Muh-he-kun-ne-tuk
Studio Anne Denastas & Jean Wollenschneider
Jusqu’au 26 septembre 2021
Une exposition co-produite par la Fondation François Schneider et le
musée du quai Branly – Jacques Chirac
Un dialogue entre le fonds d’art contemporain de la Fondation François Schneider et la collection d’objets extra-européens du musée du quai Branly – Jacques Chirac pour mettre en lumière l’universalité du thème de l’eau
Plus de 120 oeuvres et objets d’artistes, créateurs et artisans plongeant
dans les siècles, les matériaux et les représentations de l’eau sur les 5
continents.
Pirogue
Archipel des Tuamotu, Polynésie française
Début du 20e siècle
Bois, fibres végétales
© musée du quai Branly – Jacques Chirac,
L’exposition les territoires de l’eau met en résonance des œuvres et objets des collections du musée du quai Branly – Jacques Chirac avec une sélection des œuvres de la Fondation François Schneider, fonds d’art contemporain constitué depuis 2011 sur la question de l’eau. Le concours Talents Contemporains récompense 7 lauréats de toutes disciplines et nationalités confondues. Vidéos, photographies, dessins, installations, œuvres numériques, sculptures de verre soufflé constituent un ensemble de pièces racontant l’eau sous toutes ses formes. La traversée de la Méditerranée, des moutons à la dérive, une odyssée sur les fjords norvégiens, l’étain et l’eau en fusion, des rituels contemporains, des interrogations sur la pêche de masse, les barrages, la mécanique de l’eau, une planète réinventée… sont les thèmes et sujets variés des artistes contemporains lauréats du concours. Ces histoires d’eau méritent une mise en perspective avec des œuvres extra-européennes, mettant en lumière l’universalité du sujet. Les exceptionnelles pièces du musée du quai Branly – Jacques Chirac offrent ainsi la possibilité de créer un parcours inédit invitant le visiteur à une plongée dans les matières, les siècles et les représentations liées à l’eau.
Depuis des millénaires, les artistes, créateurs, artisans ont pu être fascinés par ce sujet et l’on observe ainsi des résurgences et liens iconographiques importants entre toutes les périodes. Quels que soient leurs statuts, objets
de la vie quotidienne, objets sacrés ou oeuvres d’art contemporain, toutes ces oeuvres témoignent des liens tissés par les hommes avec la source première
de la vie.
Le parcours de l’exposition permet de naviguer dans 5 grandes sections : la fabrique des techniques et du paysage, le quotidien de l’eau, imaginaires liquides, territoires du sacré et géographie des traversées.
L’exposition se divise donc en cinq chapitres dans lesquels oeuvres d’art contemporaines et oeuvres d’art extra-occidentales se côtoient pour raconter des histoires d’eau. Les associations d’oeuvres faites dans l’exposition sont tout aussi bien intellectuelles et thématiques que formelles et esthétiques.
La fabrique des techniques et du paysage
Nasses, hameçons & photographies d’Antoine Gonin et Edouard Decam
Différentes nasses provenant de divers lieux dans le monde (Océanie, Afrique, Asie), sont ici présentées comme sur le lit d’une rivière. Les nasses ont été soclées de telle manière qu’on a l’impression que les poissons ou autres animaux aquatiques vont y pénétrer pour s’y faire piéger.
En effet, les nasses comme les hameçons servent à attraper les poissons, c’est donc un outil pour l’homme pour se nourrir. La fabrication de ses nasses requiert d’un réel savoir-faire. Elles sont posées dans le courant ou aux marées, avec des appâts, afin d’attirer les poissons.
Les hameçons présentés dans plusieurs vitrines dans cette salle proviennent également de différentes régions du monde et figurent quant à eux parmi les objets les plus anciens retrouvés en contexte archéologique. Ils étaient associés à des lignes, des cannes, des flotteurs, des lests et munis de leurres. Ils sont
adaptés à la pêche en eaux profondes ou en surface. Les matériaux précieux (os, écaille de tortue, nacre, le coquillage haliotis) en faisaient des objets de
valeur qui étaient échangés et transmis dans les familles.
Les êtres qui peuplent l’eau inspirent de tout temps. Grâce à cet aquarium géant reconstitué dans la grande halle de la Fondation, les visiteurs peuvent voir de quelles manières dans certaines cultures les masques en formes de poissons, requins, etc. sont utilisés pour personnifier des esprits aquatiques tout en plongeant ensuite dans les abysses et l’univers féérique de l’artiste Yves Chaudouët. Seule une petite partie de la pièce est ici présentée dans un aquarium mis en parallèle avec des masques cimiers et autres créatures directement inspirées du monde aquatique.
Les Inuits sont un groupe de peuples autochtones, partageant des similitudes culturelles et une origine ethnique commune, vivant dans les régions arctiques de l’Amérique du Nord, au Groenland, au Canada et aux États-Unis. Ils utilisent de nombreuses techniques artisanales pour vivre dans leur environnement
parfois hostile. Le phoque leur fournit l’essentiel de leur alimentation et de leur culture matérielle. De l’animal rien ne se perd. En plus de donner la viande, la graisse et le sang pour la nourriture, il fournit la fourrure des vêtements,
la toiture des habitations, le revêtement des kayaks et la graisse des lampes.
Le manteau d’enfant, présenté ici, et datant du début du 20ème siècle a également été réalisé en intestin de phoque ce qui le rend totalement
imperméable.
Le quotidien de l’eau
L’eau est un élément majeur du quotidien des hommes, parce que nécessaire pour boire, arroser les cultures et abreuver les animaux, l’eau délimite un territoire de vie. Toutes les communautés humaines se sont constituées, à l’origine, autour d’un point d’eau. Et plus tard, en zone rurale comme en zone urbaine la présence de l’eau a un impact considérable dans les vies des individus, au quotidien.
L’eau, en arabe mā’, occupe une place prépondérante dans le monde arabo-musulman. Elle est l’élément culturel majeur de la civilisation islamique. Evoquée dans 44 versets du Coran, qui en fait la source même de toute vie, l’eau joue également un rôle essentiel dans le rite islamique.
L’eau est en effet nécessaire cinq fois par jour pour les ablutions servant à purifier le corps de tout musulman qui s’apprête à accomplir la prière.
L’eau rare, qu’il ne faut pas gâcher est une des préoccupations d’Asieh Deghani qui travaille sur l’espace intime, la dimension précieuse de l’eau, ce qui va dans le même sens que les objets du hammam.
Anahita, The Eros of Community est une série de vidéos, composée de séquences prises le long du Zayanderud, le plus grand fleuve du plateau central de l’Iran en voie d’assèchement, et du pont Siosepol qui le surplombe comme point de rendez-vous de l’eau et de la communauté. Anahita est le nom en
ancien perse de la déesse de l’eau, associée à la fertilité et à la sagesse.
Asieh Dehghani explore les façons dont la géopolitique, la religion et la culture de son pays ont sans cesse formé l’identité iranienne.
L’eau étant un fondement spirituel et matériel de la communauté iranienne – a toujours réuni les habitants des pays secs du Moyen-Orient, comme l’Iran.
Imaginaire liquide
L’eau est aussi source d’imaginaire pour les artistes. Les formes de l’eau en mouvement, la pluie, la silhouette des vagues sont successivement représentées dans cette section avec la peinture (aborigène, Australie), par la
broderie (robe et veste, Chine),
de manière numérique (Waterscape, Claire Malrieux) ou thermoformées sur du plexiglas (Holding the sea, Paul Souviron).
Ces représentations de l’eau font appel à l’imaginaire et permettent à l’esprit de divaguer, ils ont également des significations différentes en fonction des cultures et du sens que leur donnent les artistes. Une partie des
oeuvres contemporaines bien que présentant des formes parfois similaires aux ornements que l’on retrouve sur les tissus ou la peinture aborigène traitent également des questions environnementales de manière sousjacentes
comme l’oeuvre de Waterscape de Claire Malrieux.
Territoires du sacrées
L’eau accompagne la naissance de la vie. Qu’elle soit liquide, gazeuse, ou solide, vivante ou dotée de mémoire, sur le plan symbolique, elle remonte à la source du sacré, établissant un lien entre celui-ci et les créatures qui peuplent le monde. Les hommes de tous les continents n’ont cessé de diriger leurs
invocations pour que le miracle du vivant advienne, générant croissance et abondance.
Cette quatrième partie de l’exposition s’intéresse au lien entre eau et sacrée. Différents objets et masques utilisés pour les dévotions sont ainsi présentés en parallèle de mythologies plus contemporaines. On y retrouve donc des masques utilisés lors de divers rituels, certains objets qui ont des fonctions de
dévotions pour l’appel à la pluie, la fertilité et d’autres qui ont même un potentiel « magique ».
Le cimier Ciwara apparait au moment des semailles, juste avant la saison des
pluies lors de rituels liés à la pluie et à la fécondité.
Ciwara est le nom de la créature qui, dans le mythe d’origine des bambaras du
Mali, apprit aux hommes à cultiver la terre.
L’image de Mami Wata (déformation de « Mother of Water ») est très présente en Afrique centrale et occidentale. Elle figure en
esprit aquatique, capricieux et versatile, qui procure richesse et prospérité à ses adeptes les plus dévoués. Les origines de Mami Wata
sont complexes et multiples : à l’origine, il s’agirait d’une image en chromolithographie d’une charmeuse de serpents qui aurait été produite en Europe du Nord – ce qui explique que la figure féminine tienne en mains deux reptiles.
Géographie des traversées
La notion de traversée induit un déplacement, qui peut être physique ou mental. Dans les deux cas, un mouvement est à l’oeuvre. La traversée marque un temps suspendu, un entre-temps, un temps long, étiré, qui permet l’émergence d’un nouveau statut.
Les oeuvres présentées dans cette dernière partie de l’exposition invitent le visiteur au voyage et à faire perdurer celui qu’il a entamé dès le début de l’exposition, en découvrant l’eau à travers ses représentations et usages selon les cultures. Ici se côtoient des pirogues océaniennes, des cartes maritimes traditionnelles ou plus contemporaines, ou encore les questions migratoires et les drames humains qu’elles engendrent.
Du face-à-face entre les oeuvres traditionnelles océaniennes et celles des artistes contemporains comme Cristina Escobar et Mehdi Medacci émerge également une faille. Là où les oeuvres du Pacifique évoquent une profonde connexion aux éléments et à l’eau en particulier, les oeuvres
contemporaines interrogent la violence de la rupture entre les hommes et leur environnement, autant intérieur qu’extérieur. La traversée porte alors la balafre de l’arrachement, du déracinement ; elle est comme suspendue entre l’eau et le ciel.
Conclusion
Petits et grands, peuvent s’amuser sur la terrasse extérieure à remonter les courants, mais attention à ne point s’y perdre !
Muh-he-kun-ne-tuk ?!
Incantation, dieux aztèque, spécialité culinaire… mais que nous dit ce curieux nom ? Dans la culture amérindienne, Muh-he-kun-ne-tuk signifie « le fleuve qui coule dans les deux sens ». C’est un jeu de parcours intuitif proposé par le Studio Anne Denastas & Jean Wollenschneider qui invite à traverser le temps et les cultures, à se remémorer les forces symboliques et philosophiques de l’eau.
Artistes de la collection de la Fondation François Schneider
Nour Awada, Guillaume Barth, Benoît Billotte, Mathieu Bonardet, Jessie Brennan, Julie Chaffort, Yves Chaudouët, Edouard Decam, Asieh Dehghani, Rebecca Digne, Cristina Escobar, Sara Ferrer, Antoine Gonin, Elizaveta Konovalova, Mathilde Lavenne, Olivier Leroi, Claire Malrieux, Mehdi Meddaci, Camille Michel, Gustavo Millon, Hélène Mugot, Benoît Pype, Paul Souviron, Wiktoria Wojciechowska.
Informations
Commissariat général
Marie Terrieux, directrice de la Fondation François Schneider
Commissariat associé
Constance de Monbrison, responsable des collections Insulinde
(musée du quai Branly – Jacques Chirac)
Aurélien Gaborit, responsable des collections Afrique
(musée du quai Branly – Jacques Chirac)
et responsable du Pavillon des Sessions (musée du Louvre)
Scénographie
Olivia Berthon, Studio Vaste
Fondation François Schneider
27 rue de la première armée
68700 Wattwiller (Haut Rhin)
fondationfrançoisschneider.org
Ouvert du mercredi au dimanche de 11 h à 18 h
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