Pour son exposition de réouverture après plus d’un an de travaux entrepris sous la conduite de l’Institut de France, propriétaire du musée, le Musée Jacquemart-André présente une quarantaine de chefs-d’oeuvre de la célèbre Galerie Borghèse à Rome. Jusqu'au 6/1/25
COMMISSARIAT :
Dr. Francesca Cappelletti est Directrice de la Galerie Borghèse à Rome. Spécialiste du baroque italien
Pierre Curie est Conservateur général du patrimoine. Spécialiste
de peinture italienne et espagnole du XVIIe siècle
PRODUCTION ET RÉALISATION
Emmanuelle Lussiez, Directrice des expositions de Culturespaces
Milly Passigli, Directrice déléguée de la programmation des expositions
Léa Duval, Régisseuse des expositions du Musée Jacquemart-André
Bernadette Roux, Chargée des expositions du musée Jacquemart-André
Livia Lérès et Domitille Séchet pour l’iconographie au sein de Culturespaces
SCÉNOGRAPHIE
Hubert le Gall, sculpteur, designer et scénographe français.
L’EXPOSITION EN 6 OEUVRES PHARES
Caravage, Garçon à la corbeille de fruits, vers 1596, huile sur toile, 70 x 67 cm
Ce portrait d’un jeune homme tenant un panier rempli de fruits et de feuillages automnaux a été peint par Caravage peu après son arrivée à Rome, où il était employé comme peintre de fleurs et de fruits dans l’atelier du Cavalier d’Arpin. Le jeune peintre lombard fait déjà montre ici de l’étendue de son talent de peintre réaliste, jusqu’à figurer les imperfections des feuilles sèches et ternies de la nature morte. L’oeuvre est l’une des premières acquisitions du cardinal Scipion Borghèse en 1607, elle fait partie de la célèbre expropriation du Cavalier d’Arpin, qui la conservait plusieurs années après que Caravage ait quitté son atelier. Accusé d’agression et de détention d’armes, l’artiste fut forcé de céder sa collection de peintures au pape Paul V, qui en fit don à son neveu, le commanditaire présumé de cette saisie.
Raphaël, La Dame à la licorne, vers 1506
huile sur toile appliquée sur bois, 67 x 56 cm
Ce portrait d’une jeune fille habillée à la mode florentine du début du XVIe siècle paraît s’inspirer de La Joconde, peinte quelques années auparavant. Il s’agit très probablement d’un tableau commandé comme cadeau de
mariage, ainsi que le suggèrent les références aux vertus conjugales, comme la licorne et la perle blanche, symboles de virginité. Lourdement repeint à la fin du XVIIe siècle pour être transformé en sainte Catherine d’Alexandrie, le tableau a bénéficié d’une restauration en 1935, permettant de retrouver le sujet original et confirmer l’attribution à Raphaël.
Dominiquin, Sibylle, 1617, huile sur toile, 123 x 89 cm
Scipion Borghèse fait l’acquisition de cette oeuvre directement auprès du peintre en 1617. La jeune femme représentée en demi-figure est une sibylle, reconnaissable à son turban. Les douze sibylles de la mythologie
grecque sont des prêtresses d’Apollon ayant le don de divination. Si ce sujet était très courant au XVIIe siècle, l’insertion d’un instrument de musique et d’une partition est inhabituelle et semble faire référence au goût du cardinal pour la musique autant qu’à la proximité du Dominiquin, lui-même musicien amateur, avec le monde de la musique. D’autres détails – le laurier et la vigne – mêlent symboles sacrés et profanes. La popularité de cette toile au XVIIe siècle est attestée par de nombreuses copies et répliques. Peintre de l’école de Bologne, le Dominiquin était très apprécié par le cardinal qui n’hésita pas à le faire emprisonner pour le contraindre à travailler pour lui.
Bernin, Autoportrait à l’âge mûr, vers 1638-1640 huile sur toile, 53 x 43 cm
Bernin aurait réalisé plus de cent cinquante peintures entre les années 1620 et 1640, mais seule une douzaine nous est parvenue. L’Autoportrait à l’âge mûr est un remarquable témoignage de son activité de peintre, ainsi que de son intérêt pour la physionomie, que l’on retrouve dans ses portraits sculptés recherchés par les élites de toute l’Europe. L’artiste s’est concentré sur la représentation de son propre visage à l’expression sérieuse, au regard profond et de ses traits montrant des signes de vieillissement. L’arrière-plan – un mur uni – et ses vêtements sont rapidement esquissés de quelques coups de pinceau qui donnent à la peinture un aspect inachevé. L’oeuvre est entrée dans la collection de la Galerie Borghèse en 1911 grâce à la donation d’un mécène allemand, le baron Otto Messinger. Dans les années 1980, l’Autoportrait de Bernin acquiert une notoriété certaine grâce à son insertion sur les billets de cinquante mille lires italiennes.
Lorenzo Lotto, Vierge à l’Enfant avec les saints Ignace d’Antioche (?) et Onuphre
1508, huile sur panneau, 53 x 67 cm
Ce rare panneau signé et daté de l’artiste représente une
« sainte conversation », la Vierge et l’Enfant entourés de saints, ici l’évêque martyr saint Ignace d’Antioche, au vêtement richement orné contrastant avec
la nudité et l’apparence négligée de saint Onuphre, ermite légendaire du IVe siècle. La présence de ce dernier est liée aux idées réformistes circulant en Europe au début du XVIe siècle. Cette oeuvre est caractéristique du ton antihéroïque et humaniste de Lorenzo Lotto, par lequel son style se distingue de celui des autres peintres vénitiens de son époque. La palette de couleurs froides et brillantes, les contours durs s’inspirent de la peinture d’Albrecht Dürer, actif à Venise en 1506
Titien, Vénus bandant les yeux de l’Amour, vers 1565, huile sur toile, 116 x 184 cm
Cette scène d’interprétation difficile date de la période de maturité de Titien, caractérisée par une palette de couleurs chaudes et veloutées produisant de vibrants effets lumineux. Ce riche usage de la couleur typique des maîtres vénitiens était fortement admiré à Rome à l’époque de Scipion Borghèse. Le cardinal-neveu fait l’acquisition de cette pièce maîtresse dans les premières années de la constitution de sa collection en 1608, probablement grâce à un don du cardinal Paolo Emilio Sfondrati. Le sujet est le plus souvent interprété
comme Vénus bandant les yeux de son fils Cupidon, tandis que ses compagnes lui tendent son arc et son carquois, afin que l’Amour frappe aveuglément les hommes de ses flèches. D’autres spécialistes y voient aussi une représentation des Trois Grâces avec des amours, un thème s’inspirant de sources littéraires
antiques.
Scipion Borghèse : un cardinal esthète
Durant le pontificat de Paul V, le paysage artistique romain est en pleine transformation en raison de la multiplication des nouvelles églises et chapelles bâties dans l’esprit de la Contre-Réforme catholique, exalté par la multiplication des congrégations religieuses et un renouveau spirituel et artistique. Les lieux de culte sont érigés et décorés dans un style grandiose et grandiloquent, de manière à impressionner les fidèles. Les chantiers, dont beaucoup sont financés par le gouvernement pontifical, attirent à Rome de
nombreux architectes, peintres et sculpteurs en quête d’opportunités. Mais l’art sacré n’orne pas seulement les murs des églises. Les collectionneurs comme Scipion Borghèse font sortir les tableaux religieux des lieux consacrés pour les mêler à d’autres sujets dans leurs intérieurs sécularisés. Chez les particuliers, les peintures religieuses ne sont plus seulement appréciées dans le cadre de pratiques spirituelles, mais avant tout pour leur valeur d’art intrinsèque, leurs qualités esthétiques et stylistiques.
Informations pratiques
Adresse
Musée Jacquemart-André, propriété de l’Institut de France
158, bd Haussmann – 75008 Paris
Téléphone : 01 45 62 11 59
Accès
Le musée se situe à 400m de la place Charles de Gaulle-Étoile.
Métro : lignes 9 et 13 (Saint-Augustin, Miromesnil ou Saint-Philippe du Roule)
RER : RER A (Charles de Gaulle-Étoile)
Bus : 22, 43, 52, 54, 28, 80, 83, 84, 93.
Parc de stationnement : Haussmann-Berri, au pied du musée, ouvert 24h/24.
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