Chassé-croisé, Dada-Surréaliste, 1916-1969

 

Enrico Badge General Rosso 1961 ©

L’Espace d’Art Contemporain Fernet Branca nous propose un voyage dans l’histoire de l’art. Le parcours de cette exposition suggère que, de la jonction du Dadaïsme et du Surréalisme, résulte un formidable collage d’oeuvres surprenantes, un assemblage d’émotions, et surtout la découverte de nombreux artistes inconnus du grand public. Ce voyage sera jonché de découvertes allant de Hans Arp à De Chirico en passant par Klee, Delvaux, Matta, Lam, Michaux ou encore Breton et Soupault.
Après l’exposition à la Fondation Beyeler, une suite surréaliste nous est proposée par les 2 co-commissaires :  Georges Sebbag et Auguste Vonville pour qui c’est une première, en tant que commissaire, mais aussi grâce à 2 collectionneurs anonymes.
chassé-croisé, Dada-Surréaliste, 1916-1969 du 15 janvier au 1er juillet
AGAR ALECHINSKY ARP BAJ BASKINE BELLMER BELLON BENAYOUN BENOIT BONA BOTT BRASSAI TH.BRAUNER V.BRAUNER BRETON BRYEN CADAVRE EXQUIS CAMACHO CARDENAS CARRINGTON CHARCHOUNE CREPIN DALI DAX DE CHIRICO DELVAUX DEMARNE DOMINGUEZ ELLÉOUËT ERNST FRANCES FREDDIE GABRITSCHEVSKY GIRONELLA GORKY GRANELL GRAVEROL HANTAÏ HAUSMANN HAYTER HENRY HEROLD HÖCH HUGNET HUGO KLEE LABISSE LALOY LAM LAMBA LESAGE LJUBA MAGRITTE MALKINE MAN RAY MARIEN MASSON MATTA MATTER MESENS MICHAUX MIRO MOHOLY-NAGY ONSLOW FORD OPPENHEIM OSSORIO PAALEN PAPAZOFF PARENT PENROSE PICABIA POUDEROUX PREVERT RAHON-PAALEN RICHTER ROY SAGE SAURA SAVINIO SCHAD SCHRODER-SONNENSTER SELIGMANN SERPAN SILBERMANN SIMA SOUPAULT STYRSKY SVANBERG TABARD TAMAYO TANGUY TANNING TARNAUD TOYEN TZARA UBAC VARO WÖLFLI WOLS ZÜRN
 
Max Ernst Fleurs-Coquillage 1932 ©



 
On ne sait si le mot Dada a été trouvé par hasard en ouvrant un dictionnaire ou si ce mot
attrape-tout est à l’image de l’autruche Dada qui, dans L’Étoile du Sud de Jules Verne,
engloutit le plus gros diamant du monde. Tantôt l’artiste dada s’empare de tout et avale tout pour assouvir sa pulsion orale. Tantôt, en pleine phase sadique ou négativiste, il fait mine de tout casser en niant même qu’il soit un artiste. En revanche, on sait que le mot Surréalisme a été emprunté à Guillaume Apollinaire qui le réduisait à une esthétique de la surprise. Pour les trois mousquetaires Aragon, Breton et Soupault, ce terme désigne une série de découvertes placées sous le signe du merveilleux : écriture automatique, vague de rêves, « stupéfiant Image », jeu du cadavre exquis, errance dans la ville, hasard objectif, trouvaille d’un objet, rencontre capitale, amour fou, humour noir, procédés automatiques (frottage, fumage, coulage, décalcomanie sans objet préconçu). Allergiques au réalisme et au misérabilisme, les surréalistes hissent haut le drapeau de l’imagination. Ils sont à la recherche du Point Sublime, d’un « certain point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement (1). »
Dès 1909, le futurisme italien, animé par le publicitaire de choc Marinetti, a irrité, amusé et fait scandale par sa condamnation de la tradition passéiste et par ses transpositions lyriques de l’atmosphère électrique du monde industriel : concerts bruitistes et mots en liberté, éloge du coup de poing et de la vitesse, adhésion aux formes héroïques et nouvelles de la guerre. Ce mouvement moderne et d’avant-garde, qui prônait la simultanéité des états d’âme ou l’insertion du spectateur au centre du tableau, a tenté de restituer une ambiance, de captiver un public. En 1916, le mouvement Dada naît au cabaret Voltaire, à Zurich, à l’abri de la guerre. Venus d’Allemagne (Hugo Ball, Richard Huelsenbeck, Raoul Hausmann), de Roumanie (Tristan Tzara, Marcel Janco), d’Alsace ( Jean Arp) ou de Suisse (Sophie Taeuber), les dadas cultivent l’art de la dérision, puisant en partie dans les recettes futuristes. Lors de soirées festives et tumultueuses, ils deviennent des chantres de la provocation. L’esprit iconoclaste dada se manifeste aussi chez d’autres individualités, mêlant indifférence et excentricité : Arthur Cravan, neveu d’Oscar Wilde, unique rédacteur de la revue Maintenant, poète-boxeur-danseur-conférencier ; Marcel Duchamp, inventeur du ready made, tels la roue de bicyclette, le porte-bouteilles ou l’urinoir ; Francis Picabia, irrévérencieux et malicieux dans ses dessins mécanographes ; Jacques Vaché, dandy des tranchées et déserteur à l’intérieur de soi-même. La figure du futuriste affiche le sérieux de l’activiste et du constructiviste. La silhouette du dandy dada, fébrile et paradoxal, promène un individualisme funambule. Le surréaliste, membre d’une association collagiste, dévoile son visage dans un portrait de groupe. Mais dadas et surréalistes ont ceci de commun qu’ils sont des individus révoltés, des partisans de l’automatisme, des collagistes de la rencontre, des découvreurs du moment opportun.
 
Alberto Savigno Paradis Terrestre 1923 ©

Un collage réunissant et reliant 200 tableaux, photographies ou sculptures, conçus par 100 artistes surréalistes, dadas ou apparentés, tel est l’objet et le propos de cette exposition. Le collage, au sens de matériaux découpés, redistribués ou ajustés, est une pratique précoce
chez les dadas (Hannah Höch, Kurt Schwitters, Raoul Hausmann), les surréalistes (Max
Ernst) et chez ceux qu’on peut qualifier de dada-surréalistes (Picabia, Arp). Cependant, deux autres significations du mot ont été mises à profit par les surréalistes : le collage passionnel relatif à quelques-uns et à l’ensemble du groupe ; le collage temporel, comme la série de coïncidences parsemant les rencontres de Nadja et d’André Breton dans les rues de Paris.
D’ailleurs, dès juillet 1918, le soldat André Breton faisait profession de collagiste, annonçant même, en jouant sur les mots, qu’il mènerait cette carrière jusqu’à son terme : « Mieux vaut laisser dire / qu’André Breton / receveur de Contributions indirectes / s’adonne au collage /en attendant la retraite (2) ».
À travers ces oeuvres, ô combien diverses, on devine les forces souterraines qui les ont
soulevées, le soubassement collectif qui les a portées, le tissu conjonctif qui les a nourries. La répartition des 100 artistes en neuf sections obéit à quatre critères : l’appartenance (salles distinctes pour les dadas, les surréalistes et les apparentés), la chronologie (première, deuxième et troisième génération surréaliste), la particularité (femmes, ésotérisme) et le mode opératoire (photogramme). Mais les artistes répartis dans les différentes salles ne sont nullement enfermés dans une case (Chirico le précurseur fait aussi partie du premier cercle surréaliste ; Arp est autant surréaliste que dada). De même, la chronologie est assez élastique (des surréalistes des années trente peuvent être représentés par des oeuvres de décennies suivantes). On perçoit, et c’est là l’essentiel, un air de connivence entre toutes ces oeuvres, qu’elles soient majeures ou mineures, qu’elles datent des années vingt ou des années soixante. L’aire de jeu des dadas avoisine le château hanté des surréalistes. Le mouvement Dada (1916-1925) et le mouvement surréaliste (1919-1969) sont rivaux et complémentaires. Le parcours de cette exposition suggère que, de leur jonction ou conjonction, résulte un formidable collage vivant et détonant.
 
Georges Sebbag
 
Man Ray Place d'Italie 1923 ©

1 André Breton, Second manifeste du surréalisme, Éditions Kra, 1930.
2 Poème « Pour Lafcadio », recueilli dans Mont de piété (1913-1919), Au Sans Pareil, 1919.
Catalogue 224 pages/ 203 illustrations couleur
Biographies des 98 artistes présentés.
Textes de Georges SEBBAG.
© Editions de Saint-Louis. Espace d’Art Contemporain
Fernet Branca -ISBN : 978-2-917186-39-8
 
HORAIRES
du mercredi au dimanche : de 14h00 à 19h00 (fermé lundi et mardi)
TARIFS
Entrée : 7 €
6 € tarif réduit : groupes 10 personnes minimum
étudiants de moins de 26 ans, carte Cezam
Gratuité enfants de moins de 12 ans, MuseumsPass
VISITES GUIDÉES Sur demande
ACCÈS Aéroport Bâle/Mulhouse à 5 minutes, gare SNCF à 500
mètres, Autoroute A35,
La ville de Saint-Louis est à 5 minutes de Bâle (CH)

Auteur/autrice : elisabeth

Pêle-mêle : l'art sous toutes ses formes, les voyages, mon occupation favorite : la bulle.

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