Ryan Gander : artiste conceptuel

Ma première rencontre

La petite souris qui murmure dans un coin du musée, c’est lui.
La présence d’une souris dans une exposition, la tête passée dans un trou au bas d’un mur, surprend. Encore plus lorsqu’elle s’adresse à nous avec une voix enfantine, celle de la fille de l’artiste. Cette petite souris animatronique bégayante tente en vain de s’exprimer, dans un monologue plutôt confus, puis abandonne et avoue ne pas savoir quoi dire. Comme souvent dans l’œuvre de Ryan Gander, Ever After: A Trilogy (I… I… I…) se caractérise par la malice et la surprise, une œuvre dont la légèreté la rend si accessible. Equipée d’une batterie, prisonnière de sa boucle programmatique, cette souris arrête le visiteur dans son élan, le déroute et crée une illusion. Forcée d’enchaîner cycle sur cycle, jusqu’à l’épuisement, elle nous fait réfléchir et sourire sur notre condition.

« Si je savais ce que signifie cette souris, ce ne serait pas une très bonne œuvre d’art » Ryan Gander

Ses petits couinements expriment le besoin de laisser une trace de notre passage sur terre. Ils érigent un monument au langage, la seule chose qui distingue les êtres humains des animaux.

Ma 2e rencontre

Ce fut à Baden Baden au musée Frieder Burda, dans l’exposition : 
Amazing TRANSFORMERS so cute. C’est là que j’ai pu l’entendre s’exprimer.

« Sa difficulté à s’exprimer illustre notre besoin de raconter des histoires et d’être entendus, même quand nous n’avons rien à dire, un besoin d’attention excessif dans un monde devenu vorace de contenus. » Ryan Gander

Un autoportrait dans une poubelle

J’ai manqué, ne pas l’apercevoir, ce serait dommage de rater le petit personnage, alter ego de l’artiste en bonnet rouge et marinière, allongée sur le sol, la tête sur une pauvre poubelle, de la Galerie Kamel Mennour

On peut encore se contempler dans le miroir ancien, dans la même galerie, Galerie Kamel Mennour, en marbre sculpté.

Biographie

Ryan GANDER — né en 1976 à Chester (Royaume-Uni). Vit et travaille à Londres (Royaume-Uni).

Ryan Gander est un artiste contemporain britannique. Artiste conceptuel, Ryan Gander cultive des pratiques très diversifiées : sculpture, installation, dispositif interactif, performance, vidéo, design, écriture… Maniant le trait d’esprit et l’humour (witty, pour le dire en anglais), son travail joue sur les détournements. Bauhaus Revisited (2003), par exemple, reprend le jeu d’échec conçu en 1924 par Josef Hartwig. De géométrie abstraite, les pièces de Josef Hartwig sont déjà difficiles à discerner les unes des autres. Compliquant la donne, Ryan Gander utilise une essence de bois strié (marron clair, marron foncé) pour réaliser toutes les pièces de son Bauhaus Revisited. Le bois de zebrano rend ainsi les camps opposés encore plus difficilement discernables, quoique chaque pièce soit unique. Actuellement, le travail de Ryan Gander est notamment représenté par la Lisson Gallery (Londres, New York, Milan) et gb agency (Paris), notamment.

Ryan Gander a étudié les Arts Interactifs à la Manchester Metropolitan University (1996-1999). En 2000 il passe une année à la Jan van Eyck Academie de Maastricht, en tant que chercheur en art. Puis il effectue une résidence à l’Académie Royale des Beaux-Arts d’Amsterdam (2001-2002). En 2003, il reçoit le Prix de Rome de Sculpture. Conceptuel, le travail de Ryan Gander l’est en ce qu’il joue sur les narrations, à la manière d’un Marcel Duchamp. En 2009, son installation Matthew Young falls from the 1985 into a white room (Maybe this is that way it issupposed to happen), jongle ainsi avec les références. Elle s’appuie sur une nouvelle de J.G. Ballard, évoquant l’exposition « Sculpture de l’âge spatial », censée avoir eu lieu à la Serpentine Gallery de Londres. Quelques bris de verre (en sucre), quelques morceaux de bois rompu… Toute la saveur de l’œuvre réside dans les références imbriquées.

Installations, narrations, sculptures, dispositifs interactifs… Biennale de Venise et Documenta

En 2011, Ryan Gander participe à la Biennale de Venise et, en 2012, à la Documenta de Cassel. Pour cette dernière, il présente la pièce I Need Some Meaning I Can Memorise (The Invisible Pull). À savoir un léger courant d’air parcourant une grande pièce laissée vide. En 2013, le Frac Île-de-France (Le Plateau) présente « Make every show like it’s your last ». Soit la première exposition personnelle de Ryan Gander dans une institution parisienne. Avec la pièce Magnus Opus (2013), par exemple, consistant en une paire d’yeux, incrustée dans le mur et animée à l’aide de capteurs. Renversant ainsi les rôles spéculaires, entre les regardeurs et les regardés. Londres, Bâle, Paris, New York, Bologne, Amsterdam, Vienne, Zurich, Miami, Los Angeles, Tokyo, Varsovie, Mexico… Le travail de Ryan Gander fait l’objet d’expositions personnelles dans le monde entier.

Ryan Gander : artiste conceptuel, traits d’humour et références imbriquées

                                                                    Art Basel

L’horloge

« Les horloges nous disent que notre obsession pour la mesure du temps est en contradiction avec la nature humaine. Je la trouve… assez malsaine.


Avant, les êtres humains vivaient dans un état de stase, pas de croissance. » L’accélération du capitalisme est inévitable et toujours plus difficile à discerner. Avant, nous n’avions pas vraiment besoin de mesurer le temps ou la richesse. Compter n’était pas si important… Les civilisations florissantes vivaient selon le temps, Kairos – une conception du temps basée sur « le bon moment ou l’occasion opportune », sur l’immédiateté – et pas selon le temps, Chronos, dicté par les horloges. Imaginez un monde où l’on mangerait quand on a faim, et non à l’heure des repas. « 

Gander est un utilisateur de fauteuil roulant souffrant d’un handicap physique de longue durée, une grave maladie des os fragiles qui l’a hospitalisé pendant de longues périodes lorsqu’il était enfant.  En 2006, son installation à l’ancienne bibliothèque de Whitechapel, Is this Guilt in you too?, où il a rempli l’espace d’obstacles, de détritus, d’impasses et d’illusions destinés à dérouter les visiteurs et à symboliser les difficultés inéquitables rencontrées par les personnes handicapées, faisait partie des expositions Adjustments du Arts Council England dont le but était « d’aborder la pensée transitionnelle sur le handicap, l’égalité et l’inclusion ». Son travail pour l’ exposition de la Biennale de Venise de 2011 comprenait une sculpture de la taille d’une figurine qui le représente alors qu’il tombe d’un fauteuil roulant.

Metrocubo d’infinito, avec Michelangelo Pistoletto

L’événement s'est tenu en français, avec traduction anglaise simultanée.
Performance de l’artiste Michelangelo Pistoletto
Discussion animée par Carolyn Christov-Bakargiev
Direction artistique et curatoriale : Paul Olivennes
Commissaire associée : Laura Salas Redondo

Présentée en collaboration avec : Magma Journal
Éditorial : Paul Olivennes, Boris Bergmann
Scénographie : Matière Noire
Avec le soutien de Galleria Continua
  1. Metrocubo d’infinito, avec Michelangelo Pistoletto
    suivie d’une discussion avec Carolyn Christov-Bakargiev
    À l’occasion de l’exposition « Arte Povera », la Bourse de Commerce et Magma Journal présentent une performance exceptionnelle de l’artiste italien Michelangelo Pistoletto.

Figure centrale de la création contemporaine depuis les années 1960 et de la naissance du mouvement « Arte Povera », Michelangelo Pistoletto est célèbre pour ses tableaux miroirs. Dans l’Auditorium de la Bourse de Commerce, l’artiste propose une performance inédite autour de l’œuvre Metrocubo d’infinito (Mètre cube d’infini), présentée dans l’exposition en Galerie 3 et qui appartient aux Oggetti in meno (Objets en moins), œuvres exposées dans son atelier entre décembre 1965 et janvier 1966.


Dans un écrin à l’apparence banale et aux proportions dérisoires — un mètre cube symbolique — réside pourtant l’étendue infinité. Sculpture neutre de six miroirs ficelés et tournés vers l’intérieur, dont on ne peut qu’imaginer les infinis reflets, Metrocubo d’Infinito concentre les préoccupations de Michelangelo Pistoletto sur les potentialités physiques du miroir et ses allusions mystiques. C’est dans un ballet, de mouvements, avec des assistants très élégants, de noir ou de gris vêtus, gantés de noirs, que la performance se prépare minutieusement.

Après l’exécution de la performance, Pistoletto salue le public, qui l’ovationne.

La performance est suivie d’un échange entre Michelangelo Pistoletto et Carolyn Christov-Bakargiev, commissaire de l’exposition.

Michelangelo Pistoletto (né en 1933 à Bielle) se fait remarquer dès le début des années 1960 par la série des Quadri specchianti (tableaux miroirs). En appliquant des images obtenues par report photographique sur des plaques d’acier inox polies, l’artiste inclut le spectateur et l’environnement dans l’œuvre d’art. À la fin de la décennie, les installations de Michelangelo Pistoletto en matériaux pauvres l’imposent comme une figure majeure de l’Arte Povera. Dans les années 1990, ses actions au sein du tissu urbain et social avec la Fondation Cittadellarte et l’université des Idées de Biella accentuent la dimension politique de son œuvre. En 2003, il reçoit le Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière à la Biennale de Venise.

Carolyn Christov-Bakargiev (née en 1957 aux  Etats-Unis) est une historienne de l’art, commissaire d’exposition et directrice de musée. Spécialiste de l’Arte Povera, elle a publié une monographie de référence sur le courant (Londres, Phaidon Press, 1999) et des essais et études sur ses artistes. Carolyn Christov-Bakargiev a été commissaire pour la Capitale culturelle européenne d’Anvers (1993) et pour la Villa Médicis, Rome (1998-2000), conservatrice en chef au MoMA/P.S.1, New York (1999-2001), directrice artistique de la 13e édition de la dOCUMENTA à Kassel, directrice du Castello di Rivoli, Turin de 2016 à 2023. En 2019, elle a reçu le Prix Audrey Irmas pour l’excellence en conservation.

 Magma est une plateforme artistique fondée par Paul Olivennes en 2022, réunissant chaque année dans une publication inédite des plasticiens, photographes, écrivains, réalisateurs, sculpteurs, architectes et designers du monde entier. Conçu comme un forum d’expression artistique destiné aux artistes, proposant des œuvres originales et des formats nouveaux chaque année, Magma intervient également auprès des institutions et des artistes dans la réalisation de collaborations, conférences, performances, expositions, et documentaires.

Biographie

Michelangelo Pistoletto (né en 1933 à Biella, au Piémont) est un artiste contemporain, peintre et sculpteur italien. Connu à partir des années 1960, il rejoint le mouvement Arte Povera (à partir de 1967).
Michelangelo Pistoletto débute en 1947 en tant qu’apprenti dans l’atelier de son père, restaurateur de tableaux. Il collabore avec lui jusqu’en 1958 tout en fréquentant l’école de graphisme publicitaire dirigée par Armando Testa (it). À partir de ce moment-là naît son activité créative dans l’art de la peinture qui s’exprime aussi par les nombreux autoportraits sur des toiles préparées avec apprêt métallique et par la suite sur des surfaces en acier, lustré miroir.

Michelangelo Pistoletto :
« Le rôle du musée est de donner une conscience à la société »

En 1959 il participe à la Biennale di San Marino et l’année suivante il expose à la Galleria Galantayar de Turin.

Au début des années 1960, Pistoletto commence à réaliser des œuvres peintes figuratives et des autoportraits sur un fond monochrome métallique. Par la suite il combine peinture et photographie en utilisant des techniques de collage sur des arrière-plans réfléchissants. Finalement, il se convertit à l’impression photoréaliste de scènes sur des plaques d’acier polis pour rendre une haute finition en utilisant la sérigraphie, qui fond presque complètement l’observateur1.

La Galerie Ileana Sonnabend le met alors au contact du public international.

En 1965/1966, Pistoletto produit la série des œuvres Oggetti meno (« les objets en moins »), qui appartient à ses premières œuvres sculpturales.

En 1966, Pistoletto réalise sa première exposition aux États-Unis, au Walker Art Center de Minneapolis.

En 1967, son travail remporte le premier prix de la Biennale de São Paulo et la même année il commence à mettre l’accent sur la performance, l’art vidéo, et le théâtre. Il fonde un groupe d’art action appelé « Groupe de Zoo » qui donne plusieurs spectacles entre 1968 et 1970 dans le studio, les bâtiments publics ou dans les rues de Turin ou d’autres grandes villes, l’objectif étant d’afficher l’unité de l’art et de la vie quotidienne2.

Il est exposé par la Simon Lee Gallery de Londres et le Luhring Augustine Gallery de New York. Il est également représenté par la Galerieofmarseille, Marseille, France. En 2005, il expose aux côtés d’Agnès Varda et d’Éric Sandillon.

En 2007, Michelangelo Pistoletto reçoit le prix Wolf en art, en 2013, le prix Praemium Imperiale en peinture, et en 2018 le prix Haftmann.

En 2009, Salvatore Garau et Michelangelo Pistolettoont exposé ensemble à l’exposition Di tanto mare. Salvatore Garau – Michelangelo Pistoletto

Arte Povera

Michelangelo Pistoletto commence à peindre sur les miroirs en 1962, reliant la peinture avec les réalités sans cesse changeantes sources de son inspiration. À la fin des années 1960 il commence à réaliser des moulages à partir de chiffons en innovant dans l’« art statuaire classique » omniprésent en Italie. L’art d’utiliser les « matériaux pauvres » est l’un des aspects de la définition de
l’Arte Povera (« Art pauvre »)…

En 1967 avec Muretto di stracci (« petit mur en chiffons »), Pistoletto réalise une tapisserie exotique, un opulent mélange de briques et de chutes de tissu. Pistoletto, qui a commencé sous l’influence américaine du « post-Pop art » et du photoréalisme est bientôt répertorié dans les catalogues par les galeristes et critiques comme un important représentant de la tendance nouvelle de l’Arte Povera italienne.

Sur toile de fond des émeutes estudiantines de 1968, Pistoletto retire sa participation à la Biennale de Venise. Dans les années suivantes, il compose avec les idées conceptuelles qu’il présente dans le livre L’uomo nero « L’homme noir » (1970).

En 1974, il se retire presque complètement de la scène artistique : il devient moniteur de ski et passe le plus clair de son temps dans les montagnes de San Sicario. (allusion lors de sa performance par

À la fin des années 1970, il produit des sculptures, têtes et torses à l’aide de polyuréthane et de marbre qui lui procurent des commandes d’artefacts antiques ; il projette aussi des objets pour les décors théâtraux aux États-Unis (AthensAtlanta et San Francisco).

Au début des années 1980, il présente des œuvres de théâtre, comme Anno Uno (« An un ») (1981) au Teatro Quirino à Rome.

Depuis 1990, Pistoletto vit et travaille à Turin.

Cittadellarte – Fondazione Pistoletto

En 1994, Michelangelo Pistoletto a proclamé son programme Progetto Arte, dont l’objectif était l’unification économique créatrice et sociale de toutes les parties de l’existence humaine ; dans un sens plus précis, la combinaison systématique de toutes les réalisations et les connaissances de la civilisation des aspects de l’art (fashion, théâtre, design…).

En 1996, il fonde la ville d’art Cittadellarte – Fondazione Pistoletto dans une usine de textile désaffectée près de Biella, comme centre et « laboratoire » soutenant des recherches sur les ressources créatives et produisant des possibilités et des idées innovantes.

La Cittadellarte est divisée en différentes Uffici (bureaux) : travail, éducation, communication, art, nutrition, politique, spiritualité et économie. Bien qu’il soit conçu comme un système fermé, la transparence vers le monde extérieur est un aspect important de la Cittadellarte6.

Art Basel Paris 2024

Je le retrouve dans sa galerie face, dans et devant son miroir

A suivre

LES NUITS DE L’ÉTRANGE

4e édition les 30 et 31 octobre 2024

théâtre · marionnette · musique · arts visuels, visites · projections · lectures

2 NUITS POUR JOUER À SE FAIRE PEUR
DANS 11 LIEUX DE MULHOUSE

                                                        Paula Rego

Les Nuits de l’Étrange se renouvellent cette saison avec une édition augmentée les 30 et 31 octobre dans le cadre de Mulhouse, 800 ans d’histoires.
Aux rendez-vous de La Filature, Scène nationale, s’ajouteront ceux imaginés par douze partenaires mulhousiens :
le Théâtre de la Sinne, la Médiathèque de La Filature, l’atelier de gravure de la HEAR, La Kunsthalle, centre d’art contemporain, KMØ – Studio & Ateliers, le cimetière de Mulhouse, Mémoire mulhousienne, le Musée national de l’Automobile, la Cité du Train – Patrimoine SNCF, le Parc zoologique et botanique, le Musée de l’Impression sur Étoffes, le Noumatrouff et Motoco.

Lieux de culture ou de patrimoine, chacun proposera des formes artistiques qui viendront bousculer nos sens pour jouer à nous faire peur !
La Filature

La Filature 
20 allée Nathan Katz 
68100 Mulhouse
billetterie www.lafilature.org · +33 (0)3 89 36 28 28

Informations pratiques

Ici téléchargez le programme

THOSE EYES – THESE EYES – THEY FADE

MUSÉE DES BEAUX-ARTS, Mulhouse, jusqu’au 5 janvier 2025, tous les jours (sauf le mardi et les jours fériés): 13h – 18h30
et pendant le marché de Noël : 13h – 19h
Bénédicte Blondeau -Bernard Plossu –  Nigel Baldacchino – Raymond Meeks -Awoiska van der Molen
Commissaire : Anne Immelé

Dans le cadre de la 6e édition de la BPM, l’exposition those eyes – these eyes – they fade explore les liens souterrains unissant l’humain aux mondes vivants, et ce, depuis la nuit des temps. Offrant un parcours entre des espaces urbains et naturels, elle se veut être une méditation prolongée, une contemplation
active et poétique. Les oeuvres, parfois intimes parfois plus objectives, reflètent la vision personnelle des photographes et invitent à une expérience visuelle et émotionnelle plutôt qu’à une compréhension littérale.

Les installations photographiques encouragent le public à naviguer à travers des environnements aux contrastes marqués, suscitant une diversité de perceptions. Comme des images qui apparaissent à chaque clignement d’oeil, l’exposition propose des visions d’un monde en mouvement, mettant en évidence l’interconnexion entre les humains et les autres êtres vivants, y compris les plantes. Pour Emanuele Coccia, les plantes ont modifié la structure métaphysique du monde. Selon lui, c’est aux plantes qu’il faut demander
ce qu’est le monde car ce sont elles qui « font monde ». Cette connexion de la vie humaine avec celle des plantes, des minéraux, des différents organismes est primordiale dans la conception de mondes – devenus impossibles aujourd’hui – mais possibles demain.
Une première forme de those eyes – these eyes – they fade a été présentée en 2022 à l’espace Valletta Contemporary à Malte.

Quelques vues sur FaceBook

Bénédicte Blondeau

Avec Ondes, Bénédicte Blondeau documente les flux d’énergie qui façonnent nos existences tout en débordant nos capacités de perception. Cette série traite du lien entre notre origine et notre destination ultime. Ce même lien qui nous unit à des époques lointaines, aux premières formes de vie et au cosmos,
dans une vision d’interconnexion et d’interdépendance. Ondes présente une vision du réel qui n’oublie pas que celui-ci renvoie aussi à ce qu’on ne voit pas. C’est une exploration des éléments basée sur le principe que tout est en perpétuelle transformation, que nous soyons capables de le percevoir ou non.

Née à La Louvière, en Belgique, Bénédicte Blondeau a étudié la photographie à Gand et à Lisbonne, obtenant un master en communication appliquée à l’IHECS, à Bruxelles. Elle a participé à diverses expositions et conférences à travers l’Europe et son travail a été publié dans de nombreux magazines à l’international. En 2019, son premier livre photo Ce qu’il reste est paru chez l’éditeur portugais XYZ Books. En 2021, sa première exposition monographique a eu lieu au Photoforum Pasquart en Suisse. Bénédicte Blondeau a également travaillé comme réalisatrice de films documentaires et est actuellement
commissaire d’expositions photographiques pour PEP – photographic exploration project qu’elle a fondé à Berlin en 2019.

Bernard Plossu

La nature prisonnière de Bernard Plossu rassemble des clichés des années 1970, pris en France et aux États-Unis, illustrant la mise en scène artificielle de la nature dans des espaces pleinement bétonnés. Des arbres solitaires, ou presque, fournissent des effusions d’une vie végétale qui tente d’échapper au contrôle
de l’humain dans des environnements conçus par et pour lui. Face à ces images en noir et blanc, Bernard Plossu propose d’y opposer la chaleur de l’exubérante végétation du bassin méditerranéen. Après une vie de voyage, c’est au contact de cette nature côtière et généreuse que le photographe vit désormais, sans
oublier de lui rendre hommage par l’image.

Né en 1945 au Vietnam, Bernard Plossu réalise ses premières photos à treize ans, lors d’un voyage au Sahara avec son père. En 1965, il part au Mexique où il photographie ses amis beatniks avec lesquels il expérimente l’errance et la liberté. Il voyage chez les Indiens mayas, en Californie, en Égypte, en Inde, au Niger. En 1977, Bernard Plossu s’installe au Nouveau-Mexique. Il y perfectionne un style visuel direct caractérisé par une absence totale d’effet. Dans les années 1980, Il revient vivre en Europe et continue de marcher notamment en Espagne, en France, en Turquie ou sur les petites îles italiennes.
Ses images sensuelles et silencieuses évoquent la douceur des corps, de la matière, du mouvement. Il est l’auteur de très nombreux ouvrages ayant fait date, tels que Le Voyage mexicain, The African Desert, Au Nord, Avant l’âge de raison ou L’heure immobile.

Nigel Baldacchino

Dans Pinetu, Nigel Baldacchino capture les arbres du Jubilee Grove, un espace vert urbain à Malte.
Chargé d’histoire pour les habitant·es, ce bosquet charrie avec lui plusieurs strates d’une honte aux accents catholiques. Il s’y déroule une culture de drague masculine active mais secrète alors que le lieu, témoin d’épisodes de violence, sert également de refuge aux sans-abris et de zone de consommation d’héroïne.
Les formes uniques des arbres deviennent des métaphores des divers parcours de vie, bifurquants et entrelacés, tandis que l’espace porte également la mémoire personnelle de l’artiste qui a grandi non loin de celui-ci. Ne représentant que la végétation du parc et non sa population y vivant souvent une double vie, Nigel Baldacchino choisit d’éluder toute représentation explicite et sensationnaliste au profit du trouble de la suggestion.

Né en 1989, Nigel Baldacchino est un artiste et un architecte basé à Malte. Sa pratique artistique s’étend à divers médias, dont la photographie, la production musicale, la vidéo, le texte et la conception d’objets et d’espaces physiques. Son élan vers la photographie dépasse le cadre de thèmes donnés et est souvent alimenté par ses propres réflexions sporadiques sur la façon dont les gens se rapportent au monde qui les entoure, par leur présence dans l’espace et la perception qu’ils en ont.

Raymond Meeks

Réalisées dans le désert californien au début de l’année 2024, les photographies de la série Erasure, after nature s’inscrivent dans les ruines du capitalisme. De la présence humaine il ne reste que des objets laissés au rebut et des vestiges, tels des ruines d’un passé glorieux désormais incompréhensible ou insupportable.
À la manière de la démarche qui caractérisait ses précédents travaux, le photographe a cherché à recenser des motifs et des textures témoignant de la vie itinérante ayant cours dans des espaces marginalisés. Par l’immersion totale dans ces territoires, son observation minutieuse devient une analyse des migrations humaines.

Connu pour ses livres et ses images qui s’attachent aux questions de mémoire et de lieu, Raymond Meeks explore la manière dont le paysage peut façonner l’individu et, de manière plus abstraite, la façon dont un lieu, même absent, peut continuer à exercer un pouvoir de fascination sur l’être humain. Son travail fait partie des collections permanentes de la National Gallery of Art à Washington D.C., de la George Eastman House à Rochester et de la Bibliothèque nationale de France. Ses expositions personnelles ont eu lieu chez Casemore Kirkeby à San Francisco et chez Fotografia Europea en Italie. En 2018,
son livre Halfstory Halflife (Chose Commune) a été sélectionné parmi les finalistes du prix Paris Photo / Aperture.

Awoiska van der Molen

Awoiska van der Molen présente deux séries dont les sujets sont éloignés spatialement mais se rejoignent dans l’impression de silence qui s’en dégage. Urban offre des scènes nocturnes contemplatives de la ville qui nous relient à une mémoire profonde. L’espace urbain s’y trouve comme figé dans un moment suspendu où seules les lumières artificielles rappellent une présence humaine latente. Les photographies du projet The Living Mountain forment quant à elles une plongée dans un univers isolé, préservé et luxuriant. La profondeur de leurs ombres rappelle par moments la lueur argentée des nuits de pleine lune. Deux idées de la densité sont ainsi mises en regard.

Née en 1972, Awoiska van der Molen est une artiste photographe néerlandaise. Elle a étudié l’architecture et le design, puis la photographie à la Minerva Art Academy Groningen et à la Hunter City University de New York. En 2003, elle
obtient une maîtrise en photographie à l’Académie St. Joost de Breda, aux Pays-Bas. Awoiska van der Molen est connue pour ses images analogiques monumentales en noir et blanc qui représentent son expérience de l’espace primordial et psychologique dans le monde qu’elle photographie.
Les oeuvres de la série The Living Mountain ont été prêtées par la Collection d’entreprise Neuflize OB

Informations pratiques

MUSÉE DES BEAUX-ARTS,
4 Place Guillaume Tell, Mulhouse
Ouvert tous les jours
(sauf le mardi et les jours fériés)
de 13 à 18 h 30

Olivier Metzger

Toutes les nuits tu restais là

Aux Lumières de la ville

Exposition photographique en entrée libre, à la Galerie de la Filature
du 27 septembre  au 22 décembre 2024 Emmanuelle Walter
responsable arts visuels
Somewhere and Somehow
Vendredi 4 octobre à 19H
en entrée libre · salle modulable

« Des photos au cadrage sobre, parfois en plans rapprochés. La lumière y avait déjà une grande importance »,
se souvient Anne Immelé, Docteur en art, photographe et commissaire d’expositions.

La Filature rend hommage à Olivier Metzger à travers une exposition consacrée au photographe né à Mulhouse en 1973 et décédé dans un accident de la route en novembre 2022. Diplômé de l’ENSP d’Arles en 2004, Olivier Metzger est
très vite sollicité par de nombreuses rédactions pour ses portraits à la dramaturgie singulière. Son style se démarque par des lumières complexes, des décors énigmatiques et une ambiance mélancolique. Photographe de l’étrange, Olivier Metzger cherchait dans la lumière ce qu’elle pouvait révéler des choses dissimulées, à l’instar de David Lynch qui avait fait de la série Smile (Forever) son coup de coeur à Paris Photo en 2012. En mai 2022, Olivier Metzger était accueilli en résidence à Soorts-Hossegor pour créer Sodium, une archive photographique de la nuit landaise. Il poursuivra cette recherche sur l’éclairage des villes la nuit avec sa série Aux Lumières de la ville dans le cadre de la grande commande nationale financée par le ministère de la Culture et pilotée par la BnF. Il nous reste aujourd’hui ses images et le souvenir d’un photographe inspiré et exigeant qui était l’une des forces les plus sûres de sa génération.

Somewhere and Somehow

LECTURE-PROJECTION EN HOMMAGE À OLIVIER METZGER
par Éric Reinhardt, avec la participation de Mélodie Richard

Créé par Éric Reinhardt à l’invitation des Rencontres d’Arles pour rendre hommage à Olivier Metzger, Somewhere and Somehow est un
récit imaginé comme une traversée tant dans l’oeuvre visuelle que dans
l’univers musical du photographe.
Le texte lu sur scène a été composé par Éric Reinhardt à partir de quarante-neuf chansons prélevées dans la bibliothèque Spotify d’Olivier Metzger, à laquelle Rosanna Tardif lui a fait l’amitié de lui donner accès.


SUIVIE DU VERNISSAGE

en présence de Laurent Abadjian, directeur de la photographie de
Télérama, Laurent Rigoulet, reporter chez Télérama, Olivia Delhostal et
Marie Delcroix, fondatrices de l’agence modds, et Rosanna Tardif
Somewhere and Somehow
VE. 4 OCT. 19H
en entrée libre · salle modulable

Informations

Les photographies de la série Aux Lumières de la ville ont été produites dans le cadre de la grande commande nationale
« Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire » financée par le ministère de la Culture et pilotée par la BnF.
Les photographies de la série Sodium ont été produites dans le cadre d’une résidence du photographe à Soorts-Hossegor à l’invitation d’Erwan Delplanques et Constance de Buor (galerie Troisième Session).
Remerciements
Agence modds, Marie Delcroix et Olivia Delhostal ; Chicmedias, Bruno Chibane et Philippe Schweyer ; Rosanna Tardif

Pratiques

Site officiel d’Olivier Metzger
Le Monde sur la disparition d’Olivier Metzger
Liberation : Hommage à Olivier Metzger

Fisheye Magazine : Maître de la lumière
Bibliothèque nationale de France : Hommage au photographe

Ouverture
Du ma. au sa. de 13h à 18h + di. de 14h à 18h + soirs de spectacles
en entrée libre · Galerie

CLUB SANDWICH JE. 3 OCT. 12H30
visite guidée de l’exposition + pique-nique tiré du sac et
Food Truck Rest’O truck sur le Parvis
visite gratuite sur inscription au 03 89 36 28 28 · Galerie
VISITES GUIDÉES sur rendez-vous
edwige.springer@lafilature.org ou 03 89 36 28 34
RETROUVEZ CETTE EXPOSITION sur le site internet

Paula Rego – jeux de pouvoir

Du 28.9.2024 – 2.2.2025, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaire : Eva Reifert
Jeux de pouvoir

L’artiste luso-britannique Paula Rego (1935–2022) compte parmi les peintres figuratives les plus importantes des dernières décennies. Militante, féministe et auteure de tableaux tour à tour exubérants et inquiétants, son influence se fait sentir dans le milieu artistique de son pays natal, le Portugal, et dans son pays d’adoption, la Grande-Bretagne. Lorsqu’elle décède en 2022, elle laisse derrière elle une oeuvre foisonnante qui témoigne de son intérêt pour l’étude des
« jeux de pouvoir et hiérarchies » qu’elle a confié être son thème de prédilection.

Self Portrait in Red, vers 1966
Huile, crayon de couleur et papier sur toile,
collage, 152 × 152 cm
Museu Nacional de Arte Contemporânea,
Lisbonne

 Ce profond intérêt de l’artiste pour les dynamiques de pouvoir constitue le leitmotiv de l’exposition monographique d’envergure Paula Rego. Jeux de pouvoir au Kunstmuseum Basel. Il s’agit de la première présentation muséale de l’oeuvre de Rego dans l’espace germanophone et de la première grande exposition monographique depuis sa mort. S’appuyant sur quelque 120 peintures et pastels, ainsi que plusieurs poupées, carreaux et documents, cette exposition d’une grande puissance visuelle invite le public à découvrir l’univers inoubliable de Paula Rego et vise à approfondir la compréhension de cette artiste majeure.

Organisée de manière thématique, l’exposition rassemble des oeuvres emblématiques de plusieurs décennies, y compris des travaux de Rego traitant de la dictature de Salazar. D’autres motifs centraux de son oeuvre concernent son engagement contre les lois restreignant l’avortement dans son pays natal et contre la participation britannique à la guerre en Irak. Dans l’ensemble de son oeuvre, Rego remet en question les hiérarchies habituelles et montre des femmes endossant différents rôles. L’exposition présente ses spectaculaires pastels grand format inspirés à la fois de récits littéraires et de films Disney, ainsi que des exemples de ses travaux graphiques d’une brillante virtuosité technique.

Les thèmes essentiels

Autoportraits

Au cours de sa carrière, Paula Rego ne
réalisa que quelques autoportraits. La
plupart jouent sur la confusion : un portrait de rôle dans une posture résolument masculine, un reflet dans un miroir qui ne montre pas Rego mais son modèle, ou une figure aux yeux blessés dans un tourbillon de formes décomposées. Le fait que l’artiste se montre directement reste l’exception. Du point de vue stylistique, les autoportraits de Rego témoignent de la grande capacité de transformation avec laquelle elle donna toujours de nouvelles orientations à son art au fil du temps.

Constellation familiale

La famille – pour Paula Rego, cela renvoyait d’abord à la séparation de son père et de sa mère, qui vivaient temporairement au Royaume-Uni, tandis qu’elle restait chez ses grands-parents à Lisbonne. Plus tard, ses parents lui permirent d’étudier à Londres à la prestigieuse Slade School of Art. Rego sépara toujours sa création artistique de sa vie d’épouse et de mère de trois enfants.
Néanmoins, les membres de sa famille apparaissent régulièrement comme modèles dans ses oeuvres. Dans The Family, Rego donna à la constellation de personnages une dimension psychologique inquiétante.
Dans The Dance, en revanche, le changement des relations et de l ’
« être pour soi » se révèle comme un rythme de vie.

Pouvoir d’État

Les thèmes historiques de Paula Rego montrent à quel point l’histoire et la mentalité de son propre pays d’origine peuvent avoir un impact. Elle se pencha par exemple sur un régicide ou sur la dictature d’António de Oliveira Salazar, soutenue par l’Église et l’armée. Dans une immense tapisserie, des expériences traumatisantes passées et présentes du pays se superposent : alors que le Portugal était en guerre dans les années 1960 contre les mouvements d’indépendance de ses dernières colonies sur le continent africain, Rego rappela la défaite écrasante contre les troupes marocaines qui mit fin à l’expansionnisme portugais en 1578.

                                                     Le régicide

Lutte des sexes

La relation entre la femme et l’homme dans l’oeuvre de Paula Rego montre également que son univers artistique n’est pas un monde idéal. La dynamique entre les sexes, jusque dans l’érotisme, est marquée par le pouvoir et la violence. Les figures animales représentent des adversaires ou des forces pulsionnelles et des besoins physiques. En abordant le thème de l’infidélité
ou des soins apportés à son mari malade, Rego reprit certes ses propres
expériences. La recherche de la domination, la vulnérabilité et l’affirmation de soi apparaissent cependant dans son art comme le sort de la condition humaine.

Héroïnes

La confrontation de Paula Rego avec les contes de fées dans les années 1970 marqua un tournant dans son art. Des poupées en tissu comme celle de la Princesse au petit pois et les images du conte portugais de la discrète héroïne Brancaflor marquent le début de sa quête perpétuelle d’histoires captivantes.
Rego était fascinée par la constatation du psychanalyste suisse Carl Gustav Jung
selon laquelle les grands récits du monde entier concrétisent des modèles psychiques fondamentaux similaires sous la forme de héros, de magiciens ou de sages.

Jeux de rôle

Les histoires accrocheuses et imagées que nous rencontrons dans notre enfance
créent et renforcent dans notre tête des représentations idéales et des stéréotypes de genre. C’est justement ce qui se présente de manière ludique, comme les contes de fées ou les films Disney, qui déploie une influence d’autant plus grande. Paula Rego démasque les clichés avec humour et ironie, mais sa profonde affection pour ces histoires reste perceptible. Elle montre une Blanche-Neige assise seule sur des peaux de bêtes au lieu de partir sur un
cheval blanc avec le prince charmant ; sa Fée bleue ne gronde pas Pinocchio gentiment, mais s’approche de l’enfant de manière menaçante ; et les ballerines, parodiées par Disney en autruches ridicules, sont transformées par Rego en femmes pragmatiques d’âge moyen.

                                              Blanche neige

Inconscient

Paula Rego explora largement sa propre vie intérieure dans le cadre d’une psychanalyse.
Elle s’ouvrit à des domaines de l’irrationnel et du refoulé qui, pour beaucoup,
ne sont accessibles que dans les rêves. Dans ses oeuvres, elle exprima
les processus psychiques nébuleux qui déterminent des histoires comme Métamorphose de Franz Kafka ou Jane Eyre de Charlotte Brontë. Ce qui l’intéressait dans Peter Pan, c’est le refus de grandir, tandis que son triptyque The Pillowman traite les abîmes psychologiques et les excès d’une
scène d’interrogatoire littéraire grotesque.

Ron Mueck, Pinocchio, 1996

Rébellion

À certains moments, Paula Rego utilisa son art comme un outil de résistance politique. Elle dénonça la pratique encore très répandue des mutilations génitales féminines et créa des séries de pastels et de gravures percutantes dans lesquelles elle mit en évidence les conséquences dangereuses des avortements illégaux pour les femmes. Ces oeuvres furent créées après le rejet par référendum d’un projet de loi plus libéral sur l’interruption volontaires de grossesse au Portugal à la fin des années 1990. Elles contribuèrent à changer l’opinion publique jusqu’au prochain référendum.
Quand, en 2003, la participation britannique à la guerre en Irak donna lieu à Londres aux plus grandes manifestations anti-guerre depuis des décennies, Rego protesta aussi – avec une oeuvre d’une grande intensité activiste.

La fascination exercée par les oeuvres de Paula Rego résulte de sa puissance imaginative empreinte de noirceur et d’inquiétante étrangeté.

Informations pratiques
BÂTIMENT PRINCIPAL ET BÂTIMENT NOUVEAU
Fermé le lundi
Mar 10h00 – 18h00
Mercredi de 10h à 20h
Jeu-dim 10h-18h


Accès

Depuis la gare SBB tram n° 2 arrêt Kunstmuseum

Sommaire de septembre 2024

29 septembre 2024 : Matisse – Invitation au voyage
20 septembre 2024 : MAÎTRES ET MERVEILLES
14 septembre 2024 : Hommage à l’artiste Rebecca Horn
12 septembre 2024 : Les artistes lauréats du « Nobel des arts » 2024
8  septembre 2024  : Le monde de l’art au Japon
5 septembre 2024  :  Anri Sala – Au milieu des maîtres anciens
1 septembre 2024 :   Vuitton La Collection RDV avec le Sport

Matisse – Invitation au voyage

Grand nu rose Nice 1935

À partir de septembre 2024, la Fondation Beyeler à Riehen/Bâle présente la première rétrospective consacrée à Henri Matisse en Suisse et dans l’espace germanophone depuis près de deux décennies.
L’exposition réunit plus de 70 oeuvres majeures en provenance de prestigieux musées européens et américains ainsi que de collections privées, mettant en lumière l’évolution et la diversité du travail précurseur de l’artiste. L’exposition prend pour point de départ le célèbre poème : L’invitation au voyage de Charles Baudelaire, qui contient de nombreux thèmes clé également présents dans les oeuvres de Matisse. S’inscrivant dans une lignée d’expositions hors pair telles
« Paul Gauguin » (2015), « Monet » (2017) et « Le jeune Picasso – Périodes bleue et rose » (2019), « Matisse – Invitation au voyage » sera
à voir à la Fondation Beyeler du 22 septembre 2024 au 26 janvier 2025.
Commissariat Raphaël Bouvier

Henri Matisse (1869–1954) compte parmi les artistes les plus célèbres de l’art moderne. Son oeuvre précurseur a profondément influencé des générations d’artistes, de ses contemporains à nos jours. En libérant la couleur du motif et en simplifiant les formes, il a redéfini la peinture et apporté à l’art une
légèreté nouvelle. Matisse a également innové dans le domaine de la sculpture et, avec les papiers découpés de son oeuvre tardif, il a développé une pratique unique à la croisée de la peinture, du dessin et de la sculpture.

« Ce que je poursuis par-dessus tout, c’est l’expression »
Henri Matisse

                                         Luxe Calme et volupté, centre Pompidou

L’exposition couvre toutes les périodes du travail de l’artiste. C’est un pur bonheur de se laisser guider dans l’exposition, en suivant la notice de salle fournie en diverses langues. Elle commence avec les oeuvres de ses débuts produites vers 1900, passant par les toiles révolutionnaires du fauvisme et les travaux expérimentaux des années 1910, les tableaux sensuels de la période niçoise et des années 1930, pour culminer enfin dans les légendaires papiers découpés de l’oeuvre tardif des années 1940 et 1950.
Placée sous le commissariat de Raphaël Bouvier, l’exposition réunit des oeuvres emblématiques et d’autres rarement exposées, en provenance de musées et de collections particulières de premier plan, dont le
Baltimore Museum of Art ; le Centre Pompidou, Paris ; le K20, Düsseldorf ; le Kimbell Art Museum, Fort Worth ; le Museum of Modern Art, New York ; la National Gallery, Washington ; et le San Francisco Museum of Modern Art.

« En dessinant aux ciseaux dans des feuilles de papier colorées à l’avance, d’un même geste pour associer la ligne à la couleur, le contour à la surface. »
Henri Matisse en conversation avec André Verdet, 1951

L’exposition présente des chefs-d’oeuvre tels La desserte (1896/1897), Luxe,
calme et volupté (1904), La fenêtre ouverte, Collioure (1905), Le luxe I (1907), Baigneuses à la tortue (1907/1908), Poissons rouges et sculpture (1912), Figure décorative sur fond ornemental (1925/1926),
Grand nu couché (Nu rose) (1935), L’Asie (1946), Intérieur au rideau égyptien (1948) et Nu bleu I (1952).
Cette profusion de tableaux, de sculptures et de papiers découpés de tout premier plan donne à voir l’évolution et la richesse de l’oeuvre singulier de Matisse.

                                                   Baigneuses à la Tortue

Les voyages

« J’ai souvent fait des voyages en imagination et comme le but principal de mon travail est la clarté de la lumière, je me suis demandé : Comment peut-elle être de l’autre côté de l’hémisphère? »
Henri Matisse à propos de son voyage dans les mers du Sud

L’exposition prend pour point de départ le célèbre poème L’invitation au voyage de Charles Baudelaire (1821–1867), auquel Matisse s’est référé à de nombreuses reprises. Les termes de « luxe, calme et volupté » qui y apparaissent comme motifs poétiques se retrouvent chez Matisse en tant que fils
conducteurs et quintessence de son art. Suivant le poème de Baudelaire, l’exposition à la Fondation Beyeler invite donc à un voyage au fil de l’oeuvre de Matisse, dans lequel le voyage joue également un rôle important.
C’est la quête de la lumière idéale qui incitait Henri Matisse à entreprendre ses nombreux voyages. Ayant grandi dans le nord de la France, il la trouve dans un premier temps dans le sud méditerranéen du pays, poursuit ensuite ses explorations en Italie, en Espagne et en Afrique du Nord, puis lors d’une traversée des États-Unis débutée à New York, et enfin dans le Pacifique Sud.
Au cours de ses nombreux voyages en Europe et au-delà, qui le mènent également en Russie, il fait la découverte d’environnements naturels, de
cultures et de traditions picturales qu’il incorpore à son propre travail. Le voyage et l’expérience multiple de la lumière qu’il entraîne ont été des moteurs décisifs de l’évolution artistique de Matisse, des oeuvres fauvistes révolutionnaires de ses débuts aux emblématiques papiers découpés de son oeuvre tardive.


L’expérience du voyage et l’atelier comme lieu de travail forment ainsi les deux pôles entre lesquels se déploie l’oeuvre de Matisse. La vie et l’oeuvre de l’artiste sont rythmés et influencés par un va-et-vient continu entre les déplacements en France et à l’étranger et l’investissement de différents lieux de travail.
Les expériences, les souvenirs et les objets collectés pendant ses voyages constituent des thèmes aussi centraux de ses oeuvres que l’atelier comme lieu de production artistique. La fenêtre ouverte est un motif récurrent dans l’oeuvre de Matisse. En tant que lieu d’articulation entre l’intérieur et l’extérieur, entre un ici à portée de main et un là-bas lointain, elle exprime la coexistence du chez soi et du voyage. Dans sa dimension symbolique, la fenêtre ouverte constitue tout particulièrement une invitation au voyage.

Fenêtre à Collioure

« Quand j’ai compris que chaque matin je reverrais cette lumière, je ne pouvais croire à mon bonheur. »
Henri Matisse à propos de Nice

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Un espace multimédia

Dans un espace multimédia conçu spécifiquement pour l’exposition, les voyages de Matisse sont donnés à voir et à vivre par le biais de photographies historiques animées et de panneaux muraux. Des photographies et des films offrent par ailleurs des aperçus de ses ateliers et de son processus de création.

Un catalogue d’exposition richement illustré, publié sous la direction de Raphaël Bouvier pour la Fondation Beyeler et mis en page par Bonbon, Zurich, paraît au Hatje Cantz Verlag, Berlin. De nombreux auteurs et autrices ont contribué à la portée scientifique du catalogue, en premier lieu Larissa Dätwyler, Robert Kopp et Griselda Pollock, ainsi qu’Alix Agret, Dita Amory, Patrice Deparpe, John Elderfield, Claudine Grammont, Jodi Hauptman,
Ellen McBreen et Anne Théry.

Informations pratiques

HORAIRES D’OUVERTURE:
Lundi à Dimanche 10h–18h
Mercredi 10h–20h
Friday Beyeler 10h–21h

CONTACT:
Fondation Beyeler
Baselstrasse 101
CH-4125 Riehen/Basel
Tél. +41 61 645 97 00
Fax +41 61 645 97 19
info@fondationbeyeler.ch

Depuis la gare SBB tram n° 2 descendre à MessePlatz
puis tram n° 6 jusqu’à la Fondation beyeler

MAÎTRES ET MERVEILLES

 Konrad Witz
L’Empereur Auguste et la sibylle de Tibur
Technique mixte sur bois, vers 1435, Inv. DA 161 A
Legs Marie-Henriette Dard, 1916
© Musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay

PEINTURES GERMANIQUES DES COLLECTIONS FRANÇAISES (1370-1530)

PARCOURS
DE L’EXPOSITION

Mosaïque de principautés, le Saint Empire romain germanique est une
entité politique mouvante selon les époques. Les puissances locales,
tant laïques que religieuses, ont une grande autonomie par rapport
à l’empereur. Dans un climat politique et social difficile – guerres,
brigandage, révoltes -, les empereurs successifs peinent à garder le
contrôle des provinces.

Pour autant, dans l’empire comme dans le reste du monde occidental,
le XVe siècle est un moment de basculement important dans les arts.
Depuis la seconde moitié du XIVe siècle dans le nord de l’Europe, les
sensibilités et les pratiques religieuses évoluent. Des foyers artisanaux
émergent et des individualités artistiques s’affirment dans toutes les
régions de l’empire, alors que s’intensifient les circulations des hommes
comme des oeuvres. Ces territoires, situés entre l’Allemagne, le nord de
la Suisse, l’Alsace et l’Autriche actuels, sont ainsi le théâtre d’une intense
activité créatrice.

Le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon, le musée Unterlinden de Colmar, ainsi que le musée des Beaux-Arts de Dijon, en partenariat avec l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), présentent du 4 mai au 23 septembre 2024 une exposition en trois volets, consacrée à la peinture germanique de 1370 à 1550. Près de 200 oeuvres des collections françaises y sont ainsi déployées pour retracer la richesse de cette production. Aux côtés de grands maîtres, tels que Lucas Cranach, Albrecht Dürer ou Martin Schongauer, l’exposition est aussi l’occasion de découvrir des oeuvres et des artistes moins connus.

Ce projet est l’aboutissement d’un programme de recherche mené par l’Institut national d’histoire de l’art depuis 2019, qui a permis de recenser près de 500 oeuvresprésentes sur le territoire national et produites dans les régions germanophones du Saint-Empire romain germanique pendant le Moyen Âge et la Renaissance. Ce travail a consisté en une étude matérielle des peintures sur place, des collectes documentaires et bibliographiques systématiques et des recherches sur les attributions. Avec des prêts issus de musées parisiens (le musée du Louvre, le musée des Arts Décoratifs, le musée de Cluny…), de musées en région (Orléans, Lyon, Roanne, Marseille, Agen, Grenoble, Moulins, Lille, …) et d’églises (Luemschwiller, Marckolsheim, Weyersheim…), chacun des trois musées accueillant un des trois volets de l’exposition propose ainsi un axe en lien avec ses propres collections et les spécificités culturelles et historiques de son territoire.


À l’appui de sa collection exceptionnelle, le musée des Beaux-Arts de Dijonoffre ainsi un panorama de la peinture du XVe siècle jusqu’au début du XVIe siècle, au prisme d’une sélection inédite, de nouveaux rapprochements et de réattributions. À forte visée pédagogique, l’exposition propose des clés de lecture essentielles à la compréhension de la place de ces oeuvres à la fin du Moyen Âge ; elle interroge également l’évolution des modes de représentation et les particularités stylistiques de plusieurs foyers de création choisis en Allemagne et dans les marges de l’Empire.


Le musée de Besançon traite de la peinture germanique de la Renaissance en lien avec ses collections. En effet, du fait de son histoire – puisque la Franche-Comté fut rattachée au Saint-Empire du XIe au XIIIe siècle puis de 1493 à 1678 – Besançon conserve aujourd’hui un ensemble significatif d’oeuvres tant pour la peinture que pour les arts graphiques grâce aux donations successives faites à la ville. Interrogeant les notions de frontières, géographiques mais aussi symboliques entre les sphères du privé, du public et du religieux, l’exposition présentera non seulement des oeuvres des grands maîtres mais aussi d’anonymes, mystères encore manifestes de ces siècles passés, où tous travaillaient en ateliers, en corporations, en réseaux. Cette exposition a été pensée et conçue pour permettre le partage de ces connaissances à des publics variés.
La collection de peintures anciennes du musée Unterlinden émane principalement de l’art à Colmar durant les derniers siècles du Moyen Âge. L’exposition permet, grâce à des prêts généreux provenant de musées et d’églises, de l’inscrire dans le cadre géographique plus large du Rhin supérieur : ce territoire, qui correspond plus ou moins à l’actuelle Alsace, s’étend de part et d’autre du Rhin, des Vosges à la Forêt Noire, et de Strasbourg au Nord à Bâle au Sud ; il abrite des villes riches, au grand dynamisme économique, qui sont autant de grands centres de production artistique : Bâle, Colmar, Fribourg-en-Brisgau et Strasbourg. Le volet colmarien de l’exposition s’attache tout d’abord à répondre aux nombreuses questions que les visiteurs d’aujourd’hui peuvent se poser face à de telles oeuvres : comment étaient-elles réalisées aux XVe et XVIe siècles ? Quelles fonctions avaient ces peintures considérées aujourd’hui comme des oeuvres d’art ? Quelle était la nature des relations entre les peintres et leurs commanditaires ? Il invite ensuite ses visiteurs à une exploration stylistique, cherchant à leur faire saisir les spécificités de chaque centre de production, voire de chaque atelier, et les changements qui s’opèrent au fil du temps dans les goûts des commanditaires et les propositions des artistes.
Le catalogue de l’exposition, co-édité par la maison d’édition Faton et l’Institut national d’histoire de l’art, constitue à la fois un outil de diffusion des connaissances sur la peinture germanique des années 1370-1550, un ouvrage de référence sur les oeuvres des musées français et une étude sur l’historiographie des principales collections françaises de « primitifs » germaniques. De nombreuses peintures font l’objet d’études approfondies et inédites, notamment sur leur attribution à un artiste ou une école, bénéficiant des recherches récentes des spécialistes allemands, autrichiens, français et suisses sollicités pour la rédaction des 140 notices. Cet ouvrage d’environ 400 pages et richement illustré est publié en français et en allemand.
Cette exposition est placée sous le haut patronage du Président de la République française et du Président de la République fédérale allemande.
L’exposition en quelques chiffres

Trois musées

Un catalogue en français et en allemand (36 auteurs ; 9 essais ; 140 notices)

200 oeuvres

57 prêteurs
Commissariat d’exposition
Commissariat scientifique

Isabelle Dubois-Brinkmann, conservatrice en chef du patrimoine, et Aude Briau, doctorante en histoire de l’art (EPHE, PSL / Université d’Heidelberg), chargée d’études et de recherche à l’INHA
Co-commissariat
À Besançon

Virginie Guffroy, conservatrice chargée des peintures, sculptures et objets d’arts au musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon

Amandine Royer, conservatrice chargée des arts graphiques au musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon
À Colmar

Camille Broucke, conservatrice du patrimoine chargée des collections d’art ancien, directrice du musée Unterlinden de Colmar

Magali Haas, documentaliste scientifique, chargée des collections d’arts graphiques au musée Unterlinden de Colmar
À Dijon

Lola Fondbertasse, conservatrice chargée des collections médiévales au musée des Beaux-Arts de Dijon
Un programme de recherche de l’Institut national d’histoire de l’art : le Répertoire des peintures germaniques dans les collections françaises (1370-1550) 

L’exposition présente un fragment de cette histoire par le prisme des
peintures, l’un des points forts de la collection du musée grâce au legs
de Marie-Henriette Dard en 1916. Le fil du parcours est thématique. Il
propose des clés de lecture essentielles à la compréhension de la place
de ces oeuvres à la fin du Moyen Âge. Il restitue également un état des
recherches récentes sur les questions de styles et d’attributions, au
gré d’un cheminement entre l’enquête sur des « mains » et des maîtres
souvent tombés dans l’anonymat et la découverte de ces « merveilles »
rares qui continuent d’étonner et de susciter notre curiosité.

Le gothique international

Entre 1380 et 1430 environ, l’art de l’Europe centrale et occidentale partage un langage formel relativement homogène : coloris chatoyants, sinuosité des lignes, élégance des figures, raffinement ornemental et goût du détail familier. Si les origines de cette esthétique sont variées, la fusion s’est opérée dans plusieurs foyers et grands chantiers européens où travaillent ensemble des artistes flamands, ibériques, français, allemands, bohémiens ou italiens. Cette communauté de style, favorisée par l’itinérance des artistes, le commerce des oeuvres et la circulation des modèles est désignée depuis le XIXe siècle par l’expression « gothique international ». Dans l’empire, les oeuvres attribuées à Maître Bertram, actif à Hambourg, sont caractéristiques de ce mouvement.


Autriche
La Vierge à l’écritoire
Peinture sur bois (tilleul), vers 1420
Paris, musée du Louvre, inv. RF 2047
© RMN – Grand Palais (musée du Louvre) / Gérard Blot

Des peintures pour la dévotion

Nombre de ces peintures sont des fragments de tableaux d’autels aujourd’hui
démembrés et dissociés de leur contexte, ce qui empêche souvent d’en reconnaître la signification initiale. Pourtant, dans la société médiévale, elles ont un usage précis. La plupart sont des présents offerts à Dieu, pour le glorifier et obtenir ses faveurs, ou à des saints protecteurs particuliers.
Si, au XVe siècle, les commandes émanent toujoursdes religieux comme des princes, les corporations de métiers, les confréries ou les citoyens enrichis
deviennent des acteurs plus actifs. Sous l’impulsion de ces élites urbaines, la production de retables, déjà importante, se développe encore. Installé au-dessus et en retrait de l’autel, cet élément central du mobilier
de l’église bénéficie de la place croissante de l’image dans les pratiques de dévotion. Dans l’empire, il se présente souvent sous la forme dite de retable
« à transformation » : les jours liturgiques ordinaires, il est fermé par des volets mobiles peints ; lors des jours de fêtes, l’ouverture de ces derniers dévoile à l’intérieur d’autres scènes peintes ou sculptées.

Suisse
Saint Jérôme et saint Christophe avec donateurs
Peinture sur bois (tilleul), 1516
Dijon, musée des Beaux-Arts
Legs Marie-Henriette Dard, 1916, inv. DA 105 A et B
© Musée des Beaux-Arts de Dijon / François Jay

Lire la peinture

Les pratiques de dévotion du XVe siècle encouragent un rapport direct et émotionnel avec le sacré. L’image s’affirme alors comme l’outil privilégié de la prière. Le fidèle est invité à se représenter mentalement les épisodes de la vie du Christ comme s’il y assistait, notamment ceux de la Passion, afin de compatir à ses souffrances. Le goût pour la narration, l’anecdote, le détail familier et l’expression, particulièrement sensible dans la peinture germanique, sert ces pratiques. Ces scènes racontent, réconfortent et avertissent : la mort est là, qui rôde, il faut s’y préparer à tout âge. Le culte des saints, qui assurent aux fidèles protection et intercession, est également à la source de nombreuses images. Identifiables sur les tableaux grâce aux attributs liés à leur histoire, certains sont vénérés dans toute la chrétienté quand d’autres sont spécifiques à
une région.

Dans l’atelier du peintre

L’atelier d’un artisan dans la cité est, au XVe siècle, à la fois un lieu de création,
de collaboration, de formation et de commerce. Il prend généralement la forme
d’une « boutique », un magasin où sont exposées les oeuvres préalablement
réalisées dans une arrière-salle. En ce qui concerne la peinture sur panneaux de
bois, la maîtrise des différentes étapes de réalisation requiert un apprentissage
de plusieurs années auprès d’un maître. Ce dernier marque de son style
l’ensemble des oeuvres qui sortent de son atelier, auxquelles travaillent
également ses compagnons et apprentis. Son empreinte personnelle se marie
à la reprise de modèles qui circulent par l’intermédiaire de dessins et de
gravures. Plusieurs maîtres peuvent parfois coopérer. Les artistes ne signent
qu’exceptionnellement leurs créations et, aujourd’hui, leur identité est souvent
perdue.

Atelier du Maître d’Attel
(Sigmund Gleismüller ?)
La Flagellation Vers 1490 Peinture sur bois
Marseille, Musée Grobet-Labadié, inv. GL 256
© Ville de Marseille, Dist. RMN-Grand Palais / David Giancatarina

Modèles

La gravure sur bois puis sur cuivre est l’une des grandes conquêtes techniques du XVe siècle : à partir d’une matrice unique, plusieurs centaines d’exemplaires d’une même image peuvent être imprimées sur du papier dont la qualité va croissante. Mobiles, relativement peu onéreuses, ces estampes circulent facilement et sont appréciées par les artistes, qui s’en servent comme des réservoirs de compositions, de personnages et des répertoires de motifs. Elles viennent compléter des recueils de dessins déjà couramment utilisés dans les ateliers. À cette culture visuelle s’ajoutent les oeuvres vues et copiées lors des voyages. Les peintres enrichissent ce fonds de leurs propres inventions, ensuite reprises et adaptées par leurs collaborateurs et successeurs en fonction des besoins.

L’identité de l’artiste

Jusqu’au XVIe siècle, la pratique de la signature est exceptionnelle et l’identité des créateurs n’est généralement pas connue. Dans les archives figurent
des noms, qu’il est parfois possible de mettre en relation avec les tableaux conservés. Néanmoins, le plus souvent, c’est l’analyse stylistique qui permet la
formulation d’hypothèses sur leur auteur. La plupart des peintres demeurent encore anonymes et les historiens de l’art ont effectué, en comparant les
styles, des regroupements d’oeuvres qui ont donné lieu à la création de noms de convention attribués à des maîtres non identifiés (les « maîtres de… »).
Dans certains cas, il est possible de repérer à l’intérieur d’une même composition des différences de « mains », qui sont la trace visible du partage du travail au sein de l’atelier.

Hans Traut
Saint Jean l’Évangéliste
Vers 1490
Peinture sur bois (résineux), brocarts appliqués
Dijon, musée des Beaux-Arts, inv. D 4069
MNR 345 attribué au musée du Louvre par l’Office des
Biens et Intérêts Privés en 1950 ; dépôt de l’État, 1953
© Musée des Beaux-Arts de Dijon / François Jay

Peindre sur bois

Une peinture sur bois est constituée d’un support, fait de plusieurs planches collées l’une à l’autre, et d’une couche picturale. La connaissance de l’essence du bois donne des indices sur le lieu de production de l’oeuvre car l’artiste se fournit souvent localement. Dans l’empire, le chêne prédomine au Nord, le tilleul au Sud, tandis que le sapin et l’épicéa se rencontrent dans les
régions montagneuses, notamment en Bavière et en Autriche. Les artistes ne peignent jamais directement sur ce support. Après un encollage, le peintre étale
une couche de préparation, généralement blanche, composée d’un mélange de craie et de colle. Les feuilles d’or sont ensuite posées sur une sous-couche
rouge (le bol), faite d’argile et d’oxyde de fer.
Sur la préparation blanche, les artistes dessinent à la pierre noire, au fusain, au noir d’os ou de carbone.
Puis, ils appliquent les couleurs, formées d’un liant et de pigments, en général constitués de poudres de minéraux, mais parfois également de colorants
d’origine végétale ou animale. À partir de 1430, le liant le plus usuel dans la peinture germanique est l’huile, mais l’oeuf reste utilisé ponctuellement,
parfois conjointement. La peinture à l’huile, qui sèche lentement, offre la possibilité de travailler par couches successives, de moduler les tons et la transparence à l’aide de glacis ; elle permet également une meilleure
réflexion de la lumière. Des décors en relief moulés, dit « brocarts appliqués », peuvent également être ajoutés pour imiter les étoffes luxueuses. En dernière étape, la peinture est protégée par un vernis qui permet d’unifier la surface, de renforcer les contrastes et la saturation des couleurs.

Questions de style

Au début des années 1430, dans les Pays-Bas du Sud, l’art du Maître de
Flémalle, d’Hubert et Jan van Eyck, et, à la génération suivante, de Rogier van
der Weyden introduit une rupture dans la représentation du réel. Grâce à l’usage savant de l’huile comme liant de la peinture et à l’observation méticuleuse des détails, ils transcrivent une nouvelle vision du monde. Ils inspirent bientôt des artistes actifs à Strasbourg, à Bâle, comme Konrad Witz, ou à Cologne, comme Stephan Lochner. Ces peintres s’intéressent au rendu des matières et imitent des phénomènes optiques tels que la brillance ou la transparence, obtenant de séduisants effets de trompe-l’oeil. Ils restituent des volumes, des textures et des espaces profonds. Certains artistes développent une palette de tons précieux et contrastés. Des foyers et des individualités artistiques émergent dans toutes les régions de l’empire, indépendamment des divisions territoriales politiques.
Ce panneau, avec quinze
autres dispersés dans le
monde, faisait partie du
retable du maître-autel
de l’église de l’abbaye de
Marienfeld, près de Münster.
Le nom du peintre a été
retrouvé
dans les archives.
Son style se
caractérise par des contours
précis et des morphologies
allongées

Johann Koerbecke
La Résurrection du Christ
1456-1457
Peinture sur bois
Avignon, musée Calvet, inv. 834.4.5
© Ville d’Avignon / musée Calvet

Foyers de création

Dans une tentative de caractériser la géographie artistique de la peinture
germanique médiévale, les historiens de l’art des XIXe et XXe siècles ont défini
des « écoles » régionales, déterminées par une uniformité esthétique au sein
d’un territoire. Depuis quelques décennies, cette notion est remise en question
au profit d’une meilleure prise en compte de la réalité des circulations des
oeuvres et des artistes, qui expliquent le brassage des styles. Les collections
françaises, qui font l’objet d’un programme de recherche porté par l’Institut
national d’histoire de l’art, sont représentatives de cette diversité.

Maître de la Légende de sainte Ursule de Cologne
et atelier
L’envoi des ambassadeurs de la cour du roi païen
Entre 1492/93 et 1496/97
Peinture sur toile
Paris, musée du Louvre, inv. RF 969
© 2005 RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi

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Informations pratiques

Musée des Beaux-Arts de Dijon
Place de la Sainte-Chapelle
21000 DIJON
03 80 74 52 09
musees@ville-dijon.fr
musees.dijon.fr
Horaires d’ouverture du musée
Ouvert tous les jours sauf le mardi
du 1er octobre au 31 mai : de 9h30 à 18h
du 1er juin au 30 septembre : de 10h à 18h30
Fermé les 1er janvier, 1er et 8 mai, 14 juillet,
1er et 11 novembre, 25 décembre
Gratuit
Toute l’année, les collections permanentes sont gratuites pour tous.

Détail sur musees.dijon.fr
Gratuité le 1er dimanche de chaque mois
Accessibilité
Le musée des Beaux-Arts est entièrement
accessible aux personnes à mobilité réduite.
Accès au musée
Navette gratuite Divia City,
arrêt Beaux-Arts ou Théâtre
Bus > Liane 6 arrêt Théâtre
Bus > Ligne 11 arrêt St Michel
Parkings : Darcy, Dauphine, Grangier,
Monge, Sainte-Anne

Hommage à l’artiste Rebecca Horn

Héritière du surréalisme, célébrée depuis plus de quarante pour ces performances et ses sculptures corporelles, l’artiste allemande Rebecca Horn est décédé à l’âge de 80 ans. En 2019, une double exposition au Centre Pompidou-Metz et au musée Tinguely de Bâle rendait hommage à son œuvre protéiforme, à la fois violente et poétique. J’avais eu la chance de voir les 2 expositions, dont vous pouvez retrouver un résumé sur mon blog.

« Mes performances ont commencé par des sculptures corporelles. Tous les mouvements de départ étaient les mouvements de mon corps et de ses extensions. »
Rebecca Horn

Elle avait fait du corps la matière première de son art. L’artiste allemande, performeuse et plasticienne Rebecca Horn, née en 1944, est décédée le 6 septembre à l’âge de 80 ans dans sa résidence de Bad König, en Allemagne, où elle avait installé sa fondation. Profondément influencée par le dadaïsme et le surréalisme, l’univers du cinéma et des automates, elle était célébrée internationalement depuis plus de quarante ans pour ses performances et ses sculptures hybrides où le vivant et l’inerte, le corps et la machine, se mêlent en de singulières métamorphoses.