite Passion sur bois, suite de trente-sept xylographies que Dürer réalise entre 1509 et 1510, mettent à nouveau l’accent sur la faute originelle ; la complicité charnelle, toutefois, y est assumée par un couple uni, enlacé, et non plus séparé par l’arbre de la Connaissance.
Dans la présente sélection, la gravure de Sebald Beham (1500 – 1550), Adam et Eve chassés du Paradis (1543), révélant une liberté d’interprétation très moderne, est seule susceptible d’offrir un contrepoint à l’impact puissant que dégage le burin de 1504 de Dürer.
Eclairage contemporain : Incarnation, Bill Viola
Bill Viola est né en 1951 à New-York. En 1974, il part pour Florence où il devient technicien dans un grand studio européen de vidéo contemporaine : Art/Tapes/22, situé à deux pas de l’Academia. Ce séjour lui permet de découvrir les œuvres de la Renaissance et de constater la puissance de ces productions passées qui, selon ses propres mots, « imprègnent le corps et l’esprit ». Cette expérience de l’éblouissement sensible invite peu à peu Bill Viola à explorer le médium vidéo dans son lien avec les autres expressions plastiques et notamment la peinture. Si dans ses productions des années 90, il interprète souvent des tableaux précis – en 1995 The Greeting prenait appui sur la Visitation (1528) de Pontormo -, peu à peu, l’artiste approfondit de façon plus subtile les liens entre la peinture et la vidéo, et invite le spectateur à une revisitation des codes symboliques et esthétiques ayant traversé l’histoire de l’art.
Ainsi, dans Incarnation (2008), présentée en regard du diptyque d’Adam et Eve du peintre flamand Hendrick Goltzius, Bill Viola met en scène un homme et une femme aux contours indéfinis, progressivement submergés par une chute d’eau d’où ils émergent lentement à mesure que le flou grisé qui les caractérisait jusqu’alors, laisse place à leur silhouette contrastée et colorée. Bien que la vidéo de Bill Viola n’ait pas été expressément réalisée pour être confrontée aux panneaux de Goltzius, le dialogue qui se crée entre ces œuvres est riche de sens et le thème latent de l’incarnation peut s’interpréter à différents niveaux.
Tout d’abord, au niveau de l’iconographie. Si dans la religion chrétienne, le dogme de l’incarnation recouvre stricto sensu le mystère de Dieu fait homme en Jésus-Christ, la Chute d’Adam et Eve aboutit aussi à une forme d’incarnation : chassés du Paradis, ils perdent leurs corps céleste et sont alors enveloppés par Dieu dans des « vêtements de peau ». Bill Viola porte quant à lui progressivement au visible la figure humaine qui témoigne de sa présence passante dans une transfiguration des spectres gris en des êtres de chair et de sang, clairement définis.
En outre, cette vidéo implique une incarnation esthétique particulière dans le processus de revisitation de la peinture. Elle pose alors les fondements d’une réflexion sur les modalités de ré-incarnation d’une image dans une autre, et permet de créer des images qui auront elles-mêmes sans doute une pérennité et un ascendant sur d’autres créations.
Par ailleurs, la question de l’incarnation touche de façon plus globale celle du rapport au corps et au sensible – question qui ne cesse d’irriguer le travail de Bill Viola dans les liens tissés notamment entre contemplation et émotion. Pour l’artiste, « C’est dans le sensible que réside le mode ultime de connaissance : aujourd’hui, il est nécessaire de réveiller le corps avant l’esprit.» Cette vidéo en travaillant la figuration de façon originale cherche à dépasser le côté illustratif et narratif et tend par là-même à produire, ce que Deleuze nomme la figure c’est-à-dire : « la forme sensible rapportée à la sensation étant donné que c’est le même corps qui la donne et qui la reçoit.» L’amplification sonore de la chute d’eau et le déroulé temporel cyclique d’Incarnation contribuent à immerger le spectateur dans une expérience multi-sensorielle. Chez Bill Viola, qui fait dans ses œuvres le lien poétique entre le physique et le métaphysique, l’humanité et la spiritualité, l’expérience esthétique inclut le spectateur dont il s’agit de déployer les sens, afin qu’il s’engage le plus possible dans l’œuvre présentée.
C’est ainsi que l’on aborde l’ultime stade de l’incarnation telle qu’elle se donne à lire dans le travail de Bill Viola et qui rejoint l’expérience décrite par l’historien de l’art Aby Warburg sous le nom de Nachfühlung. Warburg, en s’intéressant, au début du XXe siècle, aux représentations des nymphes dans l’art, a découvert que cette forme si particulière d’image ne sollicitait pas seulement son regard mais la totalité de son être. Cette implication directe, empathique du corps du spectateur dans le mode d’expression propre de l’œuvre, est le Nachfühlung, l’incorporation.
La relation sublime entre le sensible et le spirituel dans l’œuvre de Bill Viola renouvelle ainsi notre approche de l’histoire de l’art et de son héritage.
Extraits du texte de Danièle Cohn, professeur d’esthétique à l’Université de Paris/ Panthéon Sorbonne, et philosophe, auteur du catalogue : l’Art comme le soleil,qui nous a présenté la nouvelle exposition :
« Pour qui regarde une première fois une oeuvre d’Anselm Kieferou découvre une oeuvre nouvelle, le choc est toujours là, l’incompréhension au premier abord également. Lourde de symboles, exigeant un glossaire, contenant souvent quelques mots écrits à la main, combinant les techniques et engrangeant les qualités de médiums divers sans pour autant les fusionner, ou même les « monter » pour leur donner une continuité sémantique et matérielle, une oeuvre de Kiefer s’installe dans notre perception et comme un monument, et comme une trace mnésique individuelle, un souvenir d’un quotidien dans sa banalité. La peinture de Kiefer est cultivée, savante même. Elle est imprégnée de littérature et d’histoire de l’art, de musique et d’histoire de l’architecture, de philosophie et de science, de théologie et d’alchimie. »
Elle affectionne particulièrement une œuvre d’Anselm Kiefer, (ci-dessus) qui est toute en opposition avec ses grands formats : Dein goldnes Haar, Margarete 1981, thème qu’il a décliné sous d’autres formats.
Je lui laisse la parole :
Paille collée, comme des nids, ceux dans lesquels on installe précautionneusement les œufs de Pâques – ou l’enfant Jésus dans la crèche, – aux carreaux d’une fenêtre. Croisée de la fenêtre, noir et blanc de la photographie, faire part de deuil aussi bien que croix tout autant, mais alors quelle croix, catholique, orthodoxe, protestante, croix de bois sur les tombes ? Papier noir, comme brûlé, noir de cendre, reste de la crémation, cadre noirci pour la clarté jaune de la paille. Textures mêlées du papier, de la pellicule, de la gouache et du relief, que font ces fétus de paille assemblés, tenus dans l’encadrement sombre .
Pour qui regarde une œuvre de Kiefer une première fois ou découvre une œuvre nouvelle, le choc est toujours là, l’incompréhension au premier abord. Lourde de symboles, exigeant un glossaire, contenant souvent quelques mots écrits à la main, combinant les techniques et engrangeant les qualités de mediums divers sans pour autant les fusionner, ou même les « monter » pour leur donner une continuité sémantique et matérielle, une œuvre de Kiefer s’installe dans notre perception et comme un monument, et comme une trace mnésique individuelle, un souvenir d’un quotidien dans sa banalité. La peinture de Kiefer est cultivée, savante même. Elle est imprégnée de littérature et d’histoire de l’art, de la musique, d’histoire de l’architecture, de philosophie et de science, de théologie et d’alchimie.
L’exposition Anselm Kiefer dans la Collection Würth présente le fonds particulièrement riche des oeuvres de l’artiste allemand, depuis ses oeuvres de jeunesse jusqu’à aujourd’hui. Les choix d’acquisitions du collectionneur et fondateur du Groupe Würth, Reinhold Würth, se sont en effet portés ces dernières années sur différents ensembles majeurs du travail de Anselm Kiefer.
Organisée autour des thèmes du paysage héroïque, de la poésie et des cosmogonies, l’exposition se veut comme un parcours dans une géographie imaginaire, l’esquisse d’une cartographie des pensées historiques, poétiques ou encore philosophiques chères à l’artiste. Elle présente ainsi des oeuvres de jeunesse marquées par ses interrogations sur la difficulté d’être un artiste allemand dans les années 1960-1970, vingt-cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Anselm Kiefer appartient à cette génération de plasticiens qui évolue autour de la figuration et du retour au sujet (Richter, Baselitz, Immendorf, Lüpertz). Ces artistes se plongent dans les thèmes littéraires, philosophiques ou artistiques de la culture allemande souvent récupérés par le régime nazi. Cette mémoire qu’ils souhaitent se réapproprier est aussi une arme pour questionner la conscience collective longtemps silencieuse après la défaite de 1945. Les figures héroïques, les corps mutilés, les vastes paysages sont autant de symboles de cette nouvelle iconographie.
Anselm Kiefer, né en mars 1945, fait le choix à la fin de ses études d’expérimenter physiquement le nazisme lors d’un voyage « d’occupation » à travers la France, l’Italie et la Suisse, à l’été 1969. L’artiste se met en scène dans une série d’autoportraits photographiques dans lesquels il effectue le salut nazi. Cet ensemble de photographies aboutira à la réalisation de livres d’artiste, puis en 1970 à une série de huit tableaux intitulés Symboles héroïques. Il déclarera par la suite : « Il fallait que je fasse un petit bout de chemin pour comprendre la folie ».
L’exposition révèle aussi un ensemble d’oeuvres monumentales réalisées au cours des vingt dernières années, où l’on retrouve les matériaux de prédilection de l’artiste : plâtre, plomb, paille, plantes séchées, terre, bois ou encore la photographie.
Le processus d’empilement et de transformation sur la couche picturale, d’objets, de matières et d’écriture qui caractérise le travail de création de Anselm Kiefer, crée une oeuvre polysémique que le visiteur peut aborder librement, en ayant connaissance ou non des références érudites de l’artiste. Les vastes constellations d’étoiles, désignées par des numéros puisés dans les annuaires astronomiques ou dans la nomenclature de la Nasa, invitent en effet tout autant à la contemplation d’un passé ou d’un futur imaginaire, à la découverte des palais célestes de la Kabbale, qu’aux récits de la mythologie antique qui donnèrent leur nom à des systèmes stellaires. Le dialogue ininterrompu avec la poésie, en particulier celle de Ingeborg Bachmann et de Paul Celan, est pour Anselm Kiefer une source de stimulation intellectuelle et émotionnelle inépuisable, qui, le plongeant dans l’horreur de la Shoah, lui donne en même temps les moyens de survivre.
Peintre allemand, Anselm Kiefer est né en 1945 à Donaueschingen dans le Bade-Wurtemberg. Il étudie d’abord le droit, les langues et les littératures romanes, avant de s’orienter vers l’art en fréquentant les Ecoles des beaux-arts de Fribourg-en-Brisgau et de Karlsruhe. Après avoir travaillé à Buchen dans le Bade-Wurtemberg, il s’installe en France et travaille depuis 1993 à Barjac dans le Gard et depuis 2007 à Paris.
L’oeuvre d’Anselm Kiefer démarre sur une interrogation capitale : comment, après l’Holocauste, être un artiste qui s’inscrit dans la tradition allemande ? Ce travail existentiel de mémoire s’est élargi d’une quête spirituelle nourrie de grands mythes et de mystique kabbalistique. Pétri de culture, il mêle peinture, photographie, livres et sculptures. Fasciné par le judaïsme, Anselm Kiefer a, tout au long de son oeuvre, exploré le thème de la Kabbale avec la même insistance que celui de la Germanité.
Jusqu’au 27 Mars 2011, avec l’exposition « Partir de loin… », le Musée des Beaux-Arts de Mulhouse invite à découvrir l’œuvre d’
ElisabethBourdon, son site artiste-peintre mulhousienne. Entre constructions chromatiques et vibrations colorées, le parcours de l’exposition donne à voir en filigrane un travail où l’expérience dispute les apparences. Pour son exposition personnelle présentée au Musée des Beaux-Arts, Elisabeth Bourdon propose un florilège de toiles peintes, de formats carrés variés, composées de couleurs nuancées et de formes élémentaires. Si l’utilisation du carré apparaît comme « l’unité d’un alphabet » pictural, les tableaux d’Elisabeth Bourdon ne veulent pas seulement être compris comme les assemblages d’une seule figure géométrique. En utilisant l’unicité d’une forme, l’artiste entend précisément emmener le regardeur de ses toiles de l’autre côté du sensible.Le carré, s’il fait référence dans l’œuvre d’Elisabeth Bourdon, vaut parce qu’il est associé à d’autres : juxtaposé, superposé et même cloisonné, loin d’exister pour lui-même, il est apposé, appliqué, par aplat précisément, afin de provoquer un « frémissement » visuel. Si l’artiste ne crée pas de séries, ses toiles cependant communiquent et se répondent, se tiennent la main parfois, créent des transitions toujours : vers un monde de possibles que l’artiste sonde elle–même avec une opiniâtreté remarquable.Elisabeth Bourdon interroge à cet égard les sens du spectateur. Son sens du regard tout d’abord, son acuité à dépasser les apparences et à percer le filtre d’un espace visuel à prime abord encombré. Elisabeth Bourdon incite le regard à aller au-delà de ce qu’il voit, et d’accéder à une « sphère claire » à l’aide d’interstices ménagés ici et là, timides ou plus présents. Car plus loin, il y a la couleur et ses infinis espaces : source de réjouissance et moyen efficace par lequel l’artiste interroge la sensorialité des accords qu’elle compose.L’exposition « Partir de loin… » ressemble à une invitation au départ. Il s’agit avant tout pour Elisabeth Bourdon de partir conquérir l’espace d’une toile, en deux temps. Partir de rien d’abord, de la surface d’une toile. Puis partir pour aller loin : recouvrir, et laisser néanmoins apparaître des respirations. Celles sans doute d’un souffle haletant mu par l’expérience de la peinture.Proche et présente, lointaine et distante tant le chemin à parcourir recquiert le sens et le goût du voyage, l’œuvre d’Elisabeth Bourdon, à l’image de la surface du tableau, épiderme de sensations variées, transporte les regards vers des émotions lointaines.
Faire œuvre « d’expériences » : lignes, trames et points
L’évolution plastique et l’approche artistique d’Elisabeth Bourdon témoignent d’un profond goût pour l’expérience. Celle de la couleur et de son univers incommensurable. Celle de la forme et de ses métamorphoses. Entre l’un et l’autre, il y a le trait d’union de la touche, ce moment où la peinture est posée sur la toile et où l’expérience s’amorce : touche étroite à bords ovales, touche large à bords rectangulaires, ou touche quasi impressionniste où le point dialogue avec la persistance rétinienne. Entre toutes ses combinaisons qui annoncent la recherche d’une forme idéale, il existe essentiellement l’envie d’atteindre la mesure d’un répertoire formel et coloré. Raisonner par la couleur : mouvement et dynamisme
Dans l’œuvre d’Elisabeth Bourdon, le regard, le corps et l’esprit du regardeur sont simultanément emportés. Une force omnisciente les anime, sans aucun doute celle de la couleur et le mouvement qu’elle entraîne avec elle. Qu’il s’agisse d’une spirale visuelle, d’un frémissement ou d’une ébullition pour le regard, la couleur est ici employée de sorte que l’image fasse sensation. A cet égard, l’artiste déploie tout le bagage du professeur d’arts plastiques qu’elle est : la cohabitation des couleurs primaires, secondaires et complémentaires, l’attraction mutuelle et leur répulsion réciproque. S’organise ainsi un environnement où les unes laissent la place aux autres pour que se dessine enfin un « for intérieur » : cohabitation de règles et de surprises. L’interstice, cet intermédiaire : une question de rapport
Les œuvres présentées dans l’exposition « Partir de loin… », lorsqu’elles sont rassemblées peuvent se lire comme une recherche de dialogue. Pour ce faire, Elisabeth Bourdon ménage dans ses toiles des espaces de transition. Petites « pépites » colorées ou simples espaces vides signifiés par un fond neutre, ces « communications » apparaissent tantôt comme des espaces cloisonnés, tantôt comme des respirations. Ruptures visuelles dans des gammes chromatiques harmonieuses, elles permettent de nouveaux rebondissements dans cette quête du voyage auquel convie Elisabeth Bourdon. S’affranchir du carré ?
Chez Elisabeth Bourdon, la forme n’est pas une fin en soi. Elle représente davantage le cadre, l’espace d’un dialogue, entre elle-même et les « paysages » de ses souvenirs gardés ainsi en mémoire. L’emploi du carré s’apparente de ce fait à une reconstitution. Forme simple, l’artiste lui impose cependant des métamorphoses : la régularité n’est pas de mise, ni dans sa disposition sur la toile, traitée empiriquement, ni dans son traitement formel. Moyen et non pas objectif, il n’est pas source d’une « composition ». L’artiste ne cherche pas à produire un caractère sériel, répétitif, mais bien à utiliser une unité propre à créer un processus de cohabitation dans ses toiles. Chaque carré coloré participe de l’équilibre d’un maillage encore plus vaste : mise en abîme peut-être, mais surtout évocation d’un ensemble transcendant. texte de Mickael Roy
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La Brésilienne Beatriz Milhazes est l’une des artistes les plus en vue de la scène artistique internationale actuelle. Elle puise les thèmes fondamentaux de son œuvre dans la richesse de la nature tropicale ainsi que dans l’histoire et la culture de sa patrie, donnant naissance à des compositions très vivantes, remplies d’arabesques, d’ornements floraux et abstraits, de formes géométriques et de motifs rythmiques, qui révèlent une somptuosité chromatique lumineuse.
Pour la première fois une exposition est dédiée à Beatriz Milhazes en Suisse. Elle a été exposée à la Fondation Cartier pour la France. La Fondation Beyeler présente dans son souterrain une exposition qui rassemble quatre nouvelles peintures monumentales de l’artiste, une sélection de ses collages les plus impressionnants et un mobile. Les toiles spécialement réalisées pour cette exposition, auxquelles Beatriz Milhazes travaille depuis deux ans, déclinent le thème des quatre saisons. La technique picturale tout à fait singulière de Milhazes s’inspire de la décalcomanie. L’artiste recouvre de peinture des films plastiques transparents. Elle applique les couleurs sur la toile en retirant le film. Les films constamment réutilisés conservent ainsi des traces qui peuvent réapparaître dans la même œuvre ou dans des compositions ultérieures. Tel un palimpseste, chaque peinture témoigne de l’écoulement du temps.
Avec les quatre saisons, c’est la première fois que Milhazes décide du sujet d’une œuvre avant de se mettre à peindre. Le plus souvent en effet, elle choisit le titre une fois son travail achevé, à partir d’une liste de mots et de phrases notés au préalable, sans qu’il existe obligatoirement de lien objectif entre le titre et l’œuvre. Il n’est pas rare non plus qu’elle emprunte les titres de ses collages aux matériaux utilisés, par exemple du papier d’emballage de sucreries. Leur papier multicolore ou monochrome, à motifs, brillant ou fluorescent est également employé pour réaliser des collages.
En 2007, Beatriz Milhazes a réalisé un décor pour la troupe de danse de sa sœur Marcia (Marcia Milhazes Dance Company). Un des mobiles qui ont servi dans ce spectacle a été repris et développé par l’école de samba Imperatriz Leopoldinense de Rio de Janeiro pour l’exposition de la Fondation Beyeler. Les matériaux se composent d’éléments décoratifs très simples, comme on en utilise pour confectionner les chars des défilés de carnaval.
Si la peinture constitue l’élément majeur du travail création artistique de Milhazes, elle recourt également à d’autres techniques telles que le collage ou la gravure. Parallèlement à la production de livres d’artiste, elle s’intéresse également à la création de textiles, de façades, de décors de scène et même d’espaces intérieurs comme celui de la Tate Modern de Londres. A l’Art Basel Miami Beach de 2010, la Fondation Beyeler a présenté un spectaculaire travail de revêtement de sol: toute la surface du stand était recouverte de carreaux de céramique conçus par Milhazes, qui expérimentait ainsi une nouvelle technique.
Le travail de revêtement de sol de carreaux de céramique conçus par Milhazes est désormais une œuvre pérenne, visible au sous-sol de la Fondation Beyler. Je ne peux manquer de trouver un lien de parenté entre Cette artiste brésilienne et l’asiatique Murakami, exposé récemment au Château de Versailles, dans l’opulence multicolore des fleurs, quoique l’idée créatrice ne porte pas la même signification.
La commissaire de cette exposition est Michiko Kono, conservatrice adjointe à la Fondation Beyeler. Jusqu’au 25.4. 2011
Photos 1 et 2 courtoisie de la Fondation Beyeler.
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Ernest Pignon-Ernest (né à Nice en 1942) travaillant la ville comme un matériau plastique et symbolique, Ernest Pignon-Ernest crée des œuvres éphémères par nature dont les traces nous sont offertes, dans les musées et dans les galeries, également dans les livres et les films : dessins préparatoires faits à l’atelier, photographies des rues métamorphosées par ses interventions.
les œuvres d’Ernest Pignon-Ernest sont souvent tragiques, liées à l’horreur des temps et à la condition des hommes à toute époque… Les images de Prométhée et de son aigle, les figures du Christ souffrant et de sa mère douloureuse, les ombres des morts d’Hiroshima hantent bon nombre de ses dessins.
En même temps, la joie de vivre, la sensualité ont leur place dans ce travail. D’abord s’y manifestent le plaisir du dessin et le bonheur de peindre la nudité des corps, même s’il s’agit souvent de corps douloureux. D’autre part, certains événements créés par l’artiste sont des événements heureux.
Ses œuvres les plus riches, les plus complexes, les plus émouvantes, Ernest Pignon-Ernest les a réalisées à Naples, au cours de quatre séjours (en 1988, en 1990, en 1993 et en 1995).
À Naples, il pense les rapports entre la mort et la vie, entre la mort dont on plaisante et celle qui fait pleurer, entre les pompes de la mort et sa misère, entre la mort que l’on donne aux autres et celle qui vous frappe, entre la mort et les dieux souterrains, entre les rites païens et les rites chrétiens. Il cite des tableaux de Caravage et reprend les gestes peints par les peintres napolitains du xviie siècle ; il les reprend avec une heureuse liberté, avec une infidélité volontaire, afin de rendre plus lisibles et plus bouleversants les corps placés en hauteur dans une rue étroite, ou d’autres corps situés dans un soupirail, tout près de dalles en lave noire.
À Naples, il montre des ensevelissements et des résurrections. Il rêve aux Enfers décrits par Virgile. Il se souvient du voisinage de Pompéi et d’Herculanum, cités ensevelies et protégées par leur disparition provisoire. Ses œuvres tendent à manifester la proximité de la catastrophe et du miracle, de la mort et de l’érotique, à rappeler les cultes païens de fécondité et leur continuité masquée à l’intérieur du christianisme… À Naples, il a collé près de mille dessins et sérigraphies.
« Ça fait, dit-il, que j’ai caressé, que je connais les murs de Naples, leur texture, jusqu’au bout des doigts. »
Pour terminer cette approche des œuvres d’Ernest Pignon-Ernest, on soulignera deux de leurs caractères. Tout d’abord, ce sont des œuvres sans couleurs, des dessins en noir et blanc. Elles échappent ainsi à la fois à la tentation du trompe-l’œil et à celle du pathétique. Le sang n’y est pas rouge.
D’autre part, il n’y a pas de cadre autour des œuvres. Celles-ci ne se limitent pas à l’image : parmi les éléments qui constituent chaque œuvre, il y a le mur où elle se place, le sol au pied de ce mur, les habitants et les passants, les souvenirs et les fictions qui hantent la ville. En même temps, l’image creuse les murs, travaille et transforme l’espace urbain. Cette transformation est, la plupart du temps, acceptée par les habitants eux-mêmes, souvent aimée par eux. Le noir et blanc, le refus du cadre, l’homme habite poétiquement ses œuvres.
Marie de l’Incarnation, Madame Guyon, il a conçu une installation novatrice pour dire la matérialité et la sensualité de ces corps de femmes ayant aspiré à la désincarnation. Cet artiste pour qui le papier n’a jamais été un support anodin, a choisi que ses oeuvres fassent corps avec leur réceptacle, à savoir l’architecture qui les reçoit, et contribue à leur donner sens.
Mystique du carmel
A partir des dessins, des scans et des tirages numériques pigmentaires ont été réalisés, puis marouflés sur des panneaux en aluminium mis en forme de feuilles, pour donner un ensemble exceptionnel de ces corps de femmes dont l’image se reflète dans un plan d’eau. C’est la dimension spirituelle du corps qui est au coeur de cette exposition. Le travail d’Ernest Pignon-Ernest, déjà présent dans les salles du musée consacrées à la guerre de 1870 et la Commune de Paris, rejoint ici non seulement la mystique du carmel et les figures célèbres de Marie Madeleine
et de Madame Louise, mais aussi celles des Surréalistes et du poète Paul Eluard qui avait pris pour titre d’un de ses recueils Mourir de ne pas mourir des vers de Thérèse d’Avila.
Cela m’a d’autant plus touché, c’est que j’avais entraîné mes amis à Rome, pour voir les chefs d’œuvre du Bernin, Ludovicina Albertoni a San Francesco da Ripa dans le Trastevere,
Il faut terminer la visite par la chapelle où la vision est quasi mystique, les panneaux dans la pénombre s’illuminent l’un après l’autre, surgissent de la pénombre, pour former un ensemble empreint de grâce, de ferveur, de sensualité extatique.
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le 28 janvier le CEEAC propose une navette Strasbourg / Karlsruhe vers le ZKM pour le vernissage de l’exposition
départ à 16 h 30 devant le CEEAC, inscription obligatoire
au n° 03 88 25 69 70 (places limitées) ou mail à info@ceaac.org
http://www.ecartproduction.net/v2/ca Un DVD édité par Ecart Production, sortira à l’occasion de cette exposition, Coffret 2DVD (29 films) et 1 CD audio comportant 6 œuvres musicales inédites
Livret 80 pages couleur
Textes | Stéphane Audeguy | Hou Hanru que vous pouvez commander à cette adresse
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