Rindy Sam "accepte la sentence"

Avocate

 
AVIGNON (AFP) — Entre « geste d’amour » et vandalisme, la justice a tranché vendredi en condamnant Rindy Sam, connue depuis l’été pour avoir laissé la trace de son rouge à lèvres sur une toile immaculée du peintre américain Cy Twombly exposée à Avignon.
La jeune femme, âgée de 31 ans et de nationalité cambodgienne, a écopé d’une peine de 100 heures de travaux d’intérêt général alors que le représentant du parquet avait requis une amende de 4.500 euros et un stage de citoyenneté.
Le tribunal correctionnel d’Avignon a par ailleurs condamné la prévenue à indemniser les parties civiles, à hauteur de 1.000 euros pour le propriétaire de l’oeuvre et 500 euros pour la Collection Lambert qui l’exposait.
Elle devra également payer un euro symbolique à Cy Twombly, artiste de renommée internationale, qui s’était dit « horrifié » par le baiser laissé en juillet sur une de ses oeuvres exposées à Avignon par la Collection Lambert.
L’affaire n’est cependant pas encore terminée, les magistrats ayant renvoyé au 28 février leur décision sur les frais de restauration, pour lesquels la Collection réclame 33.440 euros.
« Consciente d’avoir dégradé le bien d’autrui », Rindy Sam, qui peint elle-même, « accepte la sentence ».
Pour autant, elle dit ne pas regretter son geste qu’elle décrit comme un « acte d’amour et artistique ».
Une attitude que l’avocate des parties civiles, Me Agnès Tricoire, interrogée par l’AFP, a jugé « choquante ». Pour la Collection Lambert, le jugement oppose d’ailleurs un « démenti cinglant » au « prétendu geste d’amour » de la jeune femme.
« Un baiser est un acte merveilleux; un coup de marteau est un acte violent », a estimé pour sa part Pierre Pinoncelli, spécialiste des « happenings » artistiques, connu pour ses coups de marteau sur des urinoirs de Marcel Duchamp. Habitant Saint-Rémy de Provence (Vaucluse), il dit avoir assisté au procès « en curieux ».
Pinoncelli

 
L’affaire du « bisou » a fait l’objet depuis l’été d’une importante médiatisation, amplifiée début octobre, lors du procès, par la dégradation d’un tableau de Claude Monet au musée d’Orsay .
Les deux parties se sont mutuellement reproché vendredi d’avoir orchestré cette médiatisation afin d’en tirer parti.
La Collection Lambert a ainsi dénoncé dans un communiqué
« la notoriété gagnée par la vandale au détriment de Cy Twombly, et l’élan de sympathie médiatique qu’elle a suscité en surfant sur une vague fort désagréable: celle du mépris de l’art contemporain »
.
La défense accuse au contraire la Collection de profiter de l’affaire via l’organisation d’une nouvelle exposition intitulée « J’embrasse pas » et présentée par Eric Mésil, directeur de la Collection Lambert, comme une « démarche didactique et pédagogique » pour comprendre ce qu’est le vandalisme.
Mais pour Me Jean-Michel Ambrosino, l’avocat de Rindy Sam, « la Collection surfe sur la vague médiatique »; la faiblesse des dommages-intérêts par rapport aux montants réclamés montre que « le magistrat l’a bien pris en compte ».
Le conseil considère d’ailleurs beaucoup trop élevé le montant des frais de restauration demandé par la Collection et regrette que le tribunal n’ait pas désigné d’expert judiciaire indépendant.
Selon lui, le montant réclamé pour la restauration se base sur un devis établi par la restauratrice exclusive de la Collection Lambert, et « il n’y a là aucune objectivité ».
Dans l’immédiat, Rindy Sam, qui élève deux enfants avec son RMI dans un logement HLM de Martigues (Bouches-du-Rhône), est prête à payer ce qu’on lui réclame.
« Je vais vendre des nems pour payer les amendes, au lieu d’acheter de la peinture », a-t-elle dit.
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Rouge à Lèvres sur une toile = Syndrome de Stendhal ?

 
Ce syndrome est appelé ainsi à la suite de l’écrivain français Stendhal qui a vécu une expérience similaire lors de son voyage en Italie, à l’étape de Florence, en 1817. Il écrit alors :

Sam Rindy

« J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. »
Stendhal n’a rien fait pour s’en prémunir puisque s’asseyant sur un banc de la place, il lut un poème pour se remettre, et vit que ses visions empiraient à la lecture de cette somme de culture ambiante dans les lieux : il fut épris et malade à la fois de tant de profusion.
Ce syndrome ne fut pas décrit comme un syndrome spécifique avant 1979. La psychiatre italienne Graziella Magherini, officiant à l’hôpital central de la ville, a observé et décrit plus de 100 cas similaires parmi les touristes de Florence, le berceau de la Renaissance. Sa description figure dans un livre éponyme qui classe les cas de manière statistique selon leur provenance et leur sociologie. En résumé :
* les touristes provenant d’Amérique du Nord et d’Asie n’en sont pas touchés, il ne s’agit pas de leur culture;
* les touristes nationaux italiens en sont également immunisés; ils baignent dans cette atmosphère depuis leur enfance;
* parmi les autres, sont plus touchées les personnes vivant seules et ayant eu une éducation classique ou religieuse, indifféremment au sexe.
Les phrases précédentes sont réductrices et devraient s’interpréter selon l’acception « individus ayant reçu une éducation de la civilisation de Y » plutôt que « individus provenant de Y ».
Le facteur déclenchant de la crise est le plus souvent lors de la visite de l’un des 50 musées de la ville, où le visiteur est subitement saisi par le sens profond que l’artiste a donné à son œuvre, qui transcende les images et le sujet de la peinture; les réactions des victimes subjuguées sont très variables; des tentatives de destruction du tableau ou d’hystérie ont été observées. Les gardiens de musée sont au courant de cette particularité locale et surveillent les comportements atypiques de leurs hôtes, surveillance sans excès toutefois.
On trouve aussi la dénomination de « Syndrome de Florence » (« Syndrome de Stendhal » étant la dénomination officielle) Nos participants au voyage de Florence sont ainsi prévenus ….
Peut-on associer le comportement de Sam Rindy au syndrome de Stendhal ?
Rouge à lèvres sur une toile: procès à Avignon
Sam Rindy, la femme qui a déposé un baiser rouge sur une toile blanche de Cy Twombly
4.500 euros d’amende ont été requis contre la jeune femme qui avait taché une toile de Cy Twombly avec du rouge à lèvres
Rindy Sam est poursuivie pour « dégradation d’oeuvre d’art ». Elle devait comparaître le 16 août en audience de reconnaissance de culpabilité mais elle a refusé de plaider coupable pour ce chef.
La jeune femme avait embrassé fin juillet à Avignon une toile toute blanche du peintre US, qui fait partie d’un triptyque évalué à deux millions d’euros.
Estimant que le geste de Rindy Sam s’apparente à « une sorte de cannibalisme ou de parasitisme », le représentant du parquet a également demandé au tribunal correctionnel d’Avignon, comme peine complémentaire, qu’elle soit condamnée à un stage de citoyenneté.
Le tableau est la propriété d’Yvon Lambert, fondateur de la collection Lambert. Elle était présentée à l’occasion d’une exposition intitulée « Blooming », consacrée à Cy Twombly et organisée par la Collection Lambert du 10 juillet au 30 septembre.
La toile initialement d’une blancheur immaculée, fait partie d’un triptyque lu-même inclus dans un polyptique de onze éléments, « Les trois dialogues de Platon« , datant de 1977.
Le directeur de la Collection Lambert et commissaire de l’exposition, Eric Mézil, avait dénoncé un « viol » de l’oeuvre d’art. Selon lui, « Le rouge à lèvres contient des matières grasses, des produits chimiques et le rouge est la couleur la plus violente: ce rouge est indélébile ».
Quand la passion rend fou
Rindy Sam, peintre cambodgienne, venue spécialement de Martigues, où elle réside, pour assister à l’exposition n’avait pas pu résister à l’attrait de l’oeuvre. Tombée en arrêt devant la toile et après avoir demandé à son fiancé de la photographier bras grands ouvert devant cette dernière, elle s’est mise, dans un éclat de bonheur, à l’embrasser.
Une véritable étreinte pour cette dame qui assure avoir vécu un acte d’amour d’une grande pureté:
« J’ai déposé un baiser. Une empreinte rouge est restée sur la toile. Je me suis reculée et j’ai trouvé que le tableau était encore plus beau… », a-t-elle confié. « J’assume mon acte. Il est beau; cette toile blanche m’a inspirée. On me dit que c’est interdit de faire des choses pareilles, mais c’était totalement spontané ».
a déclaré Rindy Sam, qui conteste avoir commis une dégradation d’oeuvre d’art.
au 13 h de France 2 du 9 octobre sous la rubrique