C’est une belle partition que déploie Charles Fréger
au musée Unterliden de Colmar.
Pas de signes, de notes, de silences, de nuances,
mais des termes comme : Irudi, Exiliados / Anairak,
La Porte du milieu. Des images fortes du passé, qui
hélas se retrouvent dans l’actualité
Gernika est la capitale symbolique
des Basques. Guernica est un tableau, la
grande fresque de Picasso, est conservé à Madrid,
au musée de la Reine Sofia.
Le Musée Unterlinden qui expose l’un des
trois exemplaires de la tapisserie Guernica,
dont le carton a été réalisé en 1955 par
Jacqueline La Baume Dürrbach à la demande
de Picasso, accueille ainsi pour l’anniversaire
du bombardement de Guernica cet ensemble de
photographies de Charles Fréger.
Le 2e exemplaire d’Unterlinden (vidéo)
Charles Fréger a choisi de citer cette oeuvre :
sa suite basque, pleine de bruits et de murmures.
Elle n’aurait pu être complète sans elle. Avec les
membres du groupe de commémoration
Gernika-Lumo, qui rejouent année après
année l’événement, il a reconstruit une frise
de neuf scènes.
Neuf photographies qui figent les gestes des
acteurs ou les objets devenus aujourd’hui partie
de la geste mémorielle. L’inversion du positif
au négatif, le passage de l’ombre noire à la
blanche luminosité des silhouettes renforce le
sens de l’image. Comme les ombres errantes
qui peuplaient les enfers, ou même les blancs
fantômes des lieux hantés, les silhouettes des
acteurs, jouant les moments de cette après-midi
funeste, font revivre pleinement leurs personnages
et resplendir les symboles.
Irudi Pour faire revivre les protagonistes de Guernica,
il a choisi de photographier ses modèles en buste,
de profil, en attitude. Ainsi défilent le berger calme,
la femme au fichu, l’enfant à la fronde qui joue au soldat…
Stéréotypes créés au fil des années, le regard
vers le ciel, vers l’horreur de leur destinée. Seule
la jeune mère a le visage tourné vers son enfant,
sans avenir.
Exilados/Ainarak
Les jeunes filles de Navarre ou d’Aragon qui
venaient en Soule pour y travailler dans les
fabriques de sandales, même si elles ont
vraiment existé, font désormais partie de la
légende basque. Comme des hirondelles – les
Souletins les ont nommées ainsi – les Ainarak
traversaient en automne les montagnes pour
rejoindre les fabriques de Mauléon où elles
allaient travailler jusqu’au printemps. Dans ce
voyage, on dit qu’elles apportaient le tabouret
qui leur servirait de siège, quelques vêtements
serrés dans un baluchon de toile ; objets qui
sont devenus, au fil des années, leur costume.
Si les sujets photographiés le sont une fois encore
– et cela signe la série – en contre-jour, soudain
les paysages, la montagne, deviennent un cadre,
un personnage. Se dessinent des reliefs, des
éboulis, des failles. Cependant, les visages sont
toujours dans l’ombre ; seuls les vêtements et
les accessoires prennent des formes et, éclairés
par des rayons de soleil, se colorent doucement
La porte du milieu
En contre-jour, un personnage au profil acéré,
immobile, pose. Dans le noir de la silhouette,
se devinent quelques détails, des croisillons de
broderie, un plumet, des collants de dentelle,
des chaussons de danseurs. Un long jupon s’accroche
à ses hanches, terminé par une minuscule
proue en forme de cheval. Le Zamalzain,
comme le berger – autre figure de fierté, avec sa
longue canne, ses guêtres et sa peau de mouton
– appartient, sans doute aucun, à la galerie des
personnages basques. Pays dont ils ont participé
à forger l’image faite de résolution, d’indépendance
d’esprit, de réserve et de gaieté aussi,
et une certaine part d’insolite et d’obscur qu’accentue
la présence des autres personnages de
ces deux séries de chants et les sons qui
martèlent les représentations,
les passages par les trois portes qui, sur la
scène, signifient leur entrée dans le monde du
récit .
Ces personnages posent en contre-jour, devant des
tentures, rideaux de scène dont les superpositions,
les dérangements redessinent des paysages, ils deviennent
autres.
Non pas les acteurs grimés d’un spectacle mais
des hommes habités par le sens de leurs personnages
qu’ils subliment.
Quant au diable, il est le seul à être une ombre
chinoise cornue, qui se devine, derrière le rideau
de scène. Mais le diable n’est qu’une figurine de
bois dont l’ombre est unie, sans relief.
Samedi 18 mars
Opening Night Colmar
Rencontre – discussion
Dans le cadre du Week-End de l’Art Contemporain
Temps fort Gernika
Du 27 au 30 avril
Cycle histoire de l’art
En partenariat avec le Musée Basque et de
l’histoire de Bayonne
Profitez de la nocturne du jeudi soir pour vous
initier à un courant, une démarche artistique ou
un genre de l’histoire de l’art.
Gernika, quand l’histoire devient symbole I
Jeudi 27 avril
Jean-Claude Larronde, Historien, Président du Musée
Basque et de l’Histoire de Bayonne
Horaire I 18h30
Tarif I 4,50€ en sus du droit d’entrée
Réservation I 03 89 20 22 79 I
reservations@musee-unterlinden.com
Jusqu’au 22 mai dans l’espace de la Piscine
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