King Kong « L’Affaire Makropoulos » (2007) de Malgorzata Szczęśniak Ouvrant de manière spectaculaire l’exposition Opéra Monde, un immense King Kong se déploie dans le Forum. Cette sculpture conçue par la créatrice polonaise Malgorzata Szczęśniak pour la mise en scène de L’Affaire Makropoulos (de Leoš Janáček par Krzysztof Warlikowski) est la plus imposante jamais réalisée par les ateliers de l’Opéra national de Paris. Cette œuvre monumentale vous plonge dans l’univers hors limite de l’opéra et de son dialogue avec le cinéma. Par ailleurs architecte scénographe de l’exposition Opéra Monde, Malgorzata Szczęśniak transforme la Galerie 3 en une déambulation labyrinthique à travers les coulisses d’un décor d’opéra.
La déesse du Soleil Amaterasu sortant de la grotte Kazu Huggler (née en 1969) 2019 Installation
Jusqu’au 22 septembre 2019 au musée Rietberg de Zurich commissaire, Albert Lutz, directeur du Musée depuis 1998
« Miroirs, personne, jamais encore, n’a décrit sciemment ce que vous êtes dans votre essence » Rilke, Sonnets à Orphée, II , 3.
Musée Rietberg exposition Miroirs
Intitulée Eternity now, œuvre de la plasticienne helvète Sylvie Fleury, est un immense rétroviseur posé sur la pelouse qui permet une saisissante vision de la Villa Wesendonck et de son parc, où est installé le Museum Rietberg, qui débute l’exposition à l’extérieur.
L’exposition commence à l’intérieur, inévitablement par le mythe antique de Narcisse. L’histoire de ce jeune homme qui tombe amoureux de son reflet dans l’eau, mais qui, prenant conscience que cet amour est vain et dépérissant de jour en jour, finit par mourir de désespoir, a enflammé l’imagination des créateurs pendant des siècles: le mythe de Narcisse est un thème récurrent dans la littérature, la philosophie, l’art et la psychologie, à chaque fois qu’il est question d’un amour immodéré de sa propre personne, de la vie et de la mort et de l’estime de soi. marbre de John Gibson
« De quoi ai-je l’air aujourd’hui? Qu’est-ce que me dit mon visage? »
Jour après jour, le miroir est l’instance qui nous permet de vérifier notre aspect et de capter notre état d’âme. Il nous accompagne durant toute notre vie, et nous entretenons avec lui une relation intime, même si elle est parfois machinale et distanciée, aimée ou haïe. Mais au fait, que savons-nous de lui, de son histoire et de son utilisation, et que raconte le miroir sur nous-même?
Orphée, Tokyo Rumando
Cette exposition est la plus vaste jamais présentée sur l’histoire culturelle du miroir, qui s’étend sur plusieurs millénaires. Que ce soit dans l’Egypte ancienne, chez les Mayas du Mexique, au Japon ou en Italie, plus précisément à Venise, mais aussi dans l’art et les films actuels – d’un bout à l’autre de la planète, des miroirs ont été fabriqués dans toutes sortes de civilisations et se sont vus attribuer des significations et des pouvoirs particuliers.
A l’aide de 220 oeuvres d’art provenant de 95 musées et collections du monde entier, l’exposition met en lumière l’évolution artisanale et technologique mouvementée ainsi que la portée culturelle et sociale de cet intermédiaire qui nous renvoie notre propre reflet. Il est question du miroir en tant qu’artefact, mais aussi de connaissance de soi, d’orgueil et de sagesse, de beauté, de mystique et de magie, ainsi que du miroir de notre époque – le « #selfie ». Florence Henri Sur le net, sous tous les hashtags possibles, on peut voir des millions de selfies pris à bout de bras. Si l’on saisit « miroir et selfie » dans un moteur de recherche, on se retrouve en face de photos de femmes et d’hommes qui prennent la pose dans le lieu le plus intime de leur vie privée, la salle de bains, et divulguent ces images dans le monde entier sous le mot-dièse #bathroomselfie.
Sur la voie de la connaissance de soi Les nouveau-nés et les nourrissons s’intéressent déjà très tôt aux visages. Le visage de la mère, sa première personne de référence, est pour l’enfant son « premier miroir ». Tous deux s’imitent mutuellement, chacun reflétant les traits du visage et les émotions de l’autre. Dans un premier temps, les tout-petits interagissent avec leur reflet comme ils le feraient avec un vis-à-vis « inconnu ». Ce n’est qu’à peu près à l’âge de 18 mois que les enfants se reconnaissent eux-mêmes dans le miroir. Peu à peu, ils développent également la faculté de prise de conscience de soi en tant qu’objet et de réflexion à ce sujet. Le philosophe grec Socrate ne recommandait-il pas à ses élèves de se regarder dans un miroir pour méditer sur la beauté et la fugacité et cultiver leur propre âme…
Michelangelo Pistoletto, L’Etrusco.
CHANGEMENT D’IDENTITÉ Je est un autre Dans la célèbre formule d’Arthur Rimbaud – Je est un autre –, le poète se considère comme un voyant, qui se transcende lui-même et qui, s’affranchissant de sa propre personnalité, devient un autre, et pénètre ainsi dans les domaines inconnus de l’imagination. .Miroir-lièvre (Hasenspiegel) Cette oeuvre de Markus Raetz se réfère à une action de l’artiste allemand Joseph Beuys réalisée en 1965 et intitulée: Wie man dem toten Hasen die Bilder erklärt («Comment expliquer la peinture à un lièvre mort»). La silhouette du lièvre réalisée en fil de fer reflétée dans le miroir devient celle de quelqu’un d’autre – le profil de Joseph Beuys.
Marianne Brandt
L’exposition montre des oeuvres de vingt artistes, dont des photographes, provenant de quatre continents, sur le thème de l’« autoportrait » – des années 1920 à aujourd’hui. Cette série comprend des photographies de Claude Cahun et de Florence Henri, de Cindy Sherman et Nan Goldin, jusqu’à Amalia Ulman et Zanele Muholi, des vidéos de Bill Viola, d’Albert Lutz. Des extraits de films – des monologues d’hommes se parlant devant le miroir ou des cowboys tirant dans un miroir – constituent un programme contrasté à la fois savoureux et qui mérite réflexion.
Zanele Muholi
de Niro
Ce tour du monde à travers l’histoire du miroir auquel nous invite l’exposition commence par un miroir en bronze égyptien du XIXe s. av. J.-C., que, selon l’inscription, un père avait fait fabriquer pour sa fille « afin qu’elle puisse y regarder son visage ». Elle nous conduit en Grèce et en Italie, plus précisément à Rome, chez les Etrusques, les Celtes, puis en Asie, en Iran, en Inde, en Chine et au Japon. Des pièces singulières provenant du Museo Nacional de Antropología de Mexico laissent deviner le pouvoir numineux des miroirs chez les Mayas et les Aztèques. Quant aux miroirs grecs, romains ou étrusques, leur revers est orné de représentations artistiques de femmes se baignant ou se coiffant. L’exposition montre à ce sujet des chefs-d’oeuvre du Louvre, à Paris, et du Metropolitan Museum de New York.
Miroirs Rietberg
Magie et mysticisme Le miroir peut aussi être obscur et mystérieux. Dans de nombreux genres cinématographiques, les metteurs en scène ont recours à des miroirs pour annoncer l’avenir ou dévoiler le passé; parfois, la mort rôde derrière le miroir, il rend visible l’invisible. L’art du surréalisme, de Salvador Dali à Paul Delvaux, utilise le miroir pour suggérer des phénomènes insondables, incompréhensibles ou secrets. L’exposition présente aussi un incroyable costume de chaman, le plus vieil exemple au monde, provenant de Sibérie auquel sont suspendus des miroirs en laiton. Le parcours se termin avec l’histoire d’Alice traversant le miroir, illustrée par une oeuvre majeure de Michelangelo Pistoletto.(ci-dessus)
Paul Delvaux, Femme au Miroir 1936
Interaction Des extraits de certaines des scènes les plus célèbres de l’histoire du cinéma où le miroir joue un rôle sont présentés dans une vaste projection : l’entrée dans le monde des Enfers, tirée du film Orphée de Jean Cocteau, le final grandiose de La Dame de Shanghai d’Orson Welles, la scène du peep-show de Paris Texas de Wim Wenders ou quelques autres tirées de In the Mood for Love; de Wong Kar-Wai.
Le narcisse suisse clôture l’exposition que l’on quitte avec regret, tant elle est intelligente, riche en découvertes.
Narcisse suisse, Paul Camenisch 1944
Musée Rietberg Les arts du monde à Zurich Gablerstrasse 15 8002 Zurich Suisse
Hans et Monica Furer, collectionneurs et donateurs photo Kunstmuseum Basel
Jusqu’au 1er décembre 2019, au Kunstmuseum Basel | Neubau Sélection : Hans Furer Réalisation : équipe Gegenwartskunst
Hans Furer
Hans et Monika Furer-Brunneront fait donation de 24 oeuvres de Rémy Zaugg (1943–2005) provenant de leur fondation au Kunstmuseum Basel. La plus importante collection privée de l’artiste suisse entre ainsi au sein de la Öffentliche Kunstsammlung Basel. Cette donation comprend également une photographie de Thomas Ruff réalisée d’après 48 esquisses perceptives de Rémy Zaugg.
Conçues entre 1963 et 1968 à partir d’une analyse du tableau de Paul Cézanne La maison du pendu, celles-ci sont en dépôt au Kupferstichkabinett du Kunstmuseum Basel depuis 1992.
À l’occasion de la donation, le Kunstmuseum Basel, avec lequel les collectionneurs sont étroitement liés depuis plusieurs décennies, présente ces oeuvres dans le cadre d’une exposition répartie dans quatre salles du Neubau. Elle réunit des oeuvres de toutes les périodes de création de Rémy Zaugg, parmi lesquelles des travaux provenant des sériesEin Blatt Papier,
Für ein Bild et Schau, ich bin blind, schau, et les place aux côtés d’autres grands artistes internationaux qui caractérisent la collection Furer tels que John Baldessari, Sol LeWitt, Robert Mapplethorpe, Lawrence Weiner, Thomas Ruff et Stephan Balkenhol, On Kawara.
Thomas Ruff et Stephan Balkenhol
La mise en regard de ces oeuvres donne lieu à un dialogue stimulant. Présentée au premier étage du Neubau, l’exposition jouxte les oeuvres d’art américain d’après-guerre de la collection du Kunstmuseum Basel dont Day before one (1951) de Barnett Newman. Source d’inspiration essentielle pour Rémy Zaugg, ce tableau l’a amené à se remettre en question, à poser un regard nouveau sur l’art et à se consacrer au thème de la perception pour le restant de sa vie.
Pour cet artiste natif du Jura suisse francophone et résidant à Bâle et à Mulhouse, la peinture a toujours constitué une sorte de recherche fondamentale pour des projets « appliqués », que ce soit dans le champ de l’architecture, de l’urbanisme ou de la conception d’expositions. Zaugg compte parmi les artistes suisses majeurs du XXe siècle. Il est représenté au sein de nombreux musées nationaux et internationaux ainsi qu’au travers d’oeuvres situées dans l’espace public : auKunsthaus Aarau, dans le bâtiment « Titanic » à Berneou au Staatsarchiv à Bâle.
On Kawara
Hans Furer et sa femme ont constitué une remarquable collection d’oeuvres de Rémy Zaugg ainsi que d’autres artistes. Avocat, Furer est également connu pour son engagement en faveur de la culture. Ainsi, il fut l’un de ceux à l’initiative de l’acquisition de la sculpture de Richard Serra Intersection il y a 25 ans. (devant le théâtre de Bâle) Il a aussi apporté son soutien à de nombreux projets de politique culturelle en tant que parlementaire de Bâle-Campagne.
Robert Mapplethorpe Patti Smith, 1976 Épreuve à la gélatine argentique vintage, 38 × 38 cm Collection Hans et Monika Furer
Kunstmuseum Basel St. Alban-Graben 8, Postfach CH–4010 Basel
Horaires d’ouverture Lundi fermé Ma 10.00–18.00 Me 10.00–20.00 Je–Di 10.00–18.00
Accès ATTENTION ! A partir du 14 mars 2019, le St. Alban-Graben sera fermé à la circulation en direction de la Wettsteinplatz en raison du chantier du « Parking Kunstmuseum ». Le détour peut se faire par l’Aeschenplatz. L’arrêt de tram « Kunstmuseum » est fermé jusqu’à nouvel ordre. Descendre à Bankverein
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Une de mes aventures de déplacement, qui s’ajoute à la liste des autres :
Ce jour-là, JR me réveille trop tôt, avant l’heure prévue par mon réveil. Cela me contrarie et me met un peu mal à l’aise. Mauvais pressentiment pour la suite, qui se dissipe plus tard. Ma destination, le Kunstmuseum de Bâle pour une rencontre de presse. J’avais décidé d’y passer plus de temps, afin de rattraper les expo que j’avais manquées en juin, pour cause d’Art Basel.
C’est tout moi
Soudain appel de XXX, qui voulait me rencontrer dans l’après midi, ce n’était pas prévu. Je continue mes visites, je déjeune tranquillement à la cafétéria du musée, puis je retourne au musée. 2e appel de XXX qui me dit que son RDV de l’après midi est annulé et qu’il est disponible. Je lui fixe RDV pour 16 h.
. Je termine ma visite à 14 h, prends le tram pour rejoindre la gare SBB, puis saute dans le TER pour Mulhouse, qui par chance est en gare. Panique, je me rends compte que j’ai oublié mon sac à dos dans le tram. J’avais un 2e sac en bandoulière contenant le catalogue de l’expo du matin, qui par conséquent pèse lourd .
Mon sac à dos contient mon appareil photo tout neuf, l’autre m’ayant été volé au restaurant, il y a peu. Le veille JR m’a presque obligée à résilier l’assurance contre le vol, du nouveau bijou.
Immédiatement je décide de descendre du TER à St Louis, de rebrousser chemin et d’appeler les trams de Bâle. Pas de réponse, je retourne à Bâle avec un autre TER. A Bâle j’ai enfin une réponse téléphonique, qui me dit d’aller à la gare SBB aux objets trouvés. Je me mets en quête de ce bureau, il est au sous-sol de la gare, dans un coin retranché, personne au guichet, je sonne, 2 suisses, l’un me dit d’aller Barfussplatz, il ne peut rien faire, les objets trouvés y sont déposés. Le 2e me conseille d’aller sur le quai des trams, place de la gare, de chercher le tram n° 1, en principe le conducteur fait une pose. J’y cours, je trouve ce tram sans conducteur, il est au fond du quai, je lui explique tant bien que mal, mon affaire, il parle un peu le français. Il contacte par tél, le conducteur du tram n° 2, lui dit que je suis descendue à 14 h à la gare SBB, et là l’autre conducteur, demande mon nom. J’avais mis ma CI périmée (souvenir du vol Nice/Bâle) dans mon sac, elle m’a sauvée la mise. Réponse : « attendez, à 16 h 03, le tram 2 avec le conducteur n° 7 sera de retour il vous rendra votre sac. »
place de la gare de Bâle
J’ai guetté, sur le quai à partir de 15 h 45, ne sachant pas de quelle direction il allait venir. Les conducteurs ont une plaque jaune avec un numéro, pour les personnaliser. J’ai arpenté les quais, jusqu’à 17 h, pétrifiée d’angoisse.
Le tram 2 avec le conducteur n° 7, arrive, je suis à l’autre extrémité du quai, je cours, le téléphone sonne, il m’échappe des mains et tombe sur la face (plein de stries) sur le béton. Je récupère mon sac in extremis, je regagne Mulhouse, avec un mal d’estomac, une migraine d’enfer et un téléphone accidenté.
En fait mon Iphone n’était pas cassé, c’est juste le verre protecteur qui était fracassé.
Numéro du conducteur
Si vous me croisez, ne soyez pas étonné de me trouver l’air concentré, voire constipé, c’est que je m’applique à ne pas oublier, mon petit sac, mon sac à dos, accessoirement le sac en toile avec le Kit du musée, et une douceur achetée à la gare de Basel
Jusqu’au 27 OCTOBRE 2019 à la Fondation de l’Hermitage à Lausanne Commissariat Victor I. Stoichita, professeur ordinaire en histoire de l’art des temps modernes à l’Université de Fribourg Sylvie Wuhrmann, directrice de la Fondation de l’Hermitage Aurélie Couvreur, conservatrice de la Fondation de l’Hermitage
attribué à Wolfgang Heimbach cp
Après le succès de l’exposition Fenêtres, de la Renaissance à nos jours. Dürer, Monet, Magritte… en 2013, la Fondation de l’Hermitage à Lausanne poursuit son exploration des grands thèmes de l’iconographie occidentale, et propose au public de découvrir les multiples facettes artistiques de l’ombre. Avec une sélection inédite de près de 140 oeuvres, l’exposition Ombres, de la Renaissance à nos jours offre un parcours à travers 500 ans d’histoire de l’art, et convoque des formes artistiques très variées, allant de la peinture à l’installation, en passant par la sculpture, l’estampe, le dessin, le découpage, la photographie ou encore la vidéo.
vue de l’entrée de la Fondation de l’Hermitage, avec les ombres portées.
L’exposition se déploie en 16 thèmes. Pour certaines oeuvres connues ou encore d’autres d’auteurs moins connus, l’exposition rend attentif aux détails, que l’on regarde souvent rapidement sans les voir.
L’ombre naît de la lumière, ou plus précisément de l’absence de lumière, et elle se définit comme suit : « Diminution plus ou moins importante de l’intensité lumineuse dans une zone soustraite au rayonnement direct par l’interposition d’une masse opaque ». En d’autres termes, lorsqu’un objet opaque est mis devant un rayon lumineux, l’ombre proprement dite (ou ombre propre) est la zone de l’objet qui ne reçoit pas de lumière. Mais l’ombre a ses variations. La première d’entre elles est l’ombre portée, c’est-à-dire l’ombre projetée par un corps éclairé sur une surface. La pénombre est la zone partiellement éclairée qui entoure l’ombre propre ou l’ombre portée, lorsque l’objet est éclairé par une source lumineuse étendue.
Sol LeWitt Une sphère éclairée par le haut, les quatre côtés, et toutes leurs combinaisons
Depuis l’Antiquité, il se raconte que l’ombre est au coeur de l’invention de la peinture, du dessin et même du modelage en bas-relief. Ainsi Pline l’Ancien explique-t-il qu’une jeune femme corinthienne, Dibutade, dessina les contours de l’ombre de son bien-aimé qui se projetait sur un mur, pour en garder une image avant qu’ils ne soient séparés (Histoire naturelle, XXXV, 15 et 151). Ce récit mettant en scène une jeune femme inventrice d’un art et un jeune homme lui servant de modèle, montre le rôle central de l’ombre dans la conception artistique occidentale.
Joseph-Benoît Suvée, L’origine du dessin, 1776-1791 huile sur toile, 49 x 34 cm Musée Groeninge, Bruges
Les couleurs de l’ombre Si l’ombre est, dans l’imaginaire occidental, associée à la couleur grise, il n’en va pas de même dans la nature. Comme le note le théoricien de l’art Leon Battista Alberti dès 1435, « les rayons réfléchis s’imprègnent de la couleur qu’ils trouvent sur la surface par laquelle ils sont réfléchis ». En d’autres termes, la couleur de l’ombre offre une infinité de teintes et de nuances, qui dépendent des sources de la lumière et des surfaces que celle-ci atteint, directement ou indirectement.
Maximilien Luce
Le parcours traverse les siècles et les thèmes, associant de manière inédite des chefs-d’oeuvre de l’art occidental qui témoignent de l’intérêt continu des artistes pour ce thème, que ce soit dans l’autoportrait (Rembrandt, Eugène Delacroix), les recherches sur la perspective (Baccio Bandinelli, Pieter de Hooch), le travail sur le clair-obscur (Luca Cambiaso, Jacob Jordaens, Joseph Wright of Derby) ou la dramatisation des paysages chez les romantiques (Caspar David Friedrich, Carl Gustav Carus, Wilhelm Bendz). L’exposition fait également la part belle aux ombres impressionnistes (Claude Monet) et post-impressionnistes (Henri-Edmond Cross, Joaquín Sorolla y Bastida), qui témoignent de l’apparition de la lumière artificielle et des recherches sur la théorie des couleurs au XIXe siècle.
Claude Monet Londres, le Parlement, reflets sur la Tamise, 1905 huile sur toile, 81,5 x 92 cm Musée Marmottan Monet, Paris
Au tournant du XXe siècle, contre-jours tranchants et ombres puissantes jouent un rôle déterminant dans la quête d’un langage formel synthétique et novateur (Félix Vallotton, Hans Emmenegger). Parmi les points forts de l’exposition figure une section confrontant les ombres inquiétantes et paradoxales des artistes symbolistes (William Degouve de Nuncques, Léon Spilliaert), expressionnistes (Edvard Munch), surréalistes (Salvador Dalí, René Magritte, Max Ernst) et de la Nouvelle Objectivité (Christian Schad, Niklaus Stoecklin).
Hans Emmenegger
Les usages de l’ombre dans la création moderne et contemporaine sont, quant à eux, déclinés à travers des oeuvres emblématiques de Pablo Picasso, Andy Warhol, Christian Boltanski ou encore Joseph Kosuth, tandis que les artistes vidéo (Vito Acconci, Jean Otth, Thomas Maisonnasse) réinterprètent les grands mythes des origines qui, de Platon à Pline, relient l’ombre, l’art et la connaissance.
Boltanski, le théâtre d’ombres
En contrepoint, une importante section photographique rassemblant notamment des images saisissantes d’Edward Steichen, Man Ray, Lee Friedlander et Wolfgang Tillmans, montre que ce thème suit la photographie comme son ombre…
Thomas Ruff
Fondation de l’Hermitage Route du Signal 2 Lise Schaeren Decollogny CH – 1018 Lausanne Responsable Communication www.fondation-hermitage.ch +41 (0)21 320 50 01
Catalogue L’exposition est accompagnée d’un ouvrage richement illustré, contenant un avant-propos de Sylvie Wuhrmann et Aurélie Couvreur et des essais de Marco Costantini, Corinne Currat, Michel Hilaire, Dominique Hoeltschi, Patrizia Lombardo, Dominique Païni, Michel Pastoureau, Didier Semin, Victor Stoichita, publié en co-édition avec La Bibliothèque des Arts, Lausanne.
Horaires Mardi à dimanche de 10h à 18h Jeudi de 10h à 21h Lundi fermé
Accès Depuis la gare •Prendre le M2 direction « Croisettes », descendre à l’arrêt « Bessières » puis prendre le bus no 16, direction « Grand-Vennes ». Descendre à l’arrêt « Hermitage »
Depuis le centre ville (Place Saint-François) •Prendre le bus no 16, direction « Grand-Vennes ». Descendre à l’arrêt « Hermitage » Info trafic des Transports publics de la région lausannoise TL
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Jusqu’au 23 SEPTEMBRE 2019 au MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE DIJON Entrée gratuite pour tous Commissaires de l’exposition FRANCK GAUTHEROT, directeur du Consortium Museum de Dijon DAVID LIOT, directeur des musées de Dijon
YAN PEI-MING
Composée d’une trentaine d’oeuvres, cette exposition se déploie dans l’ensemble du musée et met en lumière un peintre contemporain majeur. Tel un journal intime l’exposition explore les vicissitudes de l’artiste face à la brutalité du monde. Elle rend hommage à sa mère et à ses amis récemment disparus. L’Homme qui pleure met en lumière la vision très personnelle d’un homme meurtri par la violence de la vie et qui continue à se battre.
YAN PEI-MINGSeptember 11th 2001 (2011)
Entre drames intimes et planétaires Dans la première salle, l’oeuvre September 11th 2001 (2011) campe les Twin Towers comme deux personnages en péril. Artiste à genoux (2012) accueille le visiteur. Yan Pei-Ming se recueille, tête baissée, demande le pardon du monde qui s’écroule, le pardon de ses proches.
Yan Pei-Ming,Fukushima, 11 mars 2011 (2011)
Yan Pei-Ming Le chien qui crie
Dans la seconde salle, les chiens hurlent de toute la puissance de leur mâchoire devant Fukushima, 11 mars 2011 (2011). Face à l’explosion de la centrale, résumée par Yan Pei-Ming au moment d’après, il ne reste que le panache énorme d’une fumée de tous les dangers radioactifs. Dans la troisième salle, les oiseaux noirs tournoient ou se posent autour de portraits de femmes voilées sous les yeux ouverts mais morts de l’Oncle aveugle (2019). Ils interrogent l’enfermement, sociétal ou physique, la liberté d’action et de mouvement.
Yan Pei-Ming
Invisible Women
Yan Pei-Ming
La dernière salle annonce l’effroi devant le tragique. Le Selfportrait at Four Ages (2006) fabrique un temps en quatre saisons : la jeunesse, l’âge adulte, le gisant mort et la vanité (le crâne) tandis que ses fleurs noires portent les messages des vivants aux morts.
Yan Pei-Ming
Fabian Stech,
Xavier Douroux
À travers Fabian Stech, portrait d’un ami (11/2015) et Xavier Douroux, portrait d’un ami (2019), Yan Pei-Ming rend hommage à ses amis décédés qui ont tant compté dans sa vie. Fabian Stech (1964-2015), fauché au Bataclan, le 13 novembre 2015 et Xavier Douroux (1956-2017), un des fondateurs et directeurs du Consortium, vaincu par la maladie, à l’aube de la soixantaine. Dans un entretien en 2005, Yan Pei-Ming, apaisé, confirme à Fabian Stech que le thème de la mort traversera toujours son oeuvre et ajoute : Plus j’avance, plus je me sens libre, plus j’ai envie d’exprimer un sentiment général d’humanité » Cette année, au coeur d’un musée rénové des Lumières, le peintre exprime sa liberté, son humanisme et sa générosité. Témoin engagé d’un monde qui vacille, l’Homme qui pleure garde intacte son énergie plastique et sa « folie créatrice ». Lueurs d’espoirs, ses morts le sont assurément.
Yan Pei-Ming
« L’aquarelle à l’eau des larmes », une salle spécifique Dans l’espace d’exposition temporaire, les Pleurants, suite d’aquarelles d’après les 82 pleurants des cénotaphes des ducs de Bourgogne s’adjoignent une peinture et une autre série d’aquarelles : Ma mère (2018), cinq feuilles d’aquarelles qui réitèrent dans l’encre lavée l’image de sa défunte mère. Dans la même salle une série d’autoportraits et les funérailles du Pape.vidéo
Yan Pei-Ming
Un peintre contemporain au musée des Beaux-Arts Dans la salle des Tombeaux le triptyque Ma mère – Souffrance • Espoir • Effroi (2018), portraits de la mère de l’artiste au tournant fatal de sa vie, se dévoile avec à ses pieds les cénotaphes des ducs entourés des Pleurants.
Yan Pei-Ming, Ma mère – Souffrance • Espoir • Effroi (2018)
Loin des mouvements artistiques des années 80, autour de l’art conceptuel et de l’installation, Yan Pei-Ming défend la peinture avec énergie et, au fil de sa carrière, va revisiter la peinture européenne du XVIIe siècle à nos jours. Il n’hésite pas à l’interpréter par un jeu infini de détournements, une écriture plastique spontanée et un sens de la polysémie
Yan Pei-Ming d’après Goya (Tres de Mayo)
Sans oublier,Game of Power, avec le portrait des dictateurs actuels.
Au sein du parcours permanent La Vocation de saint Matthieu ; Le Martyre de saint Matthieu, d’après Caravage (2015) et L’Exécution, après Goya (2012) confirment ce dialogue entre art contemporain et peinture d’histoire.
Palais des États et des ducs de Bourgogne Place de la Sainte-Chapelle – DIJON dmp@ville-dijon.fr Tél. : (+33) 3 80 74 52 09 / musees.dijon.fr Entrée gratuite pour tous Les horaires d’ouverture de l’exposition sont ceux du musée des Beaux-Arts Ouvert tous les jours sauf le mardi, du 17 mai au 31 mai : de 9h30 à 18h du 1er juin au 23 septembre : de 10h à 18h30 Navette Divia City gratuite depuis l’arrêt Foch Gare SNCF (Boulevard de Sévigné en dessous de la Gare) qui vous dépose à l’arrêt théâtre, juste à côté du musée
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Jusqu’au 30 septembre 2019, le Centre Pompidou-Metz présente une exposition monographique consacrée à Lee Ufan (vidéo)
Ma première rencontre avec les oeuvres de Lee Ufan date de 2004, présentées à la Fondation Fernet Branca, grâce à Jean-Michel Wilmotte, architecte de renommée internationale et grand connaisseur de la culture coréenne, qui a réussi la rénovation et transformation des anciennes usines, en centre d’art contemporain. Dans l’intimité du lieu, elles dégageaient une sérénité contagieuse. A Versailles, c’est « l’Eloge du peu » qui tient toutes ses promesses »
« Je suis hostile à l’industrialisation illimitée, au consumérisme de masse résultant d’un productivisme effréné. Je suis opposé à ce que les hommes veuillent former le monde selon l’image qu’ils s’en font. Par conséquent, si contradictoire que cela puisse paraître, je crée dans le but de ne pas créer. » (Lee Ufan, Tension précaire, op.cit., p.197)
Le parcours a été conçu par l’artiste et le commissaire de l’exposition comme un cheminement d’expérience en expérience, à la manière d’une initiation à un nouveau langage, en dehors des codes et des références traditionnelles de l’art contemporain. À chaque « station » du chemin, une sélection d’œuvres révèle un concept, une façon d’envisager l’art. Certaines salles sont aussi la déclinaison de ce concept à partir d’un matériau en particulier.
Lee UfanRelatum
Jean-Marie Gallais, commissaire de l’exposition, explique : « Ce n’est pas une rétrospective au sens classique du terme, il s’agit plutôt d’une traversée de l’œuvre dans sa quête de redéfinition de l’art. Nous n’avons pas cherché à montrer « tout » Lee Ufan, ni à suivre un parcours chronologique, mais plutôt à montrer comment l’artiste a élaboré des concepts et des principes. On retrouve dans l’exposition la plupart des typologies d’œuvres et de matériaux déployés par Lee Ufan, mais aussi des moments de transition, des pièces charnières qui dévoilent comment une réflexion mène à une autre. Le lien entre une idée, une pensée et une forme ou une expérience, est particulièrement rendu sensible. Ce choix d’œuvres a été fait en concertation et en dialogue constant avec l’artiste, qui a veillé à un équilibre entre peintures, sculptures et installations, œuvres anciennes et récentes. »
Lee Ufan, Relatum
La notion de doute, fondamentale pour Lee Ufan, lui permet d’interroger le principe même de la peinture et de la sculpture, et de dépasser la question de l’ego de l’artiste. Les œuvres présentées au Centre Pompidou-Metz révèlent aussi cet aspect du travail, répondant à la volonté d’atteindre le « non-peint », le « non-sculpté », comme le dit Lee Ufan, afin de créer une relation la plus pure possible entre l’intérieur et l’extérieur de l’œuvre, entre l’énergie et l’immobilité, suggérant différentes façons d’ « habiter le temps. »
Lee Ufan naît en 1936 au sud de la Corée, dans une famille imprégnée d’une morale stricte aux idéaux confucéens. « Lorsque j’essaie de vivre en tant que Coréen, ma vie créatrice s’appauvrit et, si je tente de vivre en tant qu’artiste, je m’éloigne des Coréens » (Lee Ufan, Tension précaire) Face à ce dilemme, il cherchera à trouver un équilibre en prenant à rebours la pratique artistique, afin d’atteindre un langage universel non auto-référencé, un « au-delà » de l’art, une pratique de l’humilité où l’artiste disparaît derrière son œuvre.
Le départ de Lee Ufan pour le Japon, après sa première année à l’université, est une étape importante dans la construction de son identité. Il rejoint son oncle et va y apprendre le japonais et suivre des cours de philosophie contemporaine à partir de 1957. Lee Ufan cherche alors refuge dans la pratique artistique, mêlée à une lecture phénoménologique de l’existence inspirée de ses lectures de philosophes occidentaux, notamment de l’analyse de la perception par Maurice Merleau-Ponty, mais aussi les écrits d’Heidegger ou Foucault.
Traditionnellement, la perception est définie comme l’activité de l’esprit par laquelle un sujet prend conscience d’objets et de propriétés présents dans son environnement, sur le fondement d’informations délivrées par les sens.
La phénoménologie est en effet fondatrice dans la naissance du mouvement Mono-ha au Japon en 1968, dont Lee Ufan est l’un des principaux théoriciens et représentants. Cette « Ecole des choses » sonde les relations qui naissent de la rencontre entre des éléments naturels et industriels, sur lesquels les artistes n’interviennent presque pas, dans des installations éphémères au vocabulaire ascétique. Mono-ha établit des connexions entre l’art et la philosophie, dans un esprit anticonsumériste. On trouve dans le travail de Lee Ufan, jusqu’aux œuvres les plus récentes, ce parti pris d’économiser le geste pour critiquer l’hyper productivité et la saturation des images de la société et du monde de l’art contemporains.
Lee Ufan développe ensuite sa pensée au fil des expositions, faisant évoluer ses gestes d’une série à l’autre, glissant toujours aussi allègrement entre la peinture, la sculpture ou l’installation. L’exposition du Centre Pompidou-Metz dresse un portrait par les œuvres de cet artiste qui s’efforce à travers ses créations, de considérer l’art comme un moyen d’appréhender notre rapport au monde. L’œuvre de Lee Ufan est une invitation à ralentir, à quitter le monde du déferlement des images et de la représentation, pour se recentrer sur la perception. Un chemin de méditation qui peut autant partir d’un détail insignifiant comme de l’infini : « Ce n’est pas l’univers qui est infini, c’est l’infini qui est l’univers. » rappelle l’artiste.
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