A voir jusqu’au 23 septembre 2018
Les artistes suisses Gerda Steiner & Jörg Lenzlinger
compose un labyrinthe en trois parties truffé de
cabinets de curiosités. Plus de vingt-cinq années de
pratique artistique se déploient et tournoient dans
l’espace du Musée Tinguely, qui se métamorphose en
laboratoire étrange d’une biodiversité aussi naturelle
qu’artificielle. Le public est invité à prendre part à toutes
ces transformations, et, par endroits, à en devenir un sujet actif.
C’est une exposition ludique, d’où vous ne pouvez sortir
qu’enchanté.
Depuis 1997, date à laquelle ils commencent leur collaboration,
Gerda Steiner & Jörg Lenzlinger créent ensemble des
installations in situ, souvent immersives, sous forme d’univers
luxuriants où se côtoient autant d’éléments naturels que d’objets
manufacturés. Transformation, prolifération et cristallisation
fonctionnent comme des composantes à part entière de l’œuvre,
qui se métamorphose au fur et à mesure des réactions chimiques
ou organiques qui se développent au cœur de leurs créations.
Le spectateur est régulièrement invité à traverser un univers
fantastique formé de paysages bariolés ou encore à participer
à des expériences qui éveillent les sens et l’esprit.
Leurs installations, aussi enchanteresses qu’inquiétantes,
tissent des liens entre des mondes antagonistes et proposent
d’observer l’étrange laboratoire du vivant, sa biodiversité,
désormais aussi naturelle qu’artificielle, et de s’interroger
sur les notions de fertilité et de croissance.
Pour cette première exposition revisitant vingt-cinq années
de pratique et englobant toute leur carrière, le duo d’artistes
a choisi de façonner l’espace d’exposition à la manière d’un
labyrinthe spatio-temporel. Dès l’entrée, les visiteurs sont
invités à choisir entre trois portes, celles du passé, du présent
ou du futur. Chaque porte ouvre sur un chapitre différent de
l’univers des artistes, qui, à son tour, s’ouvre sur une
multitude de voyages potentiels, répartis en différentes
stations. C’est ainsi que le public pourra traverser une forêt
de branches, s’arrêter dans un salon de massage, faire un tour
en balançoire, verser une larme pour des besoins
esthético-scientifiques, converser avec des professionnels
de la beauté, exercer ses facultés physiques sur des machines
de fitness ou encore mesurer son endurance psychique face
à la puissance tellurique d’un météorite.
Si le visiteur s’aventure dans le passé, il sera amené à voyager
au cœur des créations les plus anciennes du duo. Cet univers
très ordonné s’apparente à une exposition des plus classiques,
avec une présentation d’objets, de vidéos et d’œuvres bidimensionnelles
qui suit les règles établies de la présentation muséale.
Après avoir traversé une cabane de jardinier remplie d’outils
en tout genre, le spectateur accède aux différentes collections
que les artistes ont accumulées au fil des années et notamment
leurs collections de graines
(Schlafende Samen, 2002, Samensammlung aus Mali, 2003).
La graine, embryon de toutes choses, représente aussi bien la fertilité
– cette énergie première dont découle toute forme de vie –
que les racines, celles qui nous relient à notre propre passé c
omme à l’histoire de l’humanité.
Plus loin, la vidéo The Logic of Beauty (2010) entraîne dans un
flux d’images hypnotiques dont les couleurs et dessins dégagent
une séduction magnétique, comme si les artistes avaient capturé
ici l’essence de la beauté.
La beauté est encore au rendez-vous dans les salles suivantes,
celles qui s’ouvrent derrière la porte du présent.
Chaque espace se présente comme une mini-fiction en trois
dimensions, avec son décor, ses acteurs, ses accessoires et
son atmosphère. Au spectateur revient le rôle principal,
celui d’activer l’ensemble, de lui donner vie. Dans chaque salle,
une expérience interactive autour de la notion de beauté
est proposée, tout à la fois scientifique, humoristique et
philosophique. Ici, il faut laisser sa timidité au vestiaire
et se laisser guider par les différents intervenants –
un-e secrétaire, un-e laborantin-e, un-e collecteur de
larmes et un-e personal trainer. Il s’agira, successivement,
d’observer des sécrétions oculaires au microscope et
s’émerveiller devant leurs minuscules circonvolutions,
de se coucher sous une lourde pierre suspendue, de faire
des exercices de concentration ou encore de se reposer
dans le calme.
Plus loin, c’est le futur, avec ses incertitudes, son chaos, son inachèvement.
Les dernières salles sont présidées par une majestueuse forêt buissonneuse
et foisonnante. Un réseau aérien de ramifications fleuries entremêle le
végétal et le factice pour évoquer le fourmillement du vivant.
Labyrinthes aériens et multicolores, les formes qui dansent dans
l’espace agissent comme des déclencheurs de rêves et d’imaginaire.
Cette forêt suspendue s’ouvre sur une salle de fitness dont les machines
sont malicieusement revisitées par les deux artistes, afin que l’exercice
du corps puisse aussi réjouir l’esprit.
Avec Too early to panic, c’est une invitation au voyage que nous
lance Gerda Steiner & Jörg Lenzlinger. Un voyage qui nous enjoint
à regarder le monde avec un émerveillement renouvelé.
Steiner & Lenzlinger vivent et travaillent à Langenbruck, dans le
canton de Bâle-Campagne. Ils ont participé à Expo02 avec une gigantesque Heimatmaschine génératrice de plantes et de cristaux artificiels.
Lors de la Biennale de Venise en 2003, où ils ont représenté la Suisse,
ils créent une installation suspendue, cristalline et légère, flottant
dans l’espace de l’église San Stae. Leurs installations ont également été
montrées au Museum Kunst Palast de Düsseldorf, au Musée du XXIe
siècle à Kanazawa, dans la séculaire Stiftsbibliothek de Saint-Gall
ou encore à la Biennale de Séville, à la Biennale de Moscou,
et plus récemment au Kunsthaus Bregenz.
En 2012, ils reçoivent le Kulturpreis Basel.
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