Installationsansicht: Installation shot by John Schiff. Title: Marcel Duchamp, Exhibition design for First Papers of Surrealism, 1942.
On y joue au Musée Tinguely jusqu'au 9 mars 2025 Commissariat d’exposition : Mario Schulze et Sarine Waltenspül, co-commissariat Andres Pardey
L’exposition, décrite comme une « Une exposition de recherche » entre ficelles ou cordes !
Tendues entre huit doigts et deux pouces, parfois entre les orteils et les dents, les ficelles dessinent des figures. Les jeux de ficelle sont capables de multiples choses : ils racontent des histoires, sont un passe-temps, rendent visible l’ineffable et relient les gens. Technique culturelle parmi les plus anciennes de l’humanité, ils ont inspiré artistes, performeur.euses, ethnologues et théoricien.ne.s. En tant que pratique esthétique, artefact muséal et concept non-occidental, les jeux de ficelle constituent un objet de réflexion pour la science et l’art.
Maureen Lander, String Games
Maya Deren, pionnière du cinéma expérimental, a ainsi filmé Marcel Duchamp, après son émigration aux États-Unis, en train d’exécuter un jeu de ficelle, juste après que celui-ci a épuisé des kilomètres de ficelle pour concevoir son exposition surréaliste. Pour sa part, Maureen Lander a décolonisé la Boîte-en-valise de Duchamp en remplissant son célèbre petit musée-valise de photographies de jeux de ficelle māori. Dans un de ses Screen Tests, Andy Warhol a filmé Harry Smith, à la frontière entre folklore et art, exécutant un jeu de ficelle. Enfin,David Ket’acik Nicolai, ingénieur originaire de l’Alaska, réalise des figures que lui a enseignées sa grand-mère sur TikTok, sous le nom de Yu’pik Dave.
ont été captivés par les jeux de fils au sens propre du terme. Dans les archives cinématographiques de Göttingen, ils ont découvert sept films consacrés à ces jeux. C’est le début d’un long voyage de recherche du duo, dont les résultats intermédiaires sont désormais présentés au Musée Tinguely en collaboration avec le directeur adjoint du musée,Andres Pardey.
En ethnologie, les figures de ficelle ont longtemps été considérées comme un jeu universel. Pratique corporelle qu’on rencontre à de nombreux endroits du monde, elle a nourri l’imaginaire épistémologique d’une comparaison culturelle qui devait permettre de renseigner sur des routes migratoires ou sur l’humanité universelle. Dès 1888, Franz Boas décrivit les figures de ficelle des Kwakiutl. Par la suite, des ethnologues (féminines souvent) européo-américain.e.s ‘collectèrent’ des figures de ficelle puis les montèrent sur des feuilles de carton, des dessins ou des photographies.
Cependant, de tels supports ne permettent pas de comprendre l’élaboration de ces figures, aussi on élabora des systèmes de notation complexes. Les ethnologues ont également réalisé des films de joueur.euse.s de ficelle afin de rendre justice au caractère processuel, performatif et matériel du jeu de ficelle. Certains de ces films se trouvent dans l’Encyclopaedia Cinematographica, dont l’objectif consistait à collecter le monde sur celluloïd et à le préserver au sens d’une ethnologie de sauvetage pour la postérité.
Siena Miḻkiḻa Stubbs, Miyapunu (turtle), 2019, soft ground etching. Courtesy of the Artist.
Ces dernières années, le jeu de ficelle a gagné en importance dans le domaine de la théorie de la culture. Donna Haraway met en avant ses string figures comme méthode pour une pensée et une collaboration interdisciplinaire et interespèces. Contrairement à la métaphore du réseau, les string figures d’Haraway proposent une façon ludique de penser, axée sur le processus, incarnée et tournée vers la responsabilité mutuelle.
Étude Stringer : Noeud Magique de la Tour Eiffel Teufelshoerner (2024)
Copie carbone au fusain sur lin, avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Belmacz, application IA de Londres qui crée une sculpture numérique en fil en réponse à une déclaration orale.
« Stringer est une IA qui ne donne pas de réponses, mais qui vous tend la main et vous invite dans un autre endroit, un endroit que vous ne connaissez pas. Elle entre en dialogue avec vous et vous implique dans la construction du sens. Stringer est une IA qui engage le corps à travers une médiation prudente et lente et représente un antidote à de nombreuses théories actuelles de notre époque, caractérisées par un sentiment d’immédiateté et une peur générale de l’intelligence artificielle. Il ne s’agit pas d’un retour conservateur ou réactionnaire à l’intelligence artificielle. d’anciennes valeurs, mais comme une manière d’aborder différemment le présent. »
L’exposition réunit art, anthropologie et théorie. Elle rassemble des individus de différentes régions du monde et explore des façons de jouer ensemble sur les ruines de notre histoire.
Informations pratiques
Musée Tinguely Paul Sacher-Anlage 1 | Postfach | CH-4002 Basel | T. +41 61 681 93 20 ouvert du mardi au dimanche
Partager la publication "Jeux de Ficelle / String Figures"
La petite souris qui murmure dans un coin du musée, c’est lui. La présence d’une souris dans une exposition, la tête passée dans un trou au bas d’un mur, surprend. Encore plus lorsqu’elle s’adresse à nous avec une voix enfantine, celle de la fille de l’artiste. Cette petite souris animatronique bégayante tente en vain de s’exprimer, dans un monologue plutôt confus, puis abandonne et avoue ne pas savoir quoi dire. Comme souvent dans l’œuvre de Ryan Gander, Ever After: A Trilogy (I… I… I…) se caractérise par la malice et la surprise, une œuvre dont la légèreté la rend si accessible. Equipée d’une batterie, prisonnière de sa boucle programmatique, cette souris arrête le visiteur dans son élan, le déroute et crée une illusion. Forcée d’enchaîner cycle sur cycle, jusqu’à l’épuisement, elle nous fait réfléchir et sourire sur notre condition.
« Si je savais ce que signifie cette souris, ce ne serait pas une très bonne œuvre d’art » Ryan Gander
Ses petits couinements expriment le besoin de laisser une trace de notre passage sur terre. Ils érigent un monument au langage, la seule chose qui distingue les êtres humains des animaux.
« Sa difficulté à s’exprimer illustre notre besoin de raconter des histoires et d’être entendus, même quand nous n’avons rien à dire, un besoin d’attention excessif dans un monde devenu vorace de contenus. » Ryan Gander
Un autoportrait dans une poubelle
J’ai manqué, ne pas l’apercevoir, ce serait dommage de rater le petit personnage, alter ego de l’artiste en bonnet rouge et marinière, allongée sur le sol, la tête sur une pauvre poubelle, de la Galerie Kamel Mennour
On peut encore se contempler dans le miroir ancien, dans la même galerie, Galerie Kamel Mennour, en marbre sculpté.
Biographie
Ryan GANDER — né en 1976 à Chester (Royaume-Uni). Vit et travaille à Londres (Royaume-Uni).
Ryan Gander est un artiste contemporain britannique. Artiste conceptuel, Ryan Gander cultive des pratiques très diversifiées : sculpture, installation, dispositif interactif, performance, vidéo, design, écriture… Maniant le trait d’esprit et l’humour (witty, pour le dire en anglais), son travail joue sur les détournements. Bauhaus Revisited (2003), par exemple, reprend le jeu d’échec conçu en 1924 par Josef Hartwig. De géométrie abstraite, les pièces de Josef Hartwig sont déjà difficiles à discerner les unes des autres. Compliquant la donne, Ryan Gander utilise une essence de bois strié (marron clair, marron foncé) pour réaliser toutes les pièces de son Bauhaus Revisited. Le bois de zebrano rend ainsi les camps opposés encore plus difficilement discernables, quoique chaque pièce soit unique. Actuellement, le travail de Ryan Gander est notamment représenté par laLisson Gallery (Londres, New York, Milan) et gb agency (Paris), notamment.
Ryan Gander a étudié les Arts Interactifs à la Manchester Metropolitan University (1996-1999). En 2000 il passe une année à la Jan van Eyck Academie de Maastricht, en tant que chercheur en art. Puis il effectue une résidence à l’Académie Royale des Beaux-Arts d’Amsterdam (2001-2002). En 2003, il reçoit le Prix de Rome de Sculpture. Conceptuel, le travail de Ryan Gander l’est en ce qu’il joue sur les narrations, à la manière d’un Marcel Duchamp. En 2009, son installation Matthew Young falls from the 1985 into a white room (Maybe this is that way it issupposed to happen), jongle ainsi avec les références. Elle s’appuie sur une nouvelle de J.G. Ballard, évoquant l’exposition « Sculpture de l’âge spatial », censée avoir eu lieu à la Serpentine Gallery de Londres. Quelques bris de verre (en sucre), quelques morceaux de bois rompu… Toute la saveur de l’œuvre réside dans les références imbriquées.
Installations, narrations, sculptures, dispositifs interactifs… Biennale de Venise et Documenta
En 2011, Ryan Gander participe à la Biennale de Venise et, en 2012, à la Documenta de Cassel. Pour cette dernière, il présente la pièce I Need Some Meaning I Can Memorise (The Invisible Pull). À savoir un léger courant d’air parcourant une grande pièce laissée vide. En 2013, le Frac Île-de-France (Le Plateau) présente « Make every show like it’s your last ». Soit la première exposition personnelle de Ryan Gander dans une institution parisienne. Avec la pièce Magnus Opus (2013), par exemple, consistant en une paire d’yeux, incrustée dans le mur et animée à l’aide de capteurs. Renversant ainsi les rôles spéculaires, entre les regardeurs et les regardés. Londres, Bâle, Paris, New York, Bologne, Amsterdam, Vienne, Zurich, Miami, Los Angeles, Tokyo, Varsovie, Mexico… Le travail de Ryan Gander fait l’objet d’expositions personnelles dans le monde entier.
Ryan Gander : artiste conceptuel, traits d’humour et références imbriquées
Art Basel
L’horloge
« Les horloges nous disent que notre obsession pour la mesure du temps est en contradiction avec la nature humaine. Je la trouve… assez malsaine.
Avant, les êtres humains vivaient dans un état de stase, pas de croissance. » L’accélération du capitalisme est inévitable et toujours plus difficile à discerner. Avant, nous n’avions pas vraiment besoin de mesurer le temps ou la richesse. Compter n’était pas si important… Les civilisations florissantes vivaient selon le temps, Kairos – une conception du temps basée sur « le bon moment ou l’occasion opportune », sur l’immédiateté – et pas selon le temps, Chronos, dicté par les horloges. Imaginez un monde où l’on mangerait quand on a faim, et non à l’heure des repas. «
Gander est un utilisateur de fauteuil roulant souffrant d’un handicap physique de longue durée, une grave maladie des os fragiles qui l’a hospitalisé pendant de longues périodes lorsqu’il était enfant. En 2006, son installation à l’ancienne bibliothèque de Whitechapel, Is this Guilt in you too?, où il a rempli l’espace d’obstacles, de détritus, d’impasses et d’illusions destinés à dérouter les visiteurs et à symboliser les difficultés inéquitables rencontrées par les personnes handicapées, faisait partie des expositions Adjustments du Arts Council England dont le but était « d’aborder la pensée transitionnelle sur le handicap, l’égalité et l’inclusion ». Son travail pour l’ exposition de la Biennale de Venise de 2011 comprenait une sculpture de la taille d’une figurine qui le représente alors qu’il tombe d’un fauteuil roulant.
Partager la publication "Ryan Gander : artiste conceptuel"
L’événement s'est tenu en français, avec traduction anglaise simultanée. Performance de l’artiste Michelangelo Pistoletto Discussion animée par Carolyn Christov-Bakargiev Direction artistique et curatoriale : Paul Olivennes Commissaire associée : Laura Salas Redondo
Présentée en collaboration avec : Magma Journal Éditorial : Paul Olivennes, Boris Bergmann Scénographie : Matière Noire Avec le soutien de Galleria Continua
Figure centrale de la création contemporaine depuis les années 1960 et de la naissance du mouvement « Arte Povera», Michelangelo Pistoletto est célèbre pour ses tableaux miroirs. Dans l’Auditorium de la Bourse de Commerce, l’artiste propose une performance inédite autour de l’œuvre Metrocubo d’infinito (Mètre cube d’infini), présentée dans l’exposition en Galerie 3 et qui appartient aux Oggetti in meno (Objets en moins), œuvres exposées dans son atelier entre décembre 1965 et janvier 1966.
Après l’exécution de la performance, Pistoletto salue le public, qui l’ovationne.
La performance est suivie d’un échange entre Michelangelo Pistoletto et Carolyn Christov-Bakargiev, commissaire de l’exposition.
Michelangelo Pistoletto (né en 1933 à Bielle) se fait remarquer dès le début des années 1960 par la série des Quadri specchianti (tableaux miroirs). En appliquant des images obtenues par report photographique sur des plaques d’acier inox polies, l’artiste inclut le spectateur et l’environnement dans l’œuvre d’art. À la fin de la décennie, les installations de Michelangelo Pistoletto en matériaux pauvres l’imposent comme une figure majeure de l’Arte Povera. Dans les années 1990, ses actions au sein du tissu urbain et social avec la Fondation Cittadellarte et l’université des Idées de Biella accentuent la dimension politique de son œuvre. En 2003, il reçoit le Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière à la Biennale de Venise.
Carolyn Christov-Bakargiev (née en 1957 aux Etats-Unis) est une historienne de l’art, commissaire d’exposition et directrice de musée. Spécialiste de l’Arte Povera, elle a publié une monographie de référence sur le courant (Londres, Phaidon Press, 1999) et des essais et études sur ses artistes. Carolyn Christov-Bakargiev a été commissaire pour la Capitale culturelle européenne d’Anvers (1993) et pour la Villa Médicis, Rome (1998-2000), conservatrice en chef au MoMA/P.S.1, New York (1999-2001), directrice artistique de la 13e édition de la dOCUMENTA à Kassel, directrice du Castello di Rivoli, Turin de 2016 à 2023. En 2019, elle a reçu le Prix Audrey Irmas pour l’excellence en conservation.
Magma est une plateforme artistique fondée par Paul Olivennes en 2022, réunissant chaque année dans une publication inédite des plasticiens, photographes, écrivains, réalisateurs, sculpteurs, architectes et designers du monde entier. Conçu comme un forum d’expression artistique destiné aux artistes, proposant des œuvres originales et des formats nouveaux chaque année, Magma intervient également auprès des institutions et des artistes dans la réalisation de collaborations, conférences, performances, expositions, et documentaires.
Biographie
Michelangelo Pistoletto (né en 1933 à Biella, au Piémont) est un artiste contemporain, peintre et sculpteur italien. Connu à partir des années 1960, il rejoint le mouvement Arte Povera (à partir de 1967). Michelangelo Pistoletto débute en 1947 en tant qu’apprenti dans l’atelier de son père, restaurateur de tableaux. Il collabore avec lui jusqu’en 1958 tout en fréquentant l’école de graphisme publicitaire dirigée par Armando Testa(it). À partir de ce moment-là naît son activité créative dans l’art de la peinture qui s’exprime aussi par les nombreux autoportraits sur des toiles préparées avec apprêt métallique et par la suite sur des surfaces en acier, lustré miroir.
En 1959 il participe à la Biennale di San Marino et l’année suivante il expose à la Galleria Galantayar de Turin.
Au début des années 1960, Pistoletto commence à réaliser des œuvres peintes figuratives et des autoportraits sur un fond monochrome métallique. Par la suite il combine peinture et photographie en utilisant des techniques de collage sur des arrière-plans réfléchissants. Finalement, il se convertit à l’impression photoréaliste de scènes sur des plaques d’acier polis pour rendre une haute finition en utilisant la sérigraphie, qui fond presque complètement l’observateur1.
La Galerie Ileana Sonnabend le met alors au contact du public international.
En 1965/1966, Pistoletto produit la série des œuvres Oggetti meno (« les objets en moins »), qui appartient à ses premières œuvres sculpturales.
En 1967, son travail remporte le premier prix de la Biennale de São Paulo et la même année il commence à mettre l’accent sur la performance, l’art vidéo, et le théâtre. Il fonde un groupe d’art action appelé « Groupe de Zoo » qui donne plusieurs spectacles entre 1968 et 1970 dans le studio, les bâtiments publics ou dans les rues de Turin ou d’autres grandes villes, l’objectif étant d’afficher l’unité de l’art et de la vie quotidienne2.
Il est exposé par la Simon Lee Gallery de Londres et le Luhring Augustine Gallery de New York. Il est également représenté par la Galerieofmarseille, Marseille, France. En 2005, il expose aux côtés d’Agnès Varda et d’Éric Sandillon.
En 2009, Salvatore Garau et Michelangelo Pistolettoont exposé ensemble à l’exposition Di tanto mare. Salvatore Garau – Michelangelo Pistoletto
Arte Povera
Michelangelo Pistoletto commence à peindre sur les miroirs en 1962, reliant la peinture avec les réalités sans cesse changeantes sources de son inspiration. À la fin des années 1960 il commence à réaliser des moulages à partir de chiffons en innovant dans l’« art statuaire classique » omniprésent en Italie. L’art d’utiliser les « matériaux pauvres » est l’un des aspects de la définition de l’Arte Povera (« Art pauvre »)…
En 1967 avec Muretto di stracci (« petit mur en chiffons »), Pistoletto réalise une tapisserie exotique, un opulent mélange de briques et de chutes de tissu. Pistoletto, qui a commencé sous l’influence américaine du « post-Pop art » et du photoréalisme est bientôt répertorié dans les catalogues par les galeristes et critiques comme un important représentant de la tendance nouvelle de l’Arte Povera italienne.
Sur toile de fond des émeutes estudiantines de 1968, Pistoletto retire sa participation à la Biennale de Venise. Dans les années suivantes, il compose avec les idées conceptuelles qu’il présente dans le livre L’uomo nero « L’homme noir » (1970).
En 1974, il se retire presque complètement de la scène artistique : il devient moniteur de ski et passe le plus clair de son temps dans les montagnes de San Sicario. (allusion lors de sa performance par
À la fin des années 1970, il produit des sculptures, têtes et torses à l’aide de polyuréthane et de marbre qui lui procurent des commandes d’artefacts antiques ; il projette aussi des objets pour les décors théâtraux aux États-Unis (Athens, Atlanta et San Francisco).
Au début des années 1980, il présente des œuvres de théâtre, comme Anno Uno (« An un ») (1981) au Teatro Quirino à Rome.
Depuis 1990, Pistoletto vit et travaille à Turin.
Cittadellarte – Fondazione Pistoletto
En 1994, Michelangelo Pistoletto a proclamé son programme Progetto Arte, dont l’objectif était l’unification économique créatrice et sociale de toutes les parties de l’existence humaine ; dans un sens plus précis, la combinaison systématique de toutes les réalisations et les connaissances de la civilisation des aspects de l’art (fashion, théâtre, design…).
En 1996, il fonde la ville d’art Cittadellarte – Fondazione Pistoletto dans une usine de textile désaffectée près de Biella, comme centre et « laboratoire » soutenant des recherches sur les ressources créatives et produisant des possibilités et des idées innovantes.
La Cittadellarte est divisée en différentes Uffici (bureaux) : travail, éducation, communication, art, nutrition, politique, spiritualité et économie. Bien qu’il soit conçu comme un système fermé, la transparence vers le monde extérieur est un aspect important de la Cittadellarte6.
Art Basel Paris 2024
Je le retrouve dans sa galerie face, dans et devant son miroir
A suivre
Partager la publication "Metrocubo d’infinito, avec Michelangelo Pistoletto"
Du 28.9.2024 – 2.2.2025, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Commissaire : Eva Reifert
Jeux de pouvoir
L’artiste luso-britannique Paula Rego (1935–2022) compte parmi les peintres figuratives les plus importantes des dernières décennies. Militante, féministe et auteure de tableaux tour à tour exubérants et inquiétants, son influence se fait sentir dans le milieu artistique de son pays natal, le Portugal, et dans son pays d’adoption, la Grande-Bretagne. Lorsqu’elle décède en 2022, elle laisse derrière elle une oeuvre foisonnante qui témoigne de son intérêt pour l’étude des « jeux de pouvoir et hiérarchies » qu’elle a confié être son thème de prédilection.
Self Portrait in Red, vers 1966 Huile, crayon de couleur et papier sur toile, collage, 152 × 152 cm Museu Nacional de Arte Contemporânea, Lisbonne
Ce profond intérêt de l’artiste pour les dynamiques de pouvoir constitue le leitmotiv de l’exposition monographique d’envergure Paula Rego. Jeux de pouvoir au Kunstmuseum Basel. Il s’agit de la première présentation muséale de l’oeuvre de Rego dans l’espace germanophone et de la première grande exposition monographique depuis sa mort. S’appuyant sur quelque 120 peintures et pastels, ainsi que plusieurs poupées, carreaux et documents, cette exposition d’une grande puissance visuelle invite le public à découvrir l’univers inoubliable de Paula Rego et vise à approfondir la compréhension de cette artiste majeure.
Organisée de manière thématique, l’exposition rassemble des oeuvres emblématiques de plusieurs décennies, y compris des travaux de Rego traitant de la dictature de Salazar. D’autres motifs centraux de son oeuvre concernent son engagement contre les lois restreignant l’avortement dans son pays natal et contre la participation britannique à la guerre en Irak. Dans l’ensemble de son oeuvre, Rego remet en question les hiérarchies habituelles et montre des femmes endossant différents rôles. L’exposition présente ses spectaculaires pastels grand format inspirés à la fois de récits littéraires et de films Disney, ainsi que des exemples de ses travaux graphiques d’une brillante virtuosité technique.
Les thèmes essentiels
Autoportraits
Au cours de sa carrière, Paula Rego ne réalisa que quelques autoportraits. La plupart jouent sur la confusion : un portrait de rôle dans une posture résolument masculine, un reflet dans un miroir qui ne montre pas Rego mais son modèle, ou une figure aux yeux blessés dans un tourbillon de formes décomposées. Le fait que l’artiste se montre directement reste l’exception. Du point de vue stylistique, les autoportraits de Rego témoignent de la grande capacité de transformation avec laquelle elle donna toujours de nouvelles orientations à son art au fil du temps.
Constellation familiale
La famille – pour Paula Rego, cela renvoyait d’abord à la séparation de son père et de sa mère, qui vivaient temporairement au Royaume-Uni, tandis qu’elle restait chez ses grands-parents à Lisbonne. Plus tard, ses parents lui permirent d’étudier à Londres à la prestigieuse Slade School of Art. Rego sépara toujours sa création artistique de sa vie d’épouse et de mère de trois enfants. Néanmoins, les membres de sa famille apparaissent régulièrement comme modèles dans ses oeuvres. Dans The Family, Rego donna à la constellation de personnages une dimension psychologique inquiétante. Dans The Dance, en revanche, le changement des relations et de l ’ « être pour soi » se révèle comme un rythme de vie.
Pouvoir d’État
Les thèmes historiques de Paula Rego montrent à quel point l’histoire et la mentalité de son propre pays d’origine peuvent avoir un impact. Elle se pencha par exemple sur un régicide ou sur la dictature d’António de Oliveira Salazar, soutenue par l’Église et l’armée. Dans une immense tapisserie, des expériences traumatisantes passées et présentes du pays se superposent : alors que le Portugal était en guerre dans les années 1960 contre les mouvements d’indépendance de ses dernières colonies sur le continent africain, Rego rappela la défaite écrasante contre les troupes marocaines qui mit fin à l’expansionnisme portugais en 1578.
Le régicide
Lutte des sexes
La relation entre la femme et l’homme dans l’oeuvre de Paula Rego montre également que son univers artistique n’est pas un monde idéal. La dynamique entre les sexes, jusque dans l’érotisme, est marquée par le pouvoir et la violence. Les figures animales représentent des adversaires ou des forces pulsionnelles et des besoins physiques. En abordant le thème de l’infidélité ou des soins apportés à son mari malade, Rego reprit certes ses propres expériences. La recherche de la domination, la vulnérabilité et l’affirmation de soi apparaissent cependant dans son art comme le sort de la condition humaine.
Héroïnes
La confrontation de Paula Rego avec les contes de fées dans les années 1970 marqua un tournant dans son art. Des poupées en tissu comme celle de la Princesse au petit pois et les images du conte portugais de la discrète héroïne Brancaflor marquent le début de sa quête perpétuelle d’histoires captivantes. Rego était fascinée par la constatation du psychanalyste suisse Carl Gustav Jung selon laquelle les grands récits du monde entier concrétisent des modèles psychiques fondamentaux similaires sous la forme de héros, de magiciens ou de sages.
Jeux de rôle
Les histoires accrocheuses et imagées que nous rencontrons dans notre enfance créent et renforcent dans notre tête des représentations idéales et des stéréotypes de genre. C’est justement ce qui se présente de manière ludique, comme les contes de fées ou les films Disney, qui déploie une influence d’autant plus grande. Paula Rego démasque les clichés avec humour et ironie, mais sa profonde affection pour ces histoires reste perceptible. Elle montre une Blanche-Neige assise seule sur des peaux de bêtes au lieu de partir sur un cheval blanc avec le prince charmant ; sa Fée bleue ne gronde pas Pinocchio gentiment, mais s’approche de l’enfant de manière menaçante ; et les ballerines, parodiées par Disney en autruches ridicules, sont transformées par Rego en femmes pragmatiques d’âge moyen.
Blanche neige
Inconscient
Paula Rego explora largement sa propre vie intérieure dans le cadre d’une psychanalyse. Elle s’ouvrit à des domaines de l’irrationnel et du refoulé qui, pour beaucoup, ne sont accessibles que dans les rêves. Dans ses oeuvres, elle exprima les processus psychiques nébuleux qui déterminent des histoires comme Métamorphose de Franz Kafka ou Jane Eyre de Charlotte Brontë. Ce qui l’intéressait dans Peter Pan, c’est le refus de grandir, tandis que son triptyque The Pillowman traite les abîmes psychologiques et les excès d’une scène d’interrogatoire littéraire grotesque.
Ron Mueck, Pinocchio, 1996
Rébellion
À certains moments, Paula Rego utilisa son art comme un outil de résistance politique. Elle dénonça la pratique encore très répandue des mutilations génitales féminines et créa des séries de pastels et de gravures percutantes dans lesquelles elle mit en évidence les conséquences dangereuses des avortements illégaux pour les femmes. Ces oeuvres furent créées après le rejet par référendum d’un projet de loi plus libéral sur l’interruption volontaires de grossesse au Portugal à la fin des années 1990. Elles contribuèrent à changer l’opinion publique jusqu’au prochain référendum. Quand, en 2003, la participation britannique à la guerre en Irak donna lieu à Londres aux plus grandes manifestations anti-guerre depuis des décennies, Rego protesta aussi – avec une oeuvre d’une grande intensité activiste.
La fascination exercée par les oeuvres de Paula Rego résulte de sa puissance imaginative empreinte de noirceur et d’inquiétante étrangeté.
Informations pratiques
BÂTIMENT PRINCIPAL ET BÂTIMENT NOUVEAU
Fermé le lundi
Mar 10h00 – 18h00
Mercredi de 10h à 20h
Jeu-dim 10h-18h
Accès
Depuis la gare SBB tram n° 2 arrêt Kunstmuseum
Partager la publication "Paula Rego – jeux de pouvoir"
À partir de septembre 2024, la Fondation Beyeler à Riehen/Bâle présente la première rétrospective consacrée à Henri Matisseen Suisse et dans l’espace germanophone depuis près de deux décennies. L’exposition réunit plus de 70 oeuvres majeures en provenance de prestigieux musées européens et américains ainsi que de collections privées, mettant en lumière l’évolution et la diversité du travail précurseur de l’artiste. L’exposition prend pour point de départ le célèbre poème : L’invitation au voyage de Charles Baudelaire, qui contient de nombreux thèmes clé également présents dans les oeuvres de Matisse. S’inscrivant dans une lignée d’expositions hors pair telles « Paul Gauguin » (2015), « Monet » (2017) et « Le jeune Picasso – Périodes bleue et rose » (2019), « Matisse – Invitation au voyage » sera à voir à la Fondation Beyeler du 22 septembre 2024 au 26 janvier 2025. Commissariat Raphaël Bouvier
Henri Matisse (1869–1954) compte parmi les artistes les plus célèbres de l’art moderne. Son oeuvre précurseur a profondément influencé des générations d’artistes, de ses contemporains à nos jours. En libérant la couleur du motif et en simplifiant les formes, il a redéfini la peinture et apporté à l’art une légèreté nouvelle. Matisse a également innové dans le domaine de la sculpture et, avec les papiers découpés de son oeuvre tardif, il a développé une pratique unique à la croisée de la peinture, du dessin et de la sculpture.
« Ce que je poursuis par-dessus tout, c’est l’expression » Henri Matisse
Luxe Calme et volupté, centre Pompidou
L’exposition couvre toutes les périodes du travail de l’artiste. C’est un pur bonheur de se laisser guider dans l’exposition, en suivant la notice de salle fournie en diverses langues. Elle commence avec les oeuvres de ses débuts produites vers 1900, passant par les toiles révolutionnaires du fauvisme et les travaux expérimentaux des années 1910, les tableaux sensuels de la période niçoise et des années 1930, pour culminer enfin dans les légendaires papiers découpés de l’oeuvre tardif des années 1940 et 1950. Placée sous le commissariat de Raphaël Bouvier, l’exposition réunit des oeuvres emblématiques et d’autres rarement exposées, en provenance de musées et de collections particulières de premier plan, dont le Baltimore Museum of Art ; le Centre Pompidou, Paris ; le K20, Düsseldorf ; le Kimbell Art Museum, Fort Worth ; le Museum of Modern Art, New York ; la National Gallery, Washington ; et le San Francisco Museum of Modern Art.
« En dessinant aux ciseaux dans des feuilles de papier colorées à l’avance, d’un même geste pour associer la ligne à la couleur, le contour à la surface. » Henri Matisse en conversation avec André Verdet, 1951
L’exposition présente des chefs-d’oeuvre tels La desserte (1896/1897), Luxe, calme et volupté (1904), La fenêtre ouverte, Collioure (1905), Le luxe I (1907), Baigneuses à la tortue (1907/1908), Poissons rouges et sculpture (1912), Figure décorative sur fond ornemental (1925/1926), Grand nu couché (Nu rose) (1935), L’Asie (1946), Intérieur au rideau égyptien (1948) et Nu bleu I (1952). Cette profusion de tableaux, de sculptures et de papiers découpés de tout premier plan donne à voir l’évolution et la richesse de l’oeuvre singulier de Matisse.
Baigneuses à la Tortue
Les voyages
« J’ai souvent fait des voyages en imagination et comme le but principal de mon travail est la clarté de la lumière, je me suis demandé : Comment peut-elle être de l’autre côté de l’hémisphère? » Henri Matisse à propos de son voyage dans les mers du Sud
L’exposition prend pour point de départ le célèbre poème L’invitation au voyage de Charles Baudelaire (1821–1867), auquel Matisse s’est référé à de nombreuses reprises. Les termes de « luxe, calme et volupté » qui y apparaissent comme motifs poétiques se retrouvent chez Matisse en tant que fils conducteurs et quintessence de son art. Suivant le poème de Baudelaire, l’exposition à la Fondation Beyeler invite donc à un voyage au fil de l’oeuvre de Matisse, dans lequel le voyage joue également un rôle important. C’est la quête de la lumière idéale qui incitait Henri Matisse à entreprendre ses nombreux voyages. Ayant grandi dans le nord de la France, il la trouve dans un premier temps dans le sud méditerranéen du pays, poursuit ensuite ses explorations en Italie, en Espagne et en Afrique du Nord, puis lors d’une traversée des États-Unis débutée à New York, et enfin dans le Pacifique Sud. Au cours de ses nombreux voyages en Europe et au-delà, qui le mènent également en Russie, il fait la découverte d’environnements naturels, de cultures et de traditions picturales qu’il incorpore à son propre travail. Le voyage et l’expérience multiple de la lumière qu’il entraîne ont été des moteurs décisifs de l’évolution artistique de Matisse, des oeuvres fauvistes révolutionnaires de ses débuts aux emblématiques papiers découpés de son oeuvre tardive.
L’expérience du voyage et l’atelier comme lieu de travail forment ainsi les deux pôles entre lesquels se déploie l’oeuvre de Matisse. La vie et l’oeuvre de l’artiste sont rythmés et influencés par un va-et-vient continu entre les déplacements en France et à l’étranger et l’investissement de différents lieux de travail. Les expériences, les souvenirs et les objets collectés pendant ses voyages constituent des thèmes aussi centraux de ses oeuvres que l’atelier comme lieu de production artistique. La fenêtre ouverte est un motif récurrent dans l’oeuvre de Matisse. En tant que lieu d’articulation entre l’intérieur et l’extérieur, entre un ici à portée de main et un là-bas lointain, elle exprime la coexistence du chez soi et du voyage. Dans sa dimension symbolique, la fenêtre ouverte constitue tout particulièrement une invitation au voyage.
Fenêtre à Collioure
« Quand j’ai compris que chaque matin je reverrais cette lumière, je ne pouvais croire à mon bonheur. » Henri Matisse à propos de Nice
Dans un espace multimédia conçu spécifiquement pour l’exposition, les voyages de Matisse sont donnés à voir et à vivre par le biais de photographies historiques animées et de panneaux muraux. Des photographies et des films offrent par ailleurs des aperçus de ses ateliers et de son processus de création.
Un catalogue d’exposition richement illustré, publié sous la direction de Raphaël Bouvier pour la Fondation Beyeler et mis en page par Bonbon, Zurich, paraît au Hatje Cantz Verlag, Berlin. De nombreux auteurs et autrices ont contribué à la portée scientifique du catalogue, en premier lieu Larissa Dätwyler, Robert Kopp et Griselda Pollock, ainsi qu’Alix Agret, Dita Amory, Patrice Deparpe, John Elderfield, Claudine Grammont, Jodi Hauptman, Ellen McBreen et Anne Théry.
Héritière du surréalisme, célébrée depuis plus de quarante pour ces performances et ses sculptures corporelles, l’artiste allemande Rebecca Horn est décédé à l’âge de 80 ans. En 2019, une double exposition au Centre Pompidou-Metz et au musée Tinguely de Bâle rendait hommage à son œuvre protéiforme, à la fois violente et poétique. J’avais eu la chance de voir les 2 expositions, dont vous pouvez retrouver un résumé sur mon blog.
« Mes performances ont commencé par des sculptures corporelles. Tous les mouvements de départ étaient les mouvements de mon corps et de ses extensions. »
Rebecca Horn
Elle avait fait du corps la matière première de son art. L’artiste allemande, performeuse et plasticienne Rebecca Horn, née en 1944, est décédée le 6 septembre à l’âge de 80 ans dans sa résidence de Bad König, en Allemagne, où elle avait installé sa fondation. Profondément influencée par le dadaïsme et le surréalisme, l’univers du cinéma et des automates, elle était célébrée internationalement depuis plus de quarante ans pour ses performances et ses sculptures hybrides où le vivant et l’inerte, le corps et la machine, se mêlent en de singulières métamorphoses.
Partager la publication "Hommage à l’artiste Rebecca Horn"
DERNIERS JOURS ! Jusqu'au 15.9.2024, Kunstmuseum Basel | Bâtiment principal Commissaire de l'exposition : Dr Bodo Brinkmann
La Fondation Emanuel Hoffmann a le plaisir d’annoncer que les fresques de l’artiste Anri Sala (*1974, Tirana, Albanie), récemment acquises pour la collection, sont présentées au département des maîtres anciens du Kunstmuseum de Bâle du 30 avril au 15 septembre 2024.
Sont exposées six fresques réalisées en 2023. Sala y fait revivre l’art historique de la peinture en plein air, en relation avec des réflexions sur la temporalité et la narration, thèmes essentiels de son œuvre. La technique de la fresque a été perfectionnée par les maîtres italiens de la Renaissance, notamment Ghirlandaio, Raphaël et Michel-Ange. Anri Sala s’est intéressé à la peinture à fresque alors qu’il était encore étudiant à Tirana, sa ville natale. Il a toujours été fasciné par le temps limité de cette technique, en particulier en ce qui concerne son travail sur des supports temporels. Une fresque est réalisée en sections appelées « giornata », car chaque section doit être réalisée en une seule journée, ce qui nécessite une planification extrêmement minutieuse. Le travail se compose de deux étapes principales : d’abord, l’œuvre est dessinée en contours sur une couche de plâtre humide appelée « arriccio », puis une autre fine couche de plâtre, l’« intonaco », est appliquée pour la peinture elle-même. Les pigments ne peuvent être appliqués que tant que le plâtre est encore humide, ce qui permet aux pigments et au plâtre de se lier pendant le processus de séchage. Il n’est plus possible de modifier la surface une fois qu’elle est sèche.
Deux des six fresques exposées au Kunstmuseum appartiennent à la série Legenda Aurea Inversa . Le titre de Sala fait référence à une œuvre aux proportions gigantesques : La Légende de la Vraie Croix, un cycle du milieu du XVe siècle peint par Piero della Francesca dans la basilique San Francesco d’Arezzo. Cette importante fresque lui sert de point de départ : il sélectionne des sections, les fixe comme avec le viseur d’un appareil photo, puis les modifie considérablement. Dans les deux tableaux, il inverse les couleurs comme un négatif photographique. « Je prépare à l’avance ce qu’aurait été le négatif de l’image si la fresque de Piero della Francesca avait été une photographie en couleur. »
Les quatre fresques restantes sont issues de la série Surface to Air . La superposition typique de la peinture à fresque y est particulièrement visible. Les œuvres sont basées sur des photographies de nuages que Sala a prises depuis un avion. Il précise l’ambiance lumineuse en indiquant l’heure de la journée dans des sous-titres tels que Matin ou Après-midi .
Sala a intégré dans les deux séries des éléments en marbre, qui dépassent du plan pictural ou s’y intègrent parfaitement. Leur fonction est double : d’une part, ils prolongent le tableau et, d’autre part, ils constituent une charnière entre différentes époques dans la mesure où ils complètent des parties manquantes, comme celles que l’on trouve dans les peintures murales historiques. « Soudain, il y a cette dimension du temps qui m’intéresse beaucoup, lorsque les fragments de marbre insérés représentent ce qui aurait pu être les parties manquantes d’une ancienne fresque. »
Les fresques pourraient être interprétées comme un prolongement des réflexions d’Anri Sala sur la temporalité et la narration. Ces deux thèmes sont au cœur de ces nouvelles œuvres ainsi que de ses installations vidéo et sonores à grande échelle.
La Fondation Emanuel Hoffmann s’intéresse à l’art d’Anri Sala depuis sa première acquisition en 2004. Les fresques des séries Legenda Aurea Inversa et Surface to Air ont été acquises en 2023. Outre les six fresques, la Fondation conserve quatre dessins et trois grandes installations vidéo et sonores.
Biographie
Anri Sala (né en 1974, Tirana, Albanie) s’est jusqu’à présent surtout distingué dans les domaines de la vidéo, de la photographie et de l’installation. Dans nombre de ses oeuvres, les perturbations et les ruptures dans le langage, le temps et la musique sont des moyens d’interroger les histoires et les compositions. Basés sur le temps, ses récits se développent à partir d’un réseau dense de relations entre l’image, l’espace et le son. Après des études à l’Académie nationale des arts de Tirana, Sala a étudié l’art vidéo à l’École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris de 1996 à 1998 et la réalisation de films au Fresnoy – Studio national des arts contemporains à Tourcoing, dans le nord de la France, de 1998 à 2000. Sala fait partie de la génération d’artistes qui ont vécu l’effondrement du communisme et qui thématisent leur expérience de ce changement politique et culturel dans leurs travaux. Avec son travail vidéo « Intervista » (1998) dans le cadre de l’exposition « Voilà, le monde dans la tête » au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, l’artiste a attiré l’attention du monde entier. En 2004, les Deichtorhallen Hamburg et le MAMVP lui ont consacré l’exposition monographique « Entre chien et loup ». Depuis, son travail a été présenté dans des expositions solo à la Serpentine Gallery, Londres (2011) ; Centre Pompidou, Paris (2012) ; Haus der Kunst, Munich (2014) ; New Museum, New York (2016) ; Museo Tamayo, Mexico City (2017) ; Castello di Rivoli Museo d’Arte Contemporanea, Turin (2019) ; Mudam, Luxembourg (2019) ; Centro Botìn, Santander (2019) ; Buffalo Bayou Park Cistern, Houston (2021) ; Kunsthaus Bregenz (2021) ou Bourse de Commerce, Paris (2023). En 2001, Sala a reçu le Young Artist Prize de la Biennale de Venise, où il a représenté la France en 2013.En 2014, il a reçu le Vincent van Gogh Biennial Award for Contemporary Art in Europe. En 2023, les six fresques exposées ici sont entrées dans la collection de la Fondation Emanuel Hoffmann de Bâle. Depuis 2004, celle-ci s’intéresse au travail d’Anri Sala et procède à des achats. En plus des fresques, elle possède quatre dessins et trois installations vidéo et sonores qui occupent toute une pièce. Sala vit et travaille à Berlin.
Informations pratiques
Lu fermé
Ma 10h00–18h00
Me 10h00–20h00
Je–Di 10h00–18h00
Depuis la gare SBB tram n° 2, arrêt Kuntzmuseum
Partager la publication "Anri Sala – Au milieu des maîtres anciens"
Cet été, l’artiste franco-suisse Julian Charrière transforme le grand magasin historique bâlois Globus, actuellement en cours de rénovation, avec une œuvre visant à repousser les limites et traverser les frontières. « Calls for Action » mêle art public et conservation de la nature en établissant une connexion directe entre la ville de Bâle et une forêt de nuage des Andes occidentales en Équateur, afin de mettre en lumière l’interconnectivité de notre planète ainsi que les enjeux environnementaux qui mettent en péril des écosystèmes essentiels. Un vaste écran est accroché à la façade du grand magasin, telle une fenêtre ouvrant en temps réel sur la biodiversité foisonnante d’une écorégion menacée. « Calls for Action » est le deuxième volet du « Globus Public Art Project » : pendant les trois années de rénovation de son grand magasin emblématique sur la place du marché de Bâle, Globus collabore avec la Fondation Beyeler pour inviter des artistes à concevoir et à réaliser de nouvelles œuvres in situ en dialogue avec le bâtiment et le public.
Partager la publication "Globus et la Fondation Beyeler annoncent un projet d’art public : Julian Charrière, «Cales for Action »"
Au musée Tinguely du 5 juin 2024 – 3 novembre 2024 L'exposition Mika Rottenberg. Antimatter Factory est une coopération entre le Musée Tinguely, la Kunst Haus de Vienne et le Lehmbruck Museum de Duisbourg. Des ateliers de recyclage et fabrication d'objets en plastique régénéré sont proposés régulièrement en coopération avec Precious Basel Plastic. Commissaire d'exposition : Roland Wetzel Assistante : Tabea Panizzi
Avec l’une des plus vastes expositions consacrées jusqu’ici à Mika Rottenberg (née en 1976), le Musée Tinguely présente une rétrospective de son œuvre protéiforme qui a déjà retenu l’attention internationale lors de la Biennale de Venise (2015), de Skulptur Projekte à Münster (2017) et de la Biennale d’Istanbul (2019). En provoquant la surprise et le rire, les vidéos de Mika Rottenberg reflètent des situations absurdes de la logique de production capitaliste. À travers d’enivrantes cascades de couleurs à la dimension picturale, ses œuvres éveillent chacun de nos sens et naviguent d’une région du monde et d’une dimension à l’autre avec une malicieuse facilité. L’exposition réunit d’importants travaux et installations vidéo réalisés entre 2003 et 2024, ainsi que son dernier long métrage REMOTE (2022). Une sculpture-fontaine conçue pour l’exposition est présentée pour la première fois dans le parc Solitude devant le musée, tout comme de récentes sculptures hybrides réalisées à partir de matériaux organiques et de plastique régénéré. Des travaux cinétiques, en partie interactifs, parachèvent de couvrir le spectre de son œuvre, qui est présentée à Bâle sous le titre Mika Rottenberg. Antimatter Factory, du S juin au 3 novembre 2024.
Référence du titre
Le titre de l’exposition au Musée Tinguely, Antimatter Factory, fait référence au nom d’un département de recherche du CERN à Genève qui mène des expériences sur l’antimatière. Durant sa résidence d’artiste, Mika Rottenberg y a trouvé l’inspiration pour son travail Spaghetti Blockchain (2019-2024), présenté pour la première fois sous forme d’installation vidéo à trois canaux dans le cadre de l’exposition. Celui-ci est consacré à l’échange d’énergies, d’objets et de personnes; il relie le microscopique au macroscopique et déplace la matière à travers l’espace et le temps comme par magie. Avec ce travail, le public plonge au cœur du cosmos artistique de Mika Rottenberg.
Une usine produisant de l’antimatière. Cette périphrase pourrait également désigner les sculptures-machines de Jean Tinguely qui créent de la poésie plutôt que de la matière exploitable et raillent ainsi la production industrielle de marchandises comme rapport d’exploitation entre l’homme et la machine. Le regard ironique de Mika Rottenberg poursuit cette même thématique en étudiant les relations surprenantes, pour ainsi dire souvent insolites, au sein de la production mondiale de biens. À travers son surréalisme social, l’artiste crée des paraboles de l’aliénation identifiée par Karl Marx dans la dépréciation du monde des hommes à travers la mise en valeur du monde des choses. Ce qui renforce la pertinence de la critique de Mika Rottenberg envers notre production capitaliste de marchandises c’est sa vitesse croissante, la libre circulation mondiale des marchandises (et non des personnes), ainsi que la dématérialisation qui découple les choses de leur représentation. L’artiste se penche également sur un autre thème en résultant : la question du pouvoir d’action des choses et des matières, ainsi que la spiritualité qui leur est inhérente.
Travaux et installations vidéo
La rétrospective présente une riche sélection des travaux et installations vidéo de Mika Rottenberg. Des bruits d’éternuements émanant d’un premier travail vidéo accueillent les visiteur.euse.s. Il s’agit de Sneezeréalisé en 2012. L’éternuement est un thème présent dans plusieurs travaux de l’artiste qui s’y intéresse en tant que production végétative corporelle au même titre que la croissance des cheveux, des ongles des doigts ou des orteils. Ainsi, un fil rouge se déploie tout au long de l’exposition à travers certaines thématiques récurrentes.
L’installation vidéo No Nase Knows a été créée en 2015 pour la Biennale de Venise. Elle montre les étapes de la production industrielle de perles dans une usine de Zhuji, une ville au sud de la Chine: de l’implantation d’un corps étranger à l’intérieur de l’huître qui l’enrobe de nacre, jusqu’à la ‘récolte’ et la sélection. Au moyen d’un mécanisme de rouages et d’une courroie de transmission, l’usine est reliée au poste de travail d’une femme dont les éternuements provoqués par des bouquets de fleurs entraînent l’expulsion de plats de pâtes, tandis que son nez ne cesse de s’allonger. La question de la productivité culmine en une réaction allergique très singulière, survenant aussi en l’absence de toute volonté.
Cheese (2008)
Pour Cheese (2008), Mika Rottenberg s’est inspirée de l’histoire de la famille des ‘Seven Suther land Sisters‘ qui se produisait sous la forme d’un ensemble vocal vers 1900. Dotées d’interminables chevelures, ces sœurs en firent leur marque de fabrique et rencontrèrent un large succès en commercialisant un produit cosmétique favorisant la pousse des cheveux.
L’étiquette «The Lucky Number 7» apposée sur le flacon promettait non seulement la croissance capillaire, mais aussi le bonheur. L’installation de Mika Rottenberg se compose d’un baraquement de planches labyrinthique où il est possible de circuler, et dans lequel le pouvoir des cheveux longs se conjugue à l’énergie produite par l’écume des chutes du Niagara pour fabriquer le produit capillaire. Ce récit est lié de manière surréaliste à la fabrication de fromage de chèvre au moyen d’une rampe de transmission bricolée en bois.
Cosmic Generator
Emprunter le tunnel pour entrer dans l’installation vidéo Cosmic Generator(2017) revient à entamer un voyage à travers un étroit système de tunnel éclairé par des ampoules colorées qui clignotent. Le travelling commence au centre d’une assiette décorée de motifs chinois. La bande sonore se compose d’une musique pour instruments à cordes évoquant l’ambiance d’un restaurant chinois, de grincements produits par des bruits de roulement ainsi que du grésillement de courts-circuits électriques.
Le périple débouche sur une mer bouillonnante de débris d’ampoules colorées pour se transformer aussitôt en un panorama d’un marché de gros à Yiwu, en Chine. L’exubérance visuelle des microboutiques résulte de l’uniformité et de la spécialité de chacune d’entre elles : on y voit des guirlandes en plastique de toutes les couleurs ou des guirlandes lumineuses de toutes sortes, des sapins de Noël scintillants ou des fleurs en plastique multicolores.
Ces objets fétiches du monde marchand surabondant sont contrecarrés par les vendeuses à peine visibles qui disparaissent derrière leurs produits. Le film est inspiré d’une visite de la ville-frontière Mexicali qui se distingue par une importante population chinoise et un nombre considérable de restaurants chinois uniformes. Avant la construction de la frontière clôturée, Mexicali était reliée à Calexico, la ville californienne voisine, par un système de tunnels. Comme dans le film où une banale ‘coupe franche’ permet de surmonter les distances et les dimensions, celui-ci peut être perçu comme une allégorie du flot mondial de marchandises et de l’assujettissement local des personnes.
Aux côtés d’autres travaux et installations vidéo à l’instar de Time and a Hait (2003), Fried Sweat (2008), Smoky Lips (2016-19) et Untitled Ceiling Projection (2018) couvrant près de vingt ans de création, l’exposition montre une sélection de sculptures cinétiques hybrides, pour certaines interactives, accompagnées de compositions fonctionnelles et matérielles surréalistes des années 2020 à 2022, ainsi qu’un ensemble d’œuvres exposé pour la première fois regroupant des lampes-sculptures qui relient des structures organiques à des abat-jour colorés en plastique ré généré. Spécialement conçue pour l’exposition, une sculpture-fontaine haute de près de trois mètres, en forme de pied coloré crachant de l’eau, a été installée dans le parc Solitude.
Pendant toute la durée de l’exposition, le long métrage REMOTE (2022) est visible dans la salle de conférence du musée. Réalisé pendant la pandémie de Covid-19 par Mika Rottenberg en coopération avec le réalisateur et l’auteur Mahyad Tousi, ce film s’inspire de certaines de leurs discussions à l’époque du confinement physique, lorsque les moyens de communication numériques revêtirent une importance nouvelle. Le film crée un récit fantastique à une époque postpandémique où interactions physiques et numériques reprennent de manière inattendue et où les distances disparaissent
Le propos
Le travail artistique de Mika Rottenberg interroge des conditions de production ne faisant habituellement pas l’objet d’une remise en question ainsi que la valeur du travail au sens marxiste du terme avec une attention particulière portée à la main-d’œuvre féminine dans des situations exacerbées, surréalistes et absurdes. Avec humour, l’artiste inverse les causes et les effets, joue avec les échelles – de la plus petite à la plus grande et vice versa – et crée une alchimie d’énergies et de cosmologies.
Les visiteurs et visiteuses évoluent dans un monde imaginaire où se mêlent sensualité enivrante et illogisme déconcertant qui possède quelque chose de très libérateur. Ce sont des écosystèmes de séduction et de magie qui relient la réalité et l’imagination caractérisés par une pensée qui réfléchit la corporalité selon des critères architectoniques : espace et temps, intérieur et extérieur, haut et bas, proximité et distance, pureté et saleté, douceur et résistance. À travers son appropriation créative des matériaux les plus divers et leur ‘agency’ ouverts à des épistémologies alternatives, l’artiste a anticipé des évolutions qui sous le terme de ‘nouveau matérialisme’ explore aujourd’hui les rapports complexes entre la technologie, la nature et l’environnement.
Catalogue en ligne :
Dans le cadre de l’exposition paraît un catalogue en ligne. Il présente en anglais les principaux thèmes de l’œuvre de Mika Rottenberg au moyen d’une naviga tion ludique inspirée de l’esthétique de l’artiste. Parallèlement à des informa tions biographiques et bibliographiques ainsi que des vues d’exposition des trois institutions partenaires – le Musée Tinguely, la Kunst Haus de Vienne et le Lehmbruck Museum de Duisbourg -, cette publication en ligne réunit des extraits de travaux vidéo ainsi que des interviews et des textes de Chen Oiufan, Heather Davis, Hsuan L. Hsu, Gunn Khatri, Barbara Latacz, Filipa Ramos, James Taylor-Foster, Mahyad Tousi, Mika Rottenberg et Roland Wetzel.
Informations pratiques
Musée Tinguely I Paul Sacher-Anlage 1 l 4002 Bâle Vernissage et fête estivale: Mardi, 4 juin 2024, à 18h30
Heures d’ouverture: mardi- dimanche 11h-18h, jeudi 11h-21h I Semaine de la Art Basel: 10.06.-16.06.24: 9h-19h, 13.06. jusqu’à 21h
Curator’s Tour avec Roland Wetzel, le 22 août 2024, 19h, entrée gratuite (en allemand)