Füssli, Drame et Théâtre

Jusqu’au 10 février 2019, au Kunstmuseum Basel | Neubau
Pour la première fois, le Kunstmuseum Basel consacre
une grande exposition monographique à l’artiste suisse
Johann Heinrich Füssli (né à Zurich en 1741, décédé à
Putney Hill en 1825).

Füssli et Bodmer et le buste d’Homère
tableau qui n’est pas dans l’exposition, vu à la Kunsthalle de Zurich

Ses jeunes années se passent à Zurich jusqu’en 1761.
Puis à Rome de 1771 à 1779 où il apprend la peinture.
Il est éduqué par un père érudit, un précepteur et mentor
Johann Jacob Bodmer et un parrain Salomon Gessner
qui lui enseignent, le latin, la mythologie et la bible, la divine
comédie.
Füssli compte parmi les peintres les plus novateurs du
XVIIIe siècle. Et parmi les plus marginaux.
À cheval entre les Lumières et le Romantisme,
il témoigne des antagonismes de l’époque, tiraillée entre
raison et déraison.

Près de 70 tableaux mettent en lumière deux de ses sources
d’inspiration majeures : la littérature et le théâtre.
C’est l’un des créateurs les plus fascinants de la fin du 18e s.
Dans une période sombre, la révolution française, la Terreur
la mort de Louis XVI, de Marat, puis de Robespierre,
la fermeture des académies, des université, des musées,
le patriotisme prend la place de la culture.
L’Europe est dans la tourmente. Les valeurs occidentales
sont en train de se lézarder.
Alors qu’en Amérique est érigé le Capitole symbole du
nouveau monde et de la liberté, en Angleterre Georges III
sombre dans la démence. Ce monde sombre, contemporain
alimente la création surréaliste et  onirique de Füssli.
Féru de littérature l’artiste s’installe à Londres de 1781 à 1825.
A la Royale académie c’est Füssli qui est célébré avec Titania.
(1793/94). Il découvre Shakespeare et Milton.
Füssli, Titania

L’exposition Füssli, Drame et Théâtre s’intéresse aux
sources littéraires de ses peintures ainsi qu’aux moyens
stylistiques mis en oeuvre.
L’oeuvre entière de Füssli est parcourue par son intérêt
pour la grande littérature à laquelle il s’initie durant ses
années d’études à Zurich. Il emprunte des motifs à
la mythologie antique, au Paradis perdu de John Milton et
aux drames de Shakespeare dont il propose une mise
en scène « théâtralisée ».
Füssli, Paradis Perdus Milton

De remarquables compositions
montrent les corps tendus à rompre de héros et de femmes
vierges éclairés d’une lumière crue, tandis que des visions
spectrales, anges déchus, fées et autres apparitions surnaturelles
déploient un fantastique spectaculaire, souvent sombre.
À la croisée du classicisme et du romantisme, Füssli délaisse
les conventions artistiques et se voue au royaume de son
imagination fantasque.
« Shakespeare de la toile »

Après un séjour de plusieurs années à Rome, comme beaucoup
d’artistes de l’époque il fait le « grand tour« , Füssli fait fureur
à Londres à partir des années 1780 avec ses peintures
consacrées à des oeuvres shakespeariennes.

L’exposition présente notamment des grands formats
de Songe d’une nuit d’été, Macbeth et Hamlet que l’artiste
autodidacte réalise pour deux galeries littéraires et qui lui
valent bientôt le surnom de « Shakespeare de la toile ».
Des oeuvres majeures issues de son projet d’une
galerie Milton à laquelle il se consacre entre 1790 et 1800
sont également présentées.
L’image de « Suisse sauvage » excentrique, tel que Füssli
fut surnommé à Londres, est jusqu’à aujourd’hui fortement
marquée par Der Nachtmahr, tableau au succès scandaleux,
dont l’exposition montre la version d’une collection particulière
bâloise.
Ainsi, le public perçoit surtout le peintre comme le précurseur
du romantisme noir du « Gothic Horror ».
L’exposition au Kunstmuseum Basel étoffe cette image
en présentant Füssli comme un artiste extrêmement lettré
doué d’une imagination géniale. Elle donne à voir au visiteur
des matières épiques devenues tableaux et explore aussi bien
l’univers littéraire que l’imaginaire dramatique de Füssli.
Les sources d’inspiration de Füssli sont présentées à travers des
sections consacrées à des légendes antiques et médiévales,
à son étude d’oeuvres plus récentes et contemporaines,
comme Oberon de Christoph Martin Wieland, à des
tragédies et comédies de Shakespeare ainsi qu’au
Paradis perdu, poème épique de John Milton.
Füssli, Oberon

Une autre section est dédiée aux images d’auteur et aux
inventions de Füssli – des peintures qui ne s’inspirent pas
directement d’une oeuvre littéraire existante mais qui
représentent « la personnification des sentiments » que l’artiste
intègre de temps à autre à des contextes narratifs de sa propre
invention.
Füssli, Amour et Psyché

International et multimédia
À l’instar de Füssli, l’exposition Drame et Théâtre aspire
également à produire une vive impression en mettant
l’accent sur la peinture, médium qui suscite l’admiration.
Près de 70 oeuvres présentent les mondes picturaux à la fois
spectaculaires et intellectuellement exigeants élaborés par
Füssli durant ses décennies londoniennes.
Aux côtés des sept peintures du Kunstmuseum Basel
figurent des prêts généreux du Kunsthaus Zürich, de la
Folger Shakespeare Library de Washington, du Yale
Center for British Art de New Haven
, du Louvre, de la
Tate London et du Metropolitain Museum of Art in
New York
ainsi que d’autres musées suisses et internationaux
et de collections particulières.

Thom Luz, régisseur au Theater Basel, parvient dans
un travail vidéo à réunir les univers de la littérature, du théâtre
et de l’art au sein du musée en menant une réflexion du point
de vue du théâtre contemporain sur l’atmosphère et la
dimension parfois mystérieuse de l’oeuvre de Füssli.
Commissaire : Eva Reifert


En outre, l’audioguide propose au visiteur de se laisser
guider personnellement par Füssli à travers les salles
d’exposition.
Podcast le paradoxe Füssli, l’art est la matière
Publication
Dans le cadre de l’exposition, un catalogue paraît aux éditions
Prestel Verlag. Il propose une approche interdisciplinaire et
donne la parole aux sciences littéraires et théâtrales.
Ainsi, Alexander Honold se penche sur les enseignements
poétologiques de Johann Jakob Bodmer et de Johann Jakob
Breitinger auprès desquels Füssli a étudié à Zurich et explore
les sources de sa conception de l’art.
Pour sa part, Beate Hochholdinger-Reiterer montre comment
l’artiste entre en contact avec l’oeuvre de Shakespeare
et la manière dont le théâtre londonien a exercé une influence
sur son art à partir des années 1760.
Citons enfin d’autres contributions de Eva Reifert, Bodo Brinkmann,
Claudia Blank, Gabriel Dette, Thom Luz et Caroline Rae.
Catalogue qui n’existe hélas qu’en allemand ou en anglais.
Kunstmuseum Basel | Neubau,
St. Alban-Graben 16, 4052 Basel
du mardi au dimanche 10.00–18.00
Mercredi jusqu’à 20h

depuis la gare SBB tram n° 2 arrêt Kunstmuseum