Parmi les paires ou les séries de tableaux réalisées à partir d’un même motif par Matisse, il y a celles sur les poissons rouges.
Les animaux marins et les poissons, fréquents chez Matisse, sont des signes notoires de son évolution vers une peinture simplifiée et synthétique. Son maître, Gustave Moreau lui avait dit avec clairvoyance et d’un léger ton de reproche : « Vous allez simplifier la peinture… » ou encore, «Vous n’allez pas simplifier la peinture à ce point-là, la réduire à ça. La peinture n’existerait plus… ». En effet, les poissons rouges de Matisse sont « simplifiés ». Pour les « synthétiser » il a regardé ceux des estampes japonaises d’Hiroshigé ou d’Hokusaï, même s’il n’en suit pas les sinuosités expressives que l’on retrouve chez nombre d’artistes de la tendance « art nouveau » ; il a vu au Louvre les dauphins stylisés des vases grecs et a copié (pendant 6 ans) « La Raie » de Chardin, qu’il appelle « la grande nature morte au poisson » ; et surtout il les a observés directement. D’ailleurs il déclara qu’il fallait remplacer le séjour à l’Ecole des Beaux Arts par un long séjour au jardin zoologique.
Le poisson rouge, cet autre placide et silencieux, prétexte à la mobilité de l’œil et à la plasticité de l’espace, sert les objectifs de condensation, d’identification, de méditation et de repos visuel que Matisse confère à sa peinture. En ce sens, Matisse, très sensible aux œuvres orientales, tapisseries, céramiques et enluminures, qu’il a vu entre 1893 et 1901 à Paris et à Munich, a une vision comparable à celle des artistes orientaux. Aussi n’est ce pas un hasard si le motif du bocal de poissons rouges apparaît dans les œuvres exécutées pendant ou après ses deux voyages au Maroc en 1912-1913.
Pebeo
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