Vincent van Gogh – Entre terre et ciel: Les paysages

van-gogh-les-champs-de-ble.1241314964.jpgD’avril à septembre 2009, le Kunstmuseum de Bâle  présente une spectaculaire rétrospective quasi globale des paysages du peintre légendaire Vincent van Gogh. 70 tableaux – tant des œuvres de premier plan mondialement célèbres que des toiles peu connues du grand public – présentent l’art de van Gogh sous un jour entièrement nouveau. Ils sont complétés par 40 chefs d’œuvre contemporains qui appartiennent à la collection du Kunstmuseum Basel et servent de cadre à l’approche révolutionnaire de la peinture des paysages qui est propre à van Gogh. Il manque toutefois le très célèbre « Champ de blé au corbeaux » .
Une introduction multimédia à la vie et à l’œuvre du peintre, permet au  public d’entrer brièvement de plein pied dans l’exposition.  Le Kunstmuseum compte en faire l’événement artistique phare d’Europe en 2009.
Après un autoportrait à l’estampe japonaise, qui accueille les visiteurs, où les yeux verts émeraude de Van Gogh regardent fixement droit devant eux, une toile très colorée (bleu-blanc-rouge)  » la fête au 14 juillet  »  presque abstraite, étonne parmi les van-gogh-autoportrait-a-lestampe.1241315424.jpgtoiles terreuses de Nueven.  Puis la palette s’éclaircit avec son séjour à Arles, sa vie nous est contée au fil des œuvres accrochées chronologiquement, grâce à un audio-guide dernier cri. Le mythe du peintre maudit, fruste, grossier et ignare est définitivement démenti. Au fil de la déambulation dans les salles et des commentaires, on apprend à quel point son travail acharné était une recherche systématique et constante, de juxtaposition de couleurs selon la méthode de Chevreuse, de séries, des tryptiques assez étonnants, qui se justifient plus par les couleurs, que par la composition ou le sujet traité.  Une splendide toile en van-gogh-moisson-en-provence.1241315668.jpgprovenance du musée d’Israel de Jerusalem a retenu mon attention : un champ de blé où toutes les couleurs voisinent, du vert foncé au vert plus clair, en passant par les mauves, les jaunes, les rouges, les ocres, qui prend les 2/3 de la toile, des personnages dans le champ, un bande jaune précédant un méplat de vert, puis dans le fond la ville, avec un moulin, des maisons vertes aux toits rouges, des cheminées fumantes, par grand mistral, des clochers, une ville, des arbres, puis un fonds de ciel, bleu foncé, puis un halo vert en son centre entoure un immense soleil jaune, soleil levant ou soleil couchant, lui-même ne s’est pas prononcé.
Une autre toile « Champ de Fleurs en Hollande » démontre à quel point Van Gogh a appliqué la technique de Chevreul, en opposant les couleurs complémentaires, le van-gogh-champ-de-fleurs-en-hollande.1241317537.jpgrouge au vert, le bleu au jaune.  Le pont à Asnières permet de voir son étude de la lumière sur l’eau, Il y a aussi une série sur les cyprès, grandioses, ou tourmentés lorsqu’il est à St Paul de Mausole à St Remy, malade. On apprend aussi qu’il a peint les oliviers, pour surprendre ses éventuels clients.
Seul personnage, un portrait de Mademoiselle Gachet au piano. (pas d’illustration).
L’exposition est un enchantement pour les yeux, la progression chronologique, avec des couleurs des paysages de la Hollande (Nuenen), tristes, gris, s’éclairent avec son séjour en Arles, puis à  Auvers sur Oise, période qui est la plus féconde de sa carrière, où tantôt il est heureux, preuve les lettres  qu’il adresse à son frère Théo, mais aussi où s’achève tristement sa vie, avec le suicide que l’on connaît à l’âge de 37 ans. Il repose au cimetière d’Auvers sur Oise, son frère Theo dans la tombe voisine, les deux tombes sont reliés entre elles par du lierre, qui selon la légende proviendrait du jardin du Dr Gachet.
L’oreille coupée, une information qui vient à point
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C’était visiblement un acte de mutilation. Un acte qui laissait transparaître la déficience de la santé mentale du peintre. Le 24 décembre 1888, dans sa maison d’Arles, Vincent Van Gogh se serait coupé l’oreille gauche à l’aide d’une lame de rasoir. En tout cas, c’est ce qu’on croyait depuis plus de 120 ans. Aujourd’hui, cette théorie est remise en cause par deux universitaires allemands, Hans Kaufmann et Rita Wildegans dans un ouvrage sur l’artiste.
392 pages entièrement consacrées au peintre hollandais et à cette nuit particulière, où Vincent Van Gogh, animé par une crise de folie, se tranche l’oreille, l’enveloppe dans du papier journal et se recouche, ensanglanté.
Selon les deux auteurs, Paul Gauguin serait directement lié à cette fameuse oreille coupée. C’est à la suite d’une nouvelle dispute entre les deux peintres – qui ne partagent pas le même avis sur l’exercice de l’art – que Vincent Van Gogh aurait perdu son lobe. Mieux, Gauguin la lui aurait coupé. L’indice, selon les auteurs : Gauguin, étant précipitamment reparti pour Paris le lendemain du drame, excellait dans l’escrime et le maniement d’armes civiles. Van Gogh, prostré, n’aurait rien dit à la police, dans le but de protéger son ami.
Les deux peintres, qui entretenaient une relation conflictuelle, d’amitié profonde empreinte de rivalité, ne se seraient jamais revus après cet épisode. Vincent Van Gogh s’est suicidé, sept mois plus tard.
La théorie des historiens allemands sera soutenue le 17 mai à Bâle, à l’occasion d’une exposition consacrée au peintre hollandais.
Pour ceux qui n’ont pas l’habitude de lire les commentaires je joins le lien vers la vidéo de Benoit Landais, spécialiste du peintre des Tournesols, où il démonte cette thèse mise en avant par des universitaires allemands
En réponse à de nombreuses demandes
les détenteurs du pass-musées peuvent acquérir leur billet d’entrée uniquement auprès  des guichets du Kunstmuseum (Dufourstrasse – juste à droite du musée) au prix de 18 francs suisses, au lieu des 28 frcs ch, 5 ch frcs l’audio-guide en français.

Sommaire d'avril 2009

01 avril 2009 : Le poisson d’avril serait-il un maquereau
04 avril 2009 : Metropolitan Museum of Art (2)
11 avril 2009 : Metropolitan Museum of Art
12 avril 2009 : Joyeuses Pâques
16 avril 2009 : Scapa memories
19 avril 2009 : Chinetik 
21 avril 2009 : Dvorak ou l’apogée du violoncelle
24 avril 2009 : Le musée des automates à musique à Seewen
26 avril 2009 : Les fenêtres au musée Würth d’Erstein

Les fenêtres au musée Würth d’Erstein

 

collection-wurth-henry-moore.1240531895.JPGDepuis les années soixante, Reinhold Würth a constitué l’une des plus importantes collections d’entreprise d’art moderne et contemporain. Aujourd’hui, la collection Würth basée en Allemagne, compte près de 12000 œuvres : peintures, sculptures et dessins. Elle reflète autant les coups de collection-wurth-hoflehner.1240532479.JPGcœur de l’amateur d’art que les grands mouvements artistiques du XXe et du début du XXIe siècle.

Traversant les courants de l’art moderne avec des œuvres néo-impressionnistes, expressionnistes et surréalistes (Camille Pissarro, Alfred Sisley, Paul Baum, Heinrich von Zügel, Max Liebermann, Edvard Munch, Ernst Ludwig Kirchner, Gabriele Münter, Emil Nolde, Max Beckmann, Max Ernst, René Magritte et André Masson), la collection permet également de parcourir les évolutions de l’abstraction géométrique et de l’abstraction lyrique avec des œuvres notamment de Serge Poliakoff, Alberto Magnelli, Auguste Herbin, Aurélie Nemours, Sonia Delaunay-Terk, Victor Vasarely, Jean Dewasne, Jean Deyrolle, André Heurtaux, František Kupka, Hans Hartung, Max Bill, Josef Albers, Henryk Stazewski, Robert Jacobsen. 
collection-wurth-jacobsen.1240532031.JPG 

Riche en outre d’un bel ensemble d’œuvres de tendance néo-figurative, la collection comprend de nombreuses œuvres des artistes Markus Lüpertz, Georg Baselitz, Anselm Kiefer, Bernd Koberling, Rainer Fetting, Jörg Immendorff, Helmut Middendorf ou Dieter Hacker.

 

 

La collection qui compte de très nombreuses peintures, accorde néanmoins une place importante à la sculpture. Elle présente ainsi des pièces significatives d’artistes aussi divers que Jean Arp, Horst Antes, Anthony Caro, Henry Moore, Eduardo Chillida.
 
Par ailleurs, toujours attentif aux créateurs de son temps, Reinhold Würth s’intéresse particulièrement à des parcours singuliers : il noue ainsi une relation privilégiée avec Alfred Hrdlicka, Christo & Jeanne-Claude, José de Guimarães et Robert Jacobsen, dont il suit le travail en mécène convaincu.
Le Musée Würth France Erstein est situé immédiatement à côté du siège social de Würth France, collection-wurth-178.1240531150.JPGaux abords du parc paysager de l’entreprise.
Une confrontation entre les deux bâtiments sous-tend le programme architectural des cabinets lyonnais de Jacques et de Clément Vergély : la transparence du vaisseau de verre du siège exprime un contrepoint à l’opaque géométrie des murs de béton brut du Musée.
 
collection-wurth-wortuba-torse.1240532638.JPGLa grande variété de la collection Würth a déterminé le projet. L’édifice abrite trois salles adaptées à l’hétérogénéité des dimensions des œuvres : une nef monumentale au rez-de-chaussée, et à l’étage deux beaux espaces, pour une surface d’exposition totale de 800 m2. La conception technique de l’éclairage, conçue par Marc Fontoynont, maître d’œuvre notamment de la mise en lumière de la salle de la Joconde au Louvre, privilégie l’apport optimal de la lumière naturelle dans les salles.

 

collection-wurth-arp.1240532264.JPGCe sont les ouvertures vers l’extérieur qui sont aussi une grande réussite de ce musée. Tableaux incorporant le paysage, avec une telle évidence, véritables mises en valeur, en lumière, quelquefois diffuse des œuvres, pour une bonne conservation, un bonheur infini pour le regard.

 

 

Le musée des automates à musique de Seewen (Suisse)

Le musée des automates à musique de Seewen (SO) abrite une des collections les plus importantes au monde de boîtes à musique suisses à cylindres et à disques, de montres et de bijoux munis de mécanismes à faire de la musique et d’autres automates à musique datant du 18e siècle à nos jours..
musee-des-automates.1240176088.jpgCe musée, propriété de la Confédération, est une des destinations touristique préférée du nord-ouest de la Suisse, et avec son programme varié de manifestations, il est également apprécié comme lieu culturel. De style moderne, le bâtiment est en phase avec son environnement géographique : il est de ce calcaire jaunâtre caractéristique du Jura.
Le musée ne se visite qu’avec un guide. Ce tour instructif  dure une heure et permet d’assister à des démonstrations commentées d’automates à musique.
Les promenades dans le «Schwarzbubenland» sont un plaisir à tous les âges. Le Musée des automates à musique est situé dans un superbe paysage jurassien, qui invite à la promenade et aux randonnées, mais tout aussi agréable en voiture, à travers les vallons fleuris et boisés, de ce doux printemps.
La visite guidée commence par l’atelier, où les curieux pourront jeter un coup d’œil sur les dessous des automates et découvrir la technique des musiques mécaniques. Comment le son est-il produit, sur quels supports est-il gravé, comment fonctionnent les instruments mécaniques? Un cours accéléré plein de suprises.
Au Salon Bleu, l’accent est mis sur le plaisir de l’écoute. Les démonstrations indiquent le prestige dont jouissait la musique mécanique dans les salons de la bourgeoisie cossue et de la noblesse, il y a encore deux ou trois générations. Sont présentés non seulement des boîtes à musique suisses à cylindres et à disques, mais aussi un piano mécanique
La salle ArtSon, l’atelier et le Salon Bleu abritent des boîtes à musique suisses à cylindre et à disque, qui représentent le cœur de la collection du Musée de Seewen.

Alors qu’on avait perdu sa trace depuis de longues années, l’orgue du Britannic, le navire jumeau du Titanic naufragé en seewen-18.1240177830.JPG1912, a selon toute vraisemblance été retrouvé au Musée des automates à musique de Seewen.

L’instrument, dont l’existence est attestée par des dessins et des photographies, est resté introuvable durant près d’un siècle. La découverte eut lieu à l’occasion de la restauration de l’orgue Welte-Philharmonie du Musée des automates à musique.

Christoph E. Hänggi, directeur du musée, raconte:

 « Les facteurs d’orgues mandatés ont nettoyé trois endroits sous le sommier de l’orgue, habituellement inaccessibles, et sont tombés par trois fois sur le même indice : Britanik. »
seewen-27.1240178059.JPG« Nous avons toujours cru que notre orgue Welte-Philharmonie datait des années 1912 à 1914, mais il nous manquait des données historiques pour la période avant 1920. Les catalogues historiques Welte de nos archives spécialisées contiennent bien une photographie d’un orgue dans la cage d’escalier du Britannic, mais jusqu’à présent, nous étions bien loin de penser qu’il pouvait s’agir de notre orgue ».

Le restaurant panoramique est très convivial, il offre une vue superbe sur le Jura suisse et complète agréablement la visite.

vidéo, photos 2 et 3 de l’auteur

Dvorak ou l’apogée du concerto pour violoncelle

Dans la saison proposée par l’Orchestre Symphonique de Mulhouse, nous avons pu entendre ces dernières années de brillants interprètes du violoncelle tels qu’Anne Gastinel, Jean-Guihen Queyras, Sonia Wieder-Atherton, Henri Demarquette, Wenn Sinn Yang ou Wolgang Emmanuel Schmitt.
xavier-phlilips.1239930500.jpgFormé par Maurice Gendron et Philippe Muller, Xavier Philips participa au concours Rostropovitch et tissa des liens avec ce grand maître avec qui il travailla de nombreuses années. Ce week-end, il interprétait magnifiquement ce concerto avec l’Orchestre Symphonique de Mulhouse qui était dirigé pour l’occasion par Stefan Blunier.
Parmi les différents concertos pour violoncelle, le concerto de Dvorak est sans aucun doute le plus populaire pour le public. La période romantique —le XIXe siècle— va être particulièrement profitable au violoncelle avec des œuvres écrites par Johannes Brahms, Robert Schumann, Édouard Lalo, Camille Saint-Saëns, Antonín Dvořák, Jacques Offenbach (1819-1880) (qui jouait magnifiquement bien du violoncelle quand il ne composait pas d’opérettes).
Dans ce contexte, Dvorak (1841-1904) apparaît comme un compositeur romantique par excellence. Ses origines font de lui le successeur d’un autre compositeur tchèque, Smetana et ses influences musicales ont été déterminées par des rencontres avec Brahms et  Liszt. 
Fils d’aubergiste, il se prend de passion pour la musique dès son plus jeune âge en jouant du violon avec son instituteur du village; en 1857, l’un de ses oncles l’inscrit dans la classe d’orgue du conservatoire de Prague.
Tour à tour altiste à l’opéra de Prague puis organiste, il progresse dans son apprentissage de la composition et se fait connaître du public praguois en produisant sa cantate patriotique : Hymnus. Cette oeuvre tente d’animer un mouvement de renaissance nationale où la musique concourt au redressement patriotique.
D’abord professeur de composition au conservatoire de Prague, Dvorak connaît une renommée croissante et internationale, particulièrement en Angleterre où il effectue une dizaine de voyages entre 1884 et 1896 et aux Etat-Unis où on le nomme directeur du conservatoire de New York entre 1892 et 1895.
Son expérience de musicien d’orchestre lui permet de découvrir un vaste répertoire classique et contemporain. Il joue sous la baguette de Bedrich Smetana, Richard Wagner, Mily Balakirev.
Célèbre dans tout le monde musical, il est nommé de 1892 à 1895 directeur du Conservatoire national de New York. Il y tient une classe de composition. Sa première œuvre composée aux États-Unis, est la 9e symphonie dite « Du nouveau Monde ». Son succès est foudroyant et ne s’est jamais démenti depuis sa première audition.
Son séjour en Amérique du Nord voit naître d’autres compositions très populaires comme le 12e Quatuor et le merveilleux Concerto pour violoncelle, qui sera terminé en sol européen.
La fin de sa vie est surtout consacrée à la composition d’opéras dont le plus célèbre reste Rusalka, créé en 1901. Pendant cette période, il dirige également le Conservatoire de Prague.
Sa musique est colorée et rythmée, inspirée à la fois par l’héritage savant européen et par l’influence du folklore national tchèque mais aussi américain (negro spirituals ou chansons populaires). Dvořák est l’un des rares exemples de compositeur romantique ayant abordé avec succès tous les genres, à la seule exception du ballet. Bien que sa musique ait eu du mal à s’imposer en France, Dvořák était considéré de son vivant comme un personnage de stature internationale.
Le Concerto pour violoncelle n° 2 en si mineur est une oeuvre toute imprégnée de la nostalgie de l’exil puisqu’il à été composé par Dvorak dans sa période américaine et profondément inscrit dans ses racines nationales. Très intériorisé, lyrique, le phrasé du violoncelle atteint son point culminant dans l’adagio. Richesse mélodique, beauté de la matière sonore, engagement spirituel de l’interprète, cette oeuvre représente en elle-même la quintessence du romantisme.
L’œuvre se situe chronologiquement entre la neuvième et dernière symphonie et ses Poèmes symphoniques. Il eut l’idée de la partition après avoir écouté le concerto pour violoncelle n° 2 de Victor Herbert, compositeur américain d’origine irlandaise, chef d’orchestre, violoncelliste et qui est connu essentiellement pour ses opérettes.
La création eut lieu le 19 mars 1896 à Londres accompagné par l’orchestre de la société philharmonique sous la direction du compositeur.
L’impérieuse entrée du violoncelle en mode majeur dans le premier mouvement ouvre de nouveaux horizons. Le développement nous invite à un étonnant voyage intérieur : le violoncelle se fait tour à tour fougueux, passionné, révolté. L’orchestre devient féerie quand le soliste entonne son second thème, un chant d’amour d’un lyrisme exacerbé.
Le second mouvement est introduit par le choral des bois. Lorsque le violoncelle apparaît, c’est pour nous chanter une mélodie aussi émouvante que celle du largo du Nouveau Monde.
Le troisième mouvement  présente un finale très rythmé dans l’esprit des danses slaves. Une marche énergique, inquiétante, inéluctable, monte crescendo et s’empare de tout l’orchestre.
Le violoncelle apparaît au sommet et reprend ce thème étourdissant. Le dernier passage méditatif, avant la furia conclusive, a été ajouté quand Dvořák a appris la mort de sa belle-sœur et amour de jeunesse.
On y vit aussi un ultime hommage à son ami Tchaïkovski récemment disparu. Il ne faut cependant pas oublier que ce procédé d’introduire une méditation dans la coda est très prisé de Dvořák.
La perfection de l’œuvre n’a pas manqué de surprendre Johannes Brahms : « Pourquoi diable ne m’a-t-on pas dit que l’on pouvait écrire un concerto pour violoncelle comme celui-ci ? Si seulement je m’en étais douté, j’en aurais écrit un depuis longtemps. »
La musique de sa Bohême natale fait partie intégrante de son âme et de son génie. S’il a été sensible aux influences venues de l’ouest, voire du Nouveau monde lors de son long séjour à New York, son inspiration est toujours restée profondément ancrée dans les rythmes, les harmonies, les coloris parmi lesquels il s’est formé au milieu du 19è siècle et qui donnent à toute sa musique son poids de nostalgie et son irrésistible enthousiasme. 
Belle traversée musicale que ce voyage dans le nouveau monde et aux confins de l’Europe centrale…
Hélène Mouty

Chinetik

Le tricycle chinois entre culture du quotidien et intervention artistique  
Une exposition du Musée Tinguely et Littmann Kulturprojekte  jusqu’au  19 avril 2009   cimg0060.1239931523.JPG Si le pousse-pousse était communément répandu dans toute la Chine avant l’ère moderne, sa place a été occupée au 20ème siècle par le vélo à trois roues. Dans la capitale Beijing (Pékin) le vélo à trois roues ou tricycle était omniprésent. Inimaginable de se représenter une rue fréquentée, un marché, une rue commerciale ou un quartier de loisirs, voire une déchetterie sans tricycles. Plus de 30 exemplaires de ces véhicules furent rachetés dans les rues de Pékin par Littmann Kulturprojekte, certains avec, d’autres sans leur chargement. Les tricycles avec cargaison furent laissés tels quels, ceux qui n’en avaient pas furent confiés à des artistes avec la mission de les transformer. Ces deux groupes de tricycles sont maintenant réunis dans une exposition au Musée Tinguely. Un seul exemplaire figure dans l’ensemble, véhicule de seconde main, en état de marche mais sans précision quant à son utilisation originelle. Si Jean Tinguely était encore en vie, les termes « Chine » et « Cinétique » (mouvement) l’inciteraient peut-être spontanément à créer celui de « Chinetik ».  Leur présentation sur des socles les élevant au rang d’objets d’art, les tricycles – auparavant des plateformes de commerce (« vitrines » mobiles), cuisines sur roues, cages à animaux ou véhicules servant à divers transports (aliments, ustensiles de ménage, meubles, détritus) – perdent leur caractère d’objets ethnographiques illustrant la culture au quotidien pour devenir des pièces de musée. Par opposition sont exposés des tricycles reconvertis en objets d’art. Divers artistes à l’est (Chine)cimg0156.1239931831.JPG et à l’ouest (Europe, USA) furent mandatés de reconcevoir des tricycles neutres et sans chargement et de leur insuffler un contenu artistique. La seule condition à laquelle ils devaient se soumettre était de respecter l’état de marche des tricycles ; sinon, ces divers artistes (dont entre autres Wang Guangyi, Thomas Virnich, Ulrike Schröter, Peter Kogler, Daniele Buetti, Robert Rauschenberg, Guillaume Bijl, Stephen Craig) pouvaient donner libre cours à leur fantaisie. Le Musée Tinguely en collaboration avec Littmann Kulturprojekte présente sous le titre « Chinetik » cette première exposition d’interventions d’artistes originaires de Chine et d’Allemagne, de Belgique, d’Irlande, des Pays-Bas et d’Autriche ainsi que des États-Unis et de Suisse côte à côte avec des tricycles originaux avec leur chargement, derniers témoins d’un aspect de la culture chinoise au quotidien.cimg0063.1239931663.JPG Le tricycle se fait de plus en plus rare dans la vie de tous les jours en Chine grâce à la forte augmentation de la prospérité due à la mondialisation, surtout à Pékin où en vertu des Jeux Olympiques de 2008 il y eut un extrême élan de modernisation. Au milieu des années 1990 les tricycles étaient partout, en 2008 ils étaient devenus rares. Qu’en est-il du tricycle dans la Chine de demain? Est-il simplement une pièce de musée à classer entre objet ethnologique ayant trait à la vie quotidienne et intervention artistique?

photos de l’auteur

Scapa memories – une collection



Au Musée Tinguely de Bâle jusqu’au 19 avril 2009
L’exposition au Musée Tinguely offre un aperçu de la collection excentrique de Ted Scapa. Le célèbre dessinateur scapa.1239846196.JPGhumoriste suisse, né en 1931 aux Pays-Bas, collabora à la presse internationale avant de prendre en mains les rênes de la maison d’édition Benteli à Berne qu’il dirigea pendant plus de trente ans. Le programme pour enfants à la télévision suisse alémanique DRS, Das Spielhaus (La Maison du jeu), lui valut une grande notoriété dans les années 1960 et ’70. Aujourd’hui, Scapa vit et travaille comme artiste indépendant et dirige des ateliers de créativité.
L’exposition SCAPA Memories documente la relation qu’entretient Scapa avec l’art. Elle fait pénétrer le visiteur dans sa collection qui est un dialogue très personnalisé entre tradition et modernité. L’art est un besoin vital dans la vie de Scapa. Les œuvres et objets qu’il a assemblés au cours de sa vie ne traduisent pas la poursuite d’une stratégie consciente mais plutôt son intuition. Ce biotope culturel dans lequel vivent  et travaillent Ted Scapa et son épouse Meret depuis plus d’un demi-siècle est le reflet de la vision et de l’expérience du monde et de l’art chez Scapa.
Le mot préféré de Scapa, « créativité », est en même temps son message et le critère de sélection qui valut pour l’assemblage de sa collection. Une autre impulsion de sa passion débordante de collectionneur sont les Memories, ses souvenirs de nombreuses rencontres avec des artistes du monde entier, tantôt ceux qui évoluèrent en des liens d’amitié de toute une vie que ceux, plus spontanés, le fruit du hasard et de son enthousiasme. Avec les années est né un bric-à-brac inspiré qui reflète tout à fait la créativité débordante de l’homme Scapa, mais aussi de l’artiste connu pour sa création de lampes et de tapis.
Son importante activité d’éditeur (env. 1500 titres) amena Scapa à faire la connaissance d’un grand nombre d’artistes, de galeristes, de collectionneurs et de gens de musées – mélange magique  et stimulant. Il ne fréquenta pas seulement de grands noms tels Joan Miró ou Aimé Maeght, mais entretenait surtout des relations étroites et chaleureuses avec un groupe élargi d’êtres qui apprit à connaître son hospitalité légendaire. La publication de catalogues lui valut de rencontrer les maîtres de l’art graphique dont des peintres allemands du groupe des « nouveaux sauvages » tels Georg Baselitz, Markus Lüpertz, A. R. Penck, Jörg Immendorff, les Suisses Martin Disler, Peter Stämpfli ou Alfred Hofkunst.
scapa-memories.1239846017.JPGDans la collection de Scapa, qui a tout d’un cabinet de curiosités, des lettres-dessins aux couleurs intenses de son ami Jean Tinguely et une machine sculpture côtoient tout naturellement des objets rituels et des ustensiles quotidiens provenant de cultures et d’époques les plus diverses. Leur sont associées de monumentales œuvres graphiques d’artistes de renom du 20ème siècle, ainsi des exemples d’Antoni Tàpies ou Frank Stella, mais également des figures chinoises en terre-cuite et des sculptures en bois, des masques et des reliefs en provenance d’Afrique.
Dans son Eldorado, son château sur les bords du Lac de Morat, figures, objets et œuvres graphiques peuplent le salon, la salle à manger, les rebords des fenêtres et toutes les corniches, tables et armoires, linteaux de portes et paliers, les œuvres débordent depuis la cuisine jusqu’aux toilettes.
Devant les œuvres graphiques empilées le long des murs, des figures africaines d’hommes et de femmes le plus souvent nus, tantôt petites tantôt surdimensionnées, des masques et des tambours placés avec justesse devant les tableaux, auxquels parfois ils s’accordent par leurs tons ou leurs formes, ou, au contraire, posés n’importe comment, par manque de place probablement. De nouvelles acquisitions viennent rejoindre le groupe et l’œuvre d’art totale acquiert une nouvelle apparence, sans toutefois perdre de son impact.
Ce « cabinet de curiosités » est source d’inspiration pour Ted Scapa, l’instigation pour sa propre production artistique. Il est autant fasciné par les visages expressifs et souvent bizarres des objets d’art non-européens qu’il l’est par les possibilités d’expression que permet la technique de reproduction des œuvres graphiques d’artistes modernes.
Avec une insouciance nonchalante, il lui importe peu que les figures africaines soient des œuvres originales ou des copies d’après d’anciens modèles. Il ne prend pas en considération le contexte de leurs origines et encore moins une quelconque provenance scientifique prouvée. Ce qui importe pour lui c’est qu’une perfection artisanale ait été préservée, garantissant la survie sans perdre de son pouvoir d’expression. C’est ainsi que l’artiste Ted a sa propre approche à l’art, et pour Ted, le communicateur en art, qui avec son Spielhaus a réveillé l’instinct de création chez les enfants de tout un pays, une reproduction bien faite a autant de valeur que sa communication optimale. En tant qu’éditeur, qu’homme du mot écrit et exégète de l’impression, il accorde une plus grande importance à l’art reproductible.
L’exposition au Musée Tinguely présente 120 œuvres de la collection de Scapa ainsi qu’un film de Roy Oppenheim qui documente la vie de Scapa et sa relation particulière à l’art.
Artistes représentés:
Georg Baselitz / Stefan Berger-Teichmann / François Burland / Alexander Calder / Luciano Castelli / Eduardo Chillida / Christo und Jeanne-Claude / Jan Cremer / Martin Disler / Rainer Fetting / Sam Francis / Keith Haring / Alfred Hofkunst / Karl Horst Hödicke / Jörg Immendorff / Paul Klee / Bernhard Luginbühl / Markus Lüpertz / Felix Müller / Claes Oldenburg / A. R. Penck / Arnulf Rainer / James Rosenquist / Niki de Saint Phalle / Ted Scapa / Meret Schaap / Richard Serra / Peter Stämpfli / Saul Steinberg / Frank Stella / Bert Stern / Antoni Tàpies / Jean Tinguely / Bernar Venet
photos et vidéo de l’auteur

Joyeuses Pâques

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la résurrection – Retable d’Issenheim de Matthias Grünewald au musée Unterlinden de Colmar

La date de Pâques, mobile dans notre calendrier actuel, a été fixée, après trois siècles de controverses, par le concile de Nicée en 325. La règle, toujours en usage, est la suivante : « Pâques est le dimanche qui suit le quatorzième jour de la Lune [pleine Lune] qui atteint cet âge au 21 mars [équinoxe] ou immédiatement après ». D’après cette règle, Pâques peut donc occuper, selon les années, trente-cinq positions dans le calendrier, du 22 mars au 25 avril inclus.
    Si l’on choisit d’analyser la période des sept cents premières années du calendrier grégorien, de 1583 à 2282, on constate que, sur les trente-cinq positions possibles de la date de Pâques, les plus rares sont le 24 mars (seulement en 1799 et en 1940) et le 22 mars (1598, 1693, 1761, 1818). Au contraire, les positions de Pâques les plus fréquemment observées sont le 16 avril (30 occurrences), puis les 31 mars, 5 avril et 11 avril (29 occurrences chacune).
  (encyclopédie universalis)

Metropolitan Museum of Art (3)

chardin-le-lapin-au-port-en-argent.1239404137.JPGDans la même veine de la recherche de la couleur, mais avec un plus d’indéfinissable moelleux : Jean Baptiste Siméon Chardin

« On ne peint pas seulement avec des couleurs, on peint avec le sentiment », disait un jour Chardin. Tout est là. Et parler d’une œuvre qui nous est aujourd’hui si familière, si évidente, et pourtant si lointaine en sa perfection, c’est tenter de saisir comment, de la seule couleur, Chardin sut faire naître le sentiment.

C’est un cheminement intime et secret de Chardin vers la maîtrise et les premiers succès : ceux que lui vaudront, lorsqu’il les exposera place Dauphine, en 1728, à l’occasion de la Fête-Dieu, La Raie et Le Buffet, qui étonneront à ce point les peintres de l’Académie royale, et surtout Largillière, (qui se méprend sur Chardin et explique à Louis Boulogne ce qu’est la peinture  hollandaise,) qu’il est sur-le-champ admis et, deux mois après, reçu parmi eux comme peintre « dans le talent des animaux et des fruits ».

Dès ce moment, Chardin est en pleine possession de ses moyens ; et quoique toute sa vie, il se soit passionné pour les mille secrets techniques de la peinture, sans doute n’ira-t-il jamais plus loin dans l’accomplissement de son métier.

De Chardin, comme de Corot, l’on pourrait dire que le fil de leur vie tient à la tendresse pénétrante du regard constant qu’ils portent aux êtres et aux choses, à cette lumière candide dont ils les baignent et les font s’interpénétrer. Ce qui touche c’est la composition rigoureuse, la lumière, l’admirable matière picturale de ses natures mortes, le moelleux et la fermeté de la touche. L’art de Chardin est tout de nuances subtiles, de correspondances secrètes, d’échos entre la matière translucide d’un verre et l’éclat délicat d’une tasse en argent, ou le grain d’un pot, le bleu discret d’un nœud, le velouté de pêches, le rose opalescent des fraises.

Officiellement peintre de fruits et d’animaux, Chardin n’aborde la figure qu’après 1730, année de son premier mariage, avec Marguerite Saintard.

Dans son Abecedario, un contemporain de Chardin, Mariette, rapporte l’anecdote suivante : Chardin faisant remarquer à un de ses amis peintres, Joseph Aved (1702-1766), qu’une somme d’argent même assez faible était toujours bonne à prendre pour un portrait commandé quand l’artiste n’était pas très connu, Aved lui aurait répondu :« Oui, si un portrait était aussi facile à faire qu’un cervelas ».

L’artiste était mis au défi de peindre autre chose que des natures mortes. Mais ce n’était pas la seule raison de changer de « talent ».
Mariette ajoute :« Ce mot fit impression sur lui et, le prenant moins comme une raillerie que comme une vérité, il fit un retour sur son talent, et plus il l’examina, plus il se persuada qu’il n’en tirerait jamais grand parti. Il craignit, et peut-être avec raison, que, ne peignant que des objets inanimés et peu intéressants, on ne se lassât bientôt de ses productions. »

Peut-être est-ce l’influence toute flamande du portraitiste Aved  qui décida Chardin à ne point se limiter à la seule peinture des objets.

Aussi son œuvre est-elle double : tableaux d’objets, d’animaux et de fruits, qui ne sont jamais des « natures mortes », tableaux d’intimité, scènes de la vie domestique, qui, mis à part les autoportraits au pastel des dernières années, ne sont pas des portraits au sens où l’on entendait ce genre au XVIIIe siècle.

L’unité de l’œuvre est là, faite d’un admirable métier, d’un espace toujours clos sur lui-même (à la différence des Hollandais, Chardin n’ouvre point de fenêtre ou d’échappée sur le monde extérieur) où l’objet immobile s’anime de vie silencieuse.

Les personnages se situent au sein d’un espace absolu, intemporel qu’il s’agit de ne point troubler car tout y est à sa place, une fois pour toutes, par une harmonie secrète, longuement méditée, dont on subit le charme sans jamais pleinement pouvoir le définir.

js-chardin-les-bulles-de-savon.1239403022.JPGLes bulles de savon est la première œuvre de Chardin représentant des figures humaines.

Un garçon concentre toute son attention sur une bulle de savon toute tremblante, qui semble sur le point de se détacher de sa pipe. Le public français du XVIIIe iècles aura reconnu la bulle de savon des tableaux hollandais dans lesquels elle symbolise la fragilité de la vie et la vanité des entreprises terrestres.chardin-le-dessinateur.1239403148.JPG

Chardin concevait et exposait ses tableaux par paires.

C’est ainsi que j’ai vu à la Gemäldegalerie de Berlin le dessinateur voisinant avec un faisan.

photos de l’auteur

Metropolitan Museum of Art (2)

Ecole hollandaise : des Rembrandt à profusion, puis la merveille des merveilles « Le portrait d’une jeune femme à l’aiguière de Vermeer » Le Met possède 5 Vermeer, la Collection Frick, 3 autres, c’est à dire sur les 40 toiles connues du hollandais, 8 sont à New York.
Auteur de représentations intimistes de la société néerlandaise du XVIIe siècle, dans lesquelles la vie familière s’efface derrière la beauté de l’instant, Johannes Vermeer — dit Jan Vermeer ou Vermeer de Delft — a excellé dans l’art de peindre des scènes de genre, aux confortables intérieurs baignés d’une douce lumière argentée. Maître de la composition et de la représentation dans l’espace, l’artiste a en effet percé les effets de la lumière avec une délicatesse subtile et une pureté de couleur quasiment unique.
Vermeer épure progressivement jusqu’à l’extrême pour n’en retenir que la structure interne reliant harmonieusement êtres et objets au sein d’un même espace restreint baigné par la lumière naturelle.

Admirable coloriste, Jan Vermeer sait également jouer de la matière qu’il applique en points lumineux, technique qualifiée par les critiques de « pointilliste ». Associés à différents éléments comme le flou du premier plan, la rigueur de la perspective et la vision par plans, ces grains de couleur laissent penser que l’artiste fait usage de la chambre noire — ou camera obscura, système optique qui permet de projeter sur un plan l’image à retranscrire.
L’extérieur s’efface et n’est plus que suggéré par la lumière frappant la fenêtre, généralement placée à gauche ; un ou deux personnages imposants se tiennent immobiles, saisis dans un geste suspendu. Enfin, la disposition des rares objets concourt à créer l’espace, à affirmer le premier plan et à scander la succession des suivants.
Même si l’on ignore tout de Vermeer, au premier coup d’œil, l’on est happé, par ses toiles, sa lumière. J’ai découvert mon premier Vermeer à la Gemäldegalerie de Berlin « le Verre de vin (v. 1661-1662)
vermeer-le-verre-de-vin.1238543647.jpgLa jeune fille semblant cacher un trouble, en baissant la tête et en dissimulant à moitié son visage dans le verre de vin. L’officier souriant guette le moment pour lui resservir un autre verre. Toute la lumière à travers la vitre effleure le banc, et  mêle ses reflets aux rayons ambiants plus exaltée. L’éclat, l’énergie, la finesse, la variété, l’imprévu, la bizarrerie, je ne sais quoi de rare et d’attrayant, il a tous ces dons des coloristes hardis, pour qui la lumière est une magicienne inépuisable, Vermeer crée une harmonie lumineuse, chaude et odorante, par un jeu de reflets depuis la nappe vers le visage, qui dégage une harmonie douce, intime, prémices de relations plus intimes.

Au Met « Le portrait d’une jeune femme à l’aiguière » vermeer-la-jeune-femme-a-laiguiere.1238542842.JPG

La figure de la jeune femme, au modelé pure, d’allure modeste occupée à entrouvrir la fenêtre, la lumière douce se répand sur le mur, se détache nettement sur le fond dépouillé. imprègne cette aimable scène de genre et met en valeur les tons bruns et dorés du tableau, qui compte parmi les plus célèbres de l’artiste, la coiffe blanche, la robe bleue, met en valeur le corselet jaune, et donne un éclat particulier à l’aiguière et son plat  tenus par la jeune femme, ainsi qu’un coffret entrouvert sur la table recouverte de la nappe rouge présente dans beaucoup de toiles du maître.
C’est une fugue de couleurs. Chaque couleur appelle l’autre, magnifiant les liens. Le jaune du corselet souligné par une bordure bleue et jaune chatoie et magnifie le bleu. Bleu de la fenêtre, bleuissant presque la coiffe blanche, en passant par le bleu entremêlé de rouge de la nappe, pour s’achever dans le bleu du manteau sur la chaise. Vermeer crée une harmonie lumineuse, chaude et odorante, par un jeu de reflets, du corsage à l’aiguière, de la fenêtre à la coiffe, du coffret au manteau jeté sur une chaise.
vermeer-jeune-femme-devant-un-virginal.1238544710.JPGD’autres toiles voisinent avec elle, la jeune fille assise devant un virginal, la jeune fille assoupie, le portrait d’une jeune fille, la femme au luth, l’allégorie de la foi, qui mériteraient aussi que l’on en parle en détails.